Olivier Berruyer interroge Bernard Friot sur la notion de "Salaire à vie" .
La pension relève du droit du travail : elle n'est ni un patrimoine relevant du droit de propriété, ni une allocation relevant du droit de l'aide sociale.
Tous titulaires de notre salaire et de notre outil de travail : chaque personne, à sa majorité, doit être dotée de la capacité de maîtriser son travail et de contribuer effectivement à la souveraineté populaire sur la valeur économique.
Aucune puissance économique ou politique ne peut réduire ou supprimer la pension, ni imposer aux retraites des tâches qu'ils ou elles ne veulent pas faire. C'est une expérience formidable d'autonomie populaire par rapport au patronat et à l'État capitalistes.
Gagne-pain et gagne-temps libre, le travail est pour celui qui l’exerce un moyen pour autre chose que son objet.
Ce n'est pas parce que j'aurai et que tu n'auras pas que je serai solidaire avec toi. Cette forme extrêmement violente de la solidarité accepte que l'autre n'ait pas et le définit par son manque. Tout autre est la solidarité salariale : je serai solidaire avec toi parce que nous serons coresponsables de la production de valeur, coresponsables du niveau de salaire moyen, coresponsables des choix dans ce qui va être produit et dans l'exercice du travail concret, coresponsables dans la définition des limites de la monnaie, coresponsables de l'effectivité de la carrière salariale de chacun.
La médiation de la valeur, du travail abstrait, de la monnaie permet d'objectiver le pouvoir, de le tenir à distance, de le sortir de la gangue d'un rapport social de parenté, de voisinage, de statut de naissance, naturalisé. Penser qu'en renonçant à reconnaître quelqu'un comme producteur (et donc par de la monnaie) on le reconnaîtra comme personne, c'est oublier que les personnes ne se baladent pas dans la nature, elles non plus.
L’épargne n’est pas une opération interpériodique de soi à soi par laquelle de la monnaie ou de la valeur sont transférées d’une période à l’autre sous forme de ”revenu différé”, chacun récupérant demain sa mise d’aujourd’hui. L’épargne est un rapport social intrapériodique dans lequel la propriété de titres est une propriété lucrative qui donne à son détenteur le droit de recevoir une partie de la monnaie mise en circulation à l’occasion de l’attribution de valeur à la richesse produite. Qu’on soit en répartition ou en capitalisation, c’est toujours le travail de l’année qui produit la richesse correspondant à la monnaie qui finance les pensions de l’année.
Nous devons pouvoir déployer nos vies dans un large espace public libéré du capital.
Sortir de la soumission libérera l'énergie nécessaire pour faire de la politique.
Faire société, ça n'est pas seulement organiser la production des biens et des services nécessaires à la vie commune, ce qu'en langage technique on désignera par l'expression "production de valeurs d'usage". C'est aussi affronter la violence dans laquelle cette production s'opère, une violence qui s'exprime dans la valeur économique : la valeur d'échange dans le capitalisme, dont il s'agit de se débarrasser pour une pratique de la valeur libérée de la violence spécifique au capital.