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3.91/5 (sur 70 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Apremont (Haute-Saône) , le 10/03/1823
Mort(e) à : Paris , le 30/04/1902
Biographie :

Xavier Henri Aymon Perrin, comte de Montépin, né à Apremont (Haute-Saône) le 10 mars 1823 et mort à Paris le 30 avril 1902, est un romancier populaire français. Il repose au cimetière ancien (cimetière communal de l'Ouest) 6eme division, de Boulogne-Billancourt dans les Hauts-de-Seine à coté de la tombe de sa femme Louise Lesueur et de celle de Caroline Lesueur.

Auteur de romans-feuilletons et de drames populaires, il s'illustra dans le feuilleton. Il est notamment l'auteur de l'un des best-sellers du XIXe siècle, La Porteuse de pain, paru de 1884 à 1889, qui a été adaptée successivement au théâtre, au cinéma et à la télévision.

Le Médecin des pauvres, paru en feuilleton de janvier à mai 1861 dans le journal illustré Les Veillées parisiennes, fut un plagiat d'un roman historique de Louis Jousserandot, un avocat républicain. Jousserandot et Montépin s'assignèrent mutuellement en justice. Le procès eut lieu en janvier 1863. Les deux plaignants furent renvoyés dos à dos et condamnés tous deux aux dépens. Mais la défaite fut bien du côté de Jousserandot, l'ancien proscrit républicain qui avait bien peu de chances de gagner face au riche et célèbre Xavier de Montépin, adulé des lecteurs et politiquement proche du pouvoir impérial en place.

Les Filles de plâtre, paru en 1855, fit également scandale et valut à Montépin une condamnation à trois mois d'emprisonnement et 500 francs d'amende en 1856.

Xavier de Montépin utilisait un ou des nègres, comme beaucoup des auteurs à succès de son époque qui produisaient du roman-feuilleton « au kilomètre ». Le nom de l'un d'eux—Maurice Jogand—est connu.

Le nom des Aymon de Montépin s'est éteint avec lui.
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Source : Wikipedia
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Bibliographie de Xavier de Montépin   (16)Voir plus

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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Au moment où commence notre récit, c'est à dire le 3 septembre de l'année 1861, à trois heures du soir, une femme de vingt-six ans à peu près suivait la route conduisant de Maisons-Alfort à Alfortville.
Cette femme, simplement vêtue de deuil, était de taille moyenne, bien faite, d'une beauté attrayante. Des cheveux d'un blond fauve s'enroulaient en grosses torsades sur sa tête nue. Dans son visage d'une pâleur mate, brillaient de grands yeux aux prunelles d'un bleu sombre. La bouche était petite ; les lèvres bien dessinées, d'un rouge cerise mûre, s'entrouvraient sur des dents éblouissantes.
De sa main droite, elle tenait un bidon de fer-blanc à anse mobile ; de la main gauche, elle serrait la menotte rose d'un bébé de trois ans environ qui marchait à pas lents en tirant derrière lui, par une ficelle, un petit cheval de bois et de carton...
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Jacques Garaud jouissait à New York de toutes les joies du succès, entouré de la considération générale, ayant un intérieur délicieux, une femme adorable, et augmentant chaque jour la prospérité et la fortune de la maison « James Mortimer and Paul Harmant ». Un an s’était écoulé depuis son mariage avec la fille de l’ingénieur américain, et Noémi s’attachait à lui chaque jour davantage. Le misérable s’était pris peu à peu d’un ardent amour pour sa femme.

Un jour, le père de Noémi, atteint de violentes douleurs rhumatismales et appelé dans une ville assez éloignée de New York, fut obligé de prier son gendre de le suppléer. Paul Harmant partit en se faisant accompagner par Ovide Soliveau.

Ovide, lui aussi, grâce à la protection de son prétendu cousin, avait fait un chemin rapide : contremaître d’abord, puis inspecteur, puis bras droit de Paul Harmant. L’amitié, la confiance que lui témoignait ce dernier, ne diminuaient point son ardent désir de savoir ce qu’avait été le passé de son cousin. Bref, il mourait d’envie d’expérimenter sur l’associé de Mortimer la liqueur du Chuchillino.

« On va voyager, se dit-il, quand Jacques Garaud lui annonça le départ ; l’occasion que j’attends depuis près d’une année se présentera forcément en route. J’en profiterai… »

Et il glissa dans un sac de voyage la fiole du précieux liquide acheté à New York, moyennant quinze dollars, au Canadien dont il avait appris l’adresse à bord du Lord-Maire.

