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EAN : 9782710389668
272 pages
La Table ronde (03/01/2019)
4.3/5   2042 notes
Résumé :
"Au fil des heures et des jours le besoin d'écrire s'incruste tenace comme une arrête dans la gorge
Non la glauque de l'usine
Mais sa paradoxale beauté"

Ouvrier intérimaire, Joseph embauche jour après jour dans les usines de poissons et les abattoirs bretons. Le bruit, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps s'accumulent inéluctablement comme le travail à la ligne. Ce qui le sauve, ce sont l'a... >Voir plus
Que lire après À la ligne : Feuillets d'usineVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (426) Voir plus Ajouter une critique
4,3

sur 2042 notes
Sans point ni virgule, juste des mots les uns après les autres pour consigner ses pensées, les ordonner, rendre compte de sa réalité, et ne pas sombrer. Joseph Ponthus partage son quotidien d'ouvrier dans une conserverie de poissons et un abattoir breton. Jour après jour, à la chaîne. À la ligne.

À travers cette « monotonie lancinante », l'auteur interroge notre part de machine. Jusqu'où peut-on supporter l'aliénation ? Cette sensation instinctive que notre corps n'est plus qu'un objet auquel on demande des actions répétées, littéralement insensées et soumises à leur seule efficacité.

Jouant sur les mots, la répétition et la scansion, À la ligne, sous-titré Feuillets d'usine est plus qu'un poème, c'est un chant dédié « aux prolétaires de tous les pays, aux illettrés et aux sans dents ». Un texte original et vivifiant. À lire, forcément.

Retrouvez ma chronique complète sur Fnac Experts :
Lien : https://www.fnac.com/A-la-li..
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Un livre qui secoue, et pas uniquement parce qu'il chamboule la syntaxe habituelle, aucune ponctuation, des retours à la ligne comme dans une poésie, des vers libres sans rime.

Ce genre de procédé peut vite tourner à vide et sentir l'artificiel à plein nez , sauf que là, il prend une ampleur dingue en scrutant le quotidien à l'usine d'un intérimaire. Comme si l'usine dictait son urgence.

A la ligne donc pour chaque phrase.
A la ligne de production, l'autre nom euphémisant politiquement correct pour désigner le travail à la chaîne.
Chaque ligne pèse une tonne et revient sans fin, heure après heure, jour après jour avec son lot de souffrances, précarité, horaires délirants, aliénation du geste répétitif, corps maltraités, de la conserverie de poissons à l'abattoir.

L'usine comme une balle dans la gueule, comme une déflagration mentale et physique.
Une lutte des classes.
Une lutte tout court. Souvent l'auteur fait des parallèles avec la Première guerre mondiale, audacieux mais limpide lorsqu'on le lit.

Un récit autobiographique. Joseph Pontus écrivait chaque soir deux heures pour ne rien oublier des détails du quotidien. Pas un intellectuel à l'usine pour voir comment c'est, juste un homme qui n'a pas le choix s'il veut bouffer. S'en suis une chronique de l'usine dans laquelle l'humour a toute sa place, malgré tout, surtout malgré tout :

« Certains ayant vécu une expérience de mort
imminente assurent avoir traversé un long tunnel
inondé de lumière blanche
Je peux assurer que le purgatoire est juste avant le tunnel de cuisson d'une ligne de bulots. »

Une journal intime empli de poésie où on découvre que les souvenirs de vers d'Apollinaire, de Hugo, de Cendrars, des chansons de Trénet peuvent vous faire tenir dans l'adversité. Le manuel rejoignant l'intellectuel.
Un livre de fraternité même si le capitalisme a gagné. Des bonbons Arlequin Lutti que l'on suçotte avec «  les yeux ronds de la joie enfantine » pour fêter un anniversaire, parce que le patron en a plein dans son bureau.
Souvent bouleversant.

