De là sont nées les choses, en ce lieu elles devront aussi se perdre à nouveau selon le destin ; car elles doivent être châtiées et expier la faute de leur existence selon l’ordre du temps.
Les choses se transforment l'une dans l'autre
selon la nécessité et se rendent justice
selon l'ordre du temps.
"Trois évènements sans lesquels aucun être n’existe – venir au jour, séjourner, périr – trois évènements qui n’en font qu’un, puisqu’il s’agit des trois moments de cet évènement qu’est l’être lui-même (le fait même d’être) pour ce qui est. [...] Genesis, ousia et phtora désignent un seul évènement qui se continue – se continue jusqu’à son terme. Si donc, la genesis, l’ousia et la phtora sont temporellement déterminées, elles ne le sont pas à part l’une de l’autre : il s’agit de trois déterminations qui n’en font qu’une. Genesis, ousia, phtora, sont l’évènement génération-existence-destruction, ou des feuilles, ou des hommes, ou des cités, ou des nuages, ou des vagues de la mer." (p. 186)
Anaximandre de Milet, fils de Praxiadès, concitoyen et associé de Thales disait que la cause matérielle et l'élément premier des choses était l'infini, et il fut le premier à appeler de ce nom la cause matérielle. Il déclare que ce n'est ni l'eau ni aucun autre des prétendus éléments, mais une substance différente de ceux-ci, qui est infinie, et de laquelle procèdent tous les cieux et les mondes qu'ils renferment. Et les choses retournent à ce dont elles sont sorties «comme il est prescrit ; car elles se donnent réparation et satisfaction les unes aux autres de leur injustice, suivant le temps marqué », comme il le dit en ces termes quelque peu poétiques.
"Puisque, dans l’infini, le « sans bornes » ["l'apeiron"] [...] tous les rapports entre les extrêmes – l’un positif l’autre négatif – sont essayés, dans une sorte de brassage éternel, il est inévitable que se réalise parfois, et d’innombrables fois, le juste rapport productif : tel est le gonimon. Et, grâce au gonimon, au juste rapport fécond, les extrêmes, jusque là irreprésentables, prennent la forme cosmique [...] (p.154)
"Chez Anaximandre, la nature se trouve dissociée du monde. Elle est, certes, le principe de la vitalité du monde, mais elle n’est plus la vitalité même du monde, immanente à celui-ci. Elle est au principe d’un monde viable, car d’elle se détache le gonimon, le germe cosmique. Et ce germe implique la juste définition du rapport des contraires qui rend ce rapport fécond. Mais si la nature y est parvenue, ce n’est pas comme à un effet de sa sagesse. Car elle est en elle-même non sage, non réglée. Simplement, le juste rapport fécond entre les extrêmes est un rapport parmi d’autres, et, comme aucune Providence négative ne s’y oppose, il n’y a pas de raison pour qu’il ne soit pas un jour réalisé, et même d’innombrables fois. Mais le monde issu de cette sorte de chance n’est qu’une production incertaine et contingente de la nature, qui, abandonné à lui-même, voit bientôt s’épuiser sa vitalité."(p. 169-173)
"L’apeiron [...] n’est nullement donné. Il est ce qui est posé par la pensée pour rendre compte de ce qui s’offre au regard [...]. Il est posé seulement parce qu’il est ce qu’il faut nécessairement admettre si le Monde doit être compris [...].
Si l’on veut expliquer la particularité de ce Monde, il faut un principe qui ne soit pas lui-même particulier (ce qui serait expliquer une particularité à partir d’une autre restant, elle, inexpliquée). Mais alors, n’étant pas particulier mais universel, il ne sera pas le principe d’une certaine particularité seulement, mais aussi bien d’une autre. Ce Monde-ci, qui est né, périra. Mais il n’est pas le seul : il y en a, il y en a eu, il y en aura d’autres – une infinité. Au lieu d’expliquer le caractère particulier de ce Monde, sa structure, son ordre, en les présupposant (comme le fera encore Platon, expliquant le monde sensible par son modèle intelligible), on en fait des particularités parmi beaucoup d’autres, et l’on rend compte alors du particulier par le fait même d’en faire un cas particulier." (p. 235)
Et les choses retournent à ce dont elles sont sorties «comme il est prescrit ; car elles se donnent réparation et satisfaction les unes aux autres de leur injustice, suivant le temps marqué
Anaximandre disait que les étoiles sont des condensations d'air pareilles à des cerceaux, pleines de feu, soufflant des flammes à un certain point par des orifices. Le soleil est le plus haut de toutes ; après lui vient la lune, et au-dessous de celle-ci les étoiles fixes et les planètes.
— Aétius, II, 13, 7; 15, 6 (R. P. 19 a ; DV 2, 18).