Assise face à lui, suspendue dans le crépuscule marin déployé au-delà des baies, elle tentait d’imiter son élégante décontraction. La nuit était tombée quand un mugissement profond, comme venu du gouffre où cosmos et océan s’épousent, déclencha l’allumage à l’unisson de puissants projecteurs, éclairant le chenal dans toute sa longueur. Et un paquebot entra, monstrueux, dépassant de tous ses étages illuminés les entrepôts et les maisons du port, progressant droit sur eux avec lenteur. Comme déstabilisé par cette intrusion cosmique dans sa sphère intime, Baptiste se confia sans ambages. Il quittait femme et enfants pour une jeune maîtresse, une Japonaise menue qu’un mandarin autochtone avait menée au bord de la folie.
Elle l’avait rencontré au bord de la mer. Toujours à toute heure des gens regardent la mer, pas seulement des désœuvrés ou des mères avec leurs petits mais des prolos en bleus de chauffe, des types en complet sous le loden contemplent eux aussi sans parler le grand remue-ménage de l’eau, l’allée et venue pour rien, le ressac du vide. Peut-être était-elle venue voir ça, précisément, ou retrouver son enfance pas si lointaine, l’écho de cris heureux et de souffles courts dans les vagues et les dunes ; oublier le morne troupeau d’adultes dans lequel on l’avait insensiblement poussée et où elle se retrouvait seule désormais, sans secours.
Des ateliers d’écriture ont été mis en place à la faculté des Lettres de Nîmes, dans le cadre de la licence de lettres modernes, en septembre 2006. Trop rares encore sont les responsables de filières Lettres à oser se risquer dans ce domaine, classique aux Etats unis depuis la fin des années 50 sous le nom de writer’s workshop. Pourtant, comment comprendre de l’intérieur la littérature si l’on ne se frotte pas soi-même à l’écriture ?