«  L'autre jour à la pause j'entends une ouvrière dire
à un de ses collègues
Tu te rends compte aujourd'hui c'est tellement
speed que j'ai même pas eu le temps de chanter. »


Tout aussi bouleversant que le passage à La Grande Librairie de l'auteur où il a dit avec classe et sincérité que lui, le chômeur ( les usines dans lesquelles il travaillait n'ont pas vraiment aimé son livre ), s'il devenait riche grâce aux livres, se referait les dents, parce que, les dents, ça coûte cher.
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Voila un livre hommage, un récit que j'attendais, un hommage donc que rend Joseph Ponthus à tous ces précaires, ces invisibles, ces sans grades comme dirait Michel Onfray.
Dans ce roman auto biographique on découvre grâce à la plume singulière de l'auteur un univers : L'USINE .
Un univers que je connais car j'y passe huit heures par jour depuis l'âge de vingt ans.
Des précaires j'en vois tous les jours, des ouvrières et ouvriers intérimaires.
Dans " A la ligne " Joseph Ponthus nous raconte son quotidien à l'abattoir et à la conserverie où il travaille. Levé à l'aube, la fatigue du corps, la peur du lendemain, des contrats au jour le jour selon les besoins de l'entreprise.
" A la ligne" est un roman atypique , un récit sans ponctuation, un livre qui s'écoute comme un slam.
Dans " A la ligne" rien n'est inventé ni exagéré, les cadences à tenir, les conditions de travail déplorables, j'ai même retrouvé des analogies comme regarder le ciel et respirer à plein poumon l'air du dehors après le pointage de fin de poste où alors chanter et siffler pour se vider la tête.
Après avoir lu ce livre vous regarderez autrement ces objets et cette nourriture qui sont notre quotidien, ces gens qui triment huit heures par jour pour approvisionner notre société de consommation sans la moindre reconnaissance.
Salutations à mes ami(e)s de galère, Pierre, Daniel, Abdel, Virginie, Yanis, Angélique, Marc et Robert…Que j'ai rencontré et celles et ceux que je rencontrerai.
Un livre que je vous recommande chaudement.
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Voilà un livre vraiment pas ordinaire ! Tout d'abord, Joseph Ponthus applique son titre en allant À la ligne très souvent, un peu comme dans des vers libres mais c'est une allusion directe aux travaux dont il parle, ces Feuillets d'usine que tout un chacun devrait lire pour se rendre enfin compte de ce qui se passe derrière les murs de ces établissements gourmands de main-d'oeuvre intérimaire.

Ensuite, il se passe complètement de toute ponctuation, ce dont je serais incapable mais cela n'a nullement gêné ma lecture, même lorsqu'il énumère des chanteurs, par exemple. C'est osé et c'est réussi !

« J'écris comme je pense sur ma ligne de production divaguant dans mes pensées seul déterminé
J'écris comme je travaille
À la chaîne
À la ligne »

Joseph Ponthus dont c'est le premier roman, aime écrire. Il le dit plusieurs fois mais explique sa situation : éducateur social, il a choisi de suivre son épouse en Bretagne et ne trouve plus qu'un remplacement chaque été pour exercer son métier. le reste du temps, il bosse là où on l'embauche, plutôt dans des conserveries et dans un abattoir.
Tout ce qui est écrit est vécu ou ressenti mais c'est en même temps un formidable tableau social de ce qui se passe dans ces usines qui emploient deux tiers d'intérimaires. de plus, l'auteur ne cache rien de ses souffrances physiques et morales, parle de ses rapports avec ses camarades de travail, des pauses sur lesquelles on rogne au maximum et des horaires sans oublier les problèmes de déplacement, fondamentaux quand on ne possède pas de voiture.
Il faut tenir, résister à la souffrance physique et passer ces heures interminables. Là, Joseph Ponthus a une force incroyable : sa culture, son amour et sa connaissance des auteurs, des chanteurs.
De temps en temps, il s'échappe du travail comme lorsqu'il se rend devant le monument aux morts sur l'île de Houat où est inscrit le nom de l'arrière-grand-père de son épouse, un homme qui a été tué au Chemin des Dames, en 1917. Avant de citer la formidable Chanson de Craonne, il écrit :

