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EAN : 9782072849817
152 pages
Gallimard (10/10/2019)
3.93/5   675 notes
Résumé :
« Ce jour-là, le 25 août 2015, l'événement n'est pas : un ours attaque une anthropologue française quelque part dans les montagnes du
Kamtchatka. L'événement est : un ours et une femme se rencontrent et les frontières entre les mondes implosent. Non seulement les limites
physiques entre un humain et une bête qui, en se confrontant, ouvrent des failles sur leurs corps et dans leurs têtes. C'est aussi le temps du
mythe qui rejoint la réalité ; le ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (126) Voir plus Ajouter une critique
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sur 675 notes
Nasstaja Martin est une anthropoloque spécialisée dans les peuples arctiques, détentrice d'une thèse sur les Gwich'in d'Alaska et du Yukon. Ici, direction la péninsule du Kamtchatka dans l'extrême-orient sibérien chez les Evènes, plus particulièrement dans un clan ayant fait le choix de vivre en forêt profonde au plus près de la nature pour retisser un dialogue avec les être non humains qui parcourent leur territoire.

Le sujet en soi est passionnant mais là il devient captivant, c'est par le je de l'auteure qui raconte sa transformation après avoir survécu à une attaque d'ours qui lui a déchiqueté le visage. Mais là, où n'importe qui n'aurait lu dans cet événement qu'une simple attaque, terrible mais une attaque, Nasstaja Martin propose une autre lecture, celle d'une confrontation.

Un des évènes dont elle proche lui explique que si elle a été attaqué, c'est parce que son regard a croisé celui de l'ours, et que lorsque ce dernier y a vu un fonds commun, un miroir de son âme. Nasstaja Martin explique d'ailleurs comment, avant la rencontre avec l'ours, elle était déjà surnommée « matukha », l'ourse, comment ses rêves préfiguraient le moment, peuplés d'ours.

Cette vision des choses est forcément troublante et déstabilisante pour un occidental non initié à l'animisme. Il faut l'accepter pour apprécier ce récit très singulier, très éloigné du naturalisme qui voit en l'animal une altérité. Nasstaja dit être devenue une « miedka », «  celle qui vit entre les mondes » un être qui est passé sans retour au-delà des frontières de la normalité humaine, portant une part d'ours en elle, comme l'ours en porte une d'elle en lui.

Bien sûr, le récit narre aussi du très factuel comme le marathon médical de la reconstruction faciale, mais c'est avant tout une plongée dans la pensée vive et habité d'une femme incroyable de force et de caractère, quasi un manifeste en quête de guérison ontologique. Cela fuse tellement que c'en est un tourbillon, parfois complexe à suivre, mais cela ne m'a pas gênée, sans doute parce que ce voyage intérieur tout en mouvement est conté avec une écriture toute aussi intense que le propos. Nasstaja Martin est une écrivaine, c'est une évidence.

Un récit captivant et iconoclaste, secoué d'émotions fortes, qui pousse indéniablement à une réflexion profonde sur nos valeurs occidentales et notre rapport à la nature. Suffisamment puissant pour chambouler nos certitudes.


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En 2015, lors d'une mission anthropologique chez les rares nomades Evènes subsistant encore des rennes au Kamtchatka, l'auteur partie seule en forêt est attaquée par un ours : le fauve lui emporte la moitié du visage avant de s'enfuir, lui laissant miraculeusement la vie sauve. S'ensuivra pour la jeune femme une longue et douloureuse reconstruction physique, mais aussi une vaste introspection sur les raisons et l'impact de cette fulgurante collision entre l'humain et l'animal.


L'on reste d'abord sans voix devant l'inimaginable et terrible mésaventure de cette femme : une épreuve atroce, à l'issue improbable, suivie d'un parcours médical à faire froid dans le dos, à la merci de la brutalité d'un petit hôpital russe d'un autre âge, mais aussi, très ironiquement, des failles des plus grands établissements de santé français. L'on devine ensuite la tornade qui a dû s'emparer du psychisme de cette survivante, l'énorme travail sur soi pour parvenir à passer le cap, concrétisé par ce livre posé, réfléchi, plein de la maturité et de la sagesse de qui a déjà vécu cent vies.


