Bonjour et désolée, je n'ai pas encore lu la production de ce mois-ci. je m'y mets bientôt, promis.
Ma contribution :
Le virage de Tamburello
La vie se la coule douce dans les rues de Buenos Aires. Le soleil irradie dans les ruelles. Dans la pleine lumière de ce matin-là, qui se reflète dans la mer, le Corcovado et son Christ Rédempteur, majestueux et impressionnant, déploie, de toute sa hauteur, son emprise sur la ville.
Et le Pain de Sucre dresse sa silhouette dans la baie de Rio comme pour se rappeler aux amateurs d’escalade.
Elles sont si belles, les cariocas, lorsqu’elles dansent la samba sur Copa Cabana, qu’on se croirait au cinéma 🎵🎶(paroles de chanson).
A Santana, lieu de naissance de leur idole, mais aussi dans tout le Brésil, l’attente est toute impatience.
Les aficionados se pressent devant les images qui inondent les écrans de fortune. La liesse règne dans les Favelas.
L’enfant du pays, « Beco », véritable légende de son vivant, reste un poids lourd en Amérique du Sud.
Très tôt et parce qu’il évolue dans un environnement familial aisé et très professionnellement orienté métallurgie, aéronautique, aéroportuaire et industrie automobile brésilienne, il développe rapidement un intérêt pour la vitesse. « Appuyer sur l’accélérateur ou le frein m’amusait ».
Rapidement, il se fait remarquer sur les circuits de karting. Son mentor de l’époque, surnommé le « Tchê » façonne son talent et l’initie à la mécanique de précision. Il dira que son élève calculait sa trajectoire au millimètre près pour gagner des dixièmes et qu’il a réinventé l’art de piloter un kart.
Il obtiendra plusieurs victoires sans aucun titre mondial. Cependant, ses qualités de jeune pilote le différencieront des autres, déclarera à l’époque son chef d’équipe, qui affirmera « je crois qu’il est né avec ce don ».
Puis ce furent des débuts brillants en monoplace, au Royaume Uni. Sa rapidité, alliée à un style très agressif, ne passe pas inaperçue. Il se sait « surveillé » avec assiduité.
Il ne signa, plus tard, un contrat en Formule 3 si garantie d’un volant en F1 !!! Un tel ultimatum avait de quoi interloquer, même un manager de renom !
Dès lors, Senna, la gagne, ne cessera d’impressionner.
Pourtant, malgré sa personnalité taciturne et son caractère de gagneur qui ne lui vaut bien souvent que des animosités, il devient très vite un catalyseur et marque les esprits.
Réputé chétif et petit, il n’aura de cesse de fortifier le corps et l’esprit pour progresser car il a vite appris la différence entre une course de catégorie inférieure (1/2 heure) et les grands prix de F1 qui se disputent sur plus de 60 tours à haute vitesse qui requièrent « une forme physique et une force mentale ».
Doté d’une acuité très rare qui lui confère un avantage certain, car il anticipe le virage qu’il devra amorcer, le Brésilien réalisera de très belles performances sanctionnées par de nombreux podiums, dans les années 80, essentiellement à Monaco, circuit sur lequel il démontrera une aptitude particulière à conduire sur piste détrempée.
La fièvre de la vitesse figure son crédo et il préfère agir sur les évènements plutôt que de les subir.
Pour preuve, il déclare, à la fin d’une célèbre course, « du pilotage à l’instinct, comme dans une autre dimension, je n’avais plus conscience des limites. J’ai invité l’erreur et c’est la leçon que j’ai appris ce jour-là ».
Cependant, contraint à de nombreux abandons, et mathématicien de haut niveau, entre autres, il demeure très investi et appliqué dans le développement des moteurs, auprès de ses ingénieurs, afin de permettre aux monoplaces de trouver un meilleur rythme de course.
Cependant, la cohabitation ne fut pas toujours aisée avec les autres concurrents. Ni avec le staff tellement il possédait la rage de vaincre et de se hisser à la première place mondiale (consécration en 1988) dans la course automobile.
Et Monsieur s’arroge parfois le droit de déroger à certaines règles !
Alors, sa motivation, sa détermination, son ambition démesurée ne favorisent pas les liens. Et le conduisent parfois à commettre des actes répréhensibles, style accrochages provoqués, qui lui valent de nombreuses inimitiés et polémiques (« c’est le paradoxe de ce type, il est le premier à nous mettre dehors et le premier à venir vérifier si nous allons bien » M. Brundle).
