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EAN : 9782743635961
42 pages
Payot et Rivages (23/03/2016)
3.87/5   19 notes
Résumé :
Ecrit en 1942, ce petit texte s'interroge sur ce qu'il advient de la pensée et du rapport à soi dans la force des affects et de l'attachement à autrui.
Alliant une psychologie fine de l'attachement à autrui, une mystique du détachement et de l'amour désintéressé, et une philosophie du rapport à l'altérité, Simone Weil propose une réflexion sur la dimension relationnelle de notre existence et sur les contradictions auxquelles elle nous confronte.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
L'amitié…Idée, chose, concept, émotion... sentiment ?
En ces quelques pages, qui sont d'une très grande richesse, d'une incroyable densité, Simone Weil nous rappelle à l'ordre universel de l'âme, du coeur et de l'esprit.
Parlons en amitié, entre nous donc.
Puisqu'il ne peut se concevoir d'amitié sans un cercle.
Non resserré, l'amitié n'est pas un collet, un cercle qui doit au contraire tendre à s'élever et à s'élargir.
Amitié. Quelle belle parole. Quel mot extraordinairement difficile à définir. Ressentir oui. À se dire, c'est beaucoup plus sérieux.
"C'est mon amie", ..."voilà mon ami" .
Ce n'est pas rien. C'est un engagement. Pas une promesse. Un engagement.
Ces pages de Simone Weil sont extraites des « Formes de l'amour implicite de Dieu ».
Elles ont pour objet le devenir de notre pensée comme nous le rappelle Valérie Gérard dans sa préface.
« Devenir de notre pensée. »
Pensée d'amitié dans « la force des affects et de l'attachement à l'autre ».
Et c'est avec une netteté et clairvoyance de langage que Simone Weil taille devant nos yeux le portrait de l'Amitié.
Il faut tout d'abord, chasser le Mensonge. Mensonge qui tenterait de cacher la réalité de l'affect.
J'ai besoin de satisfaire un élan hors de moi pour rejoindre l'autre qui est extérieur à moi.
Je suis un être sociale, social, socialisant, socialisé. Mais si le rapport se ressert j' intériorise l'autre par exces, et l'élan se brise.

L'amitié s'étiole, s'étouffe, s'efface.
Ne pas reconnaître cette contradiction éternelle de l'amitié est un mensonge.

Donc lorsque l'on parle d'amitié il faut parler d'équilibre.
Il faut tendre à ce parfait équilibre, la bonne proportion des choses.
Puisqu'en réduisant l'autonomie ou au contraire en le revendiquant avec trop de force on risque de briser le cercle.

Équilibre des choses. On ne peut pas supprimer ces deux extrêmes on peut juste tenter de rester un merveilleux équilibriste.

L'Amitié. Ce sentiment divin.

« L'amitié est le miracle par lequel un être humain accepte de regarder à distance et sans s'approcher l'être même qui lui est nécessaire comme une nourriture ».

Oui effort, l'amitié réclame un effort d'équilibre. de distance.

Elle transforme, enseigne. Enseigne qu'il faut savoir s'arracher de ses propres affects pour ne pas transformer une amitié en fusion destructrice.

L'amitié. Sentiment de pureté.

Il n'y a pas de séduction en amitié. Plaire n'est pas un verbe d'amitié. Il n'y trouve pas sa place.
Plaire c'est convaincre d'une vilaine manière.
Il faut sans sens aller se confronter au monde et à ses contradictions.
Quite à se mettre en zone d'inconfort. Oui c'est parfois inconfortable de faire un effort. D'exiger la réalité. de reconnaître l' altérité et l'intégrité.
Faire la part entre la necessité et le besoin.

« la contradiction nous fait éprouver que nous ne sommes pas tout ».

Non nous ne sommes pas tout, ni pour soi, ni pour les autres.
Penser autrement serait monstrueux.
Nous ne sommes pas voués à être des monstres.

« le réel c'est essentiellement la contradiction.Car le réel, c'est l'obstacle, et l'obstacle d'un être pensant, c'est la contradiction. »

C'est la pensée qui nous faire passer les obstacles, elle ne les efface pas, ne les chasse pas.