C'est avec toute son expérience d'anthropologue, son ouverture d'esprit et sa conscience de la complexité des êtres que l'auteur envisage l'enchaînement de faits qui l'ont menée à ce face-à-face avec un fauve. Sans jamais trancher, elle ouvre une à une des hypothèses issues de différentes cultures, explorant aussi bien la psychanalyse, le chamanisme ou l'animisme. Cela l'amène avant tout à mieux se connaître, à comprendre ce que cet ours lui a pris et lui a donné en échange. Cela finit par nous faire réfléchir à notre avenir d'humains sur une planète au bord de la ruine, où l'anthropologue met en lumière ce que nous sommes en train de perdre : les mythes anciens, l'harmonie avec la nature et l'équilibre entre les espèces vivantes, les espaces de liberté et de vie sauvage…


Cette méditation, au texte parfois exigeant et toujours lucide, se lit avec d'autant plus d'intérêt qu'elle accompagne le récit sincère et sans complaisance d'une authentique expérience de terrain, où transparaissent l'estime et l'amitié d'hommes et de femmes au mode de vie en voie de disparition, et en l'avenir desquels, pourtant, l'on aimerait bien pouvoir croire encore.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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"Avec Croire aux fauves, Nastassja Martin renoue le lien que l'anthropologie entretient avec la littérature. En effet, c'est bien d'un texte littéraire qu'il s'agit là. À l'image de la cosmologie animiste qu'étudie l'auteure depuis des années, il vient nous parler d'intériorité, d'âme partagée avec tous les êtres. Il unie le poétique et le rationnel, l'extérieur et l'intime. Car qu'y a-t-il de plus intime que de se retrouver dans la gueule de l'ours ? Sentir son haleine pestilentielle, vivre le noir qui y règne, les crocs de l'animal qui défoncent la mâchoire, dents contre dents. Être mangée par un ours. Croquée par un ours. Et en sortir vivante.(...)
Pour Daria, la cheffe de clan évêne qui l'accueille depuis des années à Tvaïan, « l'un des bouts du monde, pour de vrai », dans les montagnes du Kamtchatka aux confins de la Sibérie, Nastassja Martin était déjà, Matukha, ourse ; la chercheuse voyait souvent l'animal la nuit en songe. Lorsque le rêve « rejoint l'incarné », qu'elle rencontre l'ours sur son chemin, qu'ils se fixent dans les yeux, et que celui-ci broie sa tête mais pas tout à fait, lorsqu'elle lui plante un piolet dans le corps, lorsque les deux survivent à cela, « le temps du mythe devient réalité ». Et la jeune femme devient Miedka, « moitié-moitié », celle dont les rêves sont en même temps ceux de l'ours.
Devenir femme-ourse, entrer de plain-pied dans la zone métamorphique lors d'une rencontre qui réactualise un mythe premier, sans perdre de vue le processus, voilà ce que raconte l'écrivaine dans ce texte hors-norme qui nous explique notre époque comme aucun autre. En résonnance, dit-elle. Nastassja Martin fait oeuvre d'anthropologie ; la « rencontre de l'entre-deux mondes » avec l'ours lui donne accès à un espace « entre l'humain et le non-humain » (...)
À la croisée des zones, à son retour de « cet endroit très spécial où il est possible de rencontrer une puissance autre, où l'on prend le risque de s'altérer, d'où il est difficile de revenir » , débordée par ses rêves et occupée à survivre physiquement à la rencontre violente avec un ours, l'anthropologue est devenue elle-même poreuse au monde des non-humains, elle est devenue l'un de « ces êtres qui se sont enfoncés dans les zones sombres et inconnues de l'altérité et qui en sont revenus, métamorphosés, capables de faire face à ce qui vient de manière décalée , ceux qui font à présent avec ce qui leur a été confié sous la mer, sous la terre, dans le ciel, sous le lac, dans le ventre, sous les dents. »
Ce qui se passe après cette implosion des frontières, le séjour de Nastassja Martin dans les hôpitaux russes, ses sentiments, les interventions chirurgicales, les nouvelles opérations en France, le regard porté par notre société sur elle, sur l'ours, sur son histoire, sa détresse, les réactions de son entourage, tout est documenté dans le livre. (...)
En tant que chercheuse, occidentale, et femme-ourse, elle parle depuis cette zone de mouvement qu'elle habite désormais entre les mondes et leurs différentes interprétations.
Cette histoire pourrait être l'un des récits des temps à venir, des temps où nous sommes déjà. À travers elle, Nastassja Martin nous donne la réponse de l'animisme, quand ce qui nous différencie les uns des autres n'est qu'une enveloppe extérieure. Elle nous raconte un moment de création archaïque. (...)
L'union implosive de la femme et de l'ours, ainsi que ce qui en découle, nous dit Nastassja Martin, correspond aux processus mythiques de l'avant spéciation. C'est, dit-elle, l'endroit exact où nous nous trouvons aujourd'hui, avec l'effondrement écosystémique global. Les êtres s'hybrident, des espèces se mélangent entre elles pour en créer de nouvelles ; les animaux et les plantes, tout se recompose à grande vitesse. et « on est à un moment crucial de l'histoire où l'on peut vraiment repenser nos manières de nous relier au vivant, et même repenser le vivant, puisque le vivant est lui-même en train de se repenser. » *
Et c'est bien ce que fait Nastassja Martin, dans ce livre essentiel, ancre, chercheuse, habitante des zones liminaires, elle qui s'est trouvée mélangée à l'ours dans un moment de genèse, elle se repense à travers l'évènement « qui doit être mangé et digéré pour faire sens », et, ce faisant, elle nous repense nous, dans ce vivant qui se métamorphose sous nos yeux."
Kits Hilaire dans Double Marge (Extrait)
* Nastassja Martin dans Par les temps qui courent, France Culture
Lien : https://doublemarge.com/croi..
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Il n'eut pas été compliqué de donner un coup de griffe au roman de Nastassja Martin. « Croire aux fauves », c'est Sylvain Tesson qui tombe sur un ours, s'en sort miraculeusement, tel di Caprio dans le film « The revenant » puis se fait rafistoler les maxillaires à la Salpêtrière comme Philippe Lançon. Tout ça reste dans la famille Gallimard, et la caravane passe. Pour évoquer les bêtes sauvages, Tesson n'a pas son pareil - son dernier livre en témoigne. Quant au martyr d'une gueule cassée, « le lambeau » restera une oeuvre inégalée. Alors à quoi bon se coltiner un livre qui aborde des sujets traités avec maestria par d'autres auteurs ? Parce ce que la voix de Nastassja Martin est singulière, profonde, inoubliable. Je n'en reviens toujours pas. Ce récit m'a pris à la gorge dès les premières pages et ne m'a plus lâchée. Il y a quelque chose d'hypnotique et de viscéral dans ce livre, aux limites du surnaturel. La science ne parvient pas à expliquer certains mystères. L'ours croque Nastassjya au visage. Elle en ressort vivante mais persuadée que l'animal vit en elle depuis la morsure, qu'il fait corps avec son être (très beaux passages sur l'animisme). Défigurée, Nastassjya s'interroge sur son identité et sur sa place dans le monde. Son seul moyen de s'en sortir, c'est d'accepter la présence douloureuse de l'animal qui, quelque part au Kamtchatka, pense à elle en pansant sa blessure. Car la nature nous observe, elle nous a précédés. J'ai eu la chance de descendre le lac Baïkal, de rencontrer un chaman. Sans doute ce voyage m'a prédisposée à aimer ce livre qui, j'en suis certaine, vous touchera au coeur et à l'âme. Il ne vous reste plus qu'à vous faire une opinion.