Cinq minutes après le départ, Jacques Garaud entama la conversation du ton le plus familier.

« Eh bien, cousin, dit-il, ne te paraît-il pas bon de nous trouver maîtres, comme en ce moment, de causer à cœur ouvert, en bons parents ?

– Franchement, cousin Paul, répliqua le Dijonnais, voilà, depuis une année, mon premier moment de joie.

– Ne te plais-tu donc point à New York ?

– Comment ne m’y plairais-je pas ? Je m’y plais beaucoup, au contraire, et si je viens parler d’une joie incomplète, c’est au point de vue de mes affections de famille. Aujourd’hui que la fortune de Mortimer ne peut t’échapper, il me semble que tu devrais bien trouver un joint pour me présenter comme ton parent, et me mettre avec toi sur un pied d’égalité relative.

– À quoi cela servirait-il ?

– À me rapprocher de toi, donc !

– Tu n’as pas à te plaindre. Si je ne te reconnais point publiquement pour mon cousin, j’agis en bon parent.
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La porteuse de pain

Au moment où commence notre récit, c’est-à-dire le 3 septembre de l’année 1861, à trois heures du soir, une femme de vingt-six ans à peu près suivait la route conduisant de Maisons-Alfort à Alfortville. Cette femme, simplement vêtue de deuil, était de taille moyenne, bien faite, d’une beauté attrayante.
Des cheveux d’un blond fauve s’enroulaient en grosses torsades sur sa tête nue. Dans son visage d’une pâleur mate, brillaient de grands yeux aux prunelles d’un bleu sombre. La bouche était petite ; les lèvres bien dessinées, d’un rouge cerise mûre, s’entrouveraient sur des dents éblouissantes.
De la main droite, elle tenait un bidon de fer-blanc à anse mobile ; de la main gauche, elle serrait la menotte rose d’un bébé de trois ans environ qui marchait à pas lents en tirant derrière lui, par une ficelle, un petit cheval de bois et de carton.
Une saccade détruisit l’équilibre du jouet qui tomba sur le côté. La jeune femme fit halte aussitôt.
« Voyons, Georges, dit-elle lentement à l’enfant d’une voix douce et caressante, prends ton joujou, mon chéri, et porte-le.
– Oui, petite maman. »
Le bébé obéissant saisit son dada par la tête, le mit sous son bras, et tous deux continuèrent leur chemin. Ils atteignirent bientôt les premières maisons d’Alfortville. La jeune femme entra dans une petite boutique d’épicerie. Une forte commère sortit aussitôt d’une pièce voisine.
« Tiens, c’est vous, m’ame Fortier ! dit-elle, bonjour, m’ame Fortier… Qu’est-ce qu’il faut vous servir ?…
– Du pétrole, s’il vous plaît…
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La Franche-Comté, bien qu'elle relevât de la couronne d'Espagne, jouissait d'une liberté très grande. Elle votait elle-même ses impôts, qui étaient intégralement dépensés dans le pays. Le roi d'Espagne se contentait du produit des salines et d'un don gratuit qui ne s'élevait pas annuellement à plus de deux cent mille livres.
La province devait aussi fournir à son suzerain un contingent de quatre régiments bien armés et bien équipés.
En échange de ces redevances, les Comtois pouvaient être admis aux dignités les plus hautes. Leur attachement pour l'Espagne était sans borne, de même que la bienveillance de celle-ci pour eux.
D'un autre côté, ils exécraient la France et le nom français et, de 1635 à 1668, ils prouvèrent glorieusement cette haine par trente-trois années de luttes héroïques contre les projets d'envahissement de leurs formidables voisins.
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- Vous avez découvert une mine d'or. L'américain n'a d'yeux que pour vous. Cet homme-là vous idolâtre. Ne vous l'as-t-il pas dit ?
- Oh ! Madame… je suis ouvrière, je suis pauvre, je n'ai d'autre avenir que le travail, et je n'ignore pas que les gens riches sont prodigues de belles paroles avec les jeunes filles de ma condition ; ils veulent bien partager avec elles leur bourse, mais par leur nom. Or, moi, je n'accepterai jamais la fortune sans le mari. (p65)
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.... Jeanne attendit. les réflexions les plus douloureuses, les plus effrayantes l'obsédaient. Son désespoir fit explosion tout à coup. --- Et cependant je ne suis pas coupable! dit-elle presque à haute voix sans en avoir conscience. Cet homme, ce misérable, a commis tous ces crimes, et c'est moi qui me cache.... c'est moi qui suit accusée ! Moi l'innocente!...

