AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782070149766
208 pages
Gallimard (03/03/2016)
4.25/5   8 notes
Résumé :
"Je cherche une secrétaire qui sache pour moi de quarante à cinquante façons écrire non." Cette imploration, presque désespérée, résume à elle seule les lettres de Henri Michaux réunies par Jean-Luc Outers. Il n’y est question que de refus : les demandes d’interviews, les adaptations scéniques de ses textes, les anthologies, les colloques ou les numéros de revues qui lui sont consacrés, les rééditions, y compris en livre de poche ou dans la Bibliothèque de la Pléiad... >Voir plus
Que lire après Donc c'est non - Lettres réunies et annotées par Jean-Luc OutersVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Une correspondance à la fois jubilatoire et pathétique d'un poète- écrivain- peintre dont j'avoue mal connaître l'œuvre, pourtant si vaste et si éclectique...
Une personnalité étonnante qui s'est battue toute sa vie contre la "vedettomanie", contre toute publicité autour de son nom et de ses textes...
Impressionnante réunion de lettres de refus..., qui montre à quel point cet artiste était horripilé par le cirque éditorial et littéraire...quelle énergie déployée pour ne céder à aucune facilité...

[ 29 novembre 1973- (...) Dans l'entourage verbal des autres, je ne me retrouve jamais" ]

"3 juillet 1958.... A Monsieur Bréchon (...)

Mes livres montrent une vie intérieure. Je suis, depuis que j'existe, contre l'aspect extérieur,
contre ces photos appelées justement pellicules, qui prennent la pellicule de tout, qui prennent tant qu'elles peuvent les maisons familiales ou autres, les murs, les meubles, tout
ce qui est permanent et stabilité et que je n'accepte pas, au travers de quoi je me vois passant" (p. 73)

Michaux se révèle être insatisfait, et très exigeant face à ses textes, ses écrits...On lui voit des interlocuteurs d'une qualité exceptionnelle ,qui sont aussi parmi les "obscurs"...comme
cet autre écrivain-poète que j'affectionne profondément, M. Jean de Boschère...

" A Jean Boschère...1946- (...) Mais vous exagérez sans doute mon importance- Un autre paraîtra un jour, qui connaissant des états analogues , les dira infiniment mieux" (p.50)
...
Au même, le 15.11.1965
(...) Je cherche une secrétaire qui sache pour moi de quarante à cinquante façons écrire " non" " (p. 93)

Quel incroyable parcours...de talent et d'anti-conformisme...de bagarres pour qu'on lui fiche la paix...Si rare...

Cet homme, aux talents multiples... ne souhaitait surtout pas se soumettre à aucun mouvement littéraire, aucun mouvement , aucune revue, aucun parti d'aucune sorte...
Une sorte de rage le prenait à chaque sollicitation et elles étaient bien nombreuses !!


" A Gaston Gallimard - 8 octobre 42

(...)
Je ne désire aucunement la réédition de textes, de plaquettes ou de livres de moi, et même je m'y oppose ici catégoriquement. Dans la crise du papier, ce ne sera pas moi qui mordrai dans le stock...." (p. 43)

Il reste à remercier la passion et la ténacité de Jean-Luc Outers, ainsi que son admiration sans bornes pour Michaux....

"Préface De J.L. O...
La littérature aide à vivre, dit-on. Pour moi, Michaux résume à lui seul cette formule. Si je lui avais proposé mon projet, nul doute que j'aurais rejoint la liste des éconduits qui se consolent sur le bord de la route en lisant et en relisant ébahis
la lettre qu'ils ont reçue à la fois comme une caresse et une gifle. Il y a des gifles qui font du bien... " (p. 21)

Avec une très haute idée de la poésie... qui ne doit pas être galvaudée ni mise en spectacle à n'importe quel prix, Michaux se battra sur tous les fronts...toute son existence...
" Déjà en 1941, il écrivait à son ami l'écrivain Jean de Boschère qui publiait une modeste revue littéraire: " je vous en prie instamment, ne me consacrez jamais un numéro spécial. Ce serait un cas de brouille.". Les colloques, les manifestations
commémoratives, les anthologies, les demandes d'articles, d'hommages ou de réédition subissent le même sort: retour à l'envoyeur. L'université, ce n'était pas sa langue. s'agissant de poésie surtout, il voulait se tenir éloigné " de tout endroit
où la poésie est l'occasion d'un discours" (p. 18- préface de Jean-Luc Outers)
Commenter  J’apprécie          320
Si vous ne savez dire non, lisez ce livre d'Henri Michaux, le champion du non toutes catégories, vous serez vacciné. Et vous aurez à disposition un lot fourni de formules aussi fermes que définitives (et cependant courtoises) propres à décourager les importuns qui s'aviseraient de promouvoir votre oeuvre.

