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EAN : 9782070136858
152 pages
Gallimard (12/01/2012)
3.31/5   31 notes
Résumé :
« Quand il nous arrive de dire "C'était mieux avant", sommes-nous des passéistes en proie à la nostalgie d'une enfance lointaine, d'une jeunesse révolue, d'une époque antérieure à la nôtre où nous avons l'illusion qu'il faisait bon vivre ? À moins que cet avant ne soit un hors-temps échappant au temps des horloges et des calendriers.
Je me refuse à découper le temps.
Nous avons, j'ai tous les âges. »
J.-B. Pontalis.


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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Avant, ce n'est pas un livre sur comment c'était, avant. C'est d'abord une tentative d'explication de la mémoire, de ce qu'elle conserve ou jette, de ce qu'on peut lui soutirer et de ce qu'elle refuse de rendre.
J.B. Pontalis étant psychanalyste, il l'envisage donc sous le prisme de Freud, de l'association libre, de la répétition : « L'inconscient ne devrait-il pas s'appeler Mémoire ? »
Comme je ne connais rien à Freud et à ses théories, que la psychanalyse m'indiffère, trouvant que j'ai assez à faire avec ce que ma mémoire m'offre de clair sans devoir aller chercher ce que j'ai oublié, le discours de Pontalis, quand il n'est pas complètement de l'hébreu, ne me passionne pas.

Mais « avant » ne va pas sans les questions que posent le temps, la contemplation du présent, l'origine. « D'où je viens, moi ? Aucune réponse ne pouvait nous satisfaire : ni celle des fables racontées par les adultes, la cigogne autrefois, la petite graine aujourd'hui, ni la « scientifique », également incroyable : entre la rencontre aléatoire d'un spermatozoïde et un ovule et moi, le hiatus décidément est infranchissable. »

« Avant » c'est aussi ce temps auquel J.B. Pontalis est très attaché, semble-t-il : celui de « l'infans », celui de l'enfance qui n'a pas les mots, mais qui voit, entend, perçoit. le temps d‘avant le langage. Ce temps qui est, selon J.B. Pontalis, d'une richesse dont nous perdons beaucoup en apprenant une langue limitée, incapable d'en restituer la palette, les nuances infinies. Celui dont l'analyse – dit-il - peut mettre à jour et mettre en mots des réminiscences.

Et puis – chapitre suivant - J.B. Pontalis étend le domaine de l'infans au Je, quel que soit son âge, le Je caché par le Moi que nous donnons à voir, aux autres et à nous-mêmes. Si j'ai bien compris...

Le rapport avec « Avant » ? Peut-être que ces Je, autant que ces Moi, ont fluctué toute leur vie durant. Difficile alors de savoir si nous étions tout à fait les mêmes ou un peu beaucoup autres, avant...

Cet ouvrage-là doit parler très bien à tous ceux qui connaissent sur le bout des doigts, le Freud et son langage. Quant à moi, je (Moi et Je bien d'accord) suis restée souvent au bord du chemin.

Mais la lecture en valait la peine pour quelques souvenirs de Pontalis, savoureux, ou certaines pensées, moins ésotériques que ses théories psy, que j'aurais été pourtant bien en peine de verbaliser.
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Ce recueil de textes interroge notre rapport à notre passé : notre enfance, notre adolescence, bien sûr ... mais aussi (surtout ?) la présence en nous de l'infans, cet être d'avant le langage. le psychanalyste J.-B. Pontalis utilise pour cela différentes approches (l'énumération à la Pérec, l'abécédaire...) ou différents points de vue (le regard du peintre Odilon Redon ou celui de Caspar David Friedrich, une nouvelle De Balzac, des récits anonymisés d'analysants, sa propre expérience de psychanalyste...). Plus proche de la narration sensible de Proust que de l'analyse cartésienne de Freud ou des aphorismes lacaniens, cet ouvrage est une belle occasion de nous interroger à notre tour sur la place de notre passé dans notre vie quotidienne.
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Il y a quelque chose de présomptueux à vouloir commenter l’ouvrage de l’un des grands psychanalystes et écrivains français récemment disparu, J. B. Pontalis.

