Frederic Dard dit San Antonio : un portrait

" Je le Jure "est un roman autobiographique ou plutôt , une sorte de confession de San-Antonio ou Frédéric Dard pour les intimes .IL raconte ses débuts dans la vie et aussi sa réussite en tant que romancier de polars à succès Mais quelle vie en effet !
Vie d 'orgueil et de revanche d 'un gosse révolté contre la bêtise des grandes personnes , la pubonderie lyonnaise , la cruauté des autres enfants ; vie de misère
et de colère entre le Rhône et la Saône où l 'ignoble le dispute au burlesque .
Puis vient le temps de la gloire , le fabuleux succès en librairie , la consécration qu ' apportent les thèses universitaires . C 'est alors , pour l 'écrivain , la douleur
d 'exister à travers les mots rebelles qu ' il faut arracher un à un au néant . Mais c 'est aussi pour le mari et le père , le temps des désunions et des déchirements
avant que ne vienne enfin celui de la tendresse et de la réussite . San-Antonio est derrière la création de beaucoup de néologismes qui sont passés à la postèrité et , ainsi , enrissant la langue française .
Ecrivant cette confession , l 'auteur fait cette dédicace :
" Sophie Lannes est arrivée un beau matin bardée de magnétophones , dans
mon chalet , de Gstaad.ELLE m ' y a sequestrée et m 'a arraché les confidences suivantes . C 'est à elle que je dédie son livre . Frédéric Dard . "
Je à San-Antonio faire l ' intoduction de son livre :
" J ' étais assis dans le train de Lyon . Un type , signes particuliers néant , à peu près mon âge , un peu plus corpulent que moi , cheveux en brosse , est entré dans mon compartiment et s' est installé en face de moi . IL a tiré un livre de la poche de son manteau et s 'est mis à lire . Moi , curieux , comme toujours , j 'ai contorsionné le cou : c ' était un San-Antonio .Je me suis mis anxieusement , à l 'affût derrière mon journal . IL avait l 'air de prendre du plaisir , il poussait même des gloussements . A un moment donné , il a ri suffisamment fort pour éprouver une certaine honte de s 'abandonner ainsi en présence d 'un tiers , il a baissé son livre et m 'a regardé avec un peu de gêne .
J ai frétillé :
-ça a l 'air drôle ce que vous lisez .....
-Oh ! oui , mais ce n 'est pas tant à cause du bouquin . C 'est que je connais
l 'auteur . d'ailleurs , San-Antonio , ce n 'est pas son vrai nom . IL s 'appelle
Frédéric Dard .
Un coup dans le rétroviseur pour savoir dans quel coin de mon passé je l 'avais remisé . Un ancien condisciple que la vie a malmené comme moi ? La communale ? Bourgoin ? Lyon ? Rien.Le blanc .
En face , ça se faisait volubile : " bon coup de fourchette , San-Antonio , franc buveur , assez corpulent , les yeux bleus , tout déplumé ...." J 'attendais : Un type un peu dans votre genre , quoi . " Non , même pas . Et il me raconte tout , mes trois enfants , mes deux mariages , mon suicide , mes goûts vestimentaires , la Suisse ...Un portrait un peu tremblé , comme s ' il m 'avait donné le thème astral du cancer que je suis , mais absolument concordant .
--Je l 'ai connu il y a très longtemps .Nous nous voyons à peu près tous les mois
Oui ,ça , je le connais bien .
Ma mémoire s 'est rassurée : c ' était un mytho qui venait probablement de lire un article sur moi ...IL m 'a laissé perplexe .
Qu 'on puisse , de l 'extérieur , avoir une idée complète de moi , se procurer ma notice comme pour un produit pharmaceutique avec la composition , la posologie ,
le mode d 'emploi du bonhomme ça me plaisait par son côté surréaliste . Par moments , l 'envie me prend de faire ma fiche , moi qui sais presque rien de moi !
Ce que je suis , d 'où je viens , et pourquoi je vis .
Avoir ma pièce d ' identité . Et puis le téléphone sonne , ou je m 'endors .
A ce voyageur inconnu qui vivait dans l ' intimité de San-Antonio ,j 'ai dit ,sincèrement , là , oui ,du fond de mon coeur :
--Vous avez de la chance de le connaître , ce type-là .

Un dialogue entre Jean Durieux, ancien rédacteur en chef de Paris Match et Frédéric Dard. On y découvre ici un Frédéric Dard qui se dévoile, qui raconte son enfance, les évènements marquants de sa vie. On découvre aussi une personne très sensible. Cet ouvrage qui m'a été envoyé dans le cadre de "Masse critique", m'a plu et intéressée bien que je ne sois pas une inconditionnelle de F. Dard.

Qui est Frédéric Dard ? L'extraordinaire succès de San Antonio a créé un mystère autour de la vraie personnalité de l'écrivain français, créateur du Bérurier. S'il n'a pas dédaigné de s'expliquer dans deux livres autobiographiques, C'est mourir un peu (1967) et Je le jure (1973), Frédéric Dard était resté très discret sur les événements qui bouleversèrent sa vie, l'enlèvement de sa fille Joséphine en particulier... (4ème de couverture)

Un dialogue entre l'écrivain et le journaliste. A travers les mots, on découvre un homme sensible dont la vie ressemble à une fiction pas toujours drôle. On ne s'ennuie pas avec le père de San Antonio. Mais Frédéric Dard c'est aussi le théâtre, l'ami fidèle, l'homme qui faillit perdre sa fille dans les années 80, l'homme amoureux de sa femme Françoise, pillier de son équilibre, à laquelle il fait sans cesse allusion au cours de l'entretien. Un bon moment de détente à la découverte d'un écrivain aux nombreuses facettes.
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