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EAN : 9782840460084
208 pages
In Fine éditions d'art (01/10/1992)
4/5   5 notes
Résumé :
Automne à Budapest est un livre inouï. A ma connaissance, c'est le premier livre publié à Budapest qui ose dire clairement que la révolution de 1956 a été voulue, crue, combattue, assumée par l'écrasante majorité du peuple hongrois : la plupart des jeunes, des étudiants, des ouvriers, des intellectuels, des membres du parti, des soldats. C'est le premier livre dans lequel Imre Nagy, le Premier ministre exécuté de la révolution, non seulement n'est pas couvert d'inve... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Octobre 1956 : la population de Budapest se soulève contre les Soviétiques qui sont au pouvoir depuis la fin de la seconde guerre mondiale.
Gyuszi, directeur de la Maison de la Culture, se précipite vers la Maison de la radio, encerclée par la foule, tandis que sa femme Kati, médecin chirurgien, est retenue à l'hôpital où affluent de nombreux blessés. Ce n'est pourtant pas pour cette dernière qu'il est inquiet, mais pour une certaine Olga, actrice, rencontrée quelques mois plus tôt lors d'une brève aventure amoureuse, et qu'il n'a pas oubliée...Et il a bien reconnue sa voix à la radio...

Dans la confusion des évènements qui nous ont narrés avec réalisme et objectivité, cet homme oscillant entre deux femmes est à l'image de son pays pris entre un désir de liberté et la menace des chars, l'appel à la fraternité et le désir de vengeance, le refus du passé et l'interrogation face à l'avenir.

Malgré le sang qui coule, la présence de la Brigade de la Sûreté d'Etat, le combat doit continuer, même si l'irréparable doit être accompli, le père mis à mort pour que le fils installe une société plus juste. Gyuszi refuse la violence comme l'oppression. Il choisira l'exil.

Un très beau texte, qui nous fait découvrir cet épisode de l'histoire de la Hongrie, moins connu que le Printemps de Prague, et la figure d'Imre Nagy, premier ministre qui sera exécuté en 1958 pour avoir soutenu la démocratie, premier pas d'un réformisme qui aboutira à la chute du régime en 1989. Et qui nous rappelle que rien ne peut justifier la sauvagerie ni la vengeance aveugle.
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A l'automne 1956, la majorité des hongrois s'insurgent contre le pouvoir en place dans leur pays et contre le joug soviétique dont ils veulent se libérer. Ils aspirent à un socialisme réellement démocratique. (« Ne peux être libre un peuple qui opprime d'autres peuples. ») Karl Marx.
L'insurrection contre le régime soviétique aura débuté le 23 octobre 1956, par une manifestation étudiante, et elle sera écrasée dans le sang le 4 novembre suivant, par les chars envoyés par Moscou.
Le héros dénonce les énormes inégalités qui existent entre les gens au pouvoir dans son pays et les citoyens lambdas : « … les camarades grosses légumes : ils ne payaient pas de loyer pour leur villa de luxe. Ils s'habillaient, se chauffaient, s'éclairaient à l'oeil ; pour leurs rejetons un jardin d'enfants spécial et l'exclusivité de l'école Gorki, une épicerie réservée rue Fö, où ils bénéficiaient de produits introuvables partout ailleurs tels oranges, bananes et autres délicatesses. »

