Albrecht Dürer est l'un des plus grands artistes du 15e siècle. Immense graveur, il maîtrise toutes les techniques de son époque. Parmi ses chefs-d'oeuvre, la série de l'Apocalypse, gravée sur bois et considérée comme le premier livre d'artiste.
Une oeuvre présentée par
Caroline Vrand, chargée des estampes des 15e et 16e siècles au département des Estampes et de la photographie. Retrouvez les gravures et dessins d'
Albrecht Dürer conservés à la BnF, dans Gallica : https://c.bnf.fr/P4a
Découvrez le dossier "L'invention de l'imprimerie au 15e siècle" sur les Essentiels de la BnF : https://imprimer.essentiels.bnf.fr
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En 1504, ce défaut a disparu. L’artiste, maître de sa main comme de sa pensée, a secoué le joug oppressif du détail. S’il l’emploie, c’est pour le subordonner au tout. Murs d’appui, tentures, paysages et costumes, tout s’efface et se fond dans l’admirable et simple unité de l’expression. L’âme du personnage vit seule dans ses yeux.
Animés par la fureur divine, les mélancoliques devenaient des êtres hors du commun dans les domaines de la philosophie et de l'art. Ayant aspiré à créer selon les règles de la perfection, Dürer a ressenti les limites de l'art et de la science, et c'est pourquoi Melencolia I est son autoportrait spirituel.
Melencolia I, 1514
burin ; 241x190 (cuvette) ; 270x216 (feuille)
O vous chrétiens, priez Dieu et demandez-lui grâce, car son jugement approche et sa justice va se manifester! C'est alors que le pape, les prêtres, les moines, et tous ceux qui ont versé le sang innocent, seront jugés et condamnés. Apocalypse : voici les victimes abattues sur l'autel de Dieu, elles crient vengeance. A quoi répond la voix céleste : "Attendez jusqu'à ce que le nombre des martyrs soit complet : alors je jugerai ! "
Je change à nouveau un florin pour mes dépenses et donne encore huit stüvers au docteur.
Rentré dans sa patrie, Dürer, suivant l’exemple des peintres italiens, résolut de concentrer en quelques tableaux d’importance ses qualités de dessinateur et de coloriste. Mais auparavant il s’attaqua aux difficultés qui l’avaient toujours intrigué si fortement dans l’art de Jacopo dei Barbari : l’exécution du nu. Il voulut dessiner « homme et femme d’après la règle » et composa toute une série d’ébauches dont la gravure d’Adam et d’Eve marque le point culminant. Ces feuilles, conservées à Madrid, et dont les copies qui sont à Florence passèrent longtemps pour les originaux, montrent les grands progrès qu’il sut accomplir dans cet ordre d’idées. Les proportions des corps sont devenues beaucoup plus exactes, le modelé en est excellent, dégagé décidément de toute gêne et de toute froideur; ces figures, profondément vivantes, surtout celle d’Eve, qui est dessinée avec une suprême perfection, nous révèlent que Dürer ne cherchait plus exclusivement à rendre le caractère extérieur des formes du corps humain , mais encore à faire vibrer l’âme dans l’enveloppe qui la contient.
En vérité l'art est enfermé dans la nature; celui qui peut l'en extraire, celui-là est un maître.
Il a fallu trois siècles pour que Durer, dépassant enfin l'estime des connaisseurs, fût placé par l’opinion publique au rang des hommes qui sont l’honneur de leur patrie et de l’art même. Son oeuvre touffue échappe aux classifications ; il fut peut-être trop grand pour être immédiatement compris. La bizarrerie de maints sujets, le symbolisme de ses conceptions, son génie âpre et ultra-romantique lui ont longtemps valu plus d’hostilité que ne lui ont attiré d’admiration sa fécondité d’invention, les ressources de sa composition, la vérité de son exécution.
Un dessin au crayon, conservé à l’Albertine de Vienne, porte en effet cette inscription : « J’ai fait ceci en regardant ma propre image dans un miroir, pendant l’année 1484; j’étais encore enfant.» C’est un visage d’adolescent qui regarde, comme étonné, le spectateur; la position des yeux, gauchement rendue, marque la gène que lui imposait le miroir; le nez caractéristique et la bouche nettement découpée laissent facilement prévoir et déjà reconnaître les traits de l’homme fait. L’exécution de la chevelure est extraordinairement habile, tandis que les plis tout conventionnels du costume et le dessin maladroit des mains décèlent évidemment l’inexpérience de l’artiste.
Le profit que Dürer tira de son voyage de 1494, ce n’est pas l’inspiration italienne, c’est le sens du paysage, qu’il peindra désormais en le renouvelant sans cesse d’une oeuvre à l’autre, soit qu’il nous représente les environs de Nuremberg, soit qu’il rende l’aspect des villes et des contrées étrangères. Il y apporte souvent un soin méticuleux et une fidélité de miniaturiste, comme le montrent certains paysages de Nuremberg, par exemple la Tréfilerie et le Moulin du pâturage.
Désirant que le présent volume puisse être la meilleure représentation possible de l'œuvre de l'artiste , les éditeurs ont consulté à ce sujet le Dr Henri Wölfflin dont l'autorité est bien connue. Il leur a aimablement dressé une liste de toutes les peintures importantes de Dürer et les éditeurs ont réussi à obtenir les reproductions de toutes celles qu'il a choisies.
En vérité, l'art est enfermé dans la nature ; celui qui peut l'en extraire, celui-là est un maître.