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Citations à l'affiche
Quand je mets de côté mes artifices et range dans un coin, avec un soin amoureux et l'envie de les embrasser, mes jouets à moi - mots, images ou phrases -, alors je me sens si petit, si inoffensif et si seul, perdu dans une pièce immense, et si triste, si profondément triste !

En fin de compte, qui suis-je, lorsque je ne joue pas ? Un pauvre orphelin abandonné dans les rues des Sensations, grelottant de froid aux coins venteux de la Réalité, obligé de dormir sur les marches de la Tristesse et de mendier le pain de l'Imaginaire.
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Enfant, vous êtes l'aube et mon âme est la plaine

Qui des plus douces fleurs embaume son haleine

Quand vous la respirez ;

Mon âme est la forêt dont les sombres ramures

S'emplissent pour vous seul de suaves murmures

Et de rayons dorés !



Car vos beaux yeux sont pleins de douceurs infinies,

Car vos petites mains, joyeuses et bénies,

N'ont point mal fait encor ;

Jamais vos jeunes pas n'ont touché notre fange,

Tête sacrée ! enfant aux cheveux blonds ! bel ange

À l'auréole d'or !



Vous êtes parmi nous la colombe de l'arche.

Vos pieds tendres et purs n'ont point l'âge où l'on marche.

Vos ailes sont d'azur.

Sans le comprendre encor vous regardez le monde.

Double virginité ! corps où rien n'est immonde,

Âme où rien n'est impur !
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Si un malade ne meurt pas, ce n'est pas grâce aux soins qu'il reçoit. Dès qu'il est resté trois ou quatre jours sans faire de température, on le renvoie de l'hôpital et il retourne à son camp où sa fièvre ne tardera pas à remonter. J'ai connu des forçats qui en moins d'un an avaient fait dix séjours à l'hôpital et au onzième en étaient sortis les pieds devant. Dans cinquante pour cent des cas, l'acte de décès porte la mention "mort de faiblesse physiologique".

A 25 ans, un homme peut-il mourir de faiblesse physiologique ? Au ministère on n'y croit pas aussi a-t-on remplacé la mention par : "mort d'anémie pernicieuse".
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Organiser notre existence de façon qu'elle soit aux yeux des autres un mystère, et que ceux mêmes qui nous connaissent le mieux nous méconnaissent seulement de plus près que les autres. J'ai façonné ainsi ma vie, presque sans y penser, mais avec tant d'art et d'instinct que je suis devenu pour moi-même une individualité qui n'est ni clairement ni entièrement définie, mais absolument mienne.
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L'intensité des sensations a toujours été plus faible, chez moi, que l'intensité de la conscience que j'en avais. J'ai toujours souffert davantage de ma conscience de la douleur que de la souffrance même dont j'avais conscience.

La vie de mes émotions a choisi de s'installer, dès l'origine, dans les salons de la pensée, et j'ai toujours vécu là plus largement ma connaissance émotive de la vie.

Et comme la pensée, lorsqu'elle héberge l'émotion, devient plus exigeante qu'elle, ce régime de la conscience, où j'ai opté de vivre ce que je ressentais, a rendu ma manière de sentir plus quotidienne, plus titillante et plus épidermique.

Je me suis créé écho et abîme, en pensant. Je me suis multiplié, en m'approfondissant. L'épisode le plus minime - un changement né de la lumière, la chute enroulée d'une feuille, un pétale jauni qui se détache, une voix de l'autre côté du mur, et les pas de la personne qui parle mêlés aux pas de celle qui probablement l'écoute, le portail entrebâillé sur le vieux jardin, la cour s'ouvrant sur l'arc des maisons rassemblées sous la lune -, toutes ces choses, qui ne m'appartiennent pas, retienne ma méditation sensible dans les liens de la résonance et de la nostalgie. Dans chacune de ces sensations je suis autre, je me renouvelle douloureusement dans chaque impression indéfinie.

Je vis d'impressions qui ne m'appartiennent pas, je me dilapide en renoncements, je suis autre dans la manière même dont je suis moi.
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Pourquoi écrire, si je n'écris pas mieux ? Mais que deviendrais-je si je n'écrivais pas le peu que je réussi à écrire, même si, ce faisant, je demeure très inférieur à moi-même ? Je suis un plébéien de l'idéal, puisque je tente de réaliser ; je n'ose pas le silence, tel un homme qui aurait peur d'une pièce obscure. Je suis comme ceux qui apprécient davantage la médaille que l'effort, et qui se parent des plumes du paon.

