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    juliebabelio le 02 mai 2023
    Bonjour à toutes et à tous !
     
    Au mois de mai, fais ce qu’il te plaît. Et pourquoi pas même voyager dans le temps ?
    Si vous pouviez aller n’importe où dans le temps où iriez-vous ? Dans le futur voir ce que l’avenir nous réserve ou dans le passé pour revivre des événements historiques ? Ou alors iriez-vous simplement 5 minutes en arrière pour vous empêcher de vous tromper de destinataire au mail important que vous avez envoyé ?
     
    Imaginez un voyage dans le temps. Vous faut-il une machine à remonter le temps, un objet magique, ou est-ce vos personnages qui sont dotés de pouvoir surhumains ? Quels sont leurs buts ? Pourquoi veulent-ils voyager à travers le temps ?
     
    La taille et la forme de votre contribution sont libres et nous ne prendrons en compte que le premier texte que vous posterez ici en répondant ci-dessous. Et par respect pour tous et toutes, et afin d’encourager de plus en plus de monde à participer, nous vous encourageons à faire preuve de bienveillance pour chaque texte publié. Vous avez jusqu’au 31 mai pour participer et tenter de remporter un livre !
     
    A vos claviers,
    Julie
     

    Snoopythecat le 03 mai 2023
    Super, voilà un sujet bien inspirant et qui ne devrait pas engendrer de polémiques ou de maux de tête.

    A nos plumes, prêts, partons .
    franceflamboyant le 04 mai 2023
    En même temps, c'est un thème très abordé en littérature même encore aujourd'hui. Il va falloir trouver une entrée surprenante sous peine de n'être que le corollaire d'écrivains qui ont traité le sujet de façon brillante...
    Sflagg le 04 mai 2023
    Salut !

    Avec un jeux de mots qui me saute aux yeux rien qu'en lisant le titre de ce défi, je ne pouvais qu'être inspiré. Voici donc ma participation très libre (pour changer) du thème du mois :

    Voyage dans l'étang                (04/05/23)

    Ce fut un vrai voyage dans le temps,
    Que ce voyage dans l'étang.
    Comme une balade dans un univers parallèle,
    Au cœur d'un hiver pas réel,
    Que vécurent ces amoureux des mystères
    Que recèle notre belle et vieille miss Terre. 
    Un vrai retour vers le passé,
    Mais n'en dire que ça, n'étant pas assez.
    Laissez-moi donc, cette histoire, vous conter.
    Cette aventure dont tout le monde parle dans le comté.
    C'est celle de recherches archéologiques
    Qui se déroulèrent au fond de l'étang, c'est logique.
    Pour commencer, on l'avait vidé,
    Comme on assèche un bidet.
    Puis, comme il n'était plus mouillé,
    On l'avait tout scanné et tout fouillé.
    Et devinez ce que l'on fit comme belles trouvailles,
    À la fin de ce long et laborieux travaille.
    Je vous le donne en mille,
    Mon cher Émile !
    Les restes fossilisés d'une antique et inconnue civilisation.
    Je ne vous dis pas ce que furent, dans la région, les réactions.
    De tout le pays, on vint voir ce qu'il se passait.
    Cette découverte qui changerait notre vision du passé.
    Qui, à n'en pas douter, transformerait notre future,
    Que l'on en parlera encore dans mille ans, pour sûr !
    Et c'est pour cela que l'on peut raconter,
    Sans avoir peur de se tromper,
    Que ce fut un vrai voyage dans le temps,
    Que ce voyage dans l'étang.

    S.Flagg !!

    Bonne lecture et chance à tous !!
    Carolina78 le 04 mai 2023
    Sflagg   Merci pour ce coup d’envoi mélodieux, d’une drôle de mélodie qui mêle la vie pratique, vider un étang comme on assèche un bidet, à la mythologie :

    Les restes fossilisés d'une antique et inconnue civilisation

    où le style fable :

    Laissez-moi donc, cette histoire, vous conter
    Cette aventure dont tout le monde parle dans le comté

    croise allègrement un style familier :

    vieille miss Terre

    Je vous le donne en mille,
    Mon cher Émile !

    Beaucoup d’humour et un message d’espoir :

    Cette découverte qui changerait notre vision du passé.
    Qui, à n'en pas douter, transformerait notre futur
    Cathye le 05 mai 2023

    De passage pour découvrir le thème et voilà  : 
    Bravo Sflagg pour cette belle mise en bouche, tout y est, de l’humour, de la poésie et un superbe voyage dans le temps. Quoi de mieux que la découverte d’une civilisation engloutie pour modifier notre futur. 