Page 43 de la premiere édition canadienne mai 1968 Les éditions soleil Inc.1968 .
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- Quel est donc votre avis ?
- Oh ! J'en ai plusieurs, mais je les résume en un seul ou je me tais.
- Ah ! Farceur de Dumontet, vous en savez plus long que vous ne voulez en dire.
- Peut-être, messires, mais j'ai toujours entendu soutenir que trop parler nuit. Un grand savant, qui avait le malheur d'être bossu, et qui n'en riait pas moins pour autant, un nommé Esopus, si je ne me trompe, servit un jour à Charlemagne un plat de langues en lui disant : "Votre Altesse voit devant elle ce qu'il y a de meilleur et de plus mauvais au monde".
L'érudition fantaisiste de maître Dumontet lui valut une triple salve d'applaudissements.
Encouragé par cette approbation, il continua, avec une augmentation et un redoublement de solennité :
- Voilà pourquoi, messires, toutes et quantes fois, ou toutes fois et quantes que l'on me demande mon opinion, je me retranche derrière le bastion de la prudence.
- Mais, - interrompit le teinturier, - pour qui nous prenez-vous, messire Dumontet ? S'il y a de l'indiscrétion, nous n'irons pas l'exprimer sur la tête des gens, comme un haut-de-chausses que l'on tord en le tirant de la chaudière. Ce qui entre par l'oreille droite sort par l'oreille gauche. Nous sommes des amis, morbleu !...
- Je le sais; j'ai, du reste, la réputation de n'avoir pas d'ennemis. Les haines, voyez-vous, un grand homme l'a dit dans les temps anciens, les haines vous attirent toujours des désagréments.
Pendant cette période de Maître Dumontet, un nouvel interlocuteur s'était glissé au milieu du groupe, où son costume excita une vive hilarité.
Ce personnage n'était autre que Maître Jehan Loyson.
- Or ça, - dit-il au cabaretier, - je crois que vous seriez fort embarrassé de nommer le grand homme qui a prononcé la phrase dont vous venez de vous rendre coupable, à moins, toutefois, que ce grand homme ne soit vous-même ?
Dumontet rougit jusqu'au blanc des yeux.
- Ce grand homme, messire, s'appelle Epaminondas, - dit-il.
- Mille sornettes !... Si sa valeur était en raison directe de la longueur de son nom, il devait, en effet, être un grand homme.
- Un poète très distingué, - ajouta Dumontet.
Le bouffon, qui avait une légère connaissance d'Histoire, laissa glisser un sourire moqueur sur ses lèvres de parchemin.
- Tout ceci, maître Dumontet, vous éloigne fort de votre sujet. Je parierais ma folie contre votre raison que toutes vos réticences n'ont d'autre but que de dissimuler votre ignorance profonde...
- Comment l'entendez-vous, messire Loyson ?
- Je dis que vous ne savez absolument rien de la disparition du savant Fovetius.
- Qui peut vous faire croire cela ?
- Vous me permettrez de garder mon secret à mon tour, mais moi, je sais parfaitement où il est.
- Vous !... - s'écrièrent tous les assistants.
Et la galerie s'empressa d'abandonner Dumontet pour se ranger autour du bouffon, qui prenait dès lors les proprtions d'un haut personnage.
- Oui, moi, messires, continua Loyson; mais comme je n'ai pas les mêmes motifs de dissimulation que maître Dumontet, je vais vous dire ce que je sais. D'abord, permettez-moi de résumer toutes les versions.
Un mouvement de curiosité se manifesta dans l'auditoire.
Le bouffon reprit :
- Hier, j'étais au couvent des Annonciades; chacun s'entretenait de l'évènement singulier qui vous préoccupe. Messire Philippe de Comines, lequel est, comme chacun sait, un très grand clerc, prétendait qu'une princesse de la Forêt-Noire, malade depuis fort longtemps, réclamait en vain les secours de maître Fovetius. Voyant l'opiniâtreté dudit Fovetius, elle le fit enlever par vingt soldats déguisés en charbonniers.
- Sacrebleu ! - s'écria le teinturier, - je suis de l'avis de messire de Comines.
- Vous jurez beaucoup trop en "bleu", messire, cela dénote votre profession. Mais j'ai le malheur de n'être ni de votre avis, ni de celui de mon ami Comines.