Mi souvenirs et lectures personnelles et mi essai sur des questions comme celle du temps, de la mémoire, de l’origine et du langage, cet ouvrage polymorphe s’ouvre d’abord sur une phrase qu’on entend fréquemment dans les conversations : « c’était mieux avant ». Une phrase banale, commune, qu’on entend souvent en France, et que l’auteur fait suivre d’une litanie de souvenirs « mieux avant » à la mode d’un « je me souviens » de Perec. A partir de ces évocations personnelles, le psychanalyste et écrivain s’interroge : « est-ce de la nostalgie ? éprouve-t-on des regrets » ? Sans trancher le débat entre les partisans d’un présent qui apporte son lot de progrès et un passé qui paraît plus reluisant, l’auteur prolonge sa réflexion sur le temps, celui qu’on cherche et qu’on découpe en tranches, et sa lancinante question « c’était quand déjà ? le jour où… ».

Le pendant de ce « c’était mieux avant »., on le trouve page 123 : « De celui qui déclare d’un ton péremptoire : « Moi je pense que… », vous pouvez être certain 1. qu’il ne pense pas, 2. qu’il revendique un jugement qui lui serait propre alors qu’il exprime l’opinion l plus commune dont il se fait l’écho à son insu, 3. qu’il est si peu assuré de son existence qu’il met en avant Moi et, pour faire bonne mesure, l’accole à Je. Il n’y a pas plus vantard, plus inconsistant et plus conformiste que cet homme-là. »

Fin connaisseur des comportements humains, JB Pontalis revisite plusieurs concepts à l’aune de son expérience de psychanalyste.

Son deuxième chapitre s’intitule Oublieuse mémoire. « Mon lieu d’archive est ma mémoire » explique celui qui ne garde presque rien, hormis des photographies du passé :
« Ma mémoire serait-elle une plaque photographique où l’éphémère et l’intemporel ne font qu’un ? où l’absence n’est pas l’opposée de la présence ? ». JB Pontalis porte la réflexion sur la mémoire fragmentée et distendue. Peut-on par exemple, comme le cherche Michelet, croire à la « résurrection intégrale du passé » ? Peut-on s’approprier ce temps où nous n’étions pas nés ? Et comment différencier les souvenirs des traces du passé ?

Réminiscence, remémoration, répétition, traces, l’auteur mêle ses souvenirs personnels d’analyste et une réflexion éclairée sur des notions qui intéressent l’analyse comme la littérature. Et ce qu’il y a de bien avec lui c’est qu’il ouvre plus de questions qu’il ne tranche définitivement ces questions essentielles.

Citant Barthes ou Perec, il fait le point sur ce que l’on sait aujourd’hui de la mémoire, en citant aussi Borges et son étrange personnage Irenas Funes, qui possède une mémoire incapable d’oublier. « Il est absolument impossible de vivre sans oubli » dit Nietzsche.

Un chapitre complet est consacré à Freud et les mémoires, et pose la question suivante : « L’inconscient ne devrait-il pas s’appeler Mémoire ? ». Le psychanalyste explique que Freud se refusait d’édifier une théorie générale de la mémoire et s’interroge sur notre mécanisme de sélection.

Mais l’écrivain ne se cantonne pas à son domaine : il connaît aussi la peinture, avec Odilon Rodon qui voyait en l’art comme « une petite porte ouverte sur le mystère », avant d’évoquer cette très belle formule, à propos de Caspar David Friedrich : « mettre la logique du visible au service de l’invisible » .

Difficile de tout dire tant ce recueil foisonne de réflexions intelligentes et de questions pertinentes. Mentionnons pourtant un abécédaire très amusant qui compulse toute une série de citations sur ce que peut être cet « avant » : « Avant, pour tout un chacun, c’est son enfance ». Et de très nombreux écrivains se sont penchés sur cette période : de Racine à Philippe Forest, en passant par Jules Renard, Victor Hugo ou Jean-Paul Sartre : tout un inventaire de fragments sur le thème de l’enfance qui parlent surtout de celui qui a choisi ces extraits.

