Ils jouent un jeu. Ils jouent à ne pas jouer un jeu. Si je leur montre que je le vois, je briserais les règles et ils me puniront.
Je dois jouer leur jeu, qui consiste à ne pas voir que je vois le jeu.
si je ne sais pas que je ne sais pas
je crois que je sais
si je ne sais pas que je sais
je crois que je ne sais pas
Ce sont les autres qui vous disent qui vous êtes. Plus tard on endosse leurs définitions ou l’on essaie de s’en débarrasser. Il est difficile de ne pas accepter leur version de l’histoire. Il arrive qu’on s’efforce de n’être pas ce qu’on « sait » qu’on est, tout au fond de soi-même. Il arrive qu’on s’efforce d’extirper cette identité « étrangère » dont on a été doté ou à laquelle on a été condamné, et de créer par ses propres actes une identité pour soi-même qu’on s’acharne à faire confirmer par les autres. Toutefois, qu’elles qu’en soient, par la suite, les vicissitudes, notre première identité sociale nous est conférée. Nous apprenons à être ce qu’on nous dit que nous sommes.
La vie d’une personne se déroule en spirales. Elle passe sans cesse par les mêmes points, mais à des niveaux différents d’intégration et de complexité.
Le lecteur lutte pour s’identifier à cette pensée, comme condition préalable pour atteindre un recul critique. Mais cette pensée modifie constamment sa perspective : pendant un temps, elle étudie son objet, le moment d’après elle se pense réflexivement, s’inventant au fur et à mesure où elle s’examine. S’il ne commence lui-même à vivre cette aventure totalisante, le lecteur risque de désespérer. De toute façon, il y a de fortes chances pour qu’il fasse l’expérience d’une sorte de vertige.
Nous ne sommes pas convaincus que toutes les personnes dont la conduite est psychotique sont de « vrais » schizophrènes, ou de « vrais » maniaques, ou de « vrais » mélancoliques, bien qu’il ne soit pas toujours facile de distinguer le « vrai » schizophrène de la personne que nous sentons capable de se mettre en scène dans le rôle de fou, parce que nous avons tendance à attribuer la psychose à l’homme qui fait semblant d’être psychotique. L’acte même de simulation, s’il est poussé à l’extrême dans cette direction, tend à être considéré comme une folie en soi. Nous pouvons penser non seulement qu’il est fou de faire semblant d’être fou vis-à-vis de soi-même et vis-à-vis ders autres, mais que toute raison d’avoir envie de le faire est folie. Il faut savoir ce qu’on risque sur le plan social si l’on rompt avec la réalité sociale : si l’on essaie délibérément et systématiquement de n’être pas celui pour qui tout le monde vous prend d’échapper à cette identité en jouant à n’être pas là, en restant anonyme, ou incognito, en prenant des pseudonymes, en disant qu’on est mort, en disant qu’on n’est personne parce que votre corps ne vous appartient pas. Cela ne sert à rien de faire semblant de n’être pas rien qu’un vieux bonhomme si l’on est devenu, en fantasme, rien qu’un vieux bonhomme.
[A propos de Flaubert]
Son projet, c’est la signification singulière qu’il a donnée à la littérature comme négation de sa condition originelle et comme solution objective de ses contradictions.
Un sentiment solide de sa propre identité autonome est indispensable pour avoir une relation normale avec autrui. Autrement, toute relation menace l'individu de la perte de son identité.
… La frustration se mue en désespoir quand la personne commence à douter de sa capacité de « signifier » quoi que ce soit pour qui que ce soit.
En préambule de l'ouvrage, une citation de Confucius : " La sortie passe par la porte. Pourquoi n'y a-t-il personne qui emprunte ce moyen ? "