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Valery Larbaud (Préfacier, etc.)Albert Bensoussan (Traducteur)
EAN : 9782851978868
267 pages
L'Herne (12/03/2009)
3.61/5   19 notes
Résumé :
- Faites de moi ce que vous voudrez... Je me suis sûrement trompé sur votre compte... Il y a un long silence. Puis : - J'ai cru que vous accepteriez avec plaisir celui qui vient vous proposer son aide, une pauvre aide que la mienne, mais qui ne peut que vous rendre service... Moi, que la Révolution triomphe ou pas, qu'est-ce que j'y gagne ? Au fur et à mesure qu'il parle, il s'anime et la lassitude de son regard disparaît par instants. - La Révolution profite au pau... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Je connais très mal la Révolution mexicaine. Les seules images que j'en ai proviennent de westerns italiens. Autant dire que ma vision de ces événements est très réduite. "Ceux d'en bas" de Mariano Azuela n'a pas comblé mes lacunes historiques mais a été une très bonne lecture.

Ceux qui s'attendent à un récit épique seront sans doute déçus. "Ceux d'en bas" n'est pas un récit romanesque au souffle lyrique. Là n'est pas son propos. "Ceux d'en bas" n'est même pas à proprement parler un roman. Il s'agit plutôt d'un récit de tranches de vie, d'instantanés de la Révolution.

A l'image des dessins de Diego Rivera et José Clemente Orozco qui illustrent joliment la belle édition proposée par l'Herne (que je remercie ainsi que Babelio pour cette opération masse critique), l'auteur esquisse des scènes de vie des révolutionnaires. Loin des grandes figures mythiques de la Révolution, Azuela s'attache à dépeindre les petits, ceux qui vivent, se battent et meurent dans la poussière, vêtus de frusques usées, ceux d'en bas. le lecteur est plongé au milieu d'hommes rustres, peu instruits et va partager leur dur quotidien.

Azuela a été taxé d'être contre-révolutionnaire. Cela n'est guère étonnant. Les esprits étriqués veulent trop souvent simplifier les choses à l'extrême et ont besoin de ranger dans des cases. le texte d'Azuela n'offre pas une grille de lecture facile, il est trop subtil pour faire l'objet de raccourcis. S'il ne cache rien des exactions et de la brutalité des révolutionnaires, le taxer d'anti-révolutionnaire me parait aberrant. Certes Demetrio et ses hommes pillent, tuent, se montrent violents. Cela ne retire rien au bien-fondé de leur sentiment d'injustice. Cela n'amoindrit pas la légitimité de leur colère.

Avec "Ceux d'en bas", Azuela dessine un portrait juste de ces hommes insoumis, aussi libres et sauvages que les paysages qu'ils traversent. Paysages qui sont magnifiquement décrits par l'auteur. La lecture de ce texte est très sensorielle, on sent la poussière qui pique les yeux, on ressent la brûlure du soleil du désert, on entent les rires et les cris... L'écriture d'Azuela est puissante et évocatrice. Belle aussi, élégante, poétique tout en étant fluide et humble. le style n'est jamais ampoulé.

Demetrio, la Caille, le Negro, Cerventes et les autres, ils resteront dans ma mémoire. Ces hommes qui n'entendent rien à la politique, qui sont nés sans rien, qui ne savent que survivre. Ces hommes qui n'ont même plus réellement d'idéal, pour qui la Révolution devient un but en soi. Lorsqu'un des hommes se demande pourquoi ils doivent continuer de se battre, les autres rient de sa candeur, "parce qu'enfin, si on a un fusil dans les mains et les cartouchières pleines de balles, c'est pour se battre évidemment. Contre qui ? En faveur de qui ? Ça n'a jamais préoccupé personne." Rustres, grossiers, brutaux mais courageux, fiers, ils continuent, ils marchent encore, ils marchent toujours, ils sont les "maîtres de la vallée, des plaines, de la sierra et de tout ce que la vue peut embrasser".
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Ce roman, d'abord édité sous forme de feuilletons, puis passé quasi inaperçu lors de sa publication en 1916, prend une ampleur éditoriale inattendue dès 1925 pour être traduit en plusieurs langues et contribuer à la renommée de l'auteur.
Mariano Azuela saisit dans ce livre la révolution mexicaine au moment de sa plus grande confusion, quand les différentes factions qui ont mis fin à la dictature de Porfirio Diaz entrent en lutte les unes contre les autres. D'où le ton désenchanté de l'auteur.