    Et bonne chance à tous.

    JML38 le 05 mai 2023
    Belle ouverture Sflagg.
    Et largement "dans les temps" qui plus est.
    Sflagg le 05 mai 2023
    Salut !

    Merci Carolina78, Cathye et JML38 pour vos sympathiques retours. Si j'ai réussi à vous faire rire, c'est parfait, défi réussi pour moi.

    A+ !!
    Snoopythecat le 05 mai 2023
    Sflagg   Waouw, c'est très bien écrit, drôle et poétique à la fois.
    La barre est placée haut dès le départ .
    vibrelivre le 08 mai 2023
    Balade à travers les âges



    Il était une fois un Négrillon que son père avait fait venir du Cameroun en France pour qu'il y étudie. Ce que le père ne savait pas, c'est que son fils n'aimait pas l'étude, et encore moins dans une classe de Blancs. Au Cameroun, tous les élèves étaient Noirs, et cependant, ce que le fils ne disait pas, il était dans les derniers de sa classe. Mais sa logique et son argumentation connaissaient encore des faiblesses. Tous les prétextes étaient bons pour ne pas se mettre au travail scolaire. Et plus son entourage -certes deux vieilles Blanches, mais aussi un jeune Noir- lui enjoignait de travailler à l'école, moins il avait de goût pour apprendre, moins il appréciait ses répétiteurs.
    En revanche, il vénérait la télévision. Avec elle, toutes ses peurs -et il en avait beaucoup- disparaissaient. La télévision avait tous les avantages : il restait assis à regarder les images. Il n'avait pas besoin de faire quelque effort. Et ce confort-là lui donnait de l'appétit, lui qui jamais ne mangeait aux heures auxquelles mangeaient les Français. Il avait du temps devant lui, il savourait ce qui lui servait de repas -pain au lait, Nutella, lait concentré- devant ses personnages préférés, les Loud, les Sisters, les danseurs de Un, dos, tres, les As de la Jungle, etc, etc. Il s'isolait dans son monde virtuel, n'entendait plus de reproches, et s'extasiait devant les gens qui se donnaient des baisers timides.
    Il aimait l'état d'être amoureux. Il était très sociable, il avait de nombreux copains de jeu, il était beau comme un cœur, et il ne lui déplaisait pas que les filles de l'école lui disent qu'elles étaient amoureuses de lui. C'était un tombeur malgré lui, et cependant quand il portait un soin particulier à sa chevelure -qu'une de ses répétitrices avait plaisir à caresser, comme le pelage d'un bébé panda, quelle barbe, beurk, qu'est-ce qu'elle croyait?- c'est qu'une fille avait touché son cœur et son orgueil de jeune mâle. Il n'était pas en retard dans toutes les disciplines.
    Un jour, un copain de classe, Jules, lui parla d'une machine à remonter le temps. Il voulait avoir l'air affranchi. Lui qui en classe était à la remorque, répondit, crâneur :
    _ Ça va, ça va, j'en ai une.
    Aussitôt son camarade d'appeler la bande et de s'écrier :
    _ Fru a une machine à remonter le temps !
    Les autres de ricaner :
    _ C'est ça, nullos, on va te croire, flop.
    Jules se tourna vers lui, attristé, et lui demanda :
    _ Tu me la feras voir à moi, ta machine ?
    _ 0ui, dit Fru, à condition que ça reste un secret. Et j'ai un autre secret. La machine est encore dans ma tête.
    En rentrant chez lui, il s'informa, mine de rien, auprès d'une de ses vieilles répétitrices, qui savait beaucoup de choses quand même, si les machines à remonter le temps existaient.
    _ J'aimerais bien en avoir une, tu sais.
    Et il avait composé sa frimousse irrésistible, qui ferait craquer la vieille dame.
    _ La machine à remonter le temps, on t'en a parlé à l'école ?
    L'école, elle n'avait que ce mot à la bouche.
    _ Tu sais qu'il y a une vie en-dehors de l'école ? C'est mon ami Jules qui m'en a parlé. Il aimerait bien remonter le temps, et moi j'aimerais qu'il le remonte dans ma machine …
    _ Je crois que c'est une notion de physique. Il s'agirait de courber l'Espace-Temps. Il faut trouver les matériaux adéquats pour faire plier cet Espace-Temps, mais il me semble avoir entendu dire qu'il est impossible de construire une machine qui non seulement remonterait le temps, mais aussi le redescendrait. Nous devons rester dans notre temps. Mais l'espace est à nous.
    Elle était contente, la vieille répétitrice Blanche, elle avait servi son petit cours. Elle montrait ses limites. Et le Négrillon, de limites il n'en voulait pas.
    Il retrouva Jules. Son copain exultait.
    _ Mon père a dit que les formules mathématiques, c'étaient comme des formules magiques. On n'a qu'à trouver un magicien.
    Le Négrillon alla au plus rapide.
    _ Où ? demanda-t-il, efficace.
    _ Ça doit se trouver, dit Jules. Faut qu'on se renseigne.
    vibrelivre le 08 mai 2023
    Ils firent leur plus beau sourire et dirent à la maîtresse:
    _ Théo demande où on peut trouver des magiciens. On peut quand même pas lui dire que ça n'existe pas. Qu'est-ce qu'on peut lui répondre à la place ?
    _ D'abord les magiciens existent.
    Les enfants ouvrirent des yeux ronds. L'instit était tombée sur la tête ?