« Antoine le Garun
Marin pêcheur
Mort dans la Grande Boucherie
Dans la plus grande offensive inutile de la Grande Boucherie
Mais
Mort pour la France »

Ainsi, sans la moindre ponctuation, ce livre est un cri de souffrance, de douleur mais aussi d'amour et de foi dans le travail et la solidarité humaine. Ce texte a une force incroyable et devient un témoignage d'une terrible vérité lorsqu'il parle de son travail à l'abattoir. l'214 peut diffuser des vidéos mais les mots de Joseph Ponthus sont forts que les images les plus horribles.

Chaque semaine, dans Charlie Hebdo, Luce Lapin nous appelle à ouvrir les yeux et à voir les animaux comme des êtres vivants, comme nous, alors qu'ils sont abattus, découpés comme de la marchandise.

À la ligne rappelle aussi que l'homme sait si bien exploiter son semblable pour toujours plus de profit, quitte à détruire sa santé, sa vie familiale et abréger son passage sur Terre.

Dans la tête de l'auteur fourmillent sans cesse poèmes et chansons. Il invente des stratagèmes pour tenir, pour supporter la souffrance. Même les temps de repos sont pollués par l'idée de reprise du travail, ce travail tant désiré, tant recherché mais dont ce capitalisme qui règne en maître, organise la pénurie afin d'exploiter au mieux les ouvriers et de réaliser toujours plus de profits.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Atypique. Remarquable. Captivant.

Atypique, le récit. dans sa forme, des vers libres sans ponctuation, dont on oublie vite le caractère construit, emporté par le rythme du récit, qui se traverse sans difficulté, porté par une respiration en filigrane.
Atypique l'auteur, au parcours singulier, de la littérature, qui émerge au gré des citations et des références, au social, pour en arriver à un travail alimentaire qui sera la source d'un si bel écrit.

Remarquable, pour l'originalité de ces confidences, sans langue de bois, en appelant une chaine une ligne et un contremaître un conducteur de ligne, comme le veut le politiquement correct. La précarité au jour le jour, qui ne peut se permettre le coup de gueule et la grève. L'intérimaire est en première ligne, pour les retours de bâton.

Captivantes, les expériences successives, de la crevette au bulot, jusqu'à l'abattoir, et toujours les mises en scène lors des visites ou des contrôles, et pour fil rouge la fatigue, immense, qui pourrait saturer et anéantir tout le temps hors de l'usine. Et l'on se dit quel courage pour s'abstenir à tout de même écrire.

A la ligne , ou à la chaine, sans fin, sans répit, puisse ce superbe texte, donner la possibilité à l'auteur de sortir de cette existence aliénante.

Lien : https://kittylamouette.blogs..
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critiques presse (5)
LaLibreBelgique
05 juillet 2019
Scandée, ponctuée de blancs, jouant avec les mots, apparentée à la ligne claire, la langue de Joseph Ponthus emporte dès l’entame du récit, d’autant que de cette singularité naît une puissance d’évocation hors du commun.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Culturebox
28 février 2019
Premier roman de Joseph Ponthus, A la ligne (La Table Ronde) est le récit à la première personne d'une vie à l'usine, en intérim. Les cadences, le corps en souffrance, l'odeur, l'épuisement, mais aussi "la paradoxale beauté" de l'usine. Le jeune romancier déploie son texte comme un long ruban, comme une ligne de chaîne qui ne s'arrête jamais. Une claque.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Liberation
22 janvier 2019
Ancien ouvrier dans le secteur alimentaire, Joseph Ponthus a écrit un livre sans ponctuation qui se lit comme un long poème témoignant du quotidien à l'usine, de la pénibilité du travail et des divagations induites.
Lire la critique sur le site : Liberation
Liberation
22 janvier 2019
A la ligne, comme un cadeau offert à la femme qu’il aime, et comme un défi relevé en bonne et due forme [...] On n’a pas l’impression de lire des poèmes, malgré cette disposition dans la page. La lecture est fluide, elle correspond bien au sous-titre, Feuillets d’usine. Des feuillets arrachés à l’épuisement, pris sur la vie quotidienne.
Lire la critique sur le site : Liberation
LaCroix
18 janvier 2019
Ce texte orchestral, râpeux, révoltant face à l’orgie de besogne itérative, est à mettre entre toutes les mains – calleuses ou manucurées. Il y a dans ce chant un souffle poétique affranchissant, qui replace l’exploitation humaine et animale au centre de l’esprit public. Il était grand temps : et quel tempo grandiose !
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (439) Voir plus Ajouter une citation
L'autre jour à la pause j'entends une ouvrière dire à un de ses collègues
Tu te rends compte aujourd'hui c'est tellement speed que j'ai même pas le temps de chanter » Je crois que c'est une des phrases les plus belles les plus vraies et les plus dures qui aient jamais été dites sur la condition ouvrière
Ces moments où c'est tellement indicible que l'on n'a même pas le temps de chanter
Juste voir la chaîne qui avance sans fin l'angoisse qui monte l'inéluctable de la machine et devoir continuer coûte que coûte la production alors que
Même pas le temps de chanter

