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Sofia Laznik-Galves (Traducteur)
EAN : 9782742751693
396 pages
Actes Sud (01/10/2004)
4/5   23 notes
Résumé :
L'enfer existe sur Terre ; il a pour nom Berimbau, une des favelas de Rio, et pour damnés les misérables qui y vivent– bandits, prostituées, femmes de ménage ou cireurs de chaussures.
Si certains d'entre eux se résignent à accepter leur misère, trouvant des palliatifs dans la religion, la drogue ou les feuilletons américains, d'autres se révoltent, prêts à tout pour tenter d'échapper au déterminisme social.
Petit Roi est l'incarnation de ces insoumis... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Un hélicoptère de la police tourne dans le ciel. Flack Flack. le bruit des pâles qui brassent l'air chaud et étouffant de cette fin d'après-midi. Schlack Schlack. Des bruits, des rumeurs, une descente de police au soleil tombé. La butte est encerclée. Les premiers tirs commencent, fusils AR-15 et HK-47, comme à un concert de hard-rock, explosions de grenades, comme à un concert de funk. Mais ici, favela Berimbau, Rio de Janeiro, c'est la samba qui coule son rythme sur une terre de poussière et de linges colorés séchant au vent. Une fumée épaisse. Puis le silence au petit matin. Les débris d'un hélicoptère. du sang séché mêlé à la poussière. La vie reprend. Les policiers ont été refoulés à l'extérieur de la favela. Boum. Les tambours rejouent la joie de vivre, l'insouciance pour oublier la peur ou la misère. Boum. On compte les morts dans chacun des camps. Mais la butte reste là, fidèle à son point de vue. Les guetteurs reprennent du service. le regard porté sur le vent. Attendant la prochaine livraison. de drogue. D'armes. de larmes. Boum. Une musique défile dans l'étroitesse des ruelles. le carnaval toute l'année...

Petit Roi et ses soldats est devenu le Prince de la favela. le maître qui promène ses pitbulls avec une horde féminine prête à lui apporter une bière fraîche. Et dire que sa mère veut l'envoyer à l'école… A quoi sert de résoudre une équation, si la seule inconnue de la vie est de savoir qui sera le prochain qui te plantera un couteau dans le dos. C'est pour cette raison que Petit Roi, du haut de ses seize ans, a son propre code de conduite : tue ceux qui te gênent, sans remords, sans semonces. Tuer ou être tuer, il n'y a que ces deux alternatives dans la favela Berimbau.

Alors tu montes sur la butte, une sorte de mirador sans les barbelés autour, mais avec une myriade de fils électriques qui pendent de partout. Tu poses ton regard sur l'horizon et tu vois un champ d'antennes satellites qui poussent comme des marguerites après une pluie d'eau tiède. Tu respires encore la poudre d'hier, cette odeur de soufre dans l'air. Les yeux rougis par l'autre poudre que tu t'es collée dans le nez, tu écoutes le son de la vie : des postes de télévision branchés 24h sur 24 sur des novelas à l'eau de rose, des ghettos-blasters qui crachent des onomatopées de hip-hop, des caisses claires qui cognent dans ce labyrinthe. Tout ça, c'est ton territoire. Fragile. En un clin d'oeil, l'honneur, l'argent, les armes peuvent te basculer en « Enfer ». le tout dans une plume magnifique et tourbillonnante de Patricia Melo, premier roman de l'auteure brésilienne que je découvre et pas le dernier, depuis j'en ai acheté d'autres...
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Enfer raconte la vie dans une favela de Rio de Janeiro autour de Petit Roi, un gamin de 11 ans.
[...] À 11 ans, José Luis, dit Petit Roi, n'a jamais vraiment été à l'école. Et pour cause, il veut devenir narcotrafiquant et gagner de l'argent pour avoir une vie décente et se payer des extras.
Peu de perspectives honnêtes s'offrent à lui pour s'en sortir dans la vie : entre être cireur de chaussures pour 3 sous ou travailler pour Big Milton, le leader de la butte de Berimbau, Petit Roi n'hésite pas longtemps ! Mais lorsque Big Milton lui enjoint à aller à l'école plutôt que de traîner dans ses pattes, Petit Roi commence à sombrer dans la drogue…

Le destin de Petit Roi ne fait que commencer. Il apprendra le code d'honneur, les règlements de compte, les courses poursuites avec les flics, tantôt ennemis, tantôt complices du trafic, mais aussi la trahison et la souffrance, et deviendra le grand leader incontesté.
[...] Aux côtés de Petit Roi gravitent Alzira, sa mère, Carolaine sa soeur, et Marta, son amie. Trois femmes qui, dans ce roman, incarnent trois destins différents. [...]
Notamment Carolaine, bercée par les histoires romantiques des télénovelas, seul moment d'abstraction de cette vie infernale, est déjà mère à quatorze ans. Pourtant, elle n'assume pas pour autant les conséquences de ses rencontres avec des hommes et ne supporte pas ses enfants. Elle ne pense qu'à s'amuser et à dilapider l'argent de sa mère au lieu de chercher à s'en sortir, et s'enfonce dans la misère et la dépendance.
[...] Enfer raconte la vie d'une favela, mettant en scène une galerie de personnages aux destins tous très marquants. Des vies éphémères, pleines de violences, de règlements de compte et de trahisons, de souffrances et de frustrations, de manque d'amour et de reconnaissance. Des vies détruites d'avance, ficelées par la misère, le chômage, l'échec de l'école et de l'ascension sociale, la complicité et l'impuissance des policiers, l'abandon de l'État et des services publics brésiliens.
[...] Ce roman, par bien des aspects plus complet que O Matador, est porté par un style percutant et remarquable, utilisant avec habileté et fluidité le discours indirect libre. le style de Patricia Melo, qui laisse toute la place à la vacuité, à la violence d'une vie de malheurs, donne lieu à de beaux passages, aussi terribles que déstabilisants.
L'article entier sur Bibliolingus :
http://www.bibliolingus.fr/enfer-patricia-melo-a117391504
Lien : http://www.bibliolingus.fr/e..
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ENFER DE PATRÍCIA MELO
José Luis habite une des grandes favélas de Rio. Sa mère est violente, ne lui a jamais dit qui est son père et il a une soeur Carolaine qui se nourrit de feuilletons, les télénovelas. Sur la butte de Berimbeau on le surnomme Petit Roi et son rêve est de travailler pour Big Milton qui contrôle tout ce qui est illégal, drogue et armes. Mais il n'a que dix ans alors on lui conseille de faire plutôt des petits boulots et de s'éloigner de tous les trafics. Mais cirer les chaussures pour quelques centavos ne lui va pas, il refuse d'aller à l'école et va progressivement intégrer l'organisation de Big Milton. On va suivre son assimilation dans la bande, sa découverte des femmes, ses amours, sa participation aux luttes entre les gangs rivaux pour le contrôle des buttes et de la drogue jusqu'à cette ascension qu'il désire tant.
Le monde impitoyable des favélas, un univers quasi sans espoir où seuls les trafiquants qui ont argent et pouvoir font rêver les enfants. C'est l'enfer que nous décrit brillamment et dans un style percutant Patrícia Melo, fait de phrases courtes et incisives qui nous font avaler ce roman plein de vie jusqu'à une fin surprenante.
Patrícia Melo est une auteure brésilienne née en 1962 et qui a publié une dizaine de livres.
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A seulement 10 ans, José Luis dit « Petit Roi » a déjà une longue expérience derrière lui. Né dans les favelas de Rio, la vie n'a pas été tendre avec lui : sa mère est violente, son père inconnu et son environnement complètement infecté par la drogue. Sur la butte de Berimbau, le trafiquant suprême Big Milton gouverne en maître. Patricia Melonous raconte alors la vie de Petit Roi au coeur de cet enfer, elle nous parachute dans son quotidien d'informateur, de consommateur, de soldat et enfin de chef. Son écriture est particulière : les dialogues s'incrustent dans la narration sans crier gare, le vocabulaire est fleuri et authentique, le style est brut de décoffrage, sans fioriture stylistique. le rythme de ce récit, enfin, est hypnotisant : il nous transperce et se loge en nous de telle sorte que l'on sait avant même d'avoir refermé ce livre que l'on se souviendra de sa musique pendant longtemps. Les personnages dont elle nous parle prennent quasiment le dessus et finissent chaque paragraphe en nous donnant l'impression de n'être pas seulement un individu de papier, mais aussi un narrateur de l'histoire, un homme réel. On s'attache alors à tous ces gens, Rosa Maria, Suzana, Onofre,… et surtout à Petit Roi. Patricia Melosait donner une âme à ses personnages et nous offre avec Enfer un roman saisissant, pour lequel il faut peut-être avoir le coeur bien accroché.
