D'un coté les tenants du "tout biologique" qui essentialisent le rôle des hommes et des femmes en les ramenant à une prétendue Nature, largement fantasmée. de l'autre des études en sciences sociales sur le genre, qui se méfient des tendances bicatégorisantes de la biologie ; ou alors surinvestissent des situations minoritaires comme l'intersexualité.
Thierry Hoquet se propose de reposer tout ça calmement, et de regarder ce que la biologie a à nous dire sur la sexuation humaine. Pour cela il propose le concept d'altersexualité qui consiste à "mettre en place à la fois une critique radicale de la bicatégorisation, de l'androcentrisme et de l'hétérosexisme en biologie sans pour autant verser dans le tout-social et le relativisme sexuel".
Le mérite de se livre, c'est d'avoir plongé dans les profondeurs des concepts de sexuation. Quand on parle de sexe, de quoi parle-t-on ? de la conformation des organes génitaux, du fait d'appartenir à une classe (les hommes ou les femmes), de la sexualité… ?
Même si on se concentre sur une définition strictement biologique, les choses ne se simplifient pas, bien au contraire. le sexe peut vouloir dire sexe génétique (chromosomes), gonadique (ovaires ou testicules), sexe hormonal, sexe gamétique (ovocytes ou spermatozoides), sexe légal, sexe libidinal… (et j'en passe quelques uns). Ces différents niveaux du sexe ont tendance à général à correspondre les uns avec les autres, mais ce n'est pas (du tout) une règle universelle, y compris chez les humains où les choses sont bien plus compliquées que ce qu'elles ont l'air en apparence.
Bref, "sexe" est vraiment un mot qui a de multiples sens et l'on ne ait jamais bien de quoi l'on parle. D'où la nécessité de toujours être bien précis.
De toute cette plongée dans le monde de la sexuation, dans toute son incroyable diversité chez les animaux, on peut en déduire une seule chose : il y a toujours deux types de gamètes bien différents, un rare et gros du genre ovule, et de l'autre nombreux et plus petits genre spermatozoïdes. On a tendance à appeler femelles les animaux possesseurs des 1ers, et males les seconds. C'est tout ce que l'on peut dire. Après on rencontre tellement de cas différents dans la nature qu'il faut se garder de toute généralisation.
Les derniers chapitres du livre sont moins convaincants. Hoquet s'essaye à tirer des enseignements de tout ce qu'il vient de mettre à jour et c'est un peu fade. Il y a un déséquilibre entre l'incroyable somme de connaissances mises en contextes et le peu de teneur des conclusions qu'il en tire.
Les dernières pages rappellent à l'importance de neutraliser le genre pour combattre efficacement les inégalités femmes/hommes. J'ai trouvé un peu court ce raisonnement. Je conseille de lire les Queers Zones de
Marie-Helene Bourcier pour voir ce que cette prétendue "neutralité" (qui n'existe jamais vraiment) peut avoir de dangereuse.
Un livre très complet que j'ai quand même terminé en me disant... "tout ça pour ça".