AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782081421196
224 pages
Flammarion (04/04/2018)
4/5   9 notes
Résumé :
Buenos Aires, 1910. Tout a commencé là, se souvient Bárbara Dávalo en évoquant sa vie à Leonor, qu’elle vient de recueillir chez elle. Cette année-là, Bárbara était à la croisée de deux mondes. Elle quittait l’enfance en même temps qu’elle se refusait à devenir la jeune femme effacée et bientôt mariée dont son influente famille rêvait. Bárbara ressemblait alors à Buenos Aires, cette ville en mal d’identité. Elle se souvient aussi que l’enfance est un territoire qu’i... >Voir plus
Que lire après Dans les pas de Barbara DavaloVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
A Buenos Aires, Barbara est une adolescente mal à l'aise dans sa famille influente et conventionnelle.
Heureusement, avec sa cousine, elles parviennent assez souvent à s'échapper et leur plaisir est d'aller dans les « conventillos », quartiers d'immigrés miséreux. Là, elles s'attachent à une famille d'italiens.
C'est un très beau récit que fait Mélanie Sadler. Celui de la vie de Barbara, celui des milieux nantis et des milieux défavorisée de l'Argentine au début du XXème siècle.
L'écriture est vive et précise, les personnages attachants ou agaçants, reflets d'une société où les conflits menacent.
Aux informations historiques se mêlent les émotions d'une jeune fille rebelle et pleine de grâce.
Un roman très agréable à lire.
Commenter  J’apprécie          300
Bárbara Dávalo sera libre.
Issue d'une famille bourgeoise de Buenos Aires, elle entend son père et son frère dénigrer les étrangers, la lie de la nation, ces italiens, ces irlandais qui accostent, s'installent et véhiculent des idées anarchistes.  Elle écoute sa mère et sa soeur prôner le mariage, parler dentelles et chiffons. Son univers est étriqué, elle y étouffe.
Elle, elle rêve d'espaces, d'échanges, de corps qui exultent, d'expressions et de philosophie. Elle s'évade avec sa cousine Amalia jusqu'aux Conventillos, quartiers de misère, où elle rencontre Giu, Tito, Matilde et Marcello. Elle y apprend la vie, l'amour et la fantaisie, existe au rythme du Tango, s'imprègne de liberté et s'instruit. Son propre monde lui échappe, elle ne peut plus s'y conformer, même si Amalia l'abandonne, même si l'enfance s'évapore. Son destin est ailleurs. Audacieuse, féministe d'avant-garde, Marie Curie et Juana Azurduy pour modèles, elle osera se rebeller et s'affranchir du joug familial et social.
« … Cette frontière-là n'a rien à voir. Il s'agit de moi. de mon être. Que l'on veut atrophier. Que l'on veut plier pour qu'il ne prenne pas trop de place. Ni dans la famille, ni dans la société. de ma pensée. de mon intelligence peut-être. Je repense aux mots de Marcello. La liberté de la profondeur. C'est exactement ici que l'on m'attaque. Dans ce domaine qui n'appartient qu'à moi, qui n'amputera aucun autre si je le conquiers, mais que l'on ne cesse pour autant de vouloir m'arracher. »
Un roman qui se dévore en quelques heures tant on est captivé. Sur fond de crise nationaliste, on découvre Buenos Aires en 1910 et ses fragmentations sociales dans un récit précis et détaillé. La plume de Mélanie Sadler retranscrit avec beaucoup de passion l'emprise bourgeoise, le labeur des ouvriers, la pauvreté, mais aussi la culture, le théâtre et la danse, de ce pays bouillonnant auquel elle rend un merveilleux hommage.
Un roman magnifique.


Lien : http://aufildeslivresblogetc..
Commenter  J’apprécie          140
Nous sommes à Buenos Aires, dans les années 1910. Barbara, jeune fille née dans une famille aisée, ne veut pas sortir de l'enfance, synonyme de fin de l'insouciance et de début d'une vie toute tracée … avec à la clé mariage, famille, et autres codes imposés par son rang social.

