Ce livre un bel et vibrant hommage à toutes ces femmes, dont la plus jeune avait seulement vingt ans, et qui ont toutes cru à l'amour. Qui ont toutes cru parfois à l'amour avec un grand A, mais qui ont toutes rencontré le diable.
Chacune a rencontré, sous l'habit du mari ou du concubin, un bourreau sans pitié, qui lui a fait endurer des pires souffrances, avant de la mettre à mort, parfois dans des conditions effroyables.
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Elles sont cent vingt-cinq personnalités et plus, des journalistes, des romancières, des comédiennes, des politiques, qui ont honoré la mémoire de ces autres femmes, celles qui sont mortes sous les coups impitoyables de leur conjoint, de leur concubin, de leur ami.
Toutes victimes de la folie et de la cruauté de ces bêtes innommables, de ces sauvages.
J'ai ressenti dans tous ces textes, du questionnement, des interrogations, de l'amertume, mais aussi de la colère et de l'indignation.
C'était parfois un grand cri de fureur qui était poussé et était écrit, comme l'hommage rendu à Hélène Bizieux par
Valérie Benaïm.
La journaliste écrit toute sa rage :
« Je refuse, tu refuses, il refuse, nous refusons, vous refusez, ils refusent. Non, non, non !
Hélène n'est pas cinq lignes dans une dépêche, Hélène n'est pas un féminicide de plus.
Hélène était une femme de chair et de sang, une mère aimante, une fille chérie, une soeur solaire, une amie indéfectible. »
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D'autres textes sont tendres, doux et poétiques comme l'hommage rendu à Laura Berthin par
Jessica Cymerman ou celui rendu à Sofya Rudeshko par
Laetitia Colombani, ou celui rendu à Ghylaine Beugnet par
Leïla Slimani.
J'ai beaucoup aimé la poésie de
Lilia Hassaine rendant hommage à Claire Fargeas.
D'autres textes m'ont beaucoup touché comme celui de
Julie Madar parlant avec justesse, attention et force de
Kristina Ràdy, morte d'avoir peut-être trop aimé.
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Mais ce livre émouvant, déchirant, ne contient pas seulement des hommages. Il collecte aussi des témoignages de magistrats, de philosophes et de docteurs.
Et
Sarah Barukh elle-même, qui est l'initiatrice de cet ouvrage collectif, y raconte aussi sa propre et terrible histoire.
Je m'interroge.. Je m'interroge qu'une épouse puisse rester aussi longtemps auprès d'un homme, qui ne cesse de l'humilier, de l'avilir, de la réduire et surtout de la frapper ?
La réponse du docteur
Muriel Salmona, présidente de l'association « Mémoire traumatique et victimologie » est édifiante.
Cette imminente psychiatre parle de « sidération », de victimes anesthésiées qui sont incapables de réagir et de se protéger de cette violence.
Mais je vous laisse découvrir tous ces mécanismes qui se déclenchent chez une femme confrontée à de la violence verbale et physique et à la puissance dévastatrice qui s'opère chez l'agresseur et futur assassin.
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A lire cet ouvrage collectif, c'est tout notre système qui est défaillant. Qui ne fonctionne pas pour protéger toutes ces femmes victimes de violences conjugales, celles qui entrainent pour les plus malheureuses, la mort.
Et c'est ce dysfonctionnement qui me révolte le plus, car nos élites ne me semblent ni motivées, ni efficaces et si peu intéressées pour y remédier.
Le féminicide est une calamité incommensurable, dont certains pays commencent à prendre seulement conscience de l'ampleur de ce fléau universel. Cette énorme et indigne tragédie qui dévaste tout sur son passage et qui plonge des familles entières dans le chagrin, les larmes et le désarroi celui d'avoir perdu une fille, une mère ou une soeur.
Une pensée aussi à tous ces enfants orphelins qui ont vu mourir leur maman devant leurs yeux et qui auront bien du mal à se reconstruire.