Pour Simone Weil l'amitié est nécessaire et impossible à la fois. Tant le désir nous fait sortir de nous.
Mais on y tend, on y oeuvre, on y explore, on s'y exerce. Et c'est une joie. Une joie car malgré l'instabilité que provoque cet affect, et bien, le miracle se produit.

Un miracle de vie.

Tout est là pour que cela ne fonctionne pas, et pourtant , l'amitié agit. L'amitié agit et ouvre l'espace de la pensée. On grandit, on s'élargit. La pensée ne s'arrache pas des affects mais elle doit être disposé à se laisser affecter. Pas infecter, pas empoisonner.

Le vivant a le pouvoir d'être affecté.
Sans cela peut on parler d' âme ?…

Être sensible, être vulnérable, être imparfait, mais qui tend à rester en équilibre constant pour ouvrir sa pensée en toute liberté, et offrir, partager cette pensée en Amitié.

C'est ainsi que cette pensée peut fonctionner et si elle pose problème elle trouve réponse en elle même.
Car l amitié est une matière qui vit dans la réalité, et pour s'y maintenir elle force la pensée à bouger, à « sortir de ses cadres ».

L'amitié est le reflet de l'amour divin, une union des contraires, une harmonie.
C'est pureté et vérité également. La nécessité peut empoisonner une relation.La détruire.
Là où il y a nécessité il y a contrainte, domination, souffrance donc.
C'est un malheur.
Seul le miracle de l'amitié peut rétablir l'équilibre

« L'amitié est une égalité faite d'harmonie » disait les pythagoriciens.

L'amitié est beauté, c'est une clé de l'architecture du monde.

Sans amitié rien ne se construit. Et rien ne peut s'élever sans liberté.

« il y a égalité parce qu'on désire la conservation de la faculté de libre

consentement en soi-même et chez l'autre ». « Il n'y a pas d'amitié dans l'inégalité ».

Je pourrai résumer très schématiquement cette pensée :

1+1 = 3
et 1+1 =2

2=3

2 ne sera jamais un.

1+1+1=4 également et ainsi de suite, ainsi, ainsi de suite.

L'amitié est exponentielle comme l'univers.
Car c'est une loi universelle.
Deux amis ne forme pas un.
Ils sont toujours des êtres dissociés, ils sont toujours 1+1.
Le fait qu'il soit ensemble réuni en amitié fait n'être, apparaître une étincelle, une lumière, une intensité que l'on peut appeler divine.
Ils ne forment pas le couple, la paire, une entité fusionnelle, un monstre hybride, il ne s'imbriquent pas l'un en l'autre, il ne s'entre dévore pas.

Non. Il sont 2 et 3 à la fois. Et le 3 c'est justement le miracle.

La présence de ce miracle.

« L'amitié a quelque chose d'universel. Elle consiste à aimer un être humain comme on voudrait pouvoir aimer en particulier chacun de ceux qui composent l'espèce humaine.
Comme un géomètre regarde une figure particulière pour déduire les propriétés universelles du triangle, de même celui qui sait aimer dirige sur un être humain particulier un amour universel »

Cette vision est d'une puissance , d'une force extraordinaire !

Simone Weil était une des intelligences les plus remarquables et indispensables à l'humanité.

Elle était philosophe. . Elle est venue en Amitié.

Elle est à présent la bienvenue pour l'éternité.

Cette lecture je l'adresse à mes amies et amis que j'aime, et à tous ceux que je rencontrerai demain.
Qu'il me soit pardonné parfois mon manque d'effort mais qu'il me soit reconnu ma tentative constante d'équilibre.
Cette dernière surpassant le premier, je crois que le miracle ne cessera jamais de se réaliser.
Et je vous rassure je n'ai nul nécessité et nul besoin d'écrire cela. et comme je reconnais notre altérité, je vous assure que vous n'avez nul besoin ni aucune necessité à lire tout ce que j'écris là.