Pour moi, écrire c'est m'abaisser ; mais je ne puis m'en empêcher. Ecrire, c'est comme la drogue qui me répugne et que je prends quand même, le vice que je méprise et dans lequel je vis. Il est des poisons nécessaires, et il en est de forts subtiles, composés des ingrédients de l'âme, herbes cueillies dans les ruines cachées de nos rêves, coquelicots noirs trouvés sur les tombeau de nos projets, longues feuilles d'arbres obscènes, agitant leurs branches sur les rives des eaux infernales de l'âme.

Ecrire, oui, c'est me perdre, mais tout le monde se perd, car vivre c'est se perdre. Et pourtant je me perds sans joie, non-pas comme le fleuve qui se perd à son embouchure - pour laquelle il est né, encore inconnu -, mais comme la flaque laissée dans le sable par la marée haute, et dont l'eau lentement absorbée ne retournera jamais à la mer.
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- Que dites-vous de tout ça ? demanda-telle à brûle pourpoint ?

- Tout quoi ?

-- Toute cette agitation. Tout ce qui se passe en ville.

- Ca me navre.

- Mais de nous les Noirs, insista Esther. Que pensez-vous-vous, à titre personnel de nous ?

Il prit alors conscience qu'on ne lui avait jamais posé cette question et, sur le moment, ne sut que répondre. Puis il se souvint du jour où petit garçon, il s'était rendu compte que les Noirs s'asseyaient toujours au fond du tramway. Il avait demandé à sa mère qu'elle en était la raison, et elle s'était contentée de lui répondre : "Parce que ça leur plaît." Mais son père avait riposté : "Mais non ! Personne n'aimerait y être obligé." Y être obligé ? Ce fut la première et dernière conversation qu'il avait entendue sur ce sujet et pourtant, au fil des années, il n'avait jamais lancé un coup d'oeil vers le fond d'un tramway et vu les visages noirs tournés vers lui sans repenser à cette remarque de son père.
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Certains travaillent par ennui : de même j'écris, parfois, de n'avoir rien à dire. Cette rêverie où se perd tout naturellement l'homme qui ne pense pas, je m'y perds par écrit, car je sais rêver en prose.
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Au premier instant de répit, dès que je n'ai plus besoin de surveiller ma marche, pour éviter des véhicules ou ne pas gêner les passants, dès que je n'ai plus à parler au premier venu, ni la pénible obligation de franchir une porte toute proche - alors je pars de nouveau sur les eaux du rêve, comme un bateau de papier à bouts pointus, et je retourne une nouvelle fois à l'illusion languissante qui avait bercé ma vague conscience du matin naissant, au son des carrioles qui légumisent.

C'est alors, au beau milieu de la vie, que le rêve déploie ses vastes cinémas. Je descends une rue irréelle de la Ville Basse, et la réalité des vies qui n'existent pas m'enveloppe tendrement le front d'un chiffon blanc de fausses réminiscences. Je suis navigateur, sur une mer ignorée de moi-même. J'ai triomphé de tout, là où je ne suis jamais allé. Et c'est une brise nouvelle que cette somnolence dans laquelle je peux avancer, penché en avant pour cette marche sur l'impossible.

Chacun de nous a son propre alcool. Je trouve assez d'alcool dans le fait d'exister. Ivre de me sentir, j'erre et marche bien droit. Si c'est l'heure, je reviens à mon bureau, comme tout le monde. Si ce n'est pas l'heure encore, je vais jusqu'au fleuve pour regarder le fleuve, comme tout le monde. Je suis pareil. Et derrière tout cela, il y a mon ciel, où je me constelle en cachette et où je possède mon infini.
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Inutile de dire que les affaires intérieures d'Espagne étaient minutieusement ordonnées par les nazis, avec une méthode connue du monde entier. Si les Italiens jouaient un rôle plus actif dans la guerre proprement dite, il y avait d'autre part une dizaine de milliers d'Allemands en Espagne présentés comme d'innocents "techniciens". Leur but, sous couvert d'antibolchévisme, était de créer un parti fasciste qui pourrait, un jour, soutenir les plans grandioses de Hitler pour la conquête du monde. Ces Allemands étaient soit des pilotes, soit des officiers d'artillerie, soit des ingénieurs, d'autres dirigeaient les chemins de fer, la radio et le télégraphe, et administraient les terrains conquis.

