Depuis peu - depuis Vleel en fait - il y a un coin qui honore ma bibliothèque, celui de la rangée des Hallucinés, collection du Typhon dédiée au gothique, à l'étrange ou au fantastique. Et
Ernst Theodor Amadeus Hoffmann y a naturellement toute sa place, tellement le genre lui parle :
« “L'Étrange“ veut dire toutes les manifestations de la connaissance et du désir, dont on ne comprend pas les raisons, alors que “Fantastique“ veut dire ce qu'on tient pour incompréhensible, ce qui semble dépasser les forces connues de la nature ou, ajouterai-je, ce qui va à l'encontre de la marche du monde. »
Allons-y donc pour cette définition qui colle bien aux cinq
contes de Dans la nuit, traduits par
Philippe Forget, où l'auteur joue avec nos angoisses intemporelles liées au diable, aux esprits, aux apparitions fantômes, aux disparitions et résurrections, aux comportements contre-nature ou aux quêtes maléfiques.
Et point n'est utile d'y ajouter de détails gore bien au contraire, quand la maîtrise technique du conte permet via la quête amoureuse ou l'ambiance surannée, de laisser monter en puissance la sous-couche fantastique qui vient peu à peu fracasser le calme apparent des premières pages.
Toutefois, peu accro au fantastique et à l'étrange, j'ai probablement touché avec Dans la nuit, ma limite : d'abord intéressé par le Diable à Berlin qui ouvre le recueil, puis beaucoup moins accroché par les
contes suivants. Et les lire d'affilée fut probablement mon erreur…
Reste qu'à aucun moment mon plaisir ne fut gâché, tant la qualité du travail réalisé autour de ce bel objet éditorial m'a séduit, avec ici en prime d'exceptionnelles illustrations de
Tristan Bonnemain.
La finesse de son point et de son trait confère à ses dessins une dimension quasi-hypnotique qui ajoute un deuxième axe de lecture à ces
contes, laissant l'imagination s'évader du seul texte et permettant de suivre à la lettre le conseil d'Hoffmann : « Méfiez-vous des miroirs qui vous renvoient ce que vous voulez voir ».