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EAN : 9782910227784
229 pages
Presses de l'Enssib (01/03/2010)
3.31/5   8 notes
Résumé :

La réflexion sur le modèle de bibliothèque entamée avec Quel modèle de bibliothèque ? (Presses de l'enssib, 2008) se poursuit par une analyse comparée des modèles français et américain de bibliothèque publique. Sont ici analysés les modalités de création de ces bibliothèques, leur rapport aux pouvoirs, leur place dans la société, leurs fonctions et leurs fonctionnements. Un chapitre complète l'analyse avec une présentation des deux grandes associations p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Cet essai compare les modèles de bibliothèques publiques françaises et d'Amérique du Nord, en partant de leur contexte d'origine, de leur histoire et de leurs évolutions qui ont abouti à des modèles très différents. Il s'agit notamment d'analyser comment le modèle américain a été importé en France de manière partielle, en raison d'un héritage culturel très lourd, ce qui a donné en France un modèle qui cherche encore ses marques, tiraillé entre sa tradition élitiste et sa volonté de modernité et de démocratisation culturelle.

Ainsi, L Histoire des deux pays a créé un rapport au savoir et au livre très différent : en France, les bibliothèques publiques sont apparues très tardivement et sont restées marginales et très peu ouvertes au public, et ce jusqu'aux années 1960-70. C'est le modèle des bibliothèques savantes qui primait jusque là, avec un large patrimoine de fonds anciens issu des saisies révolutionnaires, qui n'a jamais réellement été organisé et mis à la disposition du peuple, comme cela en était pourtant le projet. Les bibliothèques étaient plutôt des cabinets de lecture où les livres n'étaient pas en libre accès et rien n'était fait pour que l'usager se sente le bienvenu.

Aux Etats-Unis, au contraire, les bibliothèques ont été créées par le peuple et pour répondre aux besoins du peuple, et ce dès le 18e siècle. Leur rapport au savoir était lui aussi différent, conçu comme un moyen de devenir un citoyen éclairé et intégré à la société, tandis qu'en France il éveillait encore la méfiance, pour être trop lié au souvenir de l'oppression de classe.

La bibliothèque est donc conçue aux Etats-Unis, dès le départ, comme un vecteur d'émancipation politique et elle est construite à la demande de la population, la loi autorisant les collectivités locales à construire une bibliothèque et à lever un impôt - soumis à l'approbation de la population - destiné à la faire vivre.

En France, au contraire, si les bibliothèques publiques sont désormais de plus en plus focalisées sur le service à l'usager, elles restent conçues par le haut et leur développement reste soumis au bon vouloir des élus qui décident la répartition des budgets alloués aux différentes branches des services municipaux - dans le cas des bibliothèques municipales. de plus l'usager est très rarement impliqué dans les processus de décision, tandis qu'outre-atlantique les "library boards" réunissent un comité se voulant représentatif de la population, qui influe sur les décisions et constitue une sorte de garde-fou entre la bibliothèque et les élus, parfois soupçonnés de ne pas servir au mieux l'intérêt public.

C'est là une autre grande différence entre les deux modèles : le modèle américain a été importé en France mais amputé au passage de son aspect politique : en France, l'usager n'est pas acteur de sa bibliothèque ; aussi, même s'il l'apprécie, il n'ira pas lutter pour son maintien ou son développement, car il n'est pas impliqué dès le départ.

Ce ne sont là que quelques éléments des sujets abordés dans ce livre, qui compare aussi les différences entre les associations professionnelles dans les deux pays, le rapport à l'usager, l'implication de ces derniers, et les avantages et inconvénients de chacun de ces deux modèles de bibliothèque.

C'est donc une étude très bien menée, qui donne un aperçu global de la situation de l'un et l'autre pays et rentre dans le détail des éléments de comparaison les plus significatifs à l'aide de nombreuses références à des ouvrages, des études et des anecdotes. Il permet ainsi de bien comprendre l'origine et les fondements politiques de chaque modèle, et la manière dont l'importation incomplète du modèle américain en France a débouché sur un modèle inédit de bibliothèque qui cherche encore ses marques, ses contours, son rôle et ses missions.

