On racontait aussi l'histoire d'une femme du Rouget, nommée Jeanne Chastan. Étant sur sa porte avec ses trois enfants, Jeanne avait eu à soutenir une lutte acharnée contre la Bête du Gévaudan, qui tentait d'emporter tour à tour chacun de ses pauvres petits. La mère furieuse, se jeta sur le loup, le pinça, lutta contre lui, et parvint, malgré les morsures qu'elle avait reçues elle-même, à le mettre en fuite. Mais cette victoire lui coûta cher : un de ses fils, le plus jeune et sans doute le plus aimé, était mort quand on vint au secours de la malheureuse famille.
Le père du baron actuel notamment n'avait jamais été renommé pour sa ferveur catholique, et le baron lui-même passait pour un de ces hommes sceptiques, railleurs, dénigrants, qu'on disait, au temps d'Agrippa d'Aubigné, mal sentir la foi. Il montrait beaucoup de goût pour les idées nouvelles, et faisait volontiers parade d'irréligion, selon la mode d'alors. D'ailleurs il menait une vie folle, dissipée, luxueuse au grand préjudice de son patrimoine, déjà fortement compromis, et il imitait en tout cette noblesse inconsidérée dont les fautes préparaient déjà la révolution.