    _ Il y a des prestidigitateurs qui font sortir des colombes de leur chapeau …
    _ Mais Théo cherche un autre type de magiciens. Il veut que son magicien lui construise …
    Jules et Fru se regardèrent. Ils allaient trop en dire.
    _ Oui ?
    _ Une soucoupe volante, dit Jules, tout essoufflé brusquement.
    _ Eh bien, dites à Théo de lire ou d'aller au ciné. C'est bien aussi les livres et les films. Ils peuvent vous faire rêver.
    Ils remercièrent leur maîtresse, et sortirent de leur panoplie leur sourire d'enfants reconnaissants. Finalement, n'étaient-ils pas un peu magiciens eux aussi ?
    _ Rien à faire du côté des adultes, décréta Fru.
    _ D'accord, opina Jules.
    Ils tombèrent sur Ibrahim. Il avait un sac de bonbons à côté de lui, dans lequel il puisait souvent et d'une main plus que généreuse.
    _ C'est pas bon de s'empiffrer de bonbons, dit Fru sentencieusement, à qui les bonbons ne disaient rien.
    _ T'as qu'à m'en donner quelques-uns. Je vois qu't'as des bonbons soucoupes. Je les aime bien, ceux-là.
    Il se tourna vers Fru, et lui fit un clin d'oeil.
    _ Moi, en fait de soucoupes, j'aimerais mieux en avoir une en vrai.
    _ Et j'te parie que tu sais pas où trouver un magicien pour t'en construire une, insista Jules.
    _ Moi, j'ai vu E.T. Sur You Tube, et ma voisine a dit que sa mère avait des pouvoirs pour en produire une, poursuivit Ibrahim.
    _ Ta voisine ? dit Fru.
    _ Ouais, c'est une voyante. Ma mère dit que c'est une Gitane, et qu'il faut pas croire les Gitanes. Mais si vous voulez, on peut aller la voir.
    _ O. K., on n'a pas grand-chose à faire, en vrai.
    Quand ils arrivèrent chez la voisine, c'est sa fille qui vint leur ouvrir. Elle avait une robe rouge à pois noirs, des cheveux longs et noirs comme les yeux de Fru, et lisses, Fru adorait les cheveux lisses, et il en voulait de pareils. C'était comme si deux cascades s'écoulaient de derrière sa tête. C'était aérien. De la poésie, comme aurait dit l'une de ses répétitrices. Un paradis de poésie.
    _ Salut, Esmé, hein c'est vrai que ta mère sait faire des soucoupes ? dit Ibrahim.
    Ibrahim, avec sa voix qui muait, la cassait, la poésie. Il passait de la flûte au tuba, et parfois usait d'une scie qui crissait comme un camion maintes fois replâtré.
    _ Des soucoupes, et un tas d'autres choses, répondit Esmé en posant ses yeux de fée sur Fru.
    _ Comme une machine à remonter le temps ? dit Fru.
    _ Tout, dit Esmé. Tu veux remonter le temps ?
    Fru ne savait plus. Dans le temps d'aujourd'hui il y avait Esmé.
    _ Et toi ? dit-il.
    _ Je pourrai t'accompagner si tu veux.
    Le cœur de Fru faisait des galipettes.
    _ Pourquoi pas ? dit Fru.
    _ Mais il faut la machine, souligna Jules pragmatique.
    La voyante fumait. Les volutes ondulaient devant son visage qu'elles voilaient. Fru ne voyait que son porte-cigarettes noir qu'elle tenait dans ses mains gantées de longues mitaines en résille, qui laissaient voir des ongles interminables peints alternativement de rouge et de noir, et des veines proéminentes comme elles l'étaient sur les mains d'une des répétitrices. Sa mère serait vieille comme son père ? Ha, ha...
    _ Ainsi, vous voulez remonter le temps, dit la voyante d'une voix pierreuse comme si elle venait d'échouer sur une plage, en avalant quelques galets, telle une sirène perdue.
    _ Oui, répondirent Jules et Fru comme si la leur de voix disparaissait dans une des spirales de fumée.
    _ Ils veulent une soucoupe comme celle d'E.T, ajouta Ibrahim pour rester maître de la visite.
    _ Ils veulent changer de temps ou parcourir l'espace ? s'impatienta la Gitane dont les cordes vocales vibraient comme une râpe. Quand elle parlait, elle émettait un souffle cahoteux, hérissé, malgracieux. C'était un des effets de ses pouvoirs ?
    _ On veut voyager dans le temps, dit Jules avec détermination.
    Quant à Fru, il ne disait rien. La fumée qui dansait, les rochers qui roulaient, les gants qui scintillaient, et les yeux d'Esmé l'hypnotisaient. Il était envoûté.
    _ Ben Fru, dis quelque chose, c'est ton idée d'abord, s'inquiéta Jules.
    Fru sortit à grand-peine de son état vaporeux.
    _ Je veux saluer Cyrano, le cadet de Gascogne.
    La maîtresse leur avait fait voir la fameuse scène du balcon. Le cours du reste avait pour thème le balcon. Elle leur avait d'abord montré Roméo et Juliette, comme ils s'aimaient ces deux-là, et comme ils parlaient bien. Puis celle où Cyrano soufflait à ce bêta de Christian les mots qui séduiraient Roxane. Quels mots ! Fru ne les avait pas tous compris, mais les sons, la façon de les dire, les échos lui avaient procuré un tel émoi qu'il voulait être beau comme Christian et savoir parler comme Cyrano qui avait un si joli chapeau avec une si jolie plume. La maîtresse n'avait-elle pas parlé de panache ? Ça attaquait bravement, les a sonnaient comme des clairons de victoire, et le che prolongeait la fierté du combat gagné. L'épée grisée battait le pavé. Pa-na-che. Les lèvres de Fru souriaient et il fermait les yeux.
