Pas très facile d'entrer dans ce livre sans code, sans connaître un peu la vie de
Charles Baudelaire. J'avoue humblement que je ne la connaissais point et que, après une bonne quarantantaine de pages, j'ai décidé de faire une recherche et que j'ai trouvé plein d'éléments qui ont aidé à ma compréhension : les multiples déménagements du poète pour fuir les créanciers, le remariage de sa mère avec un militaire suite au décès de son père, la syphilis qu'il a contractée avec une prostituée et qui l'a tué ; j'avais évidemment, quand même, je ne suis pas inculte à ce point, dans un coin de mon esprit l'expression "poète maudit" qui collait parfaitement à
Baudelaire, mais je ne savais pas à quel point ni les détails de sa vie de galère. Avant que vous ne lisiez ce roman, je vous conseille donc de collecter quelques éléments de la vie de
Baudelaire, qui en plus, miracle de la littérature, pourront vous resservir en société. Ah que c'est beau un livre qui instruit !
Le texte n'est pas simple, les premières pages sont totalement surréalistes -du terme qui a donné le mouvement surréaliste-, on peut se demander parfois si on est pas dans une écriture automatique, dans des exercices de style, un mot en appelant un autre, pour les sonorités, le rythme : j'ai eu l'impression -sur quelques pages- de lire des mots que je comprends tous séparément, mais qui, mis ensemble donnent un sens énigmatique à la phrase. C'est une sensation étrange et loin d'être désagréable que de se laisser porter par les mots, juste pour le plaisir de les lire ; ça me rappelle mes lectures des surréalistes du temps ou j'étais étudiant, dont Au château d'Argol de
Julien Gracq, ou encore mes lectures de
poésies, moi qui ait un peu de mal avec le genre. de là à dire que le texte de
Felipe Polleri est poétique, il y a un pas, que je franchis volontiers.
Il y a aussi, plutôt sur la deuxième partie du livre, une sorte de refrain, de leitmotiv, repris dans toutes les pages les quatre mots suivants : "a-t-il dit", qui mettent en scène l'écrivain dans la narration de son livre sur
Baudelaire ; ça peut gêner, ça m'a gêné un peu au début, et puis, ça donne un rythme, ça place le narrateur dans sa position de biographe décalé à la fois dans le réel et dans le fictionnel.
La couleur verte est très présente, j'avoue ne pas avoir compris pourquoi, mais peu importe. le noir est là aussi, plus compréhensible parce que couramment associé à la mort ou la maladie.
Un texte de 126 pages qui demande soit de l'attention soit de se laisser porter ou les deux tour à tour, formidablement traduit (par Christophe Lucquin) et mis en pages, dans la livrée désormais connue de l'éditeur, blanche et bleue, sobre et classe. J'avais déjà lu de
Felipe Polleri,
L'ange gardien de Montevideo, un autre livre pas très évident, mais très original et diablement bon.
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