Mélanie Sadler nous parle, avec émotion, de la légèreté de l'enfance et des prémices du combat féministe de Barbara.

Mais elle évoque aussi avec beaucoup de brio la réalité de la vie en Argentine au début du 20è siècle (et aujourd'hui encore?), sur fond de lutte de la bourgeoisie nationaliste face à l'anarchisme des émigrés venus d'Europe. Ce qui n'empêche pas une culture riche et bien vivante, à travers la danse et le théâtre.

Mélanie Sadler, spécialiste de l'Argentine, nous fait ainsi découvrir une Argentine et un Buenos Aires touchants, vibrants, lyriques, à l'image de Barbara. Un livre délicat, à l'écriture fluide et poétique, qui fait voyager, y compris dans l'histoire, et qui m'a transportée.
Lien : https://accrochelivres.wordp..
Commenter  J’apprécie          30

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Giuseppe, Amalia sur les bras, Tito et ma petite silhouette — un peu hagarde — avions donc traversé le conventillo et après un périple, oui, un périple, enfin, ce qui m’en avait paru un, nous nous étions arrêtés dans une pièce où deux enfants en bas âge piaffaient (l’une des deux mordillait la semelle d’une botte décrépite). Dans un coin, une femme, assise, reprisait une chemise. Elle avait levé la tête en entendant notre cohorte et suspendu son ouvrage, aiguille en l’air, en nous remarquant, nous, les deux gamines qui ne sortaient pas du quartier. Giuseppe lui avait expliqué l’incident (du moins, c’est ce que nous nous étions imaginé avec Amalia, puisque nous ne saisissions pas un traître mot d’italien). Elle s’était levée. Un sentiment était alors né en moi, un instinct, quelque chose d’inexplicable mais de fort, de magnétique, que je n’avais jamais éprouvé pour aucune femme. Ni pour Amalia, ni même pour Gabriela. Un mélange d’admiration et de crainte. La mère des deux garçons dégageait une force. À l’époque, en essayant de circonscrire en moi cette puissance, je disais virilité. Il n’y avait, je pensais, que des hommes pour installer leur présence de la sorte. L’absolu d’une assurance — voire d’une insouciance — qui va de soi. Mais c’était une matrone aux seins solides et aux hanches larges dont chaque geste, précis et ferme, trahissait aussi une sensualité. Elle avait essuyé ses mains dans le tablier qu’elle avait noué à la taille. Elle avait déposé Amalia sur le rebord d’un lit, s’était mise à nettoyer la plaie. C’est seulement alors que j’avais constaté l’indigence de la pièce. Un matelas au sol et des lits superposés. Une table et des fauteuils en jonc qui n’inspiraient guère confiance. Un miroir qui ne refléterait bientôt plus rien du tout, tanné par l’oxydation. Une aiguière ébréchée qui devait servir à la toilette, une bassine, une lanterne à kérosène. Une cage à oiseaux qui surprenait, là, dans un coin. Une cage à oiseaux sans oiseau. Comme si elle s’était égarée. Et pourtant dans le remue-ménage alentour, tout le monde voletait. Et puis, aussi, des photos de famille et des chapelets d’images pieuses, La Vierge toute puissante qui veillait sur la maisonnée. Une conviction intime était née en moi à cet instant précis ; dans ce logis, le Salve Regina devait être adressé à cette femme robuste bien plus qu’aux saints de l’éther. J’avais senti, animale, cette appétence de me blottir contre son flanc, sur son sein, comme un rempart contre les marées et les vents. Il devait y faire bon. Ce n’est que bien plus tard que j’ai appris la violence qui avait pilonné les jeunes années de Matilde.
Commenter  J’apprécie          60
