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EAN : 9782348075131
128 pages
La Découverte (02/02/2023)
4.22/5   25 notes
Résumé :
J'ai passé dix ans au pays psychiatrique, ma vingtaine. Années pendant lesquelles j'ai le corps bourré de chimie, la tête écrasée dans l'emprise des discours des psychiatres, une peur XXL verrouillée dans le ventre. Dans ce récit j'ouvre une fenêtre sur un espace qui est tout le temps clos : celui de l'hôpital psychiatrique et des violences qu'on y croise et subit, celui des consultations qui dissocient deux mondes bien distincts. D'un côté, les psychiatrisés, de l'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
L'autrice nous raconte son parcours psychiatrique sur de longues années, les traitements lourds qu'on lui a prescrits, les nombreuses hospitalisations. Quelques poèmes enrichissent ce récit. ● L'axe majeur du récit est le rapport de pouvoir qui s'établit, « en pays psychiatrique », comme l'appelle Treize, entre le psychiatre tout-puissant et le patient, qui doit prendre son traitement sans oublier le moindre cachet et acquiescer sans poser trop de questions. ● Parfois, les diagnostics des psychiatres diffèrent, donc les traitements aussi, mais il ne faut pas le faire remarquer. le « rôle » du patient est d'être doux comme un agneau s'il ne veut pas qu'un engrenage se mette en route vers encore pire, notamment les électrochocs, encore pratiqués aujourd'hui, sous le nom beaucoup plus aimable et consensuel d'« électroconvulsivothérapie » (ou encore le sigle « ECT ») . Mais à part le nom et le fait (quand même très important) que le patient est endormi, rien n'a changé en ce domaine depuis des décennies. ● J'avais entendu Treize sur France Culture, dans l'émission « Et maintenant ? L'invité(e) des matins du samedi » (https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-invite-e-et-maintenant/l-invite-e-culture-de-et-maintenant-du-samedi-11-fevrier-2023-1255394) et cela m'avait beaucoup intéressé. ● Son livre est le reflet des propos qu'elle a tenus dans cette émission et qui sont très critiques vis-à-vis de la psychiatrie. ● Il prend sa place parmi les récits qui traitent de ce problème, qui sont finalement assez nombreux, comme Elle voulait vivre dans un tableau de Chagall de Gaëlle Fonlupt, Frère de Vincent Laudet, le Fumoir de Marius Jauffret, A la folie de Joy Sorman, Encore une journée divine de Denis Michelis, Ils vont tuer vos fils de Guillaume Périlhou, A la demande d'un tiers de Mathilde Forget, pour ne citer que les plus récents. ● Comme je suis sensibilisé à cette thématique, je lis beaucoup de livres s'y rapportant. le point fort du récit de Treize est qu'il s'agit d'un témoignage et non d'une fiction, et que sa sincérité ne fait aucun doute. A plusieurs reprises d'ailleurs, elle admet avoir eu besoin de l'arsenal médicamenteux de la psychiatrie, même si elle aurait souhaité pouvoir au moins discuter du traitement et non se le voir imposer de haut par des psychiatres pressés et pas toujours bienveillants, comme celui qui l'autorise in extremis à entrer dans son cabinet accompagnée d'une amie, après de nombreuses supplications, qui place cette amie deux mètres derrière l'autrice-patiente, et mène l'entretien en la surplombant, les fesses posées sur son bureau au lieu de s'asseoir à son fauteuil de l'autre côté. ● Les rapports de force sont très bien décrits et font souvent froid dans le dos. ● D'un autre côté, comme dans d'autres récits du même genre, ce qui fait défaut c'est précisément le discours des psychiatres. On n'a qu'un son de cloche, l'interprétation par l'autrice de son parcours psychiatrique ; on aimerait que ce discours soit soumis à une éventuelle contradiction. ● A la fin du livre, une vraie lueur d'espoir apparaît. ● C'est un récit intense et très intéressant, fort bien écrit, que je recommande à ceux qui s'intéressent à ces questions.
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Voilà un livre pas commun, entre prose et poésie, entre mots tendres et pensées crues. C'est une lecture pas facile pour ce qui y est dit : parce qu'on entre immédiatement dans un milieu ferme, celui de la psychiatrie. Notre autrice nous livre ce qu'elle a vécu de l'intérieur. Je ne sais pas si elle a fait la paix avec les psy. mais elle est ici sans concession. Elle écrit pour casser l'omerta, pour dénoncer le pouvoir peu contrôlé de ces médecins, la drogue (les médicaments) qu'ils font ingurgiter aux patients. C'est un livre coup de poing.
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Y a un truc qui me tire
Y a un truc qui me tire vers le ventre
Le ventre est le nouveau cerveau
Nouvelle gravité il inscrit mieux
Les plaies les prénoms les mots