Ce livre m'a permis de comprendre beaucoup de choses sur le fonctionnement des bibliothèques publiques françaises, à la lumière de ce qui se fait ailleurs. Je pense qu'il n'intéressera que les professionnels des bibliothèques ou ceux qui aspirent à le devenir ; mais en tous cas il se lit très bien, il est très accessible et pas du tout rébarbatif.
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En dépit de quelques redondances, cet essai, qui à l'origine était une thèse, de la directrice de l'ENSSIB est tout à fait stimulant. Utilisant la perspective comparatiste, elle montre tout ce que les bibliothèques publiques "à la française" doivent aux public libraries à l'américaine. Elle montre surtout en quoi le modèle imité par les bibliothécaires modernistes (souvent formés aux U.S.A.) a été mal adapté à un contexte français très différent du contexte américain (moindre pouvoir des échellons intermédiaires entre Etat et citoyen, absence d'une culture de l'accueil et du service, etc.). Très intéressant pour une future bibliothécaire bien sûr...
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
C'est, en une page, résumer la faille initiale qui sépare les bibliothèques publiques aux États-Unis et en France : une naissance démocratique là-bas, un héritage aristocratique ici. (...) Ce serait sans doute forcer le trait (quoique...) que d'écrire que, de part et d'autre de l'Atlantique, chacun rejoue la scène originelle, les uns, nés égaux, citoyens, hommes d'action, jaloux de leur liberté, les autres, jadis sujets, spectateurs ironiques, attachés à ne pas être exclus, soucieux d'un partage équitable. "Le grand avantage des américains est d'être arrivés à la démocratie sans avoir à souffrir de révolutions démocratiques, et d'être nés égaux au lieu de le devenir" (Tocqueville)
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(En France) La volonté farouche de se démarquer du modèle ancien se traduit plus dans le discours que dans la réalité. Mais (...) le discours sur la bibliothèque et son utilité sociale met l'accent sur le type de population touché. Est ainsi aujourd'hui considérée comme démocratique la bibliothèque qui accueille non pas l'ensemble de la population mais la part de la population qui en était auparavant exclue. D'où cette valorisation permanente du travail accompli vers ceux qui sont éloignés, exclus de la bibliothèque. D'où cette indifférence si fréquente pour l'accueil réel des usagers réels. Il s'agit de convertir ( les non-usagers) plus que de servir (les usagers).
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La pratique du "eye contact", le "Can I help you ?" contraste avec le nez baissé et l'évitement trop souvent constaté aux bureaux d'accueil en France. C'est que la culture professionnelle française continue à valoriser les tâches scientifiques ou techniques (le choix des acquisitions, les indexations...) plus que les tâches d'accueil et de renseignement des usagers. Ainsi, une directrice de bibliothèque en vient à dire qu'un bibliothécaire non performant à l'accueil ne peut en être enlevé car ce serait lui faire une faveur injustifiée.
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Puisqu'elle a besoin du soutien public, la Public library doit desservir la majorité comme les minorités. (...) Cette différence de point de vue a, on l'a vu, une conséquence essentielle sur l'approche des bibliothécaires : pragmatique aux Etats-Unis (où l'on se préoccupe du public tel qu'il est) et téléologique en France (où c'est le non-usager qui est la cible principale - le public comme on voudrait qu'il soit).
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Il est nécessaire (...) de souligner les valeurs qui sont mobilisées : l'égal accès à l'information, la tolérance à toutes les opinions, le respect des opinions minoritaires - l'horreur de la tyrannie de la majorité. Tocqueville (...) avait déjà souligné le poids de la pensée majoritaire, son incitation au conformisme intellectuel, culturel, social (...) : "Il n'y a pas de liberté d'esprit en Amérique. L'Inquisition n'a jamais pu empêcher qu'il ne circulât en Espagne des livres contraires à la religion du plus grand nombre. L'empire de la majorité a fait mieux aux Etats-Unis : elle a ôté jusqu'à la pensée d'en publier. On rencontre des incrédules en Amérique, mais l'incrédulité n'y trouve pour ainsi dire pas d'organe".
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