Je me décompose lorsque je pénètre dans le vestibule. La canne de mon père est rangée à sa place. Il est donc rentré. Je sens dans mes veines monter une pression comme un bouchon de champagne près d’exploser. Je ne sais comment je vais affronter ses remontrances. Il y a encore quelques années, j’aurais pensé très fort que non ! Je ne veux pas être privée de dulce de leche pour le dessert... Dans ces moments-là, c’était bien cela que je craignais le plus. Et les heures de sermonnade. Bien avant encore, c’était son regard à lui, ses mots durs choisis sans tact mais avec soin, le même soin qui emballe un présent que l’on a mis des jours à chercher, oui, c’était cela qui me terrorisait vraiment. Cette peur nichée là quelque part dans l’estomac, qui déploie ses ailes et les secoue sauvagement jusqu’à envahir tout l’abdomen de plumes et de frissons. Elle avait un nom cette peur-là, elle s’appelait Dedécevoir. Dedécevoir était ma pire ennemie, lorsque j’étais petite. Je fermais les yeux très fort en espérant que la bêtise que je venais de faire allait aussitôt disparaître, que les paupières closes évaporeraient le réel en mauvais rêve et qu’au réveil tout ne serait plus que soulagement. Cela n’avait jamais bien fonctionné. À la longue, j’avais attaché, de toutes mes forces, les pattes du volatile – Dedécevoir – avec des lanières de corde et j’avais coupé ses ailes pour qu’il se tienne tranquille, étale, sans agiter sa noirceur contre toutes les parois de mon corps. Dedécevoir avait capitulé. Il était là mais ne me faisait plus trembler. Un animal de compagnie, en quelque sorte. L’ennui de ces confrontations paternelles avait alors changé de nature ; c’était de devoir attendre, moi, immobile, pendant que les aiguilles de l’horloge continuaient sans faillir leur marathon, que mon père ait fini son discours – quand
il n’avait pas assez échauffé sa voix en affaires ou en politique durant l’après-midi. Ou que, d’un mot, il me prive de dessert. Mais même Privéededessert j’avais réussi à la séquestrer, un peu plus tard. Ça m’a demandé des efforts. Mais elle ne m’a jamais picoré le foie et les viscères, comme l’autre bête l’avait fait auparavant, pendant des années.
Commenter  J’apprécie          50
Ces quelques semaines d’affranchissement et de joie touchent à leur fin. Et plus tôt que prévu : les affaires de mon père ont été expédiées, de par sa légendaire efficacité et son sens du commerce non moins complimenté. Que l’aventure tourne court, que l’on mure à nouveau les trouées qu’avec patiente j’ai creusées vers San Telmo et tout ce que je découvre avec Marcello, cela m’est insupportable. Je fulmine. Ce n’est pas l’impression d’un retour prématuré de mes parents qui me ronge de l’intérieur et me donne envie de crier. C’est la sensation d’un avortement. Un avortement de soi. L’impression d’un commencement que l’on interrompt.
L’impression d’avoir été initiée. Initiée à. À quelque chose. À autre chose que les choses connues. D’avoir eu le droit de réfléchir et l’espace pour. L’espace oui. L’espace qui me manque à Recoleta et qui a pris la géographie de San Telmo. Espace gagné comme sur les frontières. La frontière du pays contre les Indiens, la frontière nord-américaine contre tous ses voisins, la frontière des régions d’un continent vieux, dit-on, qui ne rêvent pourtant que d’empires pour se dilater. Mais non. Cette frontière-là n’a rien à voir. Il s’agit de moi. De mon être. Que l’on veut atrophier. Que l’on veut plier pour qu’il ne prenne pas trop de place. Ni dans la famille, ni dans la société. De ma pensée. De mon intelligence peut-être. Je repense aux mots de Marcelo. La liberté dans la profondeur. C’est exactement ici que l’on m’attaque. Dans
ce domaine qui n’appartient qu’à moi, qui n’amputera aucun autre si je le conquiers, mais que l’on ne cesse pourtant de vouloir m’arracher.
Commenter  J’apprécie          50

Videos de Mélanie Sadler (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mélanie Sadler
Vidéo de Mélanie Sadler
autres livres classés : tangoVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (19) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3620 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *}