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EAN : 9782930607702
76 pages
Les Carnets du Dessert de Lune (21/05/2018)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Et aussi les arbres – Isabelle Bonat-Luciani
Genre : Poésie. Avant-Propos : Manuel Plaza. Collection Pleine Lune.
Format 14 cm x 20 cm. 76 pages imprimées sur papier bouffant 90 gr et Conqueror Vergé 250 gr.
ISBN 978-2-930607-70-2. 13 €.

(...) Les arbres ne sont là pour personne, croit-on. La fascination sylvestre sait pourtant résister au brasier adolescent, et à son extinction. Ça s’est déjà vu. Les arbres sont un absolu. Au dét... >Voir plus
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Et aussi les arbres – Isabelle Bonat-Luciani
Genre : Poésie. Avant‐Propos : Manuel Plaza. Collection Pleine Lune.
Format 14 cm x 20 cm. 76 pages imprimées sur papier bouffant 90 gr et Conqueror Vergé 250 gr. ISBN 9782930607702. 13 €.

Et aussi les arbres – Isabelle Bonat-Luciani
Genre : Poésie. Avant‐Propos : Manuel Plaza. Collection Pleine Lune.
Format 14 cm x 20 cm. 76 pages imprimées sur papier bouffant 90 gr et Conqueror Vergé 250 gr. ISBN 9782930607702. 13 €.

Il y a bien des façons de chanter un baiser, à la manière d’Alain Souchon ou bien en écoutant la petite musique intime nichée dans la poésie d’Isabelle Bonat-Luciani. « Nos bouches étaient cousues / mais là où le cœur chavire. J’ai encore sa langue dans ma bouche. À chaque fois. Il était une fois. Les histoires commencent ainsi.
En prenant pour fil conducteur un morceau de pop rock qui donne son titre au livre, l’auteure dévide un écheveau crânien d’abord sagement coiffé, puis de plus en plus échevelé au fur et à mesure que les souvenirs remontent à la surface, d’abord douceâtres, puis abrupts, pour devenir aussi sales qu’une casserole laissée trop longtemps dans l’évier.
Comme dans une chanson des « Cure », les mots sont des instruments. Ils jouent à perdre haleine et entraînent le lecteur dans un pas de deux à vocation rédemptrice, sinon salvatrice.
Du seul baiser donné à Arnaud par la narratrice, surgissent de sa lampe d’Aladin, soixante pages d’une intensité rare de nos jours, toutes en pudeurs contenues où l’érotisme naît de l’impromptu, à tel point qu’un mot aussi banal que « cul » paraît cru et presque obscène quand il claque au coin d’une page.
Chez Isabelle Bonat-Luciani, le baiser tient lieu de madeleine. Elle ne le plonge pas dans une tasse de thé au risque de l’effriter et qu’il se dissolve, mais l’éparpille en petits morceaux dans un recueil écrit plume battant la chamade.

L’auteure fait aussi sienne la stratégie du Petit Poucet. Les petits cailloux qu’elle sème au fil du livre sont autant d’indices pour trouver le chemin d’une vérité enfouie dans les déconvenues et l’érosion du temps qui passe. « Nous habitions des ruines / où le chagrin transformait la mort en sommeil / pour que les sexes ressuscitent / et se taisent / et tombent / détruisent / et nous brisent / dès le premier baiser. »
Dans le maelstrom des grandes découvertes de l’adolescence, beautés fragiles et pincements au cœur se répondent, s’enlacent, s’étreignent. Mais ni l’un ni l’autre ne se muent en non lieu lorsque des années plus tard, adulte solitaire à la terrasse d’un café, la narratrice accouche le non dit d’un secret de famille, pourtant de polichinelle. « Toute ma peau y pense. Toute ma peau frémit et la page tremble / tant elle te présume / dans le geste de ma main / où naissent les rivages / et les ravages affleurent. » Car le cadavre adoré, jamais vraiment enterré, et donc jamais vraiment déterré, est un révélateur. Il a le don de transcender une vie, de lui tenir lieu de guide.

Avec Et aussi les arbres, IBL relate l’apprentissage amer des faiblesses du genre humain. Elle les raconte avec autant d’indulgence que de désenchantement. Le sensible féminin s’égratigne au rocailleux d’un cursus social formaté par l’homme dominant. Il s’y blesse, en souffre, se déconfit en sourdine, mais trouve in fine au fond de son être la force nécessaire pour exulter dans un long mantra /chanson d’amour, même si quelque chose de la grâce s’est perdu dans l’aventure. « « J’ai deux corps / l’un qui prend / l’autre qui retient / l’un qui déchire / l’autre qui recoud / et dans mes mains / un exil irrévocable. »
© Jean Azarel in http://www.autourdesauteurs.fr/2018/09/03/et-aussi-les-arbres-disabelle-bonat-luciani-une-chronique-de-jean-azarel/

Entre deux scènes de bistrot qu’elle tient, observant avec acuité la clientèle, une jeune femme rameute quelques souvenirs âpres d’un passé proche, de plus loin encore lorsqu’enfant, jeune ado elle connut la sensualité, l’amour. Fut-ce un amour interdit ? Le lecteur suit ces longs poèmes qui s’infiltrent dans une conscience sans cesse alertée, où le moindre fait, entre rêve et réalité, prend assise : la mémoire donne des tableaux assez crus, naturalistes, d’une famille, avec un père absent, revenu de la guerre, qui n’honore plus l’épouse pour cause, avec un jeune Arnaud fou de Robert Smith et des Cure, avec cette femme qui n’a pu oublier tous les moments passés avec cet Arnaud, victime par ailleurs d’un beau-père incestueux : du moins le poème l’affiche comme sûr, et même la mère de fiction le savait.
Dans une atmosphère qui rappelle – et ce n’est pas le moindre mérite de l’auteur – celle que « Blesse ronce noire » de Claude Louis-Combet avait peinte, avec ses amours fous et interdits, le livre énonce sans cesse la lisière de ce qui peut être dit, ou enfoui, secret, pathologique, au sein d’une famille.
L’écriture, en longs thrènes rageurs et rebelles, donne à sentir une émotion que le temps a conservée intacte : les mots ou les scènes d’amour, de gestes sont là, à portée de mots, sans une once de travestissement sentimental.
Une réussite, qui vaut aussi pour l’exploration, peu traitée, des corps qui se débattent, des âmes qui se souviennent, des sensations brutes de délaissement, d’effroi. La mort de la mère est en elle-même un tombeau de tous les départs.
Violence, amour en « marge », « mots agglutinés dans la chair », « nous habitions des ruines » - ce château symbolique du refuge de la jeune femme - : « les mots se déploient comme le font les oiseaux » sont bien l’expression d’une ferveur anéantie, qu’il faille retrouver comme l’écho perdu, et le poème, et le livre en sont les cristaux de la déperdition.
Un beau livre.
© Philippe Leuckx in Texture, août 2018

Tous les sens de l’auteur sont en éveil à écouter, entendre, distinguer, ressentir à fleur de souvenir jusqu’au trouble qui mêle le haut et le bas, la cime et la racine de l’être, la sève de vivre : « Le ciel a débarrassé le plancher. Il est dans ma tête. Au fin fond. Toujours ça revient ». Les mots sont « tagués » les uns aux autres « pour tenir loin des désordres. Pour tenir loin des solitudes ».
Souvenir d’un premier amour ? Certes. Mais sans « Il était une fois » parce que l’évènement tourne en boucle.
Avec un ton faussement anodin, des choses importantes sont dites, toujours avec cette façon un peu explicative, voire professorale : « Parfois elle lui disait que pour aimer il valait mieux ne jamais rien savoir ».
Avec retours sur l’adolescence, l’image des parents, de la mère plus particulièrement, du corps qui se modifie, la vie en évolution parle à travers le temps qui se souvient de façon obsessionnelle : « Les gens marchent mais c’est dans ton image qui fissure le sol » ou encore : « Lorsque j’approche de ton absence, il y a ce toi bien trop immobile pour regarder ».
L’intrigue persévère ainsi entre châteaux en Espagne à venir construits si possible sur un seul château de sable du passé, semblant doubler le récit sans qu’elle ne se dévoile facilement.
Le secret évolue avec la progression du récit. Mieux que l’intrigue elle-même, on vit une sorte de mystère existentiel, douloureux, profond. Peut-être s’agit-il d’ailleurs du processus même de l’adolescence à appréhender avec ses espoirs et ses dangers.
Même Dieu passe dans ce joyeux désordre. Le langage de l’auteur est boulimique, carnassier, Isabelle ne laissant rien passer jusqu’à ce qu’on comprenne le tragique dénouement : « Je me souviens de ta tempe abritant un trou mais que je n’avais pas su regarder. Alors je chante les chants que tu m’as laissés » .
Le rêve et le cauchemar procèdent de la même origine. Cette manière d’écrire fait, à mon sens, partie d’un mouvement qu’on pourrait qualifier de « sensitif », quelque chose du balbutiement de nos recherches popularisées de la profondeur d’être, une sorte de psychanalyse vulgarisée à la compréhension de tous, exprimée comme : « Je ne sais pas ce qui remue dans mon corps prend ou donne. C’est bruyant et sourd faisant naître des chemins jusqu’à ma tête ».
Jean-Louis Massot, éditeur et auteur lui-même, initie ses choix de manière à révéler, in fine, un quasi mouvement créatif global qui ressemblerait à sa recherche personnelle profonde. Choisir des auteurs et des textes procède également de l’acte créatif. Et c’est fort le cas pour « Et aussi les arbres », le titre du livre intriguant lui-même jusqu’aux racines neurologiques d’une écrivaine qui pense ce qu’elle écrit avec une conviction vitale et essentielle.
© Patrick Devaux, juillet 2018

