Une quarantaine d'oeuvres présentées dans l'exposition « Poussin et Dieu » au Louvre sont reproduites dans ce hors-série. Mieux qu'un catalogue de belles images, nous aurons droit à des commentaires de quelques-unes de ces oeuvres, placées pour l'occasion sur le plan d'observation biographique et culturel.
L'idée principale soutenue par l'exposition révèle qu'il est impossible de séparer le sacré et le profane dans les oeuvres de Nicolas Poussin. Après les premières années romanes du peintre et la multiplication des commandes qui lui étaient dédiées, il devint peintre du Roi pour la gloire de Dieu et de son sujet temporel lors de son séjour parisien entre 1640-1642. Ses thématiques devinrent indubitablement sacrées lors de son retour à Rome et surtout à partir des années 1650.
Par le biais de l'analyse de quelques-unes de ses oeuvres les plus fameuses, on peut observer que Nicolas Poussin s'inscrit dans la tradition de l'exégèse chrétienne. Il propose une synthèse des traditions chrétienne et antique et donne un sens chrétien à des thèmes et des symboles païens. le dossier s'attarde particulièrement sur la figure de Moïse, qui fit l'objet d'une vingtaine de tableaux du peintre, et sur son amitié avec le collectionneur Chantelou qui contribua largement à sa gloire.
Ce magazine de belle facture permet d'englober rapidement l'oeuvre de Nicolas Poussin et de comprendre les figures et thématiques récurrentes de ses réalisations, pour une première approche qui sait se montrer accessible sans élucider la part de mystère qui entoure encore ce peintre.
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Nicolas Poussin, considéré comme l'un des grands peintres classiques du Grand Siècle avec Philippe de Champaigne, Claude Lorrain... passa quarante ans sans bouger de Rome. Ses succès en Italie parvinrent aux oreilles de Louis XIII et Richelieu qui l'attirèrent à Paris où il fut nommé peintre royal pendant deux ans ; puis il retourna définitivement à Rome où il était toujours considéré comme un grand peintre français et où il était le représentant quasi officiel de la Couronne.
"Ma nature, écrit Poussin, me pousse à rechercher les choses bien ordonnées et à fuir la confusion qui m'est contraire et ennemie, tout comme les ténèbres le sont à la lumière".
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Les anti-humanistes les plus rigoureux, jansénistes notamment qui abaissent l'homme, le pensant incapable de faire le bien sans l'aide de Dieu, ont reproché à Poussin de mêler éléments profanes et sacrés. L'art de Poussin relève en effet d'un comparatisme qui considère que certains personnages antiques ont pressenti les vérités chrétiennes, mais que la tradition antique demeure subordonnée à la Révélation.
Car le genre du paysage, depuis au moins L'Orage de Giorgione, cultive volontiers le mode énigmatique. Il permet d'exprimer des sentiments ou des idées qui ne passeraient pas forcément dans les formulations explicites de l'historia, qu'Alberti définissait comme la représentation d'une certaine action jouée sur la scène du tableau par différents personnages.
Poussin s’est appuyé sur des auteurs juifs de l’Antiquité comme Flavius Josèphe ou Philon d’Alexandrie, qui commentèrent ou paraphrasèrent l’Ancien Testament, influencés eux-mêmes par la tradition de l’allégorie grecque.
Le peintre médite à la manière de saint Augustin sur l’ordre du monde, le danger des passions et la quête de la sagesse.
Génie du lieu, présence du divin dans la solitude, évocation de la destinée humaine soumise aux lois de la Providence : le paysage chez Poussin permet de dire tout cela.