Ce roman de Ferenc Karenthy, est écrit sous une forme journalistique.
On vit au jour le jour avec le héros, au coeur de l'insurrection, et sur le qui-vive avec lui dans la confusion des événements.
Son nom est Gyula, il est membre du parti communiste, et dirige une maison de la culture.
Il a perdu sa mère, tuberculeuse, alors qu'il n'avait que 4 ans. Son père, colonel de gendarmerie, excessivement autoritaire envers lui, a été injustement emprisonné pendant 10 ans (par le régime communiste, parce qu'il avait été anobli pour service de guerre par un gouvernement précédent).
Gyula est marié. Sa femme Kati, a vécu dans un milieu modeste, mais est devenue chirurgienne.
L'insurrection est violente, dans les rues c'est la désolation et la dévastation partout, et Kati recevra à l'hôpital beaucoup de blessés, souvent dans un triste état !
La vie sentimentale de Gyula est mouvementée : il a une liaison avec Olga, une comédienne.
Il devra d'ailleurs par la suite l'avouer à sa femme… Et celle-ci lui demandera de faire au plus vite la séparation d'avec cette Olga !
Au quotidien, le héros écoute les flashs radios - infos/intox des communiqués – (« fallait-il croire le Ministère de l'Intérieur disant que les forces armées avaient pour l'essentiel liquidé les bandes contre-révolutionnaires ? »)
Il lit la presse, et s'informe et rejoint les groupes de jeunes combattants armés.
Les insurgés ouvrent les cellules des prisons et libèrent les innocents prisonniers politiques. le héros y participe et arrivera à libérer son père, dont ensuite il perdra la trace…
Les chars russes stationnent sur les ponts qui enjambent le Danube. Budapest est coupée en deux.
Les AVO (policiers de la Sûreté de l'Etat) qui protègent le Parlement tirent sur la foule venue manifester sur la place, y compris sur des enfants. C'est un véritable carnage qui fera des milliers de blessées et des centaines de morts !
En province aussi il y a de nombreuses émeutes et le sang coule…
Des tracts passaient de main en main, qui appelaient à la grève générale, exigeaient une nouvelle armée révolutionnaire, un gouvernement provisoire, le retrait immédiat du Traité de Varsovie, la liquidation des Services de Sûreté de l'Etat…
Les statues de Staline étaient déboulonnées… Sur les drapeaux hongrois avaient été découpés les symboles communistes (le marteau et la faucille). Les ouvrages idéologiques du Parti, de Lénine, les romans d'auteurs russes, étaient jetés dans les rues et brulés, les portraits du stalinien Matyas Rakosi aussi (séculaire général du Parti communiste hongrois et 1er ministre en 1952/1953).
L'ancien Président, Gerö, était éloigné et c'est Imre Nagy, qui prenait la relève. Lui, c'était un progressiste. Il organise la résistance en Hongrie occidentale.
Imre Nagy veut mettre en place une politique neuve, un socialisme à visage humain, démocratique.
Il appelle au calme (« le nouveau gouvernement aurait beaucoup à faire : satisfaire les revendications démocratiques et nationales de notre jeunesse et du peuple des travailleurs, apporter une solution aux problèmes économiques, l'amélioration du bien-être. Tout cela nécessitait du calme et de l'ordre, pour que parents et enfants, conjoints et amoureux puissent enfin se retrouver, pour que le travail reprenne et que les troupes soviétiques soient retirées de Budapest. »)
Imre Nagy décrète un cessez-le-feu. A partir de là, tous espèrent que le pays va pouvoir devenir une vraie démocratie et que les russes vont repartir chez eux…
C'est d'ailleurs ce qu'annonce Imre Nagy dans son discours officiel au peuple !
Les jours qui suivent, beaucoup sont encore armés, au sein de la population et certains voudraient rendre justice eux-mêmes (règlements de compte personnels, vengeances individuelles, …). le moment est dangereux pour le héros (qui est encore membre du Parti communiste) et pour son père (qui aurait été l'auteur d'exactions dans sa carrière à la gendarmerie).
Un recrutement est organisé, afin de créer une garde nationale avec des participants fiables. le héros, qui bénéficiera de soutiens bienveillants sera d'accord pour en faire partie…
Les AVH (Brigade de Sûreté de l'Etat), au nombre de 600, se sont enfermés au Siège du Parti.
Ils ne reconnaissent ni la dissolution du Parti, ni le nouveau gouvernement.
Ils tirent encore sur la population, alors que la garde nationale est en cours de constitution.
Heureusement bien dirigés et armés puissamment, les combattants de la garde nationale pourront tirer sur le Siège du Parti et débusquer les derniers AVH et les faire prisonniers.
C'est à ce moment que réapparaît le père du héros. Il somme son fils de lui livrer un des prisonniers AVH. Mais son fils refuse. Il ne veut plus se soumettre à l'autorité déplacée de son père.
Le père tire quand même sur le prisonnier qui aurait dû être interrogé. Il l'abat froidement.
Alors le héros tue son père qu'il a toujours trouvé trop injuste et qu'il avait fait souffrir durant toute son enfance (il avait même été fouetté par lui alors qu'il avait déjà 17 ans) !
Le calme était revenu, semblait-il, mais les chars russes qui étaient partis du centre de Budapest « s'étaient simplement terrés tout autour de la ville ».
Et puis, les chars russes réinvestissent Budapest en masse…
A la fin du livre, le héros énonce chronologiquement tous les faits politiques marquants qui se sont succédés depuis 1945 en Hongrie, pour dire que jamais rien ne sera épargné aux hongrois !
Les appels à l'aide à l'Occident, de Imre Nagy (alors Président du Conseil des Ministres de la République Populaire Hongroise) ne servirent à rien. La Hongrie appartenait au bloc de l'Est selon les accords de Yalta et de Téhéran. Aucune nation occidentale n'enverra ses forces dans ce conflit !
Cette répression aura fait 2 800 morts et 12 000 blessés dans les rangs hongrois, et aura provoqué la fuite à l'Ouest de 200 000 hongrois.
Le héros, qui est foncièrement non-violent et qui refuse l'oppression, choisira l'exil (en dernière page du roman, il écrit à sa femme depuis le Mexique).