    vibrelivre le 08 mai 2023
    Jules s'agaçait. Fru y était-il ? A quoi il rêvait encore ? A croire que leurs camarades avaient raison. Fru était toujours ailleurs.
    _ Qu'est-ce qu'il a, Fru ? dit Ibrahim.
    _ Il a qu'il m'énerve, dit Jules. S'il continue, je ne monterai pas dans la machine avec lui. Il sait pas que les mousquetaires ont pour devise, un pour tous, tous pour un ? Lui, il la joue solo.
    La gitane toussa. Toutes les courbes s'agitèrent comme un essor de colibris nains.
    _ Je peux vous proposer les ailes d'un dragon pour vous emmener au temps du Roi-Soleil.
    _ Un dragon, ça n'est pas dangereux ? demanda Jules.
    _ Qui ne risque rien n'aura rien, dit Ibrahim qui se sentait en veine de répliques.
    _ On rencontrera le soleil ? dit Fru qui ne maîtrisait ni l'histoire ni les périphrases.
    _ Par moments, je me demande si les copains ne sont pas dans le vrai en t'appelant l' nullos, dit Jules en colère.
    _ Vous n'avez qu'à changer d'époque, dit Ibrahim pour calmer l'ambiance.
    _ Moi, je veux être un super héros avec plein de pouvoirs, dit Jules, impulsif. Quelle force le poussait ?
    _ Comme ça, tu pourras construire ta machine, dit Ibrahim. Et même que t'auras pas besoin d'elle. Tu te propulseras dans les airs par ta propre force. Fallait pas déranger la mère d'Esmé alors.
    _ Il faut bien sûr qu'on le transforme en super héros, dit perfidement la fille de la magicienne.
    Fru devint tout chose. Cette voix, on aurait dit ...un carillon qui tinte, une clarine qui sonne, un mobile qui bruisse au vent. Ça le chavirait. Il tanguait sur une mer d'huile où flottaient des délices infinies. Il n'était que bonheur.
    _ Pour cela, tu devras traverser une série d'épreuves, dit la voyante. Ce ne sera pas facile, je le vois.
    _ Comme l'ordalie par le fer rouge, dit la petite gitane.
    _ L'or quoi ? dit Jules, déjà décontenancé.
    _ L'ordalie, dit Fru que les syllabes charmaient. Il les retenait de manière toute naturelle. Il ne butait pas sur le mot inconnu.
    _ Toi, tu sais ce que c'est, l'or machin ? dit Jules.
    _ Bien sûr qu'il le sait, dit Esmé. Au lieu de remonter le temps, tu ferais mieux de le passer à l'école. Elle, n'avait pas la chance d'y aller. L'herbe est toujours plus verte ailleurs.
    _ J'suis plus ton ami, dit Jules. J'vais r'joindr les copains. T'es un vrai nullos.
    _ Moi, j'aime bien les nullos, dit la petite gitane.
    _ J'ai l'impression d'être de trop, dit Ibrahim plus subtil qu'il ne paraissait. A moins que la perspective de la machine, même si ça n'était pas une soucoupe, ne lui libérât l'esprit et ne le rendît plus agile.
    Fru n'était plus là. De la brume dessinait des arabesques, des ronds noirs voltigeaient sur de la soie rouge, des mots sonores explosaient comme les belles multicolores des feux d'artifice, la voix d'ondine de la petite gitane lui griffait le coeur, les temps se télescopaient, les ailes d'un dragon fondaient au soleil, Cyrano trahissait Roméo, Jules épousait Sakura et Ibrahim emportait dans sa soucoupe l'imbattable Gaï Maito qu'il avait battu. Il prêterait à la petite gitane son skate qui s'envolerait comme le vélo d'Elliot, ils descendraient à toute berzingue les pentes du parc, et ils demanderaient au cygne qui donnait sa majesté au plan d'eau s'il connaissait le petit canard et s'il était aussi vilain que le conte le disait. Et ils riraient, riraient, riraient, et leurs rires traverseraient les temps, les temps d'avant le temps, les temps antiques, les temps modernes, les temps à venir, les temps hors du temps.
    Pourquoi remonter le temps quand on les avait tous pour lieux de promenade où vaguait l'esprit, et qu'avec le privilège inouï de l'enfance, on pouvait rêver tant et plus et croire que ces rêves étaient vrais ?
    Quand Fru, comme E.T., rentra à la maison, les deux vieilles dames blanches, qui s'étaient inquiétées, soupirèrent de soulagement. Elles le bisoutèrent, l'amignonnèrent, et lui fourrèrent la main dans sa tignasse. Il était leur peluche. Il les laissa faire.
    _ Alors ?
    _ Je reviens d'avoir exploré le temps. Moi, j'ai pu la construire, la machine à remonter le temps.
    _ Et c'était comment ?
    _ J'ai trouvé l'amour.
    _ Et alors ?
    _ Elle s'appelle Esmé.
    _ Es-mé-ral-da, chantèrent les vieilles répétitrices. Il avait oublié de le dire. Elles adoraient chanter.
    Danse mon Esméralda
    Chante mon Esméralda
    Au-delà de l'au-delà
    Au-delà de l'au-delà. C'est sûr que le temps était plié. La machine à remonter le temps, elle existait déjà. Personne ne s'arrêtait pour le remarquer.
    Carolina78 le 08 mai 2023
    vibrelivre   Merci de réveiller ce fil d'écriture ! Je guettais avec impatience un défi à me mettre sous la dent ! C'est avec plaisir que je vais vous lire ce soir attentivement - vu ce que j'ai vu au défi précédent j'en attends beaucoup !
    franceflamboyant le 08 mai 2023


