Boy, Snow, Bird

Lorsqu'une auteure britannique d'origine nigerianne se penche sur la question du métissage dans une société de ségrégation, cela donne ce roman singulier, cette histoire de femmes vécue de l'intérieur comme un murmure des pensées vagabondes qui ressassent les blessures passées ou présentes.

L'histoire démarre aux Etats-Unis dans les années 50, lorsque Boy, jeune new-yorkaise de 20 ans qui a fui un père violent, épouse Arturo Whitman, un veuf dont les parents noirs mais de peau très claire ont préféré s'intégrer dans une société raciste en se faisant passer pour blancs, pour ne pas subir toutes les humiliations de la ségrégation.

De son premier mariage avec une cantatrice, est née une petite fille, Snow à la peau très pâle. Avec Boy, c'est Bird une petite fille à la peau noire qui vient au monde.

Tout est en demi-teinte plongé dans le flou du ressenti et dans un espace onirique plein des contes de Lewis Caroll, dont le thème du miroir est comme une broderie récurrente dans le récit traduisant le questionnement sur l'identité des personnages. Ainsi sont évoquées les non dits de cette famille, les relations entre les soeurs séparées par la volonté des parents.

le contexte c'est celui du combat pour les Droits civiques, de l'opposition à la guerre du Vietnam, de l'émancipation des femmes.

Ce roman délicat ne prétend pas, sabre au clair, militer pour le bien contre le mal, il témoigne de la douleur de l'entre deux, de stratégie de survie, de question d'identité refusée ou assumée. Loin de la clameur des épopées historiques, vous apprécierez j'en suis sûre, ces monologues intérieurs et poétiques qui parlent d'amours perdus ou refusés.

Boy quitte le « preneur de rats ». Elle quitte New York pour la petite ville de Flax Hill. Elle quitte les mauvais traitements et le huis-clos avec son père.
Snow est la fille qu'Arturo a eue avec Julia, une chanteuse dont le disque tourne régulièrement sur la platine. Elle est cette petite fille parfaite et devient la belle-fille de Boy, lorsque celle-ci se marie avec Arturo.
Bird est la fille de Boy et Arturo. Elle est noire née de parents de blancs. A priori.
Se déroulant sur plusieurs décennies, Boy Snow Bird est comme le flux et le reflux de la mer, et disons dans un jeu de mots facile, des mères, où tout ce qui ressasse masque ce qui n'est pas dit, et où tout ce qui est tu finira par être rejeté sur le rivage aux yeux de tous.
L'entrée dans cette lecture a été difficile, puisque les actes, les mots, les motivations des personnages sont flous, puisque rien n'est dit de manière directe, puisque la réalité ne se reflète que de manière partielle ou distordue. Mais peu à peu un rythme s'établit, et l'histoire se dessine pour entraîner vers une fin qui serait de l'ordre du retournement magique.
Boy Snow Bird est pour moi un roman à part, dans le style, dans la façon de construire un personnage et de narrer des histoires. Il est également un roman de plein pied avec notre monde dans les thèmes abordés, la condition féminine, la condition raciale aux Etats-Unis (l'histoire de Bird et Snow fait penser à J'irai cracher sur vos tombes de Vian), la famille, les apparences et le genre. Une belle lecture inattendue.

Années 1950. Boy a grandi à New York, élevé par un père « preneur de rats », tyrannique, violent, dépréciateur, destructeur. de sa mère elle ne sait rien. Jusqu'au jour où, jeune femme, elle trouve la force de lui voler quelques dollars et d'acheter le billet de train qui la mènera le plus loin possible.

Arrivée par hasard à Flax Hill, une petite ville du Massachusetts, elle s'y installe et s'y fait des amis. Elle y rencontre Arturo, qu'elle finit par épouser. Bientôt Boy donne naissance à Bird, une petite fille à la peau foncée, qui révèle l'ascendance cachée d'Arturo, et n'est pas acceptée par tous les membres de sa famille dans cette région pourtant éloignée du Sud des Etats-Unis.

Arturo a eu d'un précédent mariage avec une cantatrice une fille nommée Snow, une très jolie petite fille à la peau très blanche, très mûre également pour son âge, que Bird trouve étrange et qu'elle éloigne de la famille pour protéger sa fille.

Bird grandie, belle, protégée, aimée. A l'adolescence, elle cherche à revoir Snow, la grande soeur dont on ne parle jamais et qu'elle ne connaît pas. Entre elles s'établit d'abord une correspondance, dans laquelle d'étranges similarités leurs sont révélées, notamment un rapport étonnant avec les miroirs, avec leur beauté également.

Petit à petit, des non-dits vont être révélés, des secrets éventés, jusqu'à une fin pleine de surprises !

Si j'ai eu du mal à rentrer dans ce roman, à cerner les personnages qui de prime abord paraissent flous, peu à peu je me suis familiarisée avec le style très particulier de l'auteure, qui distille indices et incohérences pour mieux guider ou brouiller les pistes jusqu'à l'épilogue.

On découvre des personnages d'une très grande intensité, d'une étonnante force de caractère, un peu décalés, pas vraiment à leur place dans le monde et dans leurs propres pensées, en conflit avec la perception qu'elles ont d'elles-mêmes.

Les parallèles avec des contes célèbres comme Blanche Neige sont assez troublants. Les thèmes de l'identité
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Boy, Snow, Bird ne m'a pas autant captivée que Le Blanc va aux Sorcières mais je l'ai quand même trouvé intéressant. L'univers étrange d'Oyeyemi est plein de symboles et laisse envisager des interprétations diverses, mais je sens que j'ai encore besoin de lire d'autres analyses pour comprendre ce qui m'a échappé. Ce qui est sûr c'est que j'ai hâte de lire d'autres titres d'elle.

Boy, Snow, Bird évolue dans une société où, malgré les époques différentes, de nombreux tabous vont façonner le destin des différents protagonistes du roman. Mais plus que tout, ce sont le silence et les secrets bien enfouis qui vont influer sur la vie de ces trois femmes Boy, Snow et Bird.
Helen Oyeyemi explore d'une écriture singulière et intime de nombreuses questions comme la filiation, la race ou l'identité sexuelle. Il faut s'adapter à l'écriture intérieure de Helen Oyeyemi, prendre le rythme, voir les destins et les entrelacements se dessiner tranquillement. Des éléments étranges, rappelant les contes, s'invitent au récit qu'il faut savoir comprendre, interpréter ou simplement accepter. Boy, Snow, Bird est une lecture à la voix particulière mais qui amène à la réflexion…

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