Publié dans un premier temps chez Libri Nova, le roman de
Marjorie Tixier est édité en ce début d'année par Fleuve Noir. Une reconnaissance méritée pour cette histoire construite et racontée de façon originale et attachante.
Dans les premiers chapitres, l'auteur présente les personnages, leur mode de vie, leurs craintes, leurs doutes et leurs interrogations. Elle laisse à penser que sous le bonheur assumé, des cadavres se cachent dans les placards. le style est clair précis mais laisse planer une ombre…
Laurence est infirmière et court une fois par semaine ses écouteurs aux oreilles
« Me voilà devant cent mètres de ligne droite, c'est comme un sorbet après un repas trop copieux. Mes jambes se détendent, mon rythme cardiaque ralentit. »
Charles, le père de Laurence souffre de la mort de son épouse Anne :
« (…) jusqu'à preuve du contraire, je crois que personne n'a encore jamais pensé à inventer les cercueils à deux places. Il y a bien des lits à deux places. »
Annie la plus jeune fille de Laurence découvre le monde des adultes
« Un jour, j'ai vu une émission à la télé où une dame cuisinait de petits oiseaux à la chair tendre, des ortolans, je crois. Elle les mangeait ensuite, comme ça, en entier. Elle gobait l'oisillon après l'avoir trempé dans la sauce, ça coulait sur son menton, c'était dégueu ! »
Edmond le père n'en revient pas encore d'avoir épousé Laurence
« Quand Laurence a bien voulu m'épouser j'ai cru qu'elle avait fait une erreur dont elle s'apercevrait très vite. Elle n'a pas changé d'avis, m'a donné deux filles, est restée la même, toute de douceur, jamais triste, juste pensive, parfois, aspirée par un rêve, un rêve de voyage probablement. »
Sans rien dévoiler de l'intrigue, tout au long de la lecture on sent qu'un drame va se produire en suivant la joggeuses dans la forêt…
D'autres éléments viennent confirmer ce sentiment :
Thérèse, la voisine, épie Laurence de sa fenêtre, un rien de nostalgie dans la tête
« Quand je m'installe, à midi pile, pour dîner (parce que moi, c'est comme ça que je dis les choses), ma poitrine se pose naturellement sur le rebord de la table. Mes seins sont ma serviette, dans quelques années, ils deviendront mon bavoir. »
Jérôme, un flic de la ville fait son boulot avec conscience.
« On est trois dans la voiture, tous en uniforme pour l'escorter. On traverse la ville, deux villages et un bout de forêt avant d'arriver au grand pré. Je connais bien le secteur, j'y passe quand je cours. C'est une prairie avec vue plongeante sur la ville et le lac. »
Claude, le banquier est sûr de lui
« J'étais mignon, si mignon qu'elles craquaient. Si j'avais eu un maître, il m'aurait fallu encore plus d'adresse pour retomber sur mes pieds, mais ça ne m'est jamais arrivé. »
La suite du récit confirme le sentiment du lecteur.
Marjorie Tixier aborde un sujet qui a fait souvent la une de l'actualité. Son récit est précis, juste, crédible sans excès. Elle décrit la lutte d'une femme pour recouvrer son intégrité physique et psychologique après une agression dont elle subit les séquelles longtemps après. le rôle de la famille est également présenté avec justesse.
La justesse de ton, une grand qualité de ce roman qui pour une première tentative sur un sujet sensible est une réussite.
A lire absolument.
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