Le plus notable était l'infiltration allemande dans la plupart des bureaux d'administration gouvernementale. Grâce à leur influence, des partisans fascistes occupaient tous les postes importants. Des hommes sûrs étaient ainsi placés dans tous les rouages de l'administration gouvernementale.

La propagande allemande contre les démocraties était extrêmement violente: ils s'attaquaient surtout l'Angleterre et à la France, plus encore qu'à l'Espagne républicaine.
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Les soins extrêmes que l’on peut prodiguer à son imaginaire sont entravés par ceux que l’on accorde à l’existence. On ne règne qu’à l’écart du vulgaire.

A vrai dire, je me contenterais facilement de cette théorie si je pouvais me convaincre qu’elle n’est pas ce qu’elle est réellement, c’est à dire un vacarme confus que je fais aux oreilles de mon intelligence, pour l’empêcher de comprendre qu’en somme, il n’y a là rien d’autre que ma timidité, et mon incompétence à vivre.
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À l'apogée de son règne, Auschwitz est un empire carcéral de trente-sept kilomètres carrés comprenant baraquements, chambres à gaz, fours crématoires et usines. On compte aussi trente-huit camps annexes, un stade de football, une bibliothèque, un laboratoire de photographie, un orchestre symphonique et un bordel. La plupart des gazages ont lieu à Birkenau, où vivent la majeure partie des femmes. Deux mille gardiens armés maintiennent la discipline dans le camp, tandis que les huit cents Juifs du Sonderkommando, le détachement spécial, veillent au bon fonctionnement des chambres à gaz. Tous les trois mois, ces hommes sont gazés et remplacés par de nouveaux arrivants. Le coût d'un meurtre à Auschwitz est de 0,25 Reichmarks.
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Entre notre vie et nous, un hygiaphone. Notre ange ne vient plus au parloir.
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Quand Mlle Ellapéroumal était seule, son visage, qui, dans l'animation de la causerie, exprimait un empressement joyeux et un peu enfantin, se contractait au lieu de se détendre et perdait, pour revêtir une sévérité douloureuse, cet air d'innocence qui lui était particulier.



(Incipit)
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 Comenius
De même que le monde entier est une école pour la totalité de l’espèce humaine depuis l’origine jusqu’à la fin des temps, de même la vie est une école pour chacun du berceau à la tombe. Il ne suffit plus de dire avec Sénèque : ‘‘Il n’y a pas d’âge pour commencer à apprendre’’. Nous devons dire "chaque âge est destiné à apprendre" car il n’y a d’autre but pour chaque être que d’apprendre dans la vie elle-même.

("Opera didactica omnia", 1657)
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 Montesquieu
Il n' y a rien de si puissant qu'une république où l'on observe les lois non par crainte mais par passion comme le fit Rome.
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C'était la première fois que j'entendais ce mot : génocide. Inventé en 1944, pour l'occasion... Si je puis dire... Génocide... Holocauste... Shoah... Tous ces mots pour essayer de nommer ce que rien ne peut décrire. L'horreur humaine la plus absolue. L'abomination.
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LE CHŒUR : Ce n'est qu'à celui qui a souffert que la Justice accorde de comprendre.
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La plupart des gens ne vivent pas ainsi : en racontant chaque instant tel qu'il se déroule, au passé, comme un observateur détaché.
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Il ne reste plus alors que la douleur, la douleur dans son ventre, dans son dos, dans son cœur et dans sa tête, une douleur insoutenable. Ulf décrit toujours des cercles désespérés au milieu de la cour, et les abeilles au-dessus d'eux se massent en un essaim plus gros encore, tandis que deux petites mains fraîches l'attrapent, la tirent à l'abri des arbres, et l'obscurité se referme sur elle en même temps que leur frondaison pour ne plus lui laisser voir que les éclairs noir doré de son agonie.
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