Dada est oiseux, vide,creux,verbeux, ce n'est que du vent.
Les Nouveaux Réalistes considèrent le monde comme un tableau, la grande oeuvre fondamentale dont ils s'approprient des fragments dotés d'universelle signifiance. Ils nous donnent à voir le réel dans les aspects divers de sa totalité expressive. Et par le truchement de ces images spécifiques, c'est la réalité sociologique toute entière, le bien commun de l'activité des hommes, la grande république de nos échanges sociaux, de notre commerce en société qui est assignée à comparaître.
.....La photo de Picasso est la photo-fétiche. Quel contraste avec celle de Duchamp, prise le 3 octobre 1964 dans son appartement de New York. La lumière est sourde, tirant vers les rouges, l'ombre au pourtour de la face est très accusée. La peau est diaphane. Les yeux marron un peu délavés semblent accommoder sur un horizon infini.
C'est le "regard du dedans" dont Navarro nous restitue le reflet, l'exact opposé de la fulgurance vitale de l'œil du Maître de Mougins.
Il n'y a pas de révolution du regard sans une profonde motivation logique correspondante. Au coeur de l'illusion non-figurative végétait le tourment, pressentiment inquiet, d'un stade plus profond de la matière, d'une autre dimension de la nature. Le microscope électronique nous a montré des neurones qui étaient Mathieu, des éléments du cortex-cérébral qui étaient des Pollock, des fibres utérines qui étaient des Nus de Fautrier. L'art abstrait, en tant que refus de représentation du réel, a épuisé ainsi sa motivation. Les nouveaux Réalistes on fait redescendre l'art sur terre, en plein phénomène sociologique, industriel, urbain. Le sens d'une nature moderne est la directe émanation de la coscience planétaire. Pour l'artiste d'aujourd'hui le Monde est un Tableau, dont il nous donne à voir l'un des fragments, dotés d'universelle signifiance : la partie prise pour le tout.
Le monde d'Ezio Gribaudo est le monde de la typographie, de l'impression, de l'édition. Les matrices, les plombs, les clichés de la photo-gravure se sont imposés à lui dans leur pleine virtualité expressive, comme une source intarissable d'images poétiques et neuves. Les empreintes qu'il en tire, par estampage direct, évoquent tantôt la géographie lointaine d'une Inde mystérieuse, tantôt le contour sacré des héros d'une mythologie à redécouvrir. Nos ancêtres n'en voyaient pas plus dans les étoiles.
La réalité technologique offre à qui sait voir les perspectives infinies du cosmos. A travers les configurations du métal, ses stratifications, ses creux, ses courbes de niveaux, Ezio Gribaudo a su retrouver l'essence de tous les mythes. Ses gravures marquent les pages d'une légende des siècles née dans la nuit des temps et qui s'en va chevaucher, les années-lumière.
Un collant vert à la jambe gauche, un collant jaune à la jambe droite. L'uniformité de l'anonymat du vêtement chez l'homme traduit chez l'homme le renoncement à l'individualisme.
Sous des dehors sentimentaux et emphatiques, quel être imprévisible et secret qu'Eddy Novarro ! Le Photographe du Soleil comme l'appelait Magritte, est le fils du mystère...