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EAN : 9782940523535
360 pages
Editions des Syrtes (16/03/2017)
4/5   1 notes
Résumé :
Béni soit l’exil ! Un titre énigmatique pour un livre-confession retraçant le parcours de Vladimir Dimitrijević (1934-2011), fondateur des éditions L’Âge d’Homme, passeur de culture et, avant tout, homme engagé et visionnaire. De 1996 à 2011, année de sa mort accidentelle, Vladimir Dimitrijević et Gérard Conio ont eu de longs entretiens qu’ils ont décidé d’enregistrer. Leurs discussions à bâtons rompus portaient sur le coeur de leur métier et de leur vie, ... >Voir plus
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Je suis arrivé ici avec une grande illusion sur l'Occident qui était le produit de la propagande que nous dispensait « La Voix de l’Amérique ». Je suis arrivé ici en pensant y trouver quelque chose de différent. J'ai dû désapprendre le passé que l'on m'avait inculqué à l'école, à partir d'une idéologie qui avait falsifié l’histoire.
Je n’avais pas de maîtres. J'ai dû découvrir l'Occident, j'ai dû mesurer la profondeur de cette civilisation. J'avais tout à apprendre, depuis la manière dont on se tient à table jusqu’au mode de pensée de cette civilisation. J’ai assimilé tout cela, je me le suis incorporé. Et c’est devenu tellement moi, si je peux m’exprimer ainsi. J’ai l’impression, dès que je parle, que tout cela est à tout moment présent en moi. J’apprends tout le temps et j’apprends au présent. Je me sers très peu du passé dans ma réflexion, je me sers du passé pour interpréter le présent, mais je n’ai pas de nostalgie du passé. Je n’ai pas ce goût-là. J’apprends chaque jour, je lis, je vois des gens, j’absorbe. Au moment où c’est absorbé, tout d’un coup ça se canalise. C’est immédiat. Et je n’oublie jamais rien. On peut me parler des Romantiques anglais, du théâtre de Meyerhold, d’Eisenstein, je n’oublie jamais ce qu’on m’a dit une fois et qui m’a paru important. Tout cela est enregistré, tout cela reste en moi, parce qe je pense continuellement à ce métier, à ce qu’il faut cristalliser, matérialiser. Je dis tout le temps : « C’est à moi, c’est à moi de le faire. » Je suis quasiment superstitieux. Non parce que je veux tout accaparer, je suis content quand ça paraît ailleurs, mais je me dis : « Je ferais mieux, cela sera mieux ici, cela sera plus à sa place. »
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Ce que je préfère, en découvrant les qualités propres d'un écrivain, c'est de lui suggérer, non des thèmes - il ne s'agit pas de lui donner des thèmes -, mais des ambitions, et des ambitions où je vois qu'il n'ose pas s'aventurer, pour des raisons personnelles, familiales, sociales, que sais-je. Je peux l'encourager à être entièrement lui-même, je peux lui dire qu'il faut être ambitieux, qu'il faut passer outre. On veut survivre ou on ne veut pas survivre : si on commence à concéder, on ne survit pas. Si l'auteur confie ce qu'il est, il aura peut-être peu de lecteurs, mais ceux qui resteront seront vraiment des âmes sœurs, de vrais lecteurs. Il est possible qu'il ne fasse pas une œuvre accomplie, mais ce sera intéressant. Il faut aller au plus près de la source. Si quelqu'un va au fond de sa nature, il intéressera les autres. C'est certain. En tant qu'éditeur, je préfère cette conversation à la conversation qui consiste à dire que "ceci sera mieux que cela". Je n'ai pas la prétention d'être meilleur juge que l’auteur. D'abord, j'ai peur de me tromper, d'enlever quelque chose qui pourra toucher d'autres lecteurs. Admettons qu'une digression me semble inutile ou incompréhensible, elle pourra apporter une comparaison originale qui renouvellera la connaissance du sujet. Je me considère plutôt comme un accompagnateur que comme un directeur.
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Je pense que c'est un credo dont peut se réclamer tout éditeur, c'est la seule charte du métier. Si quelque chose ne nous plaît pas, on le combat par la pensée, par la parole et la confrontation des idées. Vouloir comprimer les idées, vouloir les nier, vouloir noircir nos adversaires uniquement parce qu'ils nous sont hostiles, me semble indigne de ce métier. Les hommes, les sociétés, les nations ont des manières de se combattre plus déloyales, mais mon point de vue est celui-là. Si quelqu'un écrit un livre qui lui est si cher, si je retrouve en lui ce noyau comme il existe en moi, avec cette même volonté de faire partager la profondeur de ses idées, je dis qu'il est irremplaçable, qu'il faut lui donner la possibilité de se faire connaître. La possibilité de le faire connaître, de le diffuser, c'est mon travail. Nous lisons un livre, il nous bouleverse et nous voulons transmettre aux autres l'émerveillement qu'il nous a procuré. C'est tout.
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Pour revenir à l'édition, il y a des éditeurs qui ont eu la chance de naître dans les sociétés qui pouvaient produire un grand éventail d'écrivains, et je trouve qu'ils ont eu bien de la chance. Mais même si j'étais éditeur dans une situation pareille, je ne serais pas quelqu'un qui épouserait les idées de la société. Mes préférence vont vers ceux de mes confrères qui ont fait de l'édition parallèle. Il y a tout de même des dissidents dans l'édition, des dissidents involontaires, parce que les dissidents volontaires sont plutôt politiques. Mais il y a des dissidents involontaires. Ce qu'ils publient reste en marge, et je pourrais donner des dizaines de noms d'écrivains français de ce siècle qui me sont très proches, mais qui sont périphériques, chacun à sa manière, et qui ont touché des lecteurs numériquement peu nombreux mais qui ont confirmé à leur tour cette multiplicité des regards. Nous avons publié un écrivain de ce genre, Charles-Albert Cingria. Il tient le lecteur par une sorte de miracle. On ne sait pas d'où vient l'attachement à Cingria. C'est sa liberté, c'est la manière dont il peut accoupler les choses entre elles qui nous enchantent, parce que c'est bien dit, parce que c'est de la syntaxe baroque. Il y a des écrivains comme ça, il y a des écrivains qui ont une autre vocation. Il n'y a aucune comparaison possible entre Cingria et Biely, entre Biely et Mandeslstam, mais chacun d'eux possède la même sainte simplicité.
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Il existe encore autre chose. Dans ce siècle, on a inventé beaucoup de procédés pour se dissimuler, pour se trouver des alibis. Ce que l'on a le plus expérimenté, c'est de camoufler de véritables interventions sous des grands principes. La véritable intrusion dans l'édition, c'est que le livre est trop long, qu'il faut le raccourcir parce qu'on ne peut pas donner de l'argent pour le financier, parce qu'on risque trop. Mais on dira : « Il semble que ce chapitre n'est pas très bien composé, est-ce qu'on peut enlever ceci ou cela ? » Si la critique est sincère, elle est salutaire, mais la plupart de ces censures masquent des impératifs commerciaux qui ne veulent pas dire leur nom et qui mettent l'écrivain en porte-à-faux. Il commence à douter et se met à corriger son livre à partir de défauts qui ne sont pas réels. Et cela cache aussi autre chose, c'est la duplicité de ce monde. On cache les véritables intentions derrière de grands principes. Les grands principes servent à dissimuler de petites vérités personnelles, les arrivismes.
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