- Son ami, - murmura Dumontet en se tournant vers les bourgeois, qui devinrent tout à coup très respectueux envers le fou.
Celui-ci reprit :
- Messire de La Baume, le secrétaire de son Altesse, avança, de son côté, qu'il avait aperçu maître Fovetius à califourchon sur un manche à balai et courant au sabbat dans la direction des Etangs-Gris, près de la forêt de Breurey.
- Bon Dieu ! - fit le teinturier, en se signant, - lui qui a traité ma femme dans sa dernière maladie ! Si elle allait devenir possédée du diable !... J'ai déjà remarqué quelques symptômes.
- Toutes les femmes, - ajouta gravement le fou, - sont possédées du diable à un plus ou moins haut degré, c'est ce qui explique pourquoi leurs maris les envoient régulièrement au diable quatre ou cinq fois par jour.
Les célibataires du groupe battirent des mains.
- L'opinion émise par mon ami La Baume ne satisfaisait pas complètement ma raison; aussi j'allais aux informations auprès d'un homme en qui j'ai toute confiance et qui habite la maison de maître Fovetius. Cet homme est infiniment plus érudit encore que votre apothicaire. C'est pourquoi j'ai adopté sa version sans conteste.
Le groupe se resserra de plus en plus. (...)
- Il m'a dit que maître Fovetius s'occupant beaucoup d'alchimie, comme feu Nicolas Flamel, qui vivait au temps du duc Jean-Sans-Peur et du roi de France Charles VI, il avait bien pu être grillé comme un poisson dans son laboratoire. Il se rappelle même avoir entendu des bruits étranges dans la maison de l'apothicaire, et il ne serait pas étonnant que ces bruits eussent été produits par sa vilaine âme quand elle s'échappa de son corps. Il faut donc faire son deuil de maître Fovetius. C'était une vieille cornue; elle a éclaté et voilà tout.
Le silence de la stupeur accueillit cette révélation.
Messire Dumontet s'interposa.
- C'est précisément, messires, - dit-il, - la grave confidence que je n'osais vous faire; cet honorable gentilhomme m'a prévenu.
Un nouveau sourire, encore plus sardonique que le premier, erra sur les lèvres du fou.
- Vous aviez, - dit-il, - probablement lu cela dans les oeuvres du grand poète Epaminondas.
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un homme enfin un de mes ancêtres du côté de ma grand mère ;) un très beau livre mais suis je objective ?
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Pendant que l'Ecossais remplissait jusqu'aux bords son verre, qui donnait une idée du tonneau des Danaïdes, l'ex-capitaine se dressa, souleva le sien à la hauteur de ses lèvres et, étendant la main gauche avec solennité :
- Allons, Donald, - dit-il, - faites-moi raison, je vais boire à la vieille Ecosse !
Eben se leva machinalement à son tour, mais la réflexion lui vint; il se rassit :
- A quoi bon ? - grommela-t-il, - la vieille Ecosse n'existe plus !...
Le géant approcha son siège de celui du garde.
- Et pourquoi n'existe-t-elle plus, Donald ?
- Je ne sais !
- Eh bien ! Moi, je vais vous le dire... Vous avez un secret que je voudrais apprendre, fut-ce au prix d'un doigt de ma main. Je ne vous le demanderai cependant pas ! - Il va se dénouer bientôt, je le prévois, quelque intrigue infâme ! Mais je ne puis vous en vouloir de vous y être associé. Vous êtes un instrument que l'on achète aujourd'hui et que l'on peut briser demain. C'est le bras qui vous dirige qui commet le crime, et non pas vous...
Eben regardait le capitaine avec étonnement; son verre restait stationnaire dans sa main, entre ses lèvres et la table.
Le géant continua :
- Tels n'étaient pas vos pères, Eben, c'étaient d'honnêtes gentilhommes, libres comme l'air de leurs montagnes, ne s'inclinant que devant les vieillards et les héros, ne se vendant point, gardant leur sang pour la défense de leur famille et de leur patrie. Quand ils passaient, les jambes nues, dans ces hardis sentiers de rochers, où la chèvre ne se hasarde qu'en tremblant, et que la cornemuse des Highlands retentissait, on disait dans les plaines : Voilà les rois des montagnes ! Les blondes filles qui lavent leurs pieds dans le golfe de Solway, pansaient les blessures des guerriers, chantaient leurs victoires, tressaient des couronnes de bruyères : on élevait sur un bouclier de fer le triomphateur, et tout le peuple criait autour de lui : Voilà un demi-dieu !... C'était le beau temps, Eben; vous grandissiez aux bardits des épées; le bruit des armes couvrait vos vagissements, et sur votre berceau, la Liberté, votre nourrice, penchait ses mamelles puissantes...
