Dans une collection faisant référence à l'ouvrage «
Lumières pour enfants » de
Walter Benjamin, « … il y a une règle du jeu, qui est que les orateurs s'adressent effectivement aux enfants, et qu'ils le fassent hors des sentiers battus, dans un mouvement d'amitié traversant les génération ».
Le Moyen Age, notre rapport généalogique et ses dimensions niaises, les enluminures, « Ce petit peuple des marges, se prêtant à des révoltes minuscules, forme comme la bande-son du Moyen Age », les juvenes, une classe d'age très particulière. Une longue adolescence ? interroge l'auteur, « cet entretemps est essentiel dans l'imaginaire de la chevalerie », les tournois, les simulacres de combat et leur ritualisation, les fils contre les pères et la question des filiations…
Des croisades, une « croisade des enfants », enfants et pueri, plus tard la « croisade des pastoureaux », que disent ou ne disent pas ces termes ? – pauvres, menus, humbles, paysans… Pour la seconde, il s'agit donc d'une révolte paysanne.
Patrick Boucheron analyse, entre autres, les constructions historiennes de la société médiévale, la place des châteaux et des églises, l'espace médiéval, la double aristocratie de la guerre et de la prière, la ville à l'ombre des tours, l'obéissance au seigneur et à Dieu…
Les historien-ne-s et leur travail, « décevoir l'imagination », la science du changement social, enseigner « des valeurs d'émancipation et non de résignation », les temps se terminent toujours… Dans les contes, légendes, romans, dans les fictions, « une autre histoire s'y dévoile, énergique et gaie ». L'écriture invention, la reformulation, des historiens du XIXème siècle. Des héros inventés ou réinventés, Ivanhoé, Robin des Bois, les ermites, les déserts, les romans de chevalerie, le monde tenu serré et cette « sorte de révolte contre la promiscuité », l'installation en forêt comme transgression, les significations symboliques des couleurs, le climat diffus de banditisme social, le nom d'une construction mythologique, une bifurcation de l'histoire…
L'auteur souligne les « nombreuses révoltes de paysans et d'artisans, qui s'enchaînaient en un véritable cycle de rébellion », la place des changements de conjoncture, le « tour antifiscal », l'imaginaire des révoltes.
Il revient sur les archives, « Elles ne nous disent rien par elles-mêmes, c'est à nous de les faire parler, mais il faut pour cela s'approcher d'elles, se pencher, prêter l'oreille, se montrer attentif au faible bruit », l'histoire des vainqueurs, la révolte comme émotion collective, les rassemblements, les mots qui disent et ne disent rien, la nécessité d'interpréter « les silences de nos sources ou le mépris social de ceux qui les écrivent », les silences qui trahissent, les révoltes encore et toujours et l'histoire comme « art de l'émancipation ».
Dans une seconde partie, Questions/Réponses,
Patrick Boucheron parle, entre autres, de pirates, de la Saint-Barthélemy, de massacre « assassinat en masse de civils désarmés », de dérèglement, de haine sociale, de révoltes de femmes (la place des femmes n'est pas prise en compte dans tous les moments des analyses), de ce que nous ne savons pas des émotions réellement ressenties, des formes d'action violente contre l'ordre social, de délégitimation, de justice et d'injustice, de conspiration et de conjuration, d'une autre histoire possible, des possibilités ouvertes, de futurs non advenus, de contestation et de défection…
Le titre de cette note est emprunté à
Raymond Queneau cité par l'auteur.
Un livre d'histoire et donc sur l'histoire et son écriture. Il n'est pas besoin d'être un-e enfant pour en déguster, avec comme une naïveté nécessaire, les éléments, les analyses et la révolte sourde – mais point aveugle – que l'on devrait partager avec l'auteur, les lecteurs et les lectrices.
Lien :
https://entreleslignesentrel..