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EAN : 9782738119049
544 pages
Odile Jacob (14/11/2008)
3.31/5   8 notes
Résumé :

"J'ai écrit ce livre à partir de la matière de mes trente années d'enseignement au Collège de France. J'y traite aussi bien de la culture et de l'art - de la musique et de la peinture - que de la vie en société, de l'éthique et de la signification de la mort; aussi bien des langues et de l'écriture que des bases neurales et moléculaires de la mémoire et de l'apprentissage. Ce livre est une fresque qui... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
En 1983, avec L'Homme Neuronal, Jean-Pierre Changeux présente certaines découvertes fondamentales sur le fonctionnement cérébral, mais surtout il assigne une mission épistémologique aux neurosciences naissantes, parmi lesquelles personnellement je comprends : la biologie moléculaire, la chimie neurologique, la génétique, l'embryologie, la neuropathologie, l'imagérie médicale et, par extension, l'anatomie et la physiologie neurologiques comparées entre l'homme et les autres animaux. La mission est la suivante : créer des ponts entre les neurosciences et les sciences humaines sur des sujets anciennement réservés à la spéculation philosophique, dont spécifiquement les trois indiqués par le titre : la théorie de la connaissance, l'esthétique et l'éthique. Chacun peut s'apercevoir de l'ambition immense de cette mission épistémologique.
Vingt-cinq ans plus tard, en 2008, dans ce gros volume, je pense que l'intention de l'auteur a été de faire un point sur sa progression. Pour ce faire, il a rassemblé, dans un plan en quatre grandes parties qui ne va pas toujours de soi, un total de vingt chapitres (7+5+7+1) chacun desquels constitue le contenu d'une année de cours au Collège de France, professé des années 80 au début des années 2000. Chaque chapitre est donc une unité indépendante, mise à jour à l'année de sa rédaction (donc quelquefois déjà très daté), comportant donc quelques répétition d'un chapitre à l'autre, et surtout impliquant une très grande diversité de « réussite » que les différentes recherches scientifiques ont eue à apporter des réponses à la thématique assignée. En effet Changeux, et cela va tout à son honneur, a pour habitude d'introduire ses problématiques par une histoire de la pensée, notamment philosophique, qui s'y est attelé, en commençant souvent par la philosophie grecque. Sauf que, à l'évidence, les neurosciences n'ont pas encore fourni de réponse à tout, et les sciences au sens large, lorsqu'elles sont convoquées, sont très disparates : psychologie cognitive, éthologie, linguistique, et parfois, encore « uniquement » la bonne vieille philosophie... Ces cours, de plus, tels qu'ils sont reproduits sans aucun travail de vulgarisation, sont toujours très techniques (sans doute les participants aux leçons du Collège de France sont-ils priés de prendre connaissance d'une bibliographie communiquée préalablement !) : par conséquent, la lecture exige une connaissance approfondie d'une multitude de disciplines différentes, pour finalement arriver à des conclusions... qui n'ont rien à voir avec les neurosciences, voire qui peuvent être prises, épistémologiquement parlant, comme l'expression de la simple théorie philosophique de l'auteur... Ainsi de l'esthétique, qui reprend et précise à peine une citation de... Michel Onfray (pas exactement un neuroscientifique) ! Personnellement, je suis donc sorti épuisé de cette lecture (qui aurait été franchement impossible sans le confinement), soulagé seulement par les trois synthèses par Claude Debru à la fin des trois premières parties ainsi que par la Conclusion, car ces synthèses contiennent les éléments que j'avais moi-même considérés remarquables. Néanmoins, je crois que je retiendrai beaucoup moins de cette lecture que de celle de L'Homme neuronal, hormis peut-être de « cocher » ce à quoi les neurosciences ont/avaient apporté une réponse. Je pense surtout à la conscience, en partie au langage, à la mort. Et ce n'est pas peu. Je reste sur ma faim quant à la musique et au « plaisir de penser ». Mais un lecteur qui approche l'ouvrage comme une Encyclopédie, prêt à apprendre autant qu'il le peut sur une variété de sujets qu'il connaît déjà, en sera sans doute ravi. [Peut-être aurait-ce été le cas de mon père].

Table des matières [assortie d'observations personnelles] :

Première Partie : À la découverte d'un nouveau monde – Vers une neuroscience du bien et du beau.

