AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Ici sous l'étoile polaire tome 1 sur 3
EAN : 9782915727258
475 pages
Les Bons Caractères (15/03/2011)
4.88/5   4 notes
Résumé :
Ici, sous l'Etoile polaire retrace la vie de Youssi, métayer dans un village de Finlande, des années 1880 à 1914. C'est une chronique de la dure vie paysanne, quand existaient encore des rapports sociaux proches du servage, quand les métayers de parcelles minuscules et les ouvriers agricoles des grands domaines subissaient la loi des propriétaires terriens, lorsque la nature hostile n'offrait aucun répit. Mais c'est également une chronique rythmée par les événements... >Voir plus
Que lire après Ici sous l'étoile polaire, tome 1Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Cette lecture répond à un besoin que j'avais du mal à formuler. Les histoires, qu'elles soient de l'imaginaire pur ou retraçant des faits réels, sont toujours le fait d'individus en fonction de leur cheminement personnel. Où est le groupe social là dedans ? La communauté ? La société ? Voire la géopolitique ?
Certes, c'est bien plus complexe à écrire, mais c'est plus proche de la manière dont je perçois L Histoire. Je n'ai pas envie qu'on me raconte comment tel courageux héros a changé seul la face du monde ; je ne crois plus à ce conte. Je veux comprendre comment les populations se défendent face aux oppresseurs, et ce malgré leurs revendications divergeantes.
Je n'espérais plus trouver un roman qui montrent ces évolutions lentes et complexes. Mais ce livre est exactement dans cette veine. C'est bien plus qu'une histoire d'individus, mais d'unions, de classes, de tout un peuple.

Nous sommes immergés dans le quotidien d'un village finlandais, non loin de la ville industrielle de Tampere. La Finlande en cette fin de XIXème siècle n'est qu'un duché au sein de l'Empire russe. le servage y existait encore jusqu'en 1861. En 1880, où commence le récit, la récence de cette abolition a de lourdes conséquences sur l'ordre social. Ce sont en effet les métayers qui travaillent désormais les terres des propriétaires en échange d'une partie de la récolte. Et leurs droits de vote locaux vont à leurs propriétaires !
Youssi est un métayer par exemple, alors que c'est lui-même qui a rendu le marais cultivable à la force de ses bras, de sa volonté et de sa seule houe. Il incarne le « sisu » : notion chère à l'identité finlandaise de la persévérance, de la tenacité, et de la résiliance.

Face à une telle injustice systématique, les idées socialistes s'affirment, mais surtout dans les milieux intellectuels. Halme, tailleur relativement aisé dans ce milieu rural, prône par exemple des idéaux socialiste, révolutionnaire, féministe, pro-finnois, et aspire à une éducation des masses populaires. Son entourage semble assez hermétique à ses grands discours emphatiques. Demeure aussi la question de savoir si le socialisme est applicable ici, car il ne concerne en théorie que les pays industrialisés, ce que cette Finlande rurale n'est clairement pas.
Comme pour illustrer que l'oppression engendre l'oppression, le trop grand nombre de jours de redevance exigés aux métayers empêchent les familles de s'occuper de leurs « simples d'esprit », ce qui conduit à de la maltraitance. Il y a bien une maison accueillant les pauvres et les fous, mais le directeur considère qu'ils ne sont pas fous mais « retors ».

Chez la classe sociale dominante, une autre fracture apparaît à travers la « querelle des langues ». le suédois est la langue de la bourgeoisie, le finnois celle du peuple. Par nationalisme, certains de la classe bourgeoise dits « fennomanes » abandonnent leur culture suédoise pour celle finnoise. Ce n'est pas sans conséquence dans ce milieu ultra codifié, où le mépris du finnois engendre insultes et moqueries.
Si les fennomanes se veulent plus proches du peuple, le finnois n'est pourtant pas leur langue maternelle, et la langue littéraire qu'ils apprennent reste très éloignée de celle utilisée dans les campagnes.
Il y a un dialogue que j'ai trouvé brillant entre Youssi, métayer de langue finnoise, et son propriétaire, un pasteur fennomane. Il y a un tel fossé entre eux qu'ils ne peuvent se comprendre, ni dans les mots ni dans les idées. Ce qui conduit le pasteur à agir en oppresseur sans même s'en rendre compte, car ses actions sont dans la norme de ce qui se fait dans son milieu. Ce dialogue donne un aperçu de toute la complexité des rapports sociaux, où l'on a tôt fait de conclure qu'une personne qui ne comprend pas nos mots vaut moins que nous. J'ai trouvé passionnantes ces immersions dans des points de vue extrêmement éloignés.