Bilan : 🌹🌹
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Elle s'appelle Nastassja Martin, mais sa famille et ses amis l'appellent Nastia, elle est anthropologue, spécialiste des populations arctiques. Dans ce surprenant et puissant récit autobiographique, proche de l'onirisme, j'ai été emporté comme dans une vague.
Ce jour-là, le 25 août 2015, Nastassja Martin se trouve aux confins de la Sibérie, dans les montagnes du Kamtchatka où sa mission l'a entraînée, avec deux autres compagnons de route, elle entreprend une expédition de plusieurs jours dans le massif du Klioutchevskoï, le plus haut volcan du Kamtchatka.
S'étant éloignée durant quelques instants de ses compagnons de route, sa rencontre brutale et édifiante avec un ours ne va durer que quelques secondes, quelques secondes à la fois tragiques et miraculeuses où elle s'en tire vivante. Mais l'ours, qui vient de lui déchiqueter le visage et qui a peut-être fait le choix de la laisser en vie, va modifier le cours de son existence.
Parfois on appelle cela un événement fondateur. Elle parle, elle, d'une rencontre. Les chirurgiens, tour à tour russes puis français, qui l'opèreront plus tard utiliseront d'autres termes.
J'ai aimé entendre ici, dans les mots de Nastassja Martin, que rien n'arrive par hasard et que les trajectoires de vie se croisent toujours pour des raisons bien précises.
Mais que s'est-il réellement passé ce jour de 25 août 2015 ?
Là-bas, une amitié forte s'est liée entre l'anthropologue française et des membres du peuple évène, une population animiste, dont les pratiques en harmonie avec la nature, séduisent l'autrice, et je dois avouer qu'elles me séduisent aussi. Elles sont aussi marquées par de vieilles légendes ancestrales qui donnent la part belle à cette relation entre les humains et les non-humains. Cette harmonie va jusqu'à interpréter le geste de l'ours. Ses amis évènes considèrent qu'elle est devenue un être hybride depuis sa « rencontre » avec l'ours. Elle est devenue miedka (marquée par l'ours et ayant survécu à la rencontre).
Cet ours qui lui a déchiqueté le visage, mais qui aurait pu la broyer tout entière dans son corps fragile, lui a offert ce privilège de la laisser en vie. Elle est une survivante, elle est celle qui revient. Elle est celle qui réfléchit et chemine désormais. Elle quitte une forêt pour revenir dans la sienne, intérieure, ombrageuse.
Être défigurée, qui plus est par un ours, c'est entrer pour elle dans une métamorphose.
Tandis que son visage se reconstruit, voici que d'autres failles viennent, ailleurs, dans les abysses de l'âme.
J'ai aimé les mouvements et les variations de ce récit, cette dualité qui parle sans arrêt entre les mots, entre les pages, comme une vague, oscillant entre le réel et l'irréel.
Le texte est exigeant, mêlant l'expérience d'une scientifique de terrain à la réflexion philosophique et au voyage onirique. C'est magnifiquement bien fait et l'écriture est de toute beauté.
C'est l'occasion de remettre en question le parcours de sa vie, sa relation avec sa mère, entre elle et l'ours une histoire va se construire par-delà les frontières de la réalité.
Croire aux fauves, c'est croire à l'impossible, à ce qui nous est peut-être impalpable, peut-être invisible. C'est croire enfin aux blessures intérieures qui sont peut-être plus fortes.
Pour l'un de ses amis évènes, il n'y a pas de doute : son regard a certainement croisé celui de l'ours, une plongée du regard de la bête dans l'âme de la belle.