Chapitre Premier : Une conception naturaliste du monde [Histoire philosophique]
Chap. II : L'évolution culturelle [Théories éthiques – jusqu'au modèle évolutionniste du lien social]
Chap. III : La coévolution gènes-culture et le comportement coopératif [Sélection de parentèle, « donnant-donnant » ou sélection de groupe – en génétique]
Chap. IV : Neurosciences et normativité éthique [Théories psychologiques de l'attribution des états mentaux à autrui, théorie de « l'inhibiteur de violence » en éthologie]
Chap. V : Neuroesthétique (1) – les arts plastiques [L'esthétique en philosophie, théories physiques de la lumière, la « conservation » de l'image dans la rétine, biophysique de la couleur, théorie esthétique de l'auteur fondée sur : l'empathie, la sympathie et la « contestation du monde », la « capacité d'éveil » de l'oeuvre d'art, « création artistique et darwinisme mental »]
Chap VI : Neuroesthétique (2) – musique et peinture [l'esthétique selon l'auteur : « Consensus partium et parcimonie », « Synesthésie : le syndrome de Rimbaud », « Consonances et dissonances », apports de la pathologie : « les amusies », apports de la psychologie : « Frissons musicaux et réponse émotionnelle à la musique »]
Chap. VII : Physiologie du collectionneur et de la collection [La collection conçue comme un instrument herméneutique – idée philosophique qui m'intéresse]

Deuxième Partie : La « bête rugissante » - Cognition et langage

Chap. I : Les bases neurales de la conscience [le ch. culmine par le « modèle Dehaene – Changeux de l'espace de travail neuronal conscient »]
Chap II : Conscience et interaction sociale [Théories de la communication et cybernétique, les « neurones miroirs », théories philosophiques de l'esprit et théorie psychologique de la capacité d'attribution (bis), modèle de l'espace de travail conscient (bis) théorie de la « récompense partagée » : un « modèle neuronal de la "normalisation sociale" »]
Chap. III : Les bases neuronales du langage [Théories du langage, analyse critique de la théorie chomskienne du caractère inné de la prédisposition du cerveau de l'homme au langage, « Neurophysiologie du langage]
Chap. IV : Épigenèse du signe [Théories linguistiques et sémiotiques, apports des neurosciences à la linguistique : « Synaptogenèse et effets de l'expérience au cours du développement », « Théorie de l'épigenèse par stabilisation sélective de synapses » (Changeux, 1983), « Des mots et des choses : l'imagerie cérébrale du sens »]
Chap V : Les empreintes cérébrales de l'écriture [Histoire de l'écriture, enfin : « Neuropsychologie de l'écriture »]

Troisième Partie : Les « atomes psychiques » - Biologie moléculaire du cerveau

Chap I : Gènes et phylogenèse [Bases de l'évolutionnisme, paléontologie du cerveau, génétique évolutive de l'hominisation]
Chap II : le développement de la forme du cerveau [« Préformation ou épigenèse ? », l'exemple de la drosophile, « Turing et l'évolution du cerveau » (cybernétique), « Critique de la notion de programme génétique »]
Chap III : La variation du cerveau [« Mécanismes génétiques de la variation du système nerveux », culmine par la « Critique de la position empiriste »]
Chap. IV : La découverte des récepteurs de neurotransmetteurs [Synthèse des découvertes de Changeux, 1983]
Chap. V : Les mécanismes cellulaires et moléculaires de l'apprentissage [Théories de l'apprentissage, de la psychologie expérimentale à « l'approche cognitiviste », modèle cellulaire d'apprentissage chez la limace de mer (cf. Changeux, 1983)]
Chap. VI : Chimie de la conscience [« Chimie des états de veille et de sommeil », histoire des anesthésiques généraux]
Chap. VII : Signification de la mort [d'un point de vue évolutionniste avec le passage aux organismes pluricellulaires, théories philosophiques et mythes religieux de la mort]

Quatrième Partie : Où en sommes-nous aujourd'hui ? - de L'Homme neuronal à L'Homme de vérité : perspectives
[Histoire des sciences du cerveau, origines du cerveau humain en génétique, « Épigenèse par stabilisation sélective des synapses » (bis), « Problèmes de conscience » (cf. Changeux, 1983)]
Conclusion : le Beau, le Bien, le Vrai
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Ceci n'est pas réellement une critique, mais plutôt un commentaire à destination de ceux qui, comme moi, s'interrogent sur la dimension esthétique (le beau) en neurosciences.