Et introduit une mésentente larvée avec certains gagnants.
Notamment avec A. Prost, son coéquipier chez McLaren. Depuis plusieurs mois, les rapports entre les deux hommes se sont largement détériorés et la guerre psychologique explose au grand jour en 1989 et se terminera au tribunal de la FIA (Fédération Internationale de l’automobile) à la suite d’une manœuvre, pas très catholique, de la part du brésilien, « victime de son orgueil et de sa nervosité face à son principal rival ».
Mais on a beau dire, on a beau faire, sa référence, son unique modèle, celui qu’il souhaitait détrôner par n’importe quel moyen, il l’a dit « je le battrai » reste notre champion à nous.
Mais son esprit de revanche, son comportement et son attitude traduisent une autre vision de Senna, visiblement en conflit avec lui-même, dixit Ron Dennis.
Pourtant, en 1991, il sera champion du monde, pour la troisième fois !!!
Cependant, 1993 voit le grand retour de Prost avec lequel Senna ne pourra rivaliser malgré cinq victoires.
Alain Prost, tout en sagesse, et Ayrton Senna (nom de jeune fille de sa maman, pour mieux se démarquer), tout en pugnacité, deux rivalités exacerbées du fait de leur caractère de champion, qui ont fait les grandes heures de la F1 se retrouvent, à plusieurs reprises, en fin de saison, pour discuter de la nouvelle Williams en développement, mais aussi, et à l’initiative du brésilien, piloter ensemble à Paris-Bercy, une course de Karting de charité, semblant officialiser ainsi leur entente.
Probablement les meilleurs de leur génération, ces deux pilotes d’exception se portaient, malgré tout, un respect mutuel.
Aussi, ce matin-là, dimanche 1er mai 1994, les yeux du monde sont-ils braqués sur Bologne.
L’excitation est à son comble, sur le circuit d’Immola.
Mais l’inquiétude aussi.
De nombreux circuits n’ont jamais été aménagés au niveau sécuritaire sous prétexte d’aucun accident mortel, le changement de règlementation et le retrait subit de l’électronique ont vraisemblablement rendu les monoplaces plus imprévisibles, ce dont Senna restait conscient.
Et lui ne croit plus en la fiabilité de sa monoplace.
L’accident de Barrichello, le vendredi, également pilote brésilien, lui met des larmes dans les yeux.
Et La Camarde a déjà frappé ! La veille, l’Autrichien Roland Ratzenberger est victime d’un accident mortel qui affecte profondément Senna, désireux, alors, de ne plus concourir.
Il pleure sur l’épaule du professeur de l’équipe médicale qui tente de le persuader de « se mettre à la pêche », autrement dit d’arrêter puisqu’il est détendeur de titres de champion du monde et reconnu comme le plus rapide.
La pression et les intérêts en jeux pèsent sur les épaules de Senna qui n’a plus qu’à ranger ses doutes dans sa poche.
Il demande alors qu’un drapeau autrichien lui soit remis afin de rendre hommage au pilote disparu sur le podium en cas de victoire.
Cependant, son intention de reformer un comité de pilotes germe dans sa tête et il en discute avec quelques-uns des autres pilotes. Il s’en ouvre également à Prost qui le trouvera très perturbé et préoccupé par la sécurité des pilotes en général, plus fragile et moins serein que d’habitude.
Alors qu’il effectue un tour commenté, Senna adresse un message amical à Prost (consultant pourTF1) « …un spécial bonjour à mon…notre ami, Alain. Tu nous manques à tous ».
Mais La Grande Faucheuse n’en a pas terminé avec ses actions macabres.
Après le tour de chauffe, les voitures prennent leur place sur la grille de départ du Grand Prix de Saint Marin. En attendant que les feux passent au vert, les moteurs ronflent.
Puis rugissent dans un bruit d’enfer.
Des incidents, au départ, obligent les monoplaces au ralenti pendant cinq tours.
Puis, après un seul tour bouclé à pleine vitesse, septième boucle, il est 14h18 quand Ayrton Senna perd le contrôle de sa voiture.
Il quitte la piste à 305 km/h, part tout droit dans la courbe ultra-rapide de Tamburello avant de percuter un mur de béton à 212 km/ h.
Un voile de tristesse a recouvert les yeux du monde entier.
C’était, il y a 28 ans !