Emmanuelle Riva in Hiroshima mon amour
Jardins publics
Extrait 2
leur âme est doublée
de fleurs
ils marchent dans les houblons
ils boivent du goudron
et ne parlent jamais
je les connais je les connais
ils ont des sourires
qui font mourir
leur haleine est charmeuse
c'est celle des martyrs
redevenue musique
leurs mariages secrets
sont peints au blanc d'Espagne
le soleil de leurs fêtes
s'est roulé dans la neige
et glisse contre un ciel gris
pendant que d'autres noces
dansent sur le fraîche neige
d'un lac clôturé
de barbelés d'or
ils ne savent plus rien
de ce baiser donné au mystère
le jour
de leur premier amour
« Hiroshima mon amour » est une histoire d’amour, une fiction écrite comme telle. Mais c’est aussi un document précis sur le moment où, après les ravages de la guerre, alors que la reconstruction est en voie d’achèvement, une ville se transforme à travers un nouveau plan de développement urbain en accord avec la forte croissance économique que connait le pays.
Très petite, j’aimais dire des poèmes. J’aimais les dire devant les autres. Je ne pouvais pas les garder pour moi seule. Il me fallait donner à entendre la parole de l’auteur, comme une jouissance à ce partage.
Emmanuelle Riva : […] Pour écrire le scénario, Resnais avait pensé à Françoise Sagan, qui n’a pas accepté, puis il a pensé à Marguerite Duras et il ne s’est pas trompé. Il a mis dans le mille, je trouve.
Emmanuelle Riva : Je prenais ces photos aspirée par la nécessité d’avoir des images de tout ce que je vivais, voyais là-bas… J’étais prise entièrement par la vie de là-bas. Jamais je n’ai pensé que ça pourrait intéresser d’autres personnes, plus tard. Aujourd’hui, je suis très surprise, grâce à vous. Jamais je n’aurai pensé qu’il y aurait ce désir aujourd’hui de voir les photos de cette vie d’après la bombe, à Hiroshima.
Hiroshima mon amour c’est notre jeunesse. La mienne, la vôtre. C’est ma jeunesse. La jeunesse dans la vie et la jeunesse du cinéma.
Le ramasseur de rêves
Les matins au bord de tes yeux
mon amour
dans la moire de tes différents sourires
bien avant que la brume se lève
tu puises la masse de mon sommeil
qui est juste d’une taille
au dessus de ton corps
tu me balances entière
dans tes filets
jusqu’à ce que je chante
sans le savoir encore.
Jardins publics
Extrait 1
ils sont les frères jumeaux
de la musique
ils sont la trace des pas
le vent sur le visage
du ressuscité
le plus récent souvenir
des vols d'oiseaux
dans les arbres d'hiver
ils sont nés
de l'ombre blanche des colombes
ils sont là
juste derrière le sifflet
des trains
…
Mais si la française du film mérite de s'appeler à jamais Riva, c'est aussi l'infléchissement discret que la personnalité de cette actrice d’exception a imposé au personnage initialement conçu par Duras.
Je suis très admirative de ceux qui, comme sœur Emmanuelle, décédée en 2008 à la veille de son centième anniversaire, consacrent leur existence aux autres.