Rétrospective de luvre de Rohmer
Dans Meurtre, le pédéraste tue lorsqu'il est démasqué : il se considère comme anormal et n'ignore pas que son vice est une faute. Mais il est aussi bien incapable d'aimer et ne cherche qu'à échapper ensuite aux conséquences de son crime. Lorsqu'Hitchcock approfondira le problème homosexuel dans les films pré-cités [NDL : La Corde et L'Inconnu du Nord-Express], nous nous apercevrons que sa condamnation du pédéraste est justement fondée sur l'impossibilité du véritable amour homosexuel, car cet amour n'est qu'une imitation, il est par conséquent condamné à la non-réciprocité. Diane aime le pédéraste puisqu'elle se laisse condamner à sa place, mais le pédéraste ne l'aime pas, puisqu'il la laisse faire.
En 1957, quand Eric Rohmer et Claude Chabrol, qui ne sont encore que critiques de cinéma, [...] publient ce petit livre [...] , Alfred Hitchcock est un cinéaste célèbre mais pas encore le monument indiscutable qu'il est devenu aujourd'hui.
Je ne sais pas si tu penses comme moi, mais j’ai constaté que l’attirance qu’on éprouve pour la musique, pour une certaine musique plutôt qu’une autre, se situe au cœur de nous-mêmes comme celle qu’on éprouve pour une femme plutôt qu’une autre.
Dans le train, je préfère de beaucoup le livre au journal, et pas seulement à cause de la commodité du format. Le journal ne mobilise pas assez mon attention, et surtout ne me fait suffisamment pas sortir de la vie présente. Le livre que j’ai avec moi est Le voyage autour du monde de Bougainville. Mon trajet, matin et soir, correspond à peu près à la dose de lecture que j’ai absorbé sans interruption. (L'Amour, l'après-midi)
Il se retourna brusquement comme un enfant pris en faute. Élisabeth sourit :
– Je vous ai fait peur ? Vous étiez tellement absorbé que vous ne m'entendiez pas venir.
Il posa à terre le bidon d'huile et se releva ; il avait ôté sa veste et mis une blouse blanche tachée de cambouis et de peinture.
Hitchcock ne cherche nullement à cacher ses intentions puisqu'il nous montre chez le personnage de nombreux tics féminins (il se passe la main dans les cheveux, se regarde dans la glace, pirouette, s'énerve) et qu'il nous le montre même habillé en femme !
[à propos de "Meurtre"]
Dès ici, les deux pôles de son œuvre future - car c'est bien d'une œuvre qu'on peut parler dès maintenant - apparaissent clairement. L'un est fascination, captation morale, c'est-à-dire dépersonnalisation, schisme ; en termes psychanalytiques : schizophrénie ; en termes philosophiques : amoralisme ; en termes baudelairiens : postulation vers le bas, damnation. L'autre pôle est son contraire : connaissance, ou plus exactement re-connaissance de soi, unité de l'être, acceptation, aveu, communion absolue.
La conclusion éclaire le film de façon différente : le fermier épouse sa servante, amoureuse de lui en secret depuis longtemps, et qui est l'épouse idéale, car la femme est, avant tout, ménagère. C'est là l'optique d'un gourmand, mais c'est aussi celle d'un homme amoureux de la féminité.
ADELE. J’aimerais que tout soit réuni. Mais, pour l’instant, tendresse et amour sont séparés. Et la passion, ça viendra peut-être un jour, avec amour et tendresse en même temps, j’espère…
« J’ai un besoin absolu de passer une nuit blanche de temps en temps. »
(Alice à Rémi) Les nuits de la pleine lune, 4ème volet de Comédies et Proverbes, 1984