    Je me suis souvent demandée si j'aimerais voyager dans le temps. Enfant, cette idée m'enthousiasmait. Je ne m'encombrais pas à l'époque de perspectives mathématiques ou physiques ; l'espace-temps ne m'interpellait pas. Je pensais qu'il suffirait de fermer les yeux et de rester immobile assez longtemps dans un lieu où personne ne viendrait me déranger pour que tout d'un coup, le miracle se produise. Je n'étais plus dans le présent mais dans le passé, un passé coloré empreint de magie où les animaux parlaient aux fées et les fées aux humains délaissés qu'elles transformaient en princes quand ne n'était pas le contraire. J'étais  très  jeune et n'envisageai pas d'autres dans le temps que ceux que je viens d'évoquer. Bien sûr les années  ont passé et cette idée  de voyager dans le temps m'a paru de plus en plus stupide ! Était-ce parce que je suis née dans les années soixante ? A cette époque, on nous disait d'être résolument tournés vers le présent : on avait reconstruit un monde sur les cendres de la guerre. Il ne fallait pas regarder en arrière et aller de l'avant avec réalisme. Voilà qui rendait inutiles toutes les machines à voyager dans le temps possibles et inimaginables. Avec elles, qu'aurait-on fait ? Revisiter  des pans entiers de l'histoire ? Non, vraiment, rien d'intéressant.
    Tout à suivi son cours. Je suis sortie de l'enfance et de l'adolescence et jeune femme, après mes études et mon mariage, j'ai eu trois enfants. Curieusement, ce thème de l'exploration du temps m'a de nouveau occupé l'esprit. Les utopies les plus surprenantes avaient déjà été construites sur un retour possible dans le passé ou le futur, utopies mêlant souvent analyse politique, psychologie, interrogation métaphysique et physique quantique. En continuant de traverser ma vie, j'ai vu surgir des formes d'expression plus riches encore et surprenantes : le roman, la bande dessinée et le cinéma en étant les vecteurs les plus sûrs. Je n'ai pas fermé mon esprit, bien au contraire. De la préhistoire, on pouvait sauter dans le vingt-cinquième siècle ! C'était tout un programme car il y avait aussi toutes sortes de témoignages sur ce type de voyage ! Des récits déroutants qui pouvaient laisser incrédules mais pas seulement.
    Mais malgré tout, je n'ai jamais fait le lien entre allers et retours dans le temps et vécu  individuel. Mon passé familial et personnel était contenu dans des récits bien définis, des photos, quelques vidéos ; et rien de plus. Ma conviction était ferme : ce que je savais des miens au passé était clair. Je n'avais rien à apprendre. Et de toute façon, même si j'avais pensé le contraire, dans quelle machine serais-je montée ? Et pour changer quoi?
    franceflamboyant le 08 mai 2023