Y a un truc qui s'ouvre
Y a un truc qui s'ouvre dans le ventre
Le ventre est cette nouvelle fenêtre
La psychiatrie ne s'écrit pas
Avec de l'air frais des fleurs et du bleu

Y a leurs pratiques
Leurs cachets leurs inhumanités
Leurs dominations leurs diagnostics
Y a ces portes qu'on n'ouvre pas
Y a tous ces trucs qui tirent vers le bas
Et eux, mais eux, restent en haut
Tout en haut de la pyramide

Et puis vient la haine
Comme autodéfense
Elle vient comme elle perd
Les clefs des cadenas qu'ils ont posé
Partout
Sur les portes les fenêtres les corps l'esprit

Elle ouvre le huis clos psychiatrique
Elle s'accroche à la poésie elle s'engraisse
De mots de maux de peaux d'entrailles
Elle écrit avec son ventre ses tripes sa charge
Elle dénonce l'incompréhension les divergences l'incompétence les traitements lourds les ajustements les pleins pouvoirs les victimes les sorties de corps l'accoutumance le degueuli l'indifférence l'horreur les ECT
Bref du bricolage, de la mécanique de contrôle

Et dans cette écriture pulsionnelle
J'y ai vu une fenêtre ouverte
Une bouffée d'air frais: le slam
Une résistance
Une énergie électrique
Ça te foudroie. C'était ça cette lecture.
Un foudroiement.
Une décharge nécessaire pour comprendre
L'univers aliénant de la psychiatrie
Et Treize va faire de la poésie
Un moyen de libération

Une expérience ébranlante
Une écriture explosive
Bienvenue dans le huis clos psychiatrique
Au bout des coups: un coup au coeur
Au bout du All in: un coup de coeur ❤️
Lien : https://fairystelphique.word..
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La qualité de "Charge" est sa valeur de témoignage de l'intérieur sur le « huis clos psychiatrique ». Un témoignage à charge, bien sûr. L'autrice, Treize, raconte l'enfer qu'elle a vécu pendant les dix ans de sa prise en charge, puis comment elle s'est libérée de toute médication en apprenant à contrôler sa santé mentale fragile, qu'elle « doit surveiller comme du lait sur le feu ».

De son ton sincère, rageur, qui emporte immédiatement notre sympathie, elle nous explique les posologies auxquelles elle a été soumise par les psychiatres (mélange d'antidépresseurs, d'anxiolytiques et d'antipsychotiques auxquels s'ajoutent les « si besoin »). Elle ne comprend pas l'utilité de ces médicaments, les prend à son corps défendant, en sortant d'elle, ce qui accentue les crises de dépersonnalisation qu'ils sont censés combattre. Pourtant il faut les prendre, il faut ruser avec les psys qui ont un pouvoir immense sur leurs patients, qui peuvent les empêcher de travailler ou leur infliger une « sismothérapie » (c'est-à-dire des électrochocs qui diminueront "la résistance au traitement").

Cet ouvrage dit très bien le rapport de pouvoir qui s'instaure entre le psy et son patient, placé en-dessous, toujours, sa parole confisquée, son sentiment d'être mal ou pas écouté, l'expansion du sentiment de solitude inhérent à la maladie mentale, le diagnostic humiliant...
Mais il nous montre aussi, et c'est l'aspect touchant de cette lecture, comment l'écriture devient une arme contre la folie. En écrivant, Treize trouve sa voix. Elle développe une langue inventive, forte, dérangeante, que l'expérience du slam a nourrie et qui trouve son expression la plus forte dans cinq poèmes qui enrichissent son essai. Cette "écriture pulsionnelle" permet de dépasser le simple témoignage : elle ne se contente pas d'observer en criant sa colère, elle crée quelque chose d'autre, un univers où on la sent bien, forte, joyeuse et créative, libre enfin d'être elle-même. Cet aspect nous ouvre la porte d'un monde autre, plus fort, plus intense, plus brûlant, auquel le sain d'esprit n'a pas accès :
"les yeux que j'ai fermés sur l'ici se sont ouverts en grand ailleurs".