Elle écrit les choses qu'elle ressent sur deux petits carnets, l'un diurne, l'autre nocturne, selon ses humeurs, ses envies. J'adore cela. Je n'avais jusqu'à présent qu'un seul carnet pour écrire mes ressentis notamment sur des lectures, je vais peut-être suivre cette idée.
Elle y pose des choses fortes, traversant ses territoires intimes avec une conviction forte et déterminée.
Mais l'important du récit n'est pas l'opération, ni la guérison, c'est bien sur un autre territoire presque magique que nous convie l'autrice. Une tout autre reconstruction, un cheminement, quelque chose qui va la transformer et dont elle se sent prête à accomplir.
Il y avait le monde d'avant cette méchante griffure d'ours. Il y aura le monde d'après.
Elle sait qu'elle portera longtemps en elle, peut-être pour toujours la trace de l'ours sur son visage et dans ses abîmes intérieurs.
C'est désormais comme une bête qui sommeille en elle, tandis qu'une forêt là-bas l'attend. Une fois guérie, réparée, elle rêve de repartir là où son itinéraire s'était arrêté. Retrouver peut-être la bête, qui sait... Ce voyage du retour au milieu de ses rêve obsessionnels a quelque chose de chamanique.
Croire aux fauves, c'est croire à l'impossible. Mais c'est croire aussi à ce qui est possible.
Ce récit sincère et sans complaisance est nourri d'introspections, mais aussi d'un magnifique voyage aux confins de la Russie. C'est l'occasion de découvrir un peuple inconnu, oublié, les Évènes, que je ne connaissais pas.
Ici aussi c'est la respiration d'un peuple dont les modes de vie sont en voie de disparition.
Je suis ressorti de ce texte à la fois envoûté et empli d'un immense respect pour cette tranche de vie que nous partage l'autrice en nous faisant plonger sans concession dans ses abysses intérieurs.
Ici sont évoqués avec beaucoup de beauté les mystères que nous n'avons pas fini de comprendre.
Dans le contexte d'une planète bousculée, fragilisée, menacée, comment ne pas voir ici de magnifiques gestes et messages donnant sens au lien que nous devons nouer ou renouer avec la nature et dans notre rapport au monde.
Un récit essentiel, au-delà de la seule introspection d'une anthropologue en mal d'ours...
Ce soir il y a une forêt qui palpite en moi.
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critiques presse (6)
Actualitte
23 novembre 2020
Ce livre est le livre d'une rencontre fortuite et traumatisante : celle d'une anthropologue et d'un ours aux fins fonds du Kamtchatka !
Lire la critique sur le site : Actualitte
Actualitte
20 décembre 2019
Entre immersion dans les paysages sauvages et parcours hospitalier, l’autrice nous fait vivre une véritable expérience philosophique, elle dont le destin se trouve désormais lié à l’esprit de l’ours. Ce texte j’en suis ressortie impressionnée et pleine d’un immense respect, je ne peux que vous le recommander.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Liberation
05 décembre 2019
Attaquée par un ours en 2015 qui l’a mordue au visage, l’ethnologue Nastassja Martin est restée fascinée par cette étrange «rencontre». Elle en a tiré un récit à la fois savant et littéraire.
Lire la critique sur le site : Liberation
LaLibreBelgique
04 décembre 2019
Experte des populations arctiques et férue d’animisme, l’anthropologue française Nastassja Martin livre, dans Croire aux fauves, le récit de l’expérience qui a bouleversé sa vie : la rencontre, dans les montagnes du Kamtchatka (Extrême-Orient russe), avec un ours qui l’a défigurée.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeMonde
12 novembre 2019
Attaquée par un plantigrade aux confins de la Sibérie, Nastassja Martin en tire une réflexion sur la rencontre entre humain et non-humain. [...] En digne élève de Philippe Descola, elle explore les zones imprécises où l’humain et le non-humain dialoguent, mondes de l’animisme, du chamanisme, que la pensée rationnelle peine à cerner.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Telerama
22 octobre 2019
Experte des peuples et des cosmologies du Grand Nord, l’anthropologue Nastassja Martin raconte dans son livre “Croire aux fauves” sa rencontre avec un ours. Qui l’a laissée défigurée, et a ouvert la voie à une renaissance. [...] Croire aux fauves est le récit, intense, déroutant, de cette renaissance.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (189) Voir plus Ajouter une citation
Quand on a vraiment mal à l'hôpital, et qu'on veut quelque chose pour calmer la douleur, il faut dire 9. Même plutôt 9,5. Il faut entrer dans l'échelle, dans sa logique; il faut intégrer la norme et faire mine de l'accepter pour obtenir gain de cause.