Ceux d'en bas est le point de départ du genre "roman de la révolution mexicaine", avec une écriture romanesque réaliste traditionnelle, élégante et fluide, celle d'un auteur nourri de littérature française du 19ème siècle et admirateur de Zola, mais aussi imprégnée d'un souffle épique : laconisme percutant des dialogues, apports sensuels de la langue populaire mexicaine, grande concision des scènes de violence, belle richesse des métaphores proposant une vision fataliste de la condition humaine, stature mythique du personnage central, nature grandiose en opposition à la vanité humaine, contribuent à une vision sans illusion de l'auteur sur le destin de cette révolution. Ceux d'en bas influencera durablement les oeuvres et films qui par la suite aborderont le même thème.
Si la fresque des personnages de ce roman est sans concession et montre chez les protagonistes une dérive ultra violente plus proche du grand banditisme que d'une troupe d'insurgés, il y a dans chez l'auteur un attachement profond pour ceux d'en bas et une compréhension intime de leur lutte désespérée.

Lui-même ancien médecin militaire dans les troupes ralliées à Pancho Villa, Mariano Azuela met à profit son expérience vécue de la Révolution mexicaine pour analyser avec lucidité et minutie dans Ceux d'en bas une insurrection anarchique, idéologiquement très hétérogène, également extrêmement violente, désorganisée parce que largement spontanée et contre laquelle la répression sera cent fois plus féroce.
Ce que Mariano Azuela, derrière sa vision souvent acerbe, laisse transparaître de cette insurrection populaire, c'est finalement son humanité : peu importe le fracas des défaites et la trahison des idéaux, car cette révolution, ceux d'en bas ont osé la faire.
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« Quand s'allument les brasiers, ils n'entrevoient que la lumière ». L'incendie embrase les pentes abruptes de la sierra ; erratique, il fond sur les vallées les plus tranquilles ; imprévisible, il encercle, consume villes et villages ; aveugle, il dévore impitoyablement sur son passage choses et gens. La révolte paysanne mexicaine de 1915, puissante, spontanée et fondamentalement inorganisée, haineuse, irréfléchie et cependant intrinsèquement généreuse, durant trois ans, brûle de tous ses feux. Mariano Azuela, tout comme ses compañeros de la troupe de Julian Medina, ébloui par les gigantesques, libres et splendides flammes de l'incontrôlable incendie, célèbre dans ces magnifiques pages Sa baroque Révolution.


« Anastasio » tête brûlée, « Pancracio » brute épaisse, « El Meco » éternel allumé, « le Saindoux » assassin retord, « Venancio » empoisonneur et bouffeur de curé, « La Fardée » prostituée hystérique, « le Blondin» bourreau cruel, « Margarito » éphèbe sanguinaire, « Valderrama » poète un peu fou, et bien d'autre encore : « La Caille », « La Grosse » « le Négro » » … toute la troupe du futur et ombrageux général « Démétrios » errante, dépenaillée, instinctive, impulsive, sensuelle, suicidaire, animée d'une grandiose et intarissable colère, tue, pille, boit de la Tequila, fornique et se déchire. Un jeune médecin, qui les a rejoints et a bien failli le payer de sa vie, comprend la nécessité de leur combat et la cruelle beauté du hasard de ce moment unique. « La Révolution profite au pauvre, à l'ignorant, à celui qui toute sa vie a été esclave, aux malheureux qui ne savent même pas que, s'ils le sont, c'est parce que le riche fait de l'or sur les larmes, la sueur et le sang des pauvres... ». Pas de saint machin révolutionnaire dans ce récit. S'ils ont rejoint la lutte ceux d'en bas, c'est qu'ils ont tué un Fédéral aviné, empoisonné leur fiancée ou bien déserté l'armée régulière. Cette insurrection ne s'intellectualise pas, elle se vit dans l'instant avec le coeur, les tripes des paysans analphabètes sans droit, le dos au mur. « Pourquoi donc qu'on se bat à présent, Démétrio ? » « Démétrio, les sourcils froncés, prit distraitement une petite pierre, la jeta au fond du cañon. Il resta pensif en la regardant rouler et dit : « Tu vois, cette pierre, elle ne peut plus s'arrêter. »