Je tiens à remercier Sachenka, qui m'avait conseillé cet auteur !
Une très belle lecture instructive, rythmée, où se marient bien les faits historiques et les valeurs du héros : fraternité, goût pour la justice, profond désir de liberté, refus du passé, interrogation face à l'avenir.
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Une seule période de l'histoire hongroise peut être évoquée avec un titre comme Automne à Budapest : la révolution de 1956 (23 octobre – 10 novembre), achevée par la capitulation de la résistance hongroise devant les forces soviétiques et ses milliers de victimes. Ferenc Karinthy décrit l'insurrection de l'intérieur. C'est Gyula qui raconte, un trentenaire que seule l'attirance pour une actrice en vogue mêle aux événements. Ses descriptions de la situation sont dénuées de parti pris et éclairées par des extraits de discours radiographiques : le roman pullule de citations politiques de l'époque. La justesse des mots est telle que le lecteur vit la tragédie en direct, suit les mouvements de la foule et les élans d'espoir et de désespoir, aussi perdu que les protagonistes lorsque les chars soviétiques finissent par tirer sur le peuple. Ecrit en 1982 soit une décennie avant la perestroïka, il est bon de rappeler aujourd'hui que ce roman ne manque pas d'audace ni son auteur de courage à l'époque.
"La bataille faisait rage. A l'angle de la rue Kenyermezö, débouchant sur la place, se trouvait un internat pour étudiants slovaques, déjà occupé par les assiégeants ; de là un cocktail Molotov partit vers la maison du parti en face. le jeune rouquin, le visage couvert de taches de rousseur, en pull mauve, qui l'avait lancé, fut touché aussitôt par une balle tirée de l'autre côté, il s'écroula dans un cri. Mais son geste se révéla efficace ; bientôt des flammes sortirent des fenêtres de l'étage. D'après les bruits d'impacts, des projectiles venaient aussi du côté opposé, depuis l'avenue Rakoczi, des toits des immeubles ; ainsi l'édifice semblait complètement encerclé. Alors le char se mit à avancer, à envoyer quelques tirs en biais vers le haut, puis se retira ; ses projectiles firent tomber la façade, déjà enlaidie par les impacts de balles, sur un tronçon considérable."
L'intérêt du roman ne s'arrête pas là. Ferenc Karinthy profite de l'hésitation du personnage principal entre sa femme et sa maîtresse pour dresser un passionnant portrait de la société hongroise de l'époque. La femme de Gyula, issue du monde paysan, a brillamment réussi ses études de médecine ; devenue chirurgien, elle consacre les jours noirs de l'automne 1956 à sauver les blessés. La maîtresse du même Gyula est également originaire du milieu rural. Devenue actrice, à travers son portrait, l'écrivain hongrois décrit le milieu du showbiz dont il connait bien les ficelles. Les femmes et les classes pauvres sont les vraies gagnantes du régime communiste. Abolition des privilèges, réelle égalité des chances quel que soit le sexe, c'est à travers les héroïnes de l'histoire que l'auteur démontre quelques bienfaits du communisme. Soixante ans plus tard, que reste-il de cet équilibre qui semblait si naturel ? Dans notre monde moderne, les gouvernements sont obligés de légiférer pour tenter des semblants d'égalité dont les résultats positifs ne sont visibles que dans les pourcentages d'hommes et de femmes sur les listes électorales. Et encore.
Vous l'aurez compris, ce roman est vibrant de réalisme. Pour tout français qui souhaiterait un peu mieux connaître les événements de Budapest en 1956, il est une pièce de choix.
Lien : https://akarinthi.com
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Le livre se passe en 1956, pendant les fameux événements. le personnage principal, Gyula, fait parti du parti communiste, un peu par opportunité, un peu à cause de convictions d'avant et de pendant la guerre. Il travaille dans un centre culturel. Et il assiste, et participe un peu, à ce qui se passe dans sa ville. L'insurrection, les cahots politiques annoncés à la radio, les réactions à l'étranger. Tout en étant partagé entre sa femme, Kati, qui est médecin, et une jeune actrice avec qui il a plus ou moins une liaison.