"Charge" est donc une excellente introduction au thème de la psychiatrie vécue de l'intérieur. Une seule chose m'a cependant gênée à cet égard : l'absence du point de vue adverse. J'aurais aimé lire ce que pense un psychiatre intelligent et humain de l'expérience de Treize, de la médication infligée aux psychotiques et de la possibilité de s'en passer. Peuvent-ils vivre sans traitement ? A quelles conditions ? N'est-ce pas dangereux, malgré tout ?

Lu dans le cadre du Grand Prix des lecteurs Pocket 2024
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Une lecture en demie teinte pour moi ! J'apprécie l'importance de ce livre, qui est un témoignage direct des abus du monde psychiatrique. Cette prise de parole courageuse est précieuse pour notre société, pour qui la psychiatrie reste taboue et méconnue. On ne soupçonne pas ce qui se cache derrière les murs blancs et les blouses médicales des centres de soins psychiatriques. Treize nous plonge au coeur de la souffrance infligée par des méthodes déshumanisées.

Pour autant, je reste sur ma faim... Je garde comme une impression de n'avoir que gratté la surface. J'aurais aimé mieux connaître la narratrice/autrice, qu'elle nous fasse vivre plus pleinement ses épreuves, qu'elle nous dévoile plus précisément ses démons afin de pouvoir prendre meilleure conscience de l'inadéquation totale des traitements qu'on lui a proposé ou infligé... Sans nous laisser entrer plus en profondeur dans son intimité, le texte perd en impact.

Malgré ses défauts, ce récit nous laisse avec une question essentielle et primordiale : que sait-on réellement des soins administrés aux patients des centres psychiatriques ? Nous qui frémissons d'horreur à l'évocation des méthodes passées, sommes-nous sûrs d'être aujourd'hui différents ?
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critiques presse (3)
Telerama
21 avril 2023
Longtemps traitée en psychiatrie, la slameuse Treize signe avec “Charge” un livre contre la violence médicale.
Lire la critique sur le site : Telerama
LeMonde
27 mars 2023
Treize est son nom de scène comme rappeuse et slameuse. C’est maintenant son nom d’écrivaine : elle signe « Charge », témoignage bouleversant sur son vécu dans le « pays psychiatrique », entre souffrance, hôpital et médicaments.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
24 mars 2023
Entre récit, enquête et poésie, elle crée avec ce premier livre un essai littéraire autobiographique frémissant, écrit comme une bombe de plaisir – le rapport à soi retrouvé.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je fêterai cette été mes huit années sans médicaments et, petit à petit, je me retrouve. Ma santé mentale est toujours ma priorité. Je ne peux pas vivre comme les autres, il faut toujours que je me surveille. Je me suis au quotidien pour que ça tienne : j'ai des outils pour faire face aux angoisses, des outils pour quand je sens la présence de parano, j'ai des outils pour accueillir ma haine, pour la nourriture compulsive, pour la baise compulsive, j'ai des savoirs contre l'emprise, j'ai des techniques contre les pensées suicidaires et d 'autres pour faire face aux accès de violence et aux sensations de vide, j'ai aussi tout un tas de trucs qui marchent pour les sorties de corps et les sorties du réel, j'en ai pour la peur paralysante, je suis une bricoleuse géniale. Ces outils sont mes garde-fous et c'est moi qui ai la main dessus.
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Il n'est pas habillé comme d'habitude, il a soif, ces médocs nous assèchent tant la bouche. À l'hôpital il a repris la cigarette, il calcine lui aussi, il tremble beaucoup. Ils l'ont tellement chargé, je le vois tout de suite. Je comprends l'ampleur de la chimie dans son sang au premier coup d'œil : il a tout le corps portemanteau. On discute. Les propos n'ont pas d'importance et il le sait aussi. Je m'adapte à tout, le logique et l'illogique, les mots droits et les mots tordus. C''est dans la présence que je suis là.
p. 63.
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Les fenêtres ne s’ouvrent pas, c’est grâce à elles qu’on sait qu’on a un moral de merde, leurs systèmes de verrouillage nous le rappellent en permanence. Ça nous fait dès pense-bêtes, des fois qu’on oublierait…
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Ils ont créé une fenêtre thérapeutique, je décide d’en faire une fenêtre de tir. Le temps de la confiance est terminé, d’errances médicales en erreurs médicales, la patiente n’a plus le temps de l’être.
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J'ai la pyramide du pouvoir ancré dans le crâne et j'ai peur des représailles chimiques s’il rapporte de l'agressivité de ma part.
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