Madeleine Riffaud, c'est une voix, une voix sortie de l'ombre, une voix qui nous happe et nous hante. C'est cette voix envoûtante de narratrice intarissable que l'on retrouve dans le Cahier Madeleine 1 paru chez Dupuis Aire libre, avec au scénario
JD Morvan, et
Dominique Bertail pour les illustrations. Survivante multirécidiviste, devenue l'amie d'
Eluard et Picasso, elle figure parmi les derniers témoins et acteurs de la libération de Paris et fut - à la fois ou tour à tour- résistante, poète et grand reporter.
Mais commençons par le commencement. Cet opus retrace l‘enfance et l'adolescence de Madeleine et aurait pu s'intituler de Madeleine à Rainer : la métamorphose.
Cette fille d'instituteurs limousins, née le 23 août 1924 a grandi en Picardie, région encore très marquée par les stigmates de la guerre de 14. «C'est là que je suis née… Entre deux cimetières de croix blanches...Sous un ciel de traîne...Sur un sol gorgé de cadavres et d'obus qui remontent encore quand ça les toque.» Nous sommes en août 31. La petite fille espiègle, passionnée de lecture est âgée de 7 ans. Son père, lui, souffre encore des blessures reçues au combat. Survient alors un drame provoqué par l'explosion d'un obus qui la marquera à jamais et lui fera prendre la guerre en horreur. Passant directement à juin 1939, nous retrouvons l'adolescente à la chasse avec son père. Sont évoquées également des vacances dans le Limousin. Vont suivre l'exode en ce beau mois de mai chanté par
Aragon où elle va échapper une première fois à la mort, puis l'humiliation subie dans ce qui reste de la gare d'Amiens. Enfin, arrive la dernière case et un départ pour on ne sait où ...
Ce qui fait l'extrême puissance de ce récit à la première personne, c'est d'être un témoignage direct qui reprend les propos mêmes de cette femme d'exception. On retrouve à la lecture la voix entendue sur
France Culture dans la série de 10 émissions qui lui est consacrée «
Madeleine Riffaud, la mémoire sauve » et on s'imagine face à elle dans son appartement parisien. On lit et on l'entend :on se prend son histoire poignante en pleine tête et en plein coeur.
Et puis, il y a l'extrême finesse et intelligence de la mise en scène, l'art de pratiquer l'ellipse du scénariste
JD Morvan. Les 3 premières planches qui ouvrent l'ouvrage plantent le décor : double page panoramique sur le village, la petite Madeleine bouquinant dans son arbre, le grand-père paternel, ce barde tant aimé, et les roses …Puis moteur, on passe à l'action avec les évènements clés de l'enfance et de l'adolescence qui conduiront Madeleine à rejoindre la résistance sous le pseudonyme de Rainer...
Pour lire la chronique dans son intégralité rendez-vous sur L'accro des bulles.
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