Cela nous amène en 1899, année où le Tsar Nicolas II Romanov de Russie proclame « le Manifeste », ordonnant pratiquement la russification de la Finlande. Annexer un pays et supprimer sa culture est une chose terrible. Mais... une russification apporterait la « loi agraire », les terres louées reviendraient aux agriculteurs qui les cultivent, c'est-à-dire enfin l'indépendance des métaieries. Vaut-il mieux un État finlandais libre ou le peuple finlandais libre de leurs propriétaires ? le dilemme est corsé...
Bien sûr, on pourrait attendre une loi agraire sans russification, mais pourquoi la classe dominante ferait passer une telle loi contre leurs intérêts ? La question concrète est plutôt : quelle force les travailleurs ont-il pour se défendre ?
La grève générale !


En conclusion, j'ai eu un véritable coup de coeur pour cette fresque s'étalant de 1880 à 1914 avec ses personnages attachants et sa vie de village. Ils vivent de grands événements historiques de loin et à échelle humaine, et parfois y contribuent eux-mêmes directement.
C'est une histoire d'oppressions ; des métayers par les propriétaires, de la culture finnoise par celle suédoise, de la Finlande par la Russie, des femmes par les hommes... Mais l'espoir est permis par la lutte pour améliorer son sort, et cela nécessite avant tout l'union. J'ai trouvé ces luttes grandioses, sans jamais être toutefois idéalisées.

Grâce à cette lecture j'ai énormément appris sur l'Histoire de la Finlande et sur la montée du socialisme. Des notes de bas de page ressituent les nombreuses références culturelles, qui m'ont permis de découvrir des oeuvres telles que le Bouleau et l'Étoile de Topélius, le Kalevala de Lönnrot, L'Enseigne Stool de Runeberg, les poèmes d'Alexis Kivi le père de la littérature finnoise, ou l'hymne « Oy Maamme... » de Runeberg composé par Pacius. J'irai piocher dans cette liste pour poursuivre ma découverte de la culture finnoise. Et je me plongerai avec certitude et plaisir dans le deuxième tome de cette trilogie d'Ici, sous l'Étoile polaire.
Commenter  J’apprécie          10
A lire absolument! Cela dit, je ne suis peut-être pas complètement objective, en tant que passionnée de la culture finlandaise!
Ce livre pourrait être comparé (et l'a d'ailleurs été à de nombreuses reprises!) à Emile Zola. Sa description de la société finlandaise à la fin de XIXe siècle est très complète et très réaliste.
De plus, je trouve le personnage principal, Jussi, très attachant.

Seul bémol : ce livre est le premier d'une trilogie dont le dernier livre n'a jamais été traduit en Français. Il existe cependant une traduction en anglais. Mais ce livre peut également être lu seul.
Commenter  J’apprécie          53
Premier tome d'une trilogie consacrée à la guerre civile finlandaise en 1918, Ici sous l'étoile polaire nous plonge au coeur de la société finlandaise de la fin du XIXème siècle, une société scindée entre la très influente bourgeoisie de langue suédoise, et la majorité finnoise encore mal considérée. Dans ce premier tome se mettent en place les germes du conflit fratricide qui va déchirer le pays : la bourgeoisie arrogante et arc-boutée sur ses privilèges, l'arrivée des idées socialistes, la question de l'autonomie de la Finlande au sein de l'Empire russe. On y découvre Jussi, paysan fier qui travaille d'arrache-pied pour construire un avenir pour sa famille. La trilogie se lit d'une traite, tant le contexte historique est passionnant et les personnages attachants.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Les métairies n'étaient ni plus ni moins qu'une forme nouvelle du servage
Commenter  J’apprécie          10
Au commencement était le marais, la houe — et Youssi.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : finlandeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (38) Voir plus



Quiz Voir plus

Etes-vous incollable sur la littérature scandinave ?

Qui est l'auteur du roman "Bruits du cœur" ?

Herbjørg Wassmo
Jens Christian Grondhal
Sofi Oksanen
Jostein Gaarder

15 questions
149 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature scandinaveCréer un quiz sur ce livre

{* *}