Lien : http://ulostcontrol.blogspot..
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Ce roman, qui raconte l'ascension d'un gamin dans sa favela par le trafic de drogue, est à la fois effrayant, dans le constat qu'il fait du clivage existant entre l'Etat brésilien et la société des favelas, et rassurant dans la description d'une société auto-organisée qui se met en place malgré tout. Ceci étant, la main-mise des trafiquants de drogue sur les favelas n'invite pas à l'optimisme, comme l'expose la trajectoire du protagoniste du livre.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Lecteur disait tout le temps qu'il fallait en finir avec cette mascarade de "pénalisation de la drogue", il citait et récitait sans cesse à ses amis des extraits d'un livre qu'il venait de lire à ce sujet : est-ce que le haschisch est nuisible ? Et la boxe ? Et l'alpinisme ? Et les courses de voitures autour de la lagune ? Pourquoi ce n'est pas interdit ? Pourquoi est-ce qu'on n'interdit pas l'obésité, qui tue des millions de gens dans le monde ? On veut que les citoyens ne se foutent pas en l'air et on légalise la cigarette et l'alcool. Ça a autant de bon sens que de mettre un calibre .38 entre les mains d'un suicidaire. On fume jusqu'à crever d'un cancer. On boit jusqu'à crever d'une cirrhose. Le tabac et l'alcool, eux, oui, ils tuent. Les hypocrites. Je comprends qu'un pays comme les États-Unis adopte cette politique, avec tous les puritains qu'il y a là-bas, ces péquenots de l'Ohio, qui à seize ans portent des tee-shirts marqués "I Love Jesus", mais ici ? Les filles d'ici apprennent toutes jeunes, à la télé, que tout ce qui compte c'est d'avoir les cheveux blonds et les fesses dures. Rien d'autre. Et on ne pourrait pas fumer un joint ? Ni sniffer de la coke ? C'est trop hypocrite, disait-il. L'alcool, on a le droit, le tabac, on a le droit. On peut se bourrer de pilules coupe-faim, de pilules qui nous foutent la chiasse à longueur de journée, encore et toujours des pilules, des pilules pour se réveiller, pour dormir, on est accros, c'est bien connu, à la télé, à la bouffe, au sexe et au lithium, mais la coke et l'herbe sont interdites sous prétexte qu'elles rendent accro. Elles rendent accro ?
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Boum. 9 heures du matin. Ciel noir, tempête à l'horizon. Feu rouge. Maria Emilia, en route vers le coiffeur, fut dépouillée par un gamin qui la menaça avec un tesson de bouteille. Quelques minutes plus tard, Simone, secrétaire dans une multinationale, se mettait du rouge à lèvres en se regardant dans le rétroviseur lorsque surgit un garçon, menaçant, un tesson de bouteille à la main. Si tu cries, tu passes à la trappe. Ana, étudiante en droit, filez-moi votre sac madame, dit le gamin, filez-moi votre sac, madame, et pas un geste. Tesson de bouteille à la main. Amélia, cinquante-quatre ans, au téléphone, racontait à son fils qu'elle avait été agressée dans la matinée, je n'avais rien sur moi, un coup de chance, mon garçon. Il ne m'a pris que ma montre. Ce que je voudrais, dit Simone, en parlant encore avec son amie, au bureau, du vol dont elle avait été victime, ce que je voudrais c'est attraper un de ces gamins et le frapper, le frapper, lui donner une raclée telle qu'il serait bon pour l'hosto le malheureux. Ceci est un hold-up, dit le gamin à Angélica, dix-huit ans, jeune fille hystérique qui rentrait tout juste de ses vacances aux États-Unis. Tesson de bouteille à la main. Je rentre de Miami, et, la première fois que je prends ma voiture, je me fais agresser. Voilà le Brésil, dit elle. Aucune des victimes n'a porté plainte.