Le garde ne répondit rien. Une nouvelle larme, plus amère que la première, sillonna ses joues bronzées.
- Oui, c'était le beau temps, - reprit le capitaine, - Vous étiez une grande et forte nation. Wallace se taillait un royaume à coups de claymores. David Huntinghton en trouvait un aux bords du Nil, sous la bannière de Richard-Coeur-de-Lion. Maintenant, vous l'avez dit, vous n'existez plus ! Vous êtes rayés du grand livre des peuples. Les vents des monts Chéviot a balayé votre gloire dans les gouffres de la mer avec la poussière de vos ancêtres. Puis, vous êtes partis l'un après l'autre, insoucieux, sans tourner la tête, l'épée aux flancs, l'arquebuse sur l'épaule, attirés par ce météore d'argent qui brille aux potences du Plessis. On a calculé ce que valaient votre sang, votre honneur, votre nationalité; on vous a marchandé à l'encan des nations, comme on marchande les chevaux sur la place d'Edimbourg. Et vous avez servi de monture à ces trois machinateurs qu'on appelle : Tristan-L'Ermite, Olivier-Le-Dain et Louis XI, trois puissants scélérats qui ont dans les veines du sang de loup, de vautour et de renard, pour les fourberies, les brigandages et les assassinats !...
La voix du géant s'était successivement élevée : elle prit alors une intonation foudroyante :
- Et vous, fils du vieux Rob, vous, Eben Donald, qu'êtes-vous devenu ? Qu'est-ce que l'on a fait de vous ? On vous a claquemuré dans une forteresse silencieuse, entre le bourreau et les cadavres des gentilhommes qu'il a pendu. On a mis à votre gauche la honte et une poignée d'or, à votre droite l'honneur et le gibet. Et l'on vous a dit : Choisissez ! Vous avez eu vos frères égorgés à Montlhéry, et dans les plaines comtoises au signal d'un monarque étranger. Puis, un jour, on vous a jeté sur un brasier, parce que vous aviez cherché dans l'ivresse l'oubli de votre dégradation !...
Le géant se croisa les bras en attendant le résultat de sa vigoureuse homélie.
Tour à tour, le garde avait rougi, pâli, frissonné, tremblé. Pendant qu'un étranger lui rappelait ses ancêtres, un rayon d'enthousiasme avait flamboyé dans ses yeux. - Lorsque le tableau des souvenirs du passé se fut chargé des sombres couleurs du présent, lorsque le capitaine lui parla de sa gloire flétrie, de son histoire effacée, de son enfance guerrière souriant au milieu des bruits qui épouvantent les hommes faits et précédant une adolescence malheureuse, le front d'Eben s'était plissé de rides laborieuses. - Mais quand il lui eût dépeint sa honte, la figure de l'Ecossais devint livide, ses bras se raidirent, son verre tomba sur la table.
- Déshonoré !... Vendu !... murmura-t-il.
Et un râle aigu, plein de sourdes imprécations, se lamenta dans son gosier; sa tête se pencha sur sa poitrine, ses ongles s'enfoncèrent dans sa chair.
- Déshonoré !... Vendu !... répéta-t-il.
Cette douleur profonde fit pitié au géant.
- Si j'ai mis le doigt sur la plaie, Eben, je vous indique maintenant le remède...
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Prologue (la nuit du 17 janvier)

Nous prions nos lecteurs de vouloir bien remonter avec nous de près de deux siècles et demi dans le passé, ce qui nous reportera vers le commencement du dix-septième siècle, - et nous leur demandons de nous accompagner dans cette vieille province de Franche-Comté, qui, depuis Charles Quint appartenait à l'Espagne * (* note, Charles hérite du Comté de Bourgogne au début du 16ème siècle, l'âge d'or de la Renaissance comtoise)
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