Page 193, La Table ronde, 2019.
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Je rêve de mes collègues titulaires bien au chaud dans leur lit qui seront sans doute respectés tout à l'heure quand ils se baladeront en cortège avec tous leurs drapeaux « CGT abattoir »
Un beau troupeau de grévistes avec la force de leurs bras et de leur regard
J'aurais été bien parmi eux à foutre un coup de pression aux flics devant la préfecture
J'aurais été si heureux d'être parmi ces « illettrés » que Macron conchie
De ceux qui ne bossent pas pour se payer un costume mais une polaire Décathlon vu le froid dans lequel nous bossons
D'être de cette force collective et de se marrer sur les fainéants qu'il présume que nous sommes
Eh Manu
Tu viendrais pas avec nous demain matin pousser un peu de carcasses qu'on rigole un peu

Page 175, La Table ronde, 2019.
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Certains ayant vécu une expérience de mort imminente assurent avoir traversé un long tunnel inondé de lumière blanche
Je peux assurer que le purgatoire est juste avant le tunnel de cuisson d'une ligne de bulots
Pourquoi donc continuer
Pour maintenir une production dont je n'ai rien à foutre
Pour tester mes limites
Pour me dire que le bulot n'aura pas ma peau mes bras mes reins mon dos et surtout mon crâne C'est la viande verte de mon cerveau qui tient
Qui tiendra

Page 105, La Table ronde, 2019.
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Quelques jours plus tard je file un coup de main dans une autre équipe
On me parle de son mariage
Ils voulaient se pacser mais avec la nouvelle loi c'est plus simple pour adopter s'ils se marient
Je souris tendrement
Je pense fort à Mme Taubira qui a eu si raison qu'un petit pédé ouvrier puisse avouer à l'usine
Fût-ce plus dur chez ses parents
Qu'il est gay
Qu'il a la loi pour lui
Et même s'il a dû en chier et que le bizutage dut être un peu raide
Ils vont se marier
Au distributeur de canettes je me prends un Perrier à la fin de ma nuit
Champagne

Page 44, La Table ronde, 2019.
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À l'usine
L'attaque est directe
C'est comme s'il n'y avait pas de transition avec le monde de la nuit
Tu re-rentres dans un rêve
Ou un cauchemar
La lumière des néons
Les gestes automatiques
Les pensées qui vagabondent
Dans un demi-sommeil de réveil
Tirer tracter trier porter soulever peser ranger Comme lorsque l'on s'endort Ne même pas chercher à savoir pourquoi ces gestes et ces pensées s'entremêlent
À la ligne

Page 16, La Table ronde, 2019.
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Vidéo de Joseph Ponthus
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Voici un livre qui va vous secouer, vous emballer, vous épater ! Car il est traversé de part en part par un souffle grandiose.
« A la ligne », premier roman de Joseph Ponthus est publié aux éditions La Table Ronde
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