En fait, on meurt trois fois. La première fois, quand on se rend compte, enfant, que la mort, non seulement existe, mais qu'elle est aussi pour nous. Avant, on ne sait pas. On est éternel. Dès qu'on sait que la mort existe, qu'on est promis à la mort, ben..., on meurt. On tombe en dépression. C'est vers je ne sais pas quel âge... C'est assez bizarre que Freud n'ait pas parlé de ça. La deuxième fois qu'on meurt, c'est quand on pense qu'on ne sera plus jamais aimé. Le premier amour: ça y est, on est avec quelq'un pour la vie? C'est certain c'est l'homme de ma vie. Mais en fait, c'est le coup de la répétition névrotique, on a choisi exactement celui qu'il fallait pour revivre tous les traumas, donc ça se passe mal, et on se quitte, et on reste seul, et puis ça merde, c'est de petits amours, de faux amours, et alors on se dit jamais plus je ne trouverai personne pour m'aimer, et là on meurt, pour la deuxième fois. La troisième fois est la bonne. A ça, il faut ajouter qu'on meurt avec chaque chose qui meurt et chaque personne qui meurt. Ah, la, la, c'est pas facile...Donc, on n'arrête pas de mourir. La vie, c'est chiant.
Un jour nous avons eu une conversation par méls interposés avec Tim sur ce qu’était « une œuvre purement gay » comme il l’avait écrit dans un article d’Illico et il m’a cloué le bec en m’écrivant ceci : « Il y a de l’art gay, parce que les gays ont décidé que telles ou telles œuvres les représentaient (lecture rétinienne) ou les structuraient (lecture d’appropriation) ».
Je l'ai déjà dit, et je le répète, moi je suis eugéniste, je n'ai pas le culte de la misère.
Qu'on ne s'y trompe pas, je me considère comme totalement féministe, c'est-à-dire que je suis contre l'idée même de la femme.
C'est ça qui est terrible avec les adultes, c'est de voir à quel point c'est des enfants qui ont arrêté. Arrêté de dessiner, arrêté d'écrire, arrêté de chanter, arrêté de jouer, arrêté de regarder, arrêté d'associer, arrêté tout...
OEUVRES II DE GUILLAUME DUSTAN
Rencontre avec Thomas Clerc & Frédéric Boyer
C'est le deuxième volume des oeuvres complètes, après un premier tome paru en 2013.
Génie divin, LxiR et Nicolas Pages (Prix de Flore 2000), publiés aux éditions Balland dans la collection « le Rayon » entre 1999 et 2002, forment la trilogie de ce nouveau volume. Les trois livres marquent un tournant décisif dans l'oeuvre de Guillaume Dustan, mort en 2005.
Là où la première trilogie déroulait un thème unique (le sexe) dans des cadres strictement définis (la chambre, la boîte de nuit, les back-rooms), ces trois livres, notamment Nicolas Pages, prouvent que Dustan n'est pas seulement un pornographe accompli, mais aussi « un capteur du sentiment amoureux », comme l'explique l'écrivain Thomas Clerc qui dirige cette édition, auteur d'une longue préface. La pensée et les textes de Dustan contrastent fortement avec l'époque de moralisation et de régression qui est la nôtre. La première trilogie exposait un mode de vie essentiellement axé sur le plaisir sexuel, Dustan prolonge cette revendication pour en faire un programme de vie, une sorte de projet politique. Il relie politique du désir et progressisme social, sur le double modèle du libéralisme et du libertarisme.
À lire – Guillaume Dustan, Oeuvres II, POL, 2021.
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