La route n'est pas droite, il y a des creux, il y a des bosses, mais Dieu que la route sait nous rendre beaux surtout lorsque les philosophes éclairent notre chemin d'une si puissante façon.

Simone Weil fut une militante engagée, une très grande humaniste,
une femme qui a toujours su s'indigner.

09.2016
Astrid Shriqui Garain
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Peu de pages, mais un livre qui suscite la réflexion, tant par l'introduction de Valérie Gérard, que par le texte de Simone Weil (en fait des extraits d'un de ses ouvrages).

On y trouve quelques belles formules. par exemple: "l'amitié est une harmonie surnaturelle, une union des contraires".
De même au fil des pages, des éléments de définitions de l'amitié émergent: bienveillance, autonomie, compassion , gratitude, lien, réciprocité, respect de l'autonomie...

Mais les questionnements sont puissants:
- l'amitié est toujours intéressée: "la préférence personnelle à l'égard d'un être humain déterminé peut être de deux natures. Ou l'on cherche un certain bien, ou on a besoin de lui"
- "bien qu'elle soit un lien entre deux personnes, l'amitié a quelque chose d'impersonnel"
- "du fait que le désir de plaire et le désir inverse sont absents de l'amitié pure, il y a en elle, en même temps que de l'affection, comme une complète indifférence"
- le plaisir de penser comme l'ami est une atteinte à la pureté de l'amitié

L' ampleur de ses questionnements amène, une fois la derniére page lue, à se poser la question: finalement, tout ceci doit il nous amener à conclure que l'amitié n'existe pas, ou, plutôt, ne peut exister?
Heureusement en fin de son introduction, Valérie Gérard, évoque un "équilibre instable", "un jeu précaire" comme envisageable : ce chemin semble bien étroit.
J'espère que quelques lectures complémentaires me permettront de le lui donner une ampleur plus cohérente avec mon pressentiment!
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Ce court fascicule nous livre la pensée de Simone Weil sur l'amitié "pure", quand deux êtres humains, chacun parvenant à aller au-delà du besoin qu'il a de l'autre, souhaite à la fois conserver son libre-arbitre et que l'autre le conserve aussi.

Très court et très clair.

Mais je ne résiste pas à l'anecdote : j'ai pris ce livre à la médiathèque car je voulais lire un livre de Simone Veil dans le cadre d'un challenge. Et oui, honte à moi pour huit générations - au moins ! - j'ai donc confondu lamentablement Simone Weil et Simone Veil... et je n'ai réalisé ma bévue - circonstance aggravante :) - qu'au moment de rédiger ces lignes. Gloups !
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Petit livret extrait des Formes de l'amour implicite de Dieu
Très joli petit ouvrage qui ressemble plus à un lettre qu'à un essai. Se lit en 1 heure ou deux ...
Simone Weil y développe pas à pas ce qu'elle pense être le sentiment de l'amitié, à ne pas confondre selon elle, avec d'autres formes de sentiment et notamment le sentiment amoureux. L'auteur cerne avec beaucoup de conviction ce qui selon elle participe du sentiment amical et ce qui n'en fait pas partie. J'ai beaucoup aimé et le dénouement m'a paru vraiment convaincant. On aimerait avoir eu Simone Weil pour amie !
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Quand quelqu'un désire se subordonner un être humain ou accepte de se subordonner à lui, il n'y a pas trace d'amitié. (p. 35)
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Si d'un des deux côtés toute bienveillance est entièrement absente, l'autre doit supprimer l'affection en lui-même par respect pour le libre consentement auquel il ne doit pas désirer porter atteinte. Si d'un des deux côtés il n'y a pas respect pour l'autonomie de l'autre, celui-ci doit couper le lien par respect de soi-même. (p. 36)
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Il est impossible que deux êtres humains soient un, et cependant respectent scrupuleusement la distance qui les sépare, si Dieu n 'est pas présent en chacun d'eux. Le point de rencontre des parallèles est à l'infini.
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L'Amitié est le miracle par lequel un être humain accepte de regarder à distance et sans s'approcher l'être même qui lui est néccessaire comme une nourriture. S. W.
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