« Il y a une espèce d’alliance, de pacte secret entre les deux disciplines (psychanalyse et écriture), qui ont le même objet – éclairer les soubassements de l’âme humaine – et sont tissées du même matériau – la parole humaine », explique l’auteur de Avant dans un dernier entretien accordé au Point. « A l’image du lecteur qui chemine avec l’auteur, l’analysé et l’analyste avancent ensemble dans le noir, sur une terre inconnue. Une analyse qui ne vous fait pas un peu vaciller dans votre propre identité ne fonctionne pas. »

Une phrase dans laquelle on pourrait remplacer le terme « analyse » par « littérature » et qui en donnerait alors une très belle définition.

Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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En forme de lettre de gratitude

Cher JB,
Ne m'en veuillez pas de cet en-tête familière, je ne sais trop comment vous nommer, Monsieur me semble un peu cérémonieux, sérieux et impersonnel mais surtout ne dit rien de cette affection que je vous porte depuis que je vous lis. Et puis, je ne sais pourquoi, JB me parait intemporel et lorsque je prononce à haute voix les initiales de votre prénom, je sens naître aussitôt un sourire sur mes lèvres.
Il me semble que je vous ai abordé par « l'amour des commencements ». Ce qui est étrange, c'est que je suis bien incapable de dire ce que racontent vos livres. Vos livres me sont comme une petite musique que j'aime à réentendre régulièrement. Ils me plongent dans un état de rêverie dans lequel je me ressource, je sens comme une parenté entre votre voix singulière et celle que je cherche au fond de moi.
Je viens de passer un moment de récréation et d'évasion en votre compagnie grâce à l'émission de France Inter « le grand entretien » que j'ai pu écouter en différé sur mon ordinateur et c'est ce qui m'a décidé à vous écrire.
Il y a été question de votre livre « Avant »
Et j'ai entendu quelque chose ! J'ai entendu le double sens d' « avant » Cet « avant » dont vous dites qu'il condense le passé et ce qui est devant. Je crois que ce que je cherche depuis longtemps, c'est précisément de faire un pont entre un passé qui me tire en arrière ou m'immobilise et un avant qui m'effraye. J'ai entendu grâce à vous l'espoir contenu dans l'adverbe avant, et la possibilité de changer mon regard sur un passé qui peut s'alléger sans se renier grâce à l'avant.
Je voulais donc vous dire merci de ces mots qui nourrissent, de ces mots qui s'incarnent et dénouent,merci pour vos livres qui m'accompagnent avec discrétion au delà du temps et de l'espace.
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« « C'était mieux avant. » Combien de fois cela s'impose à moi comme une évidence, en toutes sortes de circonstances. » Ainsi débute J.-B. Pontalis, psychanalyste lacanien de renom, âgé de 88 ans, dans son oeuvre « Avant ».
« Avant » : objet hybride, bâti autour des mots, d'une écriture secrètement mue par le désir de faire parler l'infans en soi. Faut-il voir là un essai ? Roman ? Autofiction ? Autographie peut-être, comme l'avance l'auteur. En tout cas, « Avant » questionne le temps, d'abord sous l'angle de l'histoire singulière, en premier lieu, celle de l'auteur. le style est enchanteur, fleuri d'une poésie émouvante et servi par une érudition admirable, non seulement dans le domaine de la psychanalyse, mais aussi dans le champ de la littérature. Pontalis applique peut-être ici la règle de la libre association d'idées autour d'un thème central et nodal pour l'homme : la temporalité.
Mais « Avant » renvoie aussi à l'Histoire et Pontalis semble tenir là une clé de compréhension : « Si c'était l'Histoire qui nous apprenait à découper le temps, à nous imposer des avant et des après ? » (p. 138). Se refuser à découper le Temps : voilà le voeu que formule Pontalis pour chacun, car : « J'ai comme chacun de nous tous les âges si je cesse de découper le Temps. » (p. 21)
Pontalis fait vivre ici, par des mots - ce langage qui promeut, mais aussi aliène - l'éternité de l'instant.

