Il y a des auteurs qui ne peuvent pas s'empêcher de faire de l'idéologie dans leurs textes. Sans doute y voient-ils une manière de mener un combat qui est par ailleurs peut-être fort louable, à condition toutefois de faire cela avec intelligence, mesure, modération, sous peine de tomber dans la caricature et donc de produire une oeuvre de mauvaise qualité, à l'image de cette daube infâme que nous a pondu
Romain Slocombe.
De ce recueil de nouvelles, je n'ai lu que celle éponyme, reprise dans une série intitulée les Petits Polars du Monde, mais je n'aurais de toutes façon pas lu les autres puisque j'aurais jeté le livre par la fenêtre sitôt après avoir fini celle-ci.
Ce texte est mauvais non pas parce qu'il est mal écrit (le style est correct) mais parce qu'il est grossièrement caricatural, pour la raison évoquée plus haut.
Romain Slocombe ne raconte pas ici une histoire mais fait de l'idéologie, et il le fait sans finesse aucune mais au contraire en exagérant à un point tel qu'il en perd toute crédibilité. Ses cibles? La France de province, qu'il ne voit qu'à travers le prisme de ses préjugés et de sa bien-pensance parisienne, et la Police, Institution composée selon lui de gens brutaux et sans foi ni loi.
La France profonde, c'est pour
Romain Slocombe des gens gros, laids, bêtes; en somme des ploucs (le mot est d'ailleurs utilisé dans le texte). Bien évidemment, tous ces gens, au nombre desquels on trouve quelques skinheads, sont xénophobes et sans doute racistes et, pour une bonne partie d'entre eux, votent pour des partis d'extrême-droite. Leur bêtise et leur étroitesse d'esprit les rend dangereux et font qu'ils n'hésitent pas à s'en prendre en toute impunité aux gens de la ville. Enfin, les restaurants qu'on trouve dans cette France profonde sont à l'image des habitants: chers et proposant de la nourriture immangeable, servie par du personnel malaimable au possible.
Vous trouvez cela un tantinet exagéré? Ce n'et rien à côté de la manière dont sont présentés les policiers. Voyez plutôt: ils assassinent des gens en toute impunité et en étant bien sûr couverts par leur hiérarchie, violent des petites filles en ne prenant même pas la peine d'enlever leur uniforme ou encore arrêtent des gens pour des motifs arbitraires, le tout en n'étant jamais inquiétés par la Justice. Ce procédé, qui consiste à salir une profession et ceux qui l'exercent en dépeignant des situations parfaitement exagérées et même tout bonnement irréalistes (la Police et la Gendarmerie Nationale font partie des institutions les plus surveillées et les plus contrôlées de France, et jamais ne serait-ce que
le dixième de ce que décrit
Romain Slocombe ne pourrait se produire) est tout simplement ignoble et répugnant.
De la première à la dernière ligne, ce torchon transpire la haine et le mépris de classe et est bien révélateur de la mentalité des bourgeois parisiens bien pensants comme
Romain Slocombe qui prétendent être proches du peuple mais qui en réalité
le détestent et ont en plus le culot d'étaler sans vergogne cette détestation dans les livres qu'ils écrivent.
Si vous êtes du même bord idéologique que M.
Slocombe et que les outrances et la caricature ne vous choquent pas, alors vous devriez aimer ce texte; pour les autres, jetez-le à la poubelle sans même l'avoir ouvert, cela vous évitera de perdre votre temps.
A noter que dans la série des Petits Polars du Monde, une autre nouvelle concurrence celle-ci dans l'exagération et la mauvaise foi: il s'agit de
Que ta volonté soit faite, de
Marin Ledun, texte dans lequel nous est décrite la vie dans un établissement d'enseignement catholique, description toute en nuances et en objectivité puisque tous les élèves ou presque sont des fachos, nostalgiques de Pétain, antisémites et ayant tous des sympathies prononcées pour un certain parti d'extrême-droite. En quelques pages,
Marin Ledun, dont certains titres m'avaient pourtant attiré, s'est à tout jamais décrédibilisé à mes yeux. On attend avec impatience le même récit mais qui se déroulerait cette fois dans une école coranique...
Les autres nouvelles de la série ne sont pas toutes aussi outrancières, Dieu merci, mais on sent quand même que la plupart sont dans le très politiquement correct. L'ensemble est de qualité assez moyenne (hormis les deux titres susmentionnés dont je ne parlerai plus), et seuls quatre titres parviennent à mon sens à tirer leur éping
le du jeu:
Hostiles, de
Franck Thilliez,
Chérie noire, de
Caryl Férey, Boulevard du Midi, de Brigitte Aubert, et
Dernier été, de
Patrick Pécherot, nouvel
le dans laquelle nous faisons la connaisance du peintre Frédric Bazille, mort à l'âge de 29 ans pendant la guerre de 1870.