Sabine Wespieser éditeur est une maison d`édition créée en 2001 par Sabine Wespieser. Elle publie des ouvrages de fiction français et étrangers. Il n`y a pas de collections au sein de la maison, Sabine Wespieser éditant selon ses mots les livres qui lui plaisent, ne voyant pas l’intérêt de diviser. Le catalogue de la maison compte aujourd`hui plus de 140 titres et la maison publie une dizaine d`ouvrages par an.

Le titre : comment une mer liquide devient-elle un mur compact ? L'image est bien trouvée : l'eau est aussi implacable que le béton! Cela m'a fait penser bien sûr au mur de Donald Trump entre le Mexique et les Etats-Unis, au mur de Berlin entre RDA et la RFA , à tous les murs, en somme.
La structure du livre entrecroise les vies de trois femmes principales qui font l’objet d’un chapitre en particulier, alternant le récit trois fois interrompu du trajet en bateau. Le suspense est ainsi maintenu quant à savoir si le chalutier va arriver à bon port, si les gens vont être sauvés et si la fin sera heureuse.
Cette fin en suspens permet donc de raconter le parcours qui a amené chacune au même endroit alors qu’elles sont de pays différents (Erythrée, Syrie, Niger), de confession différentes (chrétienne orthodoxe, musulmane, juive) et partent pour des raisons non moins différentes (dictature, guerre, misère), bien qu’ayant la même origine (la peur, la survie, le droit au bonheur).
Le fait que ce soient des femmes nous les rend-il plus pitoyables ou émouvantes?
Commenter  J’apprécie         30 
Nécessaire par son sujet, ce roman m'a déçu par sa forme. Le sujet, ce sont les enlèvements de lycéennes par Boko Haram. Réduites en esclavage, violées, battues, voire lapidées quand leurs tortionnaires en ont décidé ainsi, elles méritent que le monde s'intéressent à leur sort (et aillent même plus loin en mettant fin aux exactions de ces sauvages assoiffés de sang et de sexe ; mais cette réaction viendra-t-elle un jour?). Le travail d'Edna O'Brien est donc salutaire, du fait qu'elle lutte contre le silence. Elle rend d'ailleurs avec un réalisme glaçant les tortures physiques et mentales subies par les jeunes femmes victimes des djihadistes.
Ce qui est intéressant, c'est que l'autrice choisit aussi d'évoquer le retour dans leurs villages des prisonnières qui reviennent de cet enfer.
C'est sans doute moins connu, mais le fait est que même une fois libérées elles continuent à souffrir d'une autre forme de torture morale : leurs voisins et leurs proches les regardent de travers, les rejettent pour le motif qu'elles reviennent impures, salies par ce qu'elles ont endurées ou même, peut-être, imprégnées des dogmes de leurs anciens geôliers ; et cette stigmatisation est encore pire si elle reviennent accompagnées d'un enfant né d'un viol, un enfant dans les veines duquel coule le sang d'un djihadiste. Victimes des pires abominations, elles se retrouvent considérées comme coupables de leurs malheurs.
L'évocation de ce retour est tout aussi édifiante ; mais c'est à partir de là que le livre m'a moins plu.
Le style sec, saccadé, brut de l'autrice convenait à la violence de l'enlèvement, de la détention puis de la fuite de son héroïne, soumise à l'arbitraire, au hasard, aux changements brusques. Mais par la suite, cette écriture, parfaite pour un magazine d'investigation, devient lassante.
Par ailleurs, l'attitude de rejet mentionnée plus haut est bien moins approfondie que les réflexions et ressentis décrits par l'héroïne dans la première partie.
Enfin, deux autres points m'ont vraiment gêné lors de la lecture : certains passages sont confus et d'autres sont remplis par des anecdotes pas toujours utiles ni intéressantes, racontées à l'héroïne en fuite par des personnages brièvement rencontrés. Cela aurait pu être évité, à mon sens.
Commenter  J’apprécie         20 
Minneapolis, 25 mai 2020. Lors de son arrestation et de son placage ventral, George Floyd souffle « I can’t breath » et décède dans la foulée. Les manifestations et émeutes qui s’ensuivirent, reprenant ses dernières paroles, ont bouleversé l’Amérique et le monde entier.
Louis-Philippe Dalembert s’est très rapidement saisi de cet événement pour le transposer à Milwaukee, une ville qu’il connaît bien pour y avoir habité et enseigné. Il choisit de donner à entendre différents personnages, en commençant par l’épicier pakistanais qui a composé le 911 devant le possible faux billet avec lequel Emmet a payé ses achats. Emmet, une grande baraque noire qui a failli faire carrière dans le football américain, père célibataire de trois filles, fils modèle d’une mère récemment décédée.
Le chœur des voix des proches fonctionne bien, notamment lorsqu’il donne a voir de l’intérieur les effets de la ségrégation officieuse entre les blancs et les autres, notamment dans l’espace urbain, à l’université ou même dans le couple mixte, dans un pays où celui-ci reste l’exception.
Il n’échappe parfois pas aux expressions toutes faites, que l’on retrouve parfois d’un personnage à l’autre. J’ai particulièrement été émue par Nancy, la fiancée blanche et idéaliste, et Ma Robinson, la pasteure ex-matonne haute en couleur !
Le héros, si l’on peut dire, de ce roman, est un peu trop parfait, à croire que le manichéisme des fictions américaines a contaminé le grand écrivain d’origine haïtienne. S’il avait été drogué et ancien braqueur comme George Floyd, son meurtre aurait-il été justifié ?
J’ai eu le plaisir d’écouter Louis-Philippe Dalembert l’an dernier au festival des écrivains du Sud à Aix-En-Provence. Un grand moment !
Commenter  J’apprécie         40