On savait Henri Michaux très indépendant, pour ne pas dire atypique, le choix des 91 lettres qui composent cet ouvrage est fidèle à son image de rebelle irréductible porté sur le secret et l'isolement. HM, c'est ainsi qu'il parle de lui, ne cesse d'aligner et de souligner un NON résolu à tout ce qui lui est demandé : retours en arrière jugés « insupportables », entretiens, photos, biographies, revues, anthologies, rééditions, spécialement en collections de poche ( « Il y a déjà deux mille imbéciles qui me lisent pourquoi y en aurait-il vingt mille ? »), récitals, émissions radiophoniques ou télévisuelles, thèses et autres mémoires, colloques, conférences, illustrations, prix littéraires, cénacles ou académies, en un mot tout ce qui pour lui constitue « le carnaval médiatique » qui entoure une oeuvre. Une petite exception (on appréciera l'humour) pour certaines traductions : « Il ne faut pas que le oui soit tout à fait oublié non plus. » Il ira même jusqu'à refuser sa panthéonisation dans la Pléiade, c'est dire ! Ainsi qu'un prix d'une valeur de plus de 50 000 euros actuels alors qu'il déclarait « un revenu fort modeste ». Il affiche la même intransigeance pour son oeuvre picturale, qu'il traite de « petits mimodrames », ou pour la belgitude dans laquelle certains inconscients voudraient l'enfermer. Fichue notoriété ! Devant l'afflux des sollicitations, comment trouver une secrétaire qui sache « de quarante à cinquante façons écrire non » ?

Une philosophie du non

Ce n'est chez Michaux ni une fausse modestie ni une coquetterie de star. L'écrivain fuit tout enfermement, tout carcan qui fige les choses. Il craint sans cesse d'être étouffé, embrigadé dans un système. Ni « honneurs publics, ni largesses pécuniaires », il désire farouchement se tenir éloigné de toute gloire médiatique, de toute consécration officielle. Il envisage son oeuvre comme un parcours, un mouvement, lui, HM, « passant au travers », et donc n'éprouve que dégoût pour toute forme de reconnaissance, de distinction sclérosante : « elle ferait de moi définitivement un professionnel au lieu de l'amateur que je préfère être et demeurer. » Son oeuvre de silence et de recueillement se suffit à elle-même, voyage dans « l'espace du dedans » et non soumission à un tourbillon extérieur aussi vain que délétère. « La distance est nécessaire à mes écrits », affirme-t-il. Si on n'accepte pas son choix, c'est qu'on ne comprend pas son oeuvre.
On ne s'ennuie pas un seul instant à lire cette litanie de refus tant les lettres sont savoureuses et drôles. On s'amuse de la constance des demandes, de la persévérance des solliciteurs et de l'invariabilité des réponses. Les admirateurs en sont pour leurs frais, quels que soient leurs noms, leurs états de service ou recommandations. Les mots de Michaux sont forts, inlassablement répétés, parfois cinglants. À l'issue de l'ouvrage, on reste admiratif devant une telle exigence qui ne sut déroger à ses principes. « Je signe mes écrits. Je ne peux signer ce que d'autres ont rédigé. Je ne peux rédiger des écrits que d'autres avec moi signeraient. » Dont acte.
On serait cependant en droit de se demander d'où Michaux tenait cette obsession intraitable de l'effacement alors qu'à certains moments on le voit s'inquiéter de la parution de ses livres, du non-paiement de ses droits d'auteur pour un texte interprété en public sans son accord. Lui qui haïssait toute « vedettomanie », qui répugnait « à l'étalage », au « tapage », que dirait-il de notre époque où le poète doit se faire marchand, bateleur, histrion pour diffuser ses livres et se faire un nom dans un milieu si foisonnant ? Que penserait-il de sa cote sur le marché de l'art ? de tous ces commentaires de commentaires qui envahissent nos papiers, nos écrans ?
A l'instar de la lettre pirouette rédigée en autodérision par Outers à la fin de l'ouvrage, que HM nous permette avec cette présente glose un pied-de-nez aussi paradoxal qu'enthousiaste.
Commenter  J’apprécie          00
L'oeuvre ne réclame pas d'autres scènes que la sienne. Elle se mani­feste dans le recueille­ment, le creux du silence. Lequel ne peut se gre­ver des remugles de vani­tés d'usage. Ses lettres res­tent donc des voyages dans le « non ». Ce mot devient l'emblème et la clé de l'oeuvre. le silence, la paix doivent se méri­ter afin que le tra­vail suive son cours. C'est pour­quoi là où d'autres se trou­ve­raient tou­chés, Michaux se sent atteint dans son inté­grité : non seule­ment il fait le gros dos, il recule.
Lien : http://www.lelitteraire.com/..
Commenter  J’apprécie          10