Et aussi les arbres d'Isabelle Bonat-Luciani est un récit autant qu'une suite poétique dont les vers ont souvent de longs déplis.
Tous les matins, la narratrice entre dans son bistrot et s'installe à sa table. Elle regarde le trompe l'oeil d'une fenêtre sur un mur. Elle se souvient, "le corps pareil au cadavre d'un animal que la mort aurait négligé d'emporter tout à fait". Une coccinelle se pose sur sa main et le souvenir grandit avec l'enfance retrouvée. En eaux troubles. Mais comment "mettre à nu les entraves" dans l'inquiétante relation avec l'inquiétant Arnaud ? Est-il totalement un homme ? Ne serait-il pas plutôt un oiseau ? A moins qu'il soit un peu les deux tout en restant enfant sous le regard de la mère dont il est l'amant !
Une femme bien étrange, cette mère ! Qui pleure comme elle pisse pour taire absolument le grand secret. Dans une famille de guingois. Le père, revenu d'une guerre de l'autre côté du monde (en Indochine ?) n'a plus d'assiduités que pour ses bouts rimés qui posent et imposent "son nombril sur la table".
La narratrice évoque son corps "irrémédiable" et [son ventre qui prend toute la place dans son cerveau] lorsque la mère lui dit que maintenant elle est formée. Elle évoque aussi le château imaginaire partagé avec Arnaud. Un château foisonnant et labyrinthique, rongé par un mal mystérieux comme dans le Gormenghast de Mervyn Peake.
Puis la coccinelle s'envole. Le souvenir s'apaise et trouve des contours plus sûrs, avec le désir inentamé. Le chant de Robert Smith (du groupe anglais The Cure), jusque là presque en sourdine, monte en puissance et apprête le corps "mince cloison poreuse" et.
Et.
Isabelle Bonat-Luciani, présentée comme une punkette qui ne craint pas la kryptonite, nous offre avec Et aussi les arbres un texte émouvant (notamment sur "le corps en carcasse" qui maigrit...), servi par une palette allant du plus trash au plus lyrique teinté d'onirisme. Les opacités y sont aussi nombreuses que les évidences. Il faudrait peut-être changer la fenêtre du trompe l'oeil. Mais comment le vitrier saurait-il donner le jour ?
Donnons enfin la parole à Manuel Plaza qui signe l'avant-propos du livre : "C'est là que se tient IBL, je crois, dans ce non-lieu de non-dits où tout n'est que sensation, dans ce paysage qui est la demeure de chaque femme, de chaque homme, dans ce qu'ils se disent avec ou sans les mots, et qui ressemble à ce que se disent les arbres entre eux. On ne parle jamais mieux qu'à ceux qui ne sont plus là pour entendre."
Extraits :
Arnaud et son geste.
Arnaud et sa main.
Dans ma bouche il tourne tout ce qui traîne et résiste.
Dans ma bouche il dédale
et je m'installe dans un imaginaire
où nous pourrions revenir au futur.
Je ralentis mes pas
et retiens nos innocences.
*
S'il fallait t'écrire à un endroit
la marge serait blanche
emplie de mots empêchés
tel un ciel trop loin.
Les mots se sont agglutinés dans la chair.
Toute ma peau y pense.
Elle te présume
dans le geste de ma main
où naissent les rivages
et les ravages affleurent
© Dominique Boudou in https://dominique-boudou.blogspot.com/2018/05/isabelle-bonat-luciani-et-aussi-les.html?spref=fb

"Et aussi les arbres" appartiennent aussi bien au passé qu'au présent, à la nuit qu'au jour, au corps qu'à l'esprit, aux chansons rock qu'aux musiques langoureuses, aux coccinelles amoureuses qu'aux mères omniprésentes et aux pères absents. Tout cela dans un climat où seules les émotions - et elles sont nombreuses et variées - donnent le rythme, forment des ponts plus ou moins solides entre les textes de chaque page ; et des refrains pour accompagner cette voix intérieure que rien ne peut taire. Si bien qu'arrivé à la fin du livre, on a envie de le reprendre encore et encore pour revoir toutes ces images et mieux les savourer dans leur subtilité et leur sensualité. Un recueil pénétrant - à tous les points de vue - addictif et si juste. Bravo Isabelle Bonat-Luciani ! Bravo ! C'est publié aux Carnets du Dessert de Lune.
© Thierry Radière, juin 2018
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