    Et puis, tout a basculé . J'étais arrivée au milieu de ma vie, étais séparée de mon mari que la maladie avait frappé et qui végétait dans un hôpital lointain ; et je venais de voir partir mon dernier fils. La crise que je traversais me surprenait. Je m'étais toujours crue forte et honnête, à l'image de ma famille en somme. Mais une forte dépression m'a contrainte à penser différemment. Parce qu'à l'évidence, mon histoire familiale, que j'avais toujours estimée lisse ne l'était pas tant que cela. Elle comportait des zones d'ombre inquiétantes...
    Pendant ma maladie, seule et isolée  chez moi, je regardais souvent par la fenêtre et l'idée m'est venue que j'attendais quelqu'un... Un matin, j'ai très clairement vu  sur le trottoir d'en face une femme d'une quarantaine d'années, anachroniquement vêtue d'un tailleur gris perle, de bas couture et de chaussures à talons. Elle portait un chapeau à voilette et un renard sur l'épaule. C'était une tenue des années quarante, j'en étais certaine. Nous nous sommes regardées intensément, en silence d'abord ; puis l'inconnue s'est mise à parler. Je voyais les paroles se former sur ses lèvres, son regard était intense et elle agitait les bras, comme pour me convaincre de l'importance de qu'elle disait. Je n'entendais rien mais était fascinée. Cette femme grimaçante m'était proche...Je suis sortie pour aller à sa rencontre. Elle avait disparu. Mais j'avais compris une chose : le temps s'ouvrait.
    Qui était-elle ? J'ai mis longtemps à le savoir. J'avais l'intuition qu'elle appartenait à ma famille mais il n'y avait, dans celle-ci, aucune trace d'une femme comme elle. Alors, ayant son visage en tête, j'ai cherché...et trouvé. Il existe tant et tant de moteurs de recherche ! Et puis, j'avais de la suite dans les idées !  C'était ma grand mère maternelle, Odette Hesse. On ne parlait jamais d'elle. Je savais que dans les familles, il  arrivait  qu'on n'évoque jamais un aïeul car il avait été  particulièrement effacé, mais ce n'était pas  le cas de cette femme. Elle avait été une personne dure, je l'avais vu à la crispation de son visage et à sa bouche tordue. Ses paroles, que je n'avais pu entendre, étaient mauvaises.  Elle avait du avoir un rôle nocif et être  occultée volontairement.
    Fragile médicalement à cette époque, comme je l'ai déjà signalé, je voyais médecins et thérapeutes. Je n'ai pas osé évoquer cette apparition  avec eux mais ai senti l'urgence de le faire. L'adresse de Matthias Haenel a fini par me parvenir. Il pratiquait l'hypnose. Sa réputation était sulfureuse, certains le vénérant, d'autres le détestant. Ses pratiques n'étaient pas, à ce que je compris, orthodoxes. Je lui ai parlé il m'a écoutée puis m'a dit :
    -Madame, cette parente s'est trouvée soudain dans le même espace-temps que vous car elle voulait se signaler à vous. Vous n'avez pas capté son message car tel n'était pas le but. Elle vous donne rendez-vous.
    -Pourquoi ?
    -Elle vous était inconnue, vous me l'avez avouée. Votre famille tait son nom car elle a semé la discorde. Avec vous, elle s'est toujours tenue à distance mais désormais, elle veut le contact. Vous voulez en savoir plus après tout...
    -Elle va revenir, alors ?
    -Non.
    -C'est moi qui voyage vers elle ?
    -Vous le pouvez. C'est une prise de risque importante, cependant.
    -Car elle respire le mal ?
    -C'est certain. Pour ce qui est du voyage, sachez que ce n'est pas un transport classique...
    -De quoi s'agit-il ?
    -D'un transfert dans un temps qui n'est pas le vôtre. Ce n'est ni facile, ni naturel de faire un tel saut en arrière. Et plus malaisé encore dans faire un en avant pour revenir là où vous étiez. Vous pourriez rester bien plus longtemps que vous le souhaitez dans cet espace où vous voulez vous rendre et à cela, il y a plusieurs explications.
    -Je change de dimensions ?
    -Vous allez changer d'état de conscience. A un moment, vous serez vous et à un autre, vous serez elle. C'est cela qui rendra votre position difficile. Vous voudrez revenir puis non...
    Je ne comprenais pas tout de ce que Haenel me disait mais une chose était sûre, je n'allais pas lui résister. Il m'a donc hypnotisée. Enfin je pense car ça a été un très long rituel. J'ai traversé des distances infinies...
    Soudain, je me suis trouvée dans la peau d'une femme qui, à Bordeaux, menait grand train. Elle avait trente ans, deux enfants et de l'argent. La guerre se profilait sans qu'elle s'en inquiète : c'était une opportuniste. Tout se télescopait : Odette menait son mari par le bout du nez et avait le sens de l'argent. Elle était belle et coquette. Brusquement veuve, elle gardait son aplomb. J'étais elle dans un café parisien avec un avocat d'affaires qui la courtisait, puis elle encore au téléphone avec ses deux garçons qu'elle avait laissés à une parente dans le Bordelais où ils faisaient de bonnes études. La guerre arrivait : Odette ne sourcillait pas. Sous l'occupation, elle frayait avec l'occupant, faisait du marché noir, dénonçait des résistants. A la libération, elle retrouvait ses fils pour lesquels elle éprouvait soudain un engouement irrésistible. Cette fois, j'étais extérieure à elle, une sorte de double invisible. Elle flattait ses garçons. L'un s'est lancé dans la magistrature, l'autre dans la politique. Le politicien, que sa mère estimait, est mort brutalement à l'aube de sa carrière. L'autre, mon père, a vécu un peu plus longtemps, sans doute parce qu'il avait coupé les ponts avec son encombrante mère...Mais ça ne finissait pas ainsi : j'étais elle encore et encore. Elle restait en vie des années durant, faisant le mal, escroquant. Elle riait. Être dans sa peau lors de ces années soixante-dix puis quatre-vingt m'a épouvantée. J'étais vaniteuse, égoïste, raciste. Odette était cruelle au point de tuer...Je l'ai découvert.Et en même temps, j'ai su mort brutale. On l'avait étranglée chez elle. Un homme que jadis elle avait dénoncé...
    franceflamboyant le 08 mai 2023