critiques presse (1)
NonFiction
26 août 2016
Il faut donc remercier Jean-Luc Outers pour ce recueil « à l’agressivité tonique », comme il le dit dans sa belle présentation des lettres écrites entre 1931 et 1984, joliment intitulée une « philosophie du non ».
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Paris , le 5.6.77

(...)
La distance est nécessaire à mes écrits. C'est une illusion que de vouloir les rendre publics et en public. Ils y perdent leur retenue. C'est perdre leur nature.
Sans transgression, on ne peut aller à un certain public. Et je n'ai nulle , nulle envie de plus de public. Et si jamais j'en avais , ce ne serait que de lecteurs et non de spectateurs. Je n'en dis pas plus. (p. 136)
Commenter  J’apprécie          210
A Jean Paulhan

Novembre 1934

(...) Maintenant la photo. C'est extraordinaire, cette manie des photos. J'ai écrit pour qu'on puisse justement se passer d'une photo de moi. Me suis-je assez montré ! Eh bien qu'Est-ce qu'il leur faut encore ?
Je vais justement faire faire une radioscopie de mes poumons, car ça ne va pas fort là-dedans.
Je la lui enverrai, et un agrandissement de mon nombril. Soyez tranquille, c'est présentable, le cordon ne pend plus. On l'a coupé proprement, en temps voulu. (p. 32)
Commenter  J’apprécie          110
Le 15 .11. 1965 (...)

Cher Robert Bréchon,
(...)
Je cherche une secrétaire qui sache pour moi de quarante à cinquante façons écrire" non" (p. 93)
Commenter  J’apprécie          260
A Marcel Arland
¨Paris, le 1er juillet 1976

(...)
Attendez la fin de ma vie qui ne saurait tarder. Lorsqu'est arrivé le moment où sur le corps se désorganisant tout tour à tour devient danger grave, la chaleur de l'été, le froid de l'hiver, le manger , le mouvement, la mer, la montagne, les émotions, la lumière et les médicament mêmes, alors la fatale disparition est proche. Du moins, que je ne finisse pas gavé de mon propre nom. (p. p.125)
Commenter  J’apprécie          70
A René Tavernier

Mai 1944

Comme je vous connaissais mal ! Ainsi malgré votre allure évasive, vous êtes un travailleur, et un de ces damnés travailleurs qui asticotent les autres pour qu'ils travaillent aussi. (...)
Déjà vous avez détruit ma réputation de sage étendu toute la journée sur son lit. Abandonnons-la puisque je ne la mérite plus.
Mais je vous prie, laissez-moi encore un peu celle d'un homme qui "travaille par inaction" (p. 49)
Commenter  J’apprécie          60

Videos de Henri Michaux (48) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Henri Michaux
Sacha Guitry, Victor Hugo, Henri Michaux, Raymond Devos... Tous ces noms furent les auteurs de textes illustres, qu'André Dussollier convoque et ressuscite sur la scène des Bouffes parisiens depuis le 18 janvier. Rencontre avec cet acteur à trois césars et récompensé du Molière du comédien.
#theatre #cinema #andredussollier __________ Venez participer au Book club, on vous attend par ici https://www.instagram.com/bookclubculture_ Et sur les réseaux sociaux avec le hashtag #bookclubculture
Retrouvez votre rendez-vous littéraire quotidien https://youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrqL4fBA4¤££¤9Henri Michaux20¤££¤ ou sur le site https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/bienvenue-au-book-club-part-2
Suivez France Culture sur : Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture Twitter : https://twitter.com/franceculture Instagram : https://www.instagram.com/franceculture TikTok : https://www.tiktok.com/@franceculture Twitch : https://www.twitch.tv/franceculture
+ Lire la suite
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (30) Voir plus



Quiz Voir plus

La Traversée

Quel est le nom de naissance de Sam ?

Saybe
Thimothée
Seyba

10 questions
60 lecteurs ont répondu
Thème : La traversée de Jean-Christophe TixierCréer un quiz sur ce livre

{* *}