À bien y repenser, l'inadéquation de l'échelle est contenue dans son application même : il y a quelque chose de surréaliste à devoir en passer par une mesure si rationnelle et codifiée pour se voir administrer une drogue qui, dans le meilleur des cas, va vous envoyer dans des nimbes ingouvernables.
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Une porte claque, l'homme d'à côté se retrouve enfermé; et il commence à chanter. Un long chant mélancolique, qui raconte les temps d'avant, le kolkhoze, l'armée Rouge, les vaches, le lait, les rennes, les livres et le cinéma, les peaux et le comptoir, la vodka. J'aimerais voir son visage, voir la peine qui fait tressaillir sa voix entrecoupée de sanglots. Quel monde pleure- t-il ? Quel âge a-t-il pour pleurer ces temps révolus ? Je l'imagine, bouteille à la main quelques heures plus tôt, titubant dans les ornières boueuses de l'une des routes défoncées de la ville, sous les lumières blafardes de l'un de ces supermarchés sortis de terre il n'y a pas cinq ans, ayant poussé là au milieu des immeubles d'époque soviétique fissurés de part en part, témoignant d'un monde qui a changé trop fort trop vite et qui s'effrite déjà avant même d'avoir atteint sa maturité prédatrice.
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Je souhaite tellement sortir de ce dehors et rejoindre le ventre de la forêt que j'ou- blie où je me trouve, dans un monde potentiellement habité et parcouru par d'autres êtres vivants. J'oublie, c'est aussi simple que cela. Comment puis-je oublier ? Je me demande aujourd'hui. C'est le glacier dans mon dos, la Nature de Nikolaï et Lanna et la pierraille à perte de vue, c'est la tempête de ces derniers jours, l'enfermement dans la tente au col et l'anxiété de ne pas pouvoir redescendre des volcans. C'est cette rivière bouillonnante plus haut qui a failli nous emporter, l'empressement puis le relâchement une fois sortis d'affaire. C'est la fatigue, la peur et la tension, tout ça qui se désagrège dans un même mouvement. C'est ma mélancolie intérieure, que même l'expédition la plus lointaine n'a pu guérir.
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Je ne me ressemble plus, ma tête est un ballon griffé de cicatrices rouges et enflées, de points de suture. Je ne me ressemble plus et pourtant je n'ai jamais été aussi proche de ma complexion animique; elle s'est imprimée sur mon corps, sa texture reflète à la fois un passage et un retour. 
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À mesure qu'il s'éloigne et que je rentre en moi-même nous nous ressaisissons de nous-mêmes. Lui sans moi, moi sans lui, arriver à survivre malgré ce qui a été perdu dans le corps de l'autre ; arriver à vivre avec ce qui y a été déposé.
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Videos de Nastassja Martin (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nastassja Martin
Festival L'Histoire à venir 2023 Il était une fois le progrès  -- Rencontre avec Nastassja Martin autour de À l'est des rêves : réponses Even aux crises systémiques publié aux éditions Les empêcheurs de penser en rond. En compagnie d'Adeline Grand-Clément -- Découvrez le livre À l'est des rêves (https://www.ombres-blanches.fr/product/49103/nastassja-martin-a-l-est-des-reves-reponses-even-aux-crises-systemiques) -- 25/05/2023 -  Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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