    Au bout d'un temps peu quantifiable, je suis sortie de son orbite, ai échappé à son univers et ai réintégré le cabinet de Mattias Haenel. J'étais hors de moi ! A Certains moments, cette femme m'avait totalement fascinée. J'avais eu envie d'avoir son aplomb, son goût pour la vilenie ! A d'autres, redevenant moi-même, je m'étais défendue...
    -Que d'années passées avec elle ! Elle a détruit son mari, son fils aîné, mon père, dénoncé pendant la guerre, fait chanter plusieurs personnes !
    -Et vous savez donc...
    -Qu'elle est mauvaise ! Et que tout ce qu'il y a de difficile dans la famille de mon père et la mienne vient d'elle ! Et s'il n'y avait que cela ! Elle a tiré sur un pauvre homme qu'elle prenait pour un voleur !
    -Et c'est tout ?
    -Je demande réparation car elle a agi sciemment ! Les horreurs qu'elle a dites !
    -Réparation : vous faites bien.
    -Oui, mais voilà cette horrible grand-mère Odette est bel et bien morte et puis quoi ? Que suis-je supposée faire ? La tuer de nouveau ? On s'en est déjà chargé !
    Il a acquiescé.
    -Oui. Vous devez la faire disparaître.
    J'ai pensé à un meurtre mental. La suicider en parlant d'elle, provoquer une catharsis, mais mon thérapeute n'était pas de cet avis.
    -Elle vous hantera quand même, vous et les vôtres. Votre mari ne guérira pas, vos enfants seront atteints. Il faut aller dans le futur. Dans trente ans, une guerre meurtrière. Elle sera là, elle a toujours été là.