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J'ai tué un homme, chers fidèles. Alléluia. Et ce n'était pas une vengeance, ou à cause d'une discorde, d'une rancœur ou d'une dispute. C'est triste à dire, et c'est ce qui m'achève. Je l'ai tué pour de l'argent. Alléluia, Dieu est notre père.
Un homme d'un certain âge, trapu et tout en muscles, pathétique dans ses expressions, faisait le récit de son drame devant une assemblée de pauvres, de souffreteux, de vieillards désemparés, d'infirmes avec leurs béquilles, de veuves, de mères dont l'enfant était mort, de paralytiques sur des fauteuils roulants, de femmes abandonnées par leur mari, de jeunes au chômage, d'ex-alcooliques, d'ex-prostituées, habitant tous la favela et vêtus de leurs meilleurs habits.
Je me souviens, messieurs-dames, poursuivit l'homme qui prêchait, je me souviens que lorsque j'étais dans ma cachette, guettant le pauvre gars que j'allais tuer de sang-froid, alléluia, ce malheureux qui ne m'avait rien fait, j'ai vu, messieurs-dames, de ma cachette, j'ai vu l'image de la Vierge Marie, alléluia, je l'ai vue, messieurs-dames, j'étais sur le perron d'une maison modeste, la maison d'un travailleur, j'ai vu cette petite statue qu'on avait placée là pour qu'elle veille sur la famille, comme c'est la coutume dans beaucoup de maisons par ici, j'ai vu, chers fidèles, la Vierge avec son petit enfant dans les bras, un bébé, et à ce moment-là, chers fidèles, moi, mon revolver à la main, alléluia, je n'ai pas compris, messieurs-dames, que Dieu m'envoyait un signe, en plaçant la Vierge sous mes yeux, les pleurs du bébé, je ne voyais rien, chers fidèles, je ne remarquais pas ces signes du ciel, parce que j'étais bras dessus bras dessous avec le démon.
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Lecteur toujours des bouquins sous le bras, une cigarette à la main, en compagnie de femmes bien en chair, je vais te dire une chose, puisque tu es là, je vais te dire une chose, ce qui lui plaît à Lecteur c'est une bonne grosse louloute de quatre-vingts kilos, lui raconta Onofre. Une bonne grosse. Tu es en âge de comprendre, pas vrai ? il lui demandait d'un air malicieux, avec des gestes obscènes pour mimer l'acte. Hein ? Tu l'as déjà fait ? Baiser. Les femmes. Leurs petites chattes. Leurs bonnes petites founes, hein ? Toutes mouillées. Hum. Les sucer. Lecteur lui, Petit Roi, il adore faire la queue à la banque, à l'hôpital, au centre des impôts, ce genre de queues. Il reste là, à observer les employées, les filles des guichets, les hôtesses d'accueil, et quand il tombe sur la grassouillette de service, le genre jeune molle, noire ou blanche, noire le plus souvent, quand il tombe sur la fille, le genre qui n'a jamais eu de mec, la fille seule qui n'a jamais vu une bonne bite, en manque quoi, il lui fait sa fête, Lecteur. Il déverse ses sornettes d'amour sur la fille et en deux temps trois mouvements elle se retrouve dans sa piaule. Lecteur, celui-là, dit Onofre, en se penchant sur la table, à l'oreille de Petit Roi, celui-là c'est un baiseur de grosses. Il paraît que c'est quelque chose, une grosse au plumard. Un truc hallucinant. Le ciel qui vous tombe sur la tête. Tu y crois, toi, Petit Roi ? Il paraît qu'ils le font même sur la gazinière. Allumée, la gazinière.
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Arrivé aux grilles de la Promenade publique, Fake ouvrit sa braguette et pissa, en regardant le ciel. Ah, pisser à la belle étoile, c'est le bonheur. Depuis qu'il était sorti de prison, deux jours plus tôt, il n'avait que cette phrase à la bouche. Je sais pas ce qui me prend, Petit Roi, mais j'ai des pensées philosophiques dès que je me mets à pisser à la belle étoile. Je pisse et je pense à des trucs super-sérieux, c'est comme ça que je pisse en méditant. Le Bonheur.
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