Cette épopée, pas plus que l'insurrection, n'est faite pour les pisse-froid, les éternels spectateurs qui comptent les points et qui toujours attendent. Il faut risquer, « au milieu de la fumée blanche de la fusillade et des noirs tourbillons qui s'élèvent des édifices incendiés », l'aventure aux cotés des redoutables guérilleros. La prose de Mariano Azuela, simple décrit à la perfection l'âpre réalité de ce monde en ébullition. Simplement sont esquissés quelques traits de caractère, seulement mentionnés un surnom, une particularité physique et, avec une économie de moyens remarquable, se dessine sous nos yeux un portrait parlant des acteurs de la Révolution mexicaine. L'écriture forte, éclatante de l'auteur fait corps avec la beauté aride de la sierra mexicaine.
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Livre lu dans le cadre de la 12ème édition de Masse Critique.
(et encore un grand merci à Babelio!)

Ceux d'en bas
de Mariano Azuela
Edition de L'Herne

«La Révolution est un ouragan, et l'homme qui se donne à elle n'est plus un homme, mais une misérable feuille emportée par le vent...»

Pour la grande histoire. Celle d'en haut.
1913. Mexique.
A la tête des «fédérés», suite à un coup d'Etat militaire, le général Huerta prend le pouvoir.
A la tête des révolutionnaires, deux illustres figures héroïques, Emiliano Zapata et Pancho Villa.
Pancho Villa, «l'aigle aztèque qui a planté son bec d'acier dans la tête de vipère de Huerta». Pancho Villa, le «Napoléon mexicain.»

Pour la petite histoire. Celle d'en bas. Celle racontée par Azuela.
Ceux d'en bas.
Demetrio Macia et sa bande de «pieds nickelés». Des bandits révolutionnaires. Des illustres inconnus au bataillon.
Des pilleurs, des tueurs.
Aux doux noms de la Fardée, le Blondin, La Caille, le Négro, La Grosse, La Poudrée. Ils n'ont rien à perdre, ils n'ont rien.
Ici bas, dans la poussière, affamés, assoiffés de mezcal, les grades
s'échangent comme de la monnaie de singe : paysan un jour, général le lendemain !
«Quel grade vous avez ?
Captitaine, mon général.
Venez donc...Je vous fais major."
Ici bas, chacun s'invente de glorieux combats, chacun s'accorde sur un même idéal : à boire, à manger, une femme.
C'est tout cela que nous raconte Azuela. Loin, bien loin des scènes de «galas révolutionnaires».
Dans un style sobre, économe, détaché et parfois ironique.
Un peu comme Istrati, le Gorki des Balkans, qui peignait la Russie paysanne des «petites gens» avec de simples couleurs.
Un livre qui sait décrire la réalité d'une révolution (de toutes les révolutions ?) comme dans ce passage.
«Le versant de six cent mètres, est jonché de morts, cheveux emmêlés, vêtements souillés de terre et de sang, et dans cet entassement de cadavres encore chauds, des femmes déguenillées vont et viennent comme des coyotes faméliques, fouillant et dépouillant.»

L'auteur, Azuela, était médecin major dans l'armée révolutionnaire de Médina. Et pourtant, ce livre, trop loin des icônes de la révolution ? pas assez idéaliste ? fut taxé de contre-révolutionnaire !