    De nouveau, il m’a hypnotisée et de nouveau j'ai traversé des espaces infinies, vu des couleurs indescriptibles et entendu des sons inconnus; puis j'ai  changé de monde. J'ai erré dans un pays lointain en décomposition. Tout était désolation.Soudain, je l'ai revue, elle!  Elle  était telle que je l'avais decouverte la première fois : le même tailleur couture, le renard, le chapeau à voilette. Elle était toujours aussi blonde, son sourire était toujours aussi dur. Elle était l'esprit même  de  la destruction, celui qui mine les soldats, les pères de famille, attriste les mères, meurtrit les enfants en leur offrant le spectacle d'une mort précoce...Mon mari était si malade qu'on n'évoquait plus sa survie. Notre fils aîné développait un cancer lui-aussi.
    -Odette Hesse ?
    Elle me regardait :
    -Tu n'es pas restée avec moi ! Tu m'as jugée! Tu es pitoyable, à  l'image de ta stupide famille qui ne parlait que de morale. Bon, comme tu le constates, les guerres font du bon travail ! Tu vois, cette ville derrière toi. Elle est déjà quasiment détruite et ses habitants anéantis. Il ne restera plus une famille debout ! Quelques enfants, quelques vieillards essaieront bien de s'en tirer ! La naïveté guide le monde. Elle te guide aussi, ma pauvre. Tu crois que tu peux me détruire car tu voyages dans le temps? Non, tu ne le peux pas.
     Elle a eu raison au départ car j'ai été elle, de nouveau, mais peu de temps puis j'ai  su qu'elle faisait erreur. M'extirpant d'elle, j'ai été soldat. Comme tous les autres, j'ai  porté un uniforme blanc ressemblant à un scaphandre et utilisé des armes qui  appartenaient à une technologie du futur dont on n'avait encore aucune notion.
    J'ai tiré sur elle dans le futur et suis restée soldat jusqu'à ce que je parvienne à redevenir moi. On la tuait encore mais cette fois pour de bon ! Elle le savait et en quittant la vie, elle a eu une grimace hideuse. Il m'a fallu me cacher car je n'étais plus guère qu'une voyageuse du passé dans un monde futuriste quasi-détruit. Il m'a fallut aussi lutter avec moi même pour me retrouver dans le cabinet de Matthias Haenel. Je m'attendais à des retrouvailles solennelles mais il m'a paru soudain vieilli ! Mon second voyage dans le temps avait été très long. Haeenel est mort brutalement, s'est volatilisé et a disparu de ma vue. Mon mari, guéri depuis longtemps  m'a retrouvée avec surprise ainsi que mon fils qui avait été malade et les deux autres enfants.
    Ma vie est différente.
    Concernant les voyages dans le temps que j'ai accomplis, je constate qu'ils m'ont changée. Je songe à faire d'autre incursions dans le passé et le futur.  Je ne souhaite plus désormais mettre fin à  une malédiction familiale mais voir plus grand ! Pour ce qui est des moyens, l 'hypnose, c'est bien, mais  je songe à acquérir unemachine à explorer le temps. Les Odette Hesse pullulent. Avec un engin sophistiqué, j'irais plus vite.
    Carolina78 le 08 mai 2023
    franceflamboyant  Je vais avoir de la lecture !
    Sflagg le 08 mai 2023
    Salut !

    Merci Snoopythecat.

    A+ !!
    Carolina78 le 08 mai 2023
    vibrelivre    C’est un joli conte philosophique sentimental qui met en scène Fru, un enfant ado rêveur, insouciant et fainéant. Il vient du Cameroun, n’aime pas l’école et, encore moins, dans une classe de blancs. Il fait son crâneur et affirme qu’il a une machine à remonter le temps.

    Le suspense est de la partie, et on se demande comment il va s’en sortir avec sa fanfaronnade.

    Beaucoup de poésie, avec différentes variations sur le thème de la voix comme :

    Ainsi, vous voulez remonter le temps, dit la voyante d'une voix pierreuse comme si elle venait d'échouer sur une plage, en avalant quelques galets, telle une sirène perdue.

    J’aime beaucoup.
    JML38 le 08 mai 2023
    Bravo vibrelivre pour cette approche du thème sous la forme d'un joli conte plein de poésie.
    Superbe.





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