« Comme souvent c'est un enfant qui pose la question toute simple – et pourtant elle suscite en moi un léger vertige : « Est-ce qu'aujourd'hui sera hier, demain ? » » (p. 140)
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critiques presse (1)
Lexpress
09 février 2012
Dans ce petit livre plein d'humour et de sagesse, Pontalis parle du temps passé et évite les écueils de la nostalgie.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Le psychanalyste est à l'affût de traces. Non, pas à l'affût, il ne les guette pas comme le chasseur, d'abord parce que, s'il chasse, c'est dans le noir, et surtout parce que ces traces, il les découvre là où ni lui ni son patient ne les attendaient. Il ne fait guère confiance aux souvenirs racontés, évoqués, tant ceux-ci sont transformés, déformés comme l'est tout récit. Pour preuve, ils donnent lieu à des versions différentes comme autant de traductions. Freud va même jusqu'à écrire dans son texte sur les souvenirs-écrans qu'il n'existe pas à proprement parler de souvenirs d'enfance, mais seulement des souvenirs se rapportant à l'enfance. Cette affirmation nous blesse, tant nous les chérissons, nos souvenirs de ce temps-là; qu'ils soient heureux ou malheureux, qu'ils témoignent de nos exploits ou de nos hontes, nous croyons dur comme fer à leur vérité. Eh bien, non, ce sont des fictions. Fictions comme l'autobiographie, nos confessions, toujours plus ou moins complaisantes, comme nos journaux dits intimes qui n'ignorent pas l'autocensure. Fiction, ce que nous croyons être notre mémoire.
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Nous n’aspirons pas à l’éternité, sinon à celle de l’instant. Nous ne souhaitons pas être immortels mais nous avons la capacité d’être atemporels pour peu que demeurent présents en nous tous les âges de la vie et que nous nous refusions – je renouvelle un vœu formulé tout au long de ce livre en doutant qu’il ait la moindre chance d’être exaucé – à découper le temps.
Comme souvent c’est un enfant qui pose la question toute simple – et pourtant elle suscite en moi un léger vertige : « Est-ce qu’aujourd’hui sera hier, demain ? »
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Avec « Le stade du miroir » (de Lacan), j’allais un peu plus loin dans la même direction : le Moi était une instance imaginaire, une fiction, quelque chose comme un assemblage hétéroclite d’identifications auquel, sans jamais y parvenir, chacun s’efforçait de donner une unité. Vaine synthèse. Mais ce qui me gênait chez Lacan quand j’assistais, semaine après semaine, à son séminaire du mercredi à Sainte-Anne, c’est qu’il ne paraissait pas, lui, tenir son Moi pour si imaginaire que ça ! Il exhibait son col Mao, son cigare torsadé, il alternait savamment soupirs et provocations adressées à son auditoire, nous entraînait dans la spirale de sa parole en perpétuel suspens. Tel un acteur, il captivait son public. La plupart d‘entre nous étaient séduits, d’autres littéralement fascinés. Nous étions son miroir complaisant.

Sartre, lui, en imposait d’une autre manière. Sa parole était tranchante, sa pensée affirmative. Pas comédien pour un sou, le petit homme, à l’opposé du grand Autre. Aucun souhait de se faire des disciples qui deviendraient bientôt des perroquets. Mais, même s’il a déclaré souvent vouloir penser contre lui-même, ce qu’il pensait dans le temps où il le pensait avait valeur de certitude, n’entamait pas sa force persuasive. Avatar du « Cogito » cartésien : je suis, moi, Sartre, donc je pense. Je n’arrête pas de penser, je n’arrête pas d’écrire.
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Georges Perec se présentait ainsi à son analyste : « Je n’ai pas de souvenirs d’enfance. » Il paraissait revendiquer cette amnésie alors qu’elle était l’aveu d’une douleur muette, la perte d’une mère disparue sans laisser de traces.
Alors, à défaut de pouvoir combler ce trou noir, Perec écrit « Je me souviens » où il note de petits faits « insignifiants » : « Je me souviens de Ploum, ploum tra la la ». Je me souviens du scoubidou. »
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Et maintenant, c’est maintenant. Et maintenant, c’est aujourd’hui, hier et demain. Nous autres, humains, nous ressentons et croyons que le temps passe, nous prétendons qu’il s’écoule et, plus nous vieillissons, qu’il s’écoule trop vite. Mais le Temps (avec une majuscule) ignore qu’il passe, il est immobile, il n’a pas d’âge.
J’ai comme chacun de nous tous les âges si je cesse de découper le Temps.
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