A noter la préface très instructive de Valérie Larbaud et la très belle édition de L'Herne avec ses gravures signées Diego Rivera.

A lire, donc, pour se faire une idée...vue d'en bas !
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A l'instar de l'un des personnages de son roman, c'est en tant que médecin que Mariano Azuela a vécu la révolution mexicaine. Peut-être même avait-il lors de son engagement aux côté des révolutionnaires, la même vision romantique de la guerre civile avec les gentils peons d'un côté et les vilains propriétaires terriens de l'autre. Mais si tel était le cas, il n'a pas tardé à réviser son jugement si l'on en croit la manière dont il nous présente ses anciens camarades de combat.
"Ceux d'en bas" nous montre en effet des combattants qui n'ont rien de Robin des Bois. Les personnages de Mariano Azuela luttent certes contre les fédéraux du général Huerta mais se conduisent aussi en véritables soudards. Ils pillent, volent et violent à qui mieux mieux et s'en prennent aussi bien aux riches caciques qu'aux pauvres paysans. Ils passent leur temps à boire et festoyer et l'on ne sent plus guère d'idéal dans leurs motivations. Ils ne savent d'ailleurs plus très bien pourquoi ils se battent. La révolution est devenue une fin en soi. Ils n'en espèrent plus rien si ce n'est quelques galons d'opérette et de vagues promesses de richesse.
Le point fort de ce roman est donc de nous présenter ces évènements sous un jour réaliste loin de la légende qui entoure les faits d'armes d'un Emiliano Zapata ou d'un Pancho Villa. Cela ne nous empêche pas pour autant d'éprouver de la sympathie à l'égard de ses pauvres hères qui n'ont pas choisi de prendre les armes. Ils y ont été contraint par les exactions et l'oppression subie jour après jour, par la misère sans cesse recommencée. Leur révolte est sanglante mais sans doute aussi légitime. C'est l'ultime manifestation de leur désespoir.
Malgré ce sujet relativement sombre "Ceux d'en bas" n'a rien de triste, bien au contraire. C'est presque toujours dans la bonne humeur que Demetrio Macias et les membres de sa troupe, Pancracio, La Caille, la Poudrée ou La Grosse se rencontrent, se battent, s'aiment, vivent. le roman aurait d'ailleurs pu prendre la forme d'une pièce de théâtre. Les scènes comiques abondent et les dialogues sont omniprésents. Les propos échangés ont le plus souvent la saveur de l'argot populaire même si quelques envolées lyriques surgissent çà et là : « Et il croit avoir découvert un symbole de la Révolution dans ces nuages de fumée et de poussière qui fraternellement s'élèvent, s'embrassent, se confondent et se dissipent dans le néant ».
Les éditions de l'Herne ont donc eu une très bonne idée en rééditant ce texte vieux d'un siècle et qui plus est dans un format poche très agréable avec sa couverture à rabats, son papier de qualité, ses jolies illustrations et le choix d'une encre bleue du plus bel effet.

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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Le geste de Valderrama est dédaigneux et solennel comme celui d’un empereur :
- Villa ?… Obregon ?… Carranza ?... X… Y… Z… ? Qu’est-ce que j’en ai à foutre ?... J’aime la Révolution comme j’aime le volcan en éruption. Le volcan parce qu’il est le volcan ; la Révolution parce qu’elle est la Révolution !… Mais les pierres qui restent, debout ou couchées, après le cataclysme, que m’importe ?...
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– Que la Révolution est belle, même dans sa barbarie, dit Solís avec émotion.
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« Sur son cheval zain, Demetrio se sent rajeunir. Ses yeux recouvrent leur éclat métallique particulier, et sous ses joues cuivrées d’indigène de race pure coule à nouveau un sang rouge et ardent. Tous les hommes dilatent leurs poumons, comme pour respirer les vastes horizons, l’immensité du ciel, le bleu des montagnes et l’air frais, embaumé par les arômes de la sierra. Et ils font galoper leurs chevaux, comme s’ils voulaient, dans cette course effrénée, s’emparer de la terre entière. »
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