Les événements historiques sont vus de loin, pas vraiment exposés. En partie à cause de la date de l'écriture et de l'édition de l'ouvrage. Mais sans doute aussi par choix. Gyula est ballotté, il est plus spectateur qu'acteur, et là souvent un peu par hasard. Ce n'est pas pour autant qu'il est indifférent, mais les choses sont complexes, et il est difficile de savoir ce qui est juste de faire. C'est très précis sur les détails, tout en étant impressionniste.

Cela permet de bien s'identifier à ce personnage ordinaire, entre ses soucis de famille, ses convictions, ses désenchantements. Et la complexité d'une situation que personne ne maîtrise vraiment. Une façon sensible de participer à un moment historique, différente de celle de livres d'histoire, beaucoup plus proche de celle de n'importe qui qui se serait trouvé là à ce moment.

C'est une lecture prenante, pour mieux en profiter, il vaut quand même mieux connaître un peu le contexte historique décrit.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je mis la radio plus fort, un communiqué annonçait justement : "...Le rétablissement de l'ordre dans la capitale avance à un bon rythme, toutefois certains éléments irresponsables n'hésitent pas à semer le trouble et à tirer des coups de feu, c'est pourquoi la population est invitée à ne pas sortir dans la rue, sauf si cela est absolument nécessaire..." A cette dernière phrase Olga sursauta :
- Bien sûr que nous sortons dans la rue ! C'est absolument nécessaire !
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Les héros de 1956 (...) se sont battus pour tous ceux en Europe et dans le monde qui vivaient dans une dictature.
(Déclaration du Président de la Commission Européenne José Manuel Durao Barroso)
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La révolution de 1956 a jeté les bases de l'Europe élargie d'aujourd'hui (…) nous devons tous être reconnaissants envers le peuple hongrois.
(Déclaration du Président de la Commission Européenne José Manuel Durao Barroso)
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La liberté est invincible, l'humanité est née pour être libre.
(Message de la révolution de 1956)
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Naître libre est un cadeau, mais vivre libre est une responsabilité.
(Déclaration de la liberté,1956)
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