Ce livre est en effet un des rares à en traiter, mais il faut avoir conscience que (malgré le titre) seuls les chapitres 5, 6 et 7, plus la conclusion, traitent réellement de ce sujet. Soient environ 60 pages sur 423.

Le reste est constitué de cours assez généraux sur les neurosciences au Collège de France.
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Ce livre a changé ma vie. Peu de livres peuvent se vanter du même résultat ! Par sa profondeur, son intelligence, par l'immensité des connaissances mobilisées, le sérieux des expériences et des conclusions proposées, par la culture artistique, linguistique et historique, bref par l'ampleur du panorama intellectuel que nous propose ici Jean-Pierre Changeux, je peux dire que ce livre fait partie des perles rares de la littérature mondiale. Il est de ceux que j'emporterai sur l'île déserte. Je suis infiniment reconnaissant à M. Changeux d'avoir écrit un tel livre en une langue parfaite de bout en bout (le français en l'occurence) et de m'avoir tant fait découvrir.
Lien : https://www.blogger.com/blog..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Plusieurs présupposés idéologiques, qui sont monnaie courante dans les sciences de l’homme, doivent être déconstruits. Première opposition réductrice : la dualité corps-esprit. Le programme de la neuroscience contemporaine est d’abolir cette distinction archaïque, fondée sur une ignorance délibérée des progrès de la connaissance scientifique : il est, précisément, d’établir une relation de causalité réciproque entre l’organisation neurale et l’activité qui s’y développe et se manifeste par l’actualisation d’un comportement (ou d’un processus mental) défini. L’extrême complexité de l’organisation fonctionnelle de notre cerveau, jusque-là insoupçonnée, doit être prise en compte, qui inclut les multiples histoires évolutives passées et présentes, emboîtées les unes dans les autres : génétiques et épigénétiques, développementales, cognitives, mentales et socioculturelles, chacune déposant une trace matérielle singulière dans cette organisation. (p. 104)
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[Sur la problématique de la conscience, qui m'intéresse vivement, avec réf. récente à Llinas – Stériade, 2006]
« La riche connectivité réciproque entre thalamus et cortex participerait à la genèse d'oscillations dont les divers "modes" signeraient les états de conscience distincts. Dans le mode "relais", les EEG sont désynchronisés comme pendant l'éveil ou le sommeil paradoxal. Dans le mode "oscillant", les EEG sont synchronisés comme pendant le sommeil lent. Le mode relais serait associé à la décharge tonique des neurones thalamiques ; le mode oscillant à des décharges en rafales avec longues périodes d'inhibition et potentiels d'action Ca++ lents. Les neurones cholinergiques du tronc cérébral […] interviendraient dans le passage d'un mode à l'autre et les entrées sensorielles lors de l'éveil "mettraient à l'heure" les rythmes internes avec corrélation temporelles des activités spontanées et évoquées […] La conscience serait une "propriété intrinsèque" résultant de l'expression de ces dispositions dans des conditions de cohérence définie ; elle assumerait la "reconstruction de la réalité extérieure en une réalité neurale intérieure".
Cette activité assurerait la cohérence temporelle à travers l'ensemble du cerveau ainsi que la simulation de la réalité. L'organisation radiale ou "verticale" des relations thalamocorticales interviendrait dans la "liaison" temporelle des composants fragmentés de la réalité externe et de la vie interne du sujet en une seule construction, le "soi". Selon Llinas, la subjectivité, ou le soi, serait engendrée par le dialogue entre le thalamus et le cortex. » (p. 213)
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La prise en compte des progrès de la science dans l'activité normative apporte un fort contingent d'universalité à la réflexion éthique. p. 101
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Vidéo de Jean-Pierre Changeux
Colloque de rentrée 2015 : Lumière, lumières Conférence du jeudi 15 octobre 2015 : La lumière au siècle des Lumières et aujourd'hui, de la biologie de la vision à une nouvelle conception du monde, de Newton à Henri Grégoire et aux Droits de l'Homme
Intervenant(s) : Jean-Pierre Changeux, Collège de France
Retrouvez la présentation et les vidéos du colloque : https://www.college-de-france.fr/site/colloque-2015
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