AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782715245778
272 pages
Le Mercure de France (31/08/2017)
3.83/5   20 notes
Résumé :
Septembre 1961. Théodore, 18 ans, rend régulièrement visite à son ami Antoine dans un hôpital militaire de la région lyonnaise. Il lui parle, lui fait écouter de la musique. Antoine ne répond jamais, et pour cause ! Il est dans le coma après avoir été blessé en Algérie.
Au même moment, Théo rencontre Mila, une jeune femme mystérieuse : silhouette androgyne, crâne rasé, une longue cicatrice autour du cou… Un peu funambule, un peu magicienne. Ils vont s’aimer i... >Voir plus
Que lire après IndocileVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
3,83

sur 20 notes
5
7 avis
4
3 avis
3
2 avis
2
1 avis
1
0 avis

Le chapitre d'ouverture nous conduit à l'hôpital militaire de Desgenettes, ( Lyon), au chevet d'Antoine, jeune soldat, dans un état comateux. Les visites qu'il reçoit se limitent à celles de sa mère et de Théo, son ami d'enfance. Scènes touchantes de les voir tenter de faire réagir le malade en le touchant, lui parlant.

D'un côté le huis clos de la chambre «  au mur gris », la douleur, la souffrance, la musique de Johnny sur laquelle Théo danse. A l'extérieur des militaires rejoignant le kiosque pour une répétition de la fanfare.

Théo, de la fenêtre de la chambre, se laisse ensuite distraire par des grutiers en difficulté, plein d'admiration pour cette fille «  qui dévale la grue comme un chat ». le narrateur aiguise notre curiosité en précisant que «  Théodore ne sait pas encore que sa vie bascule ». Mais le rythme s'accélère après la rencontre avec la fille à la mobylette, à la conduite sportive. Celle-ci propose à Théo de le conduire à la foire de la Beaucroissant. On suit leur échappée jusqu'au soir à la fête du lac de Paladru.
Une liaison amoureuse naît, gauche pour Théo ( 18ans) qui confesse sa première expérience : «  Ils sont aux abois, ne sachant rien..» de l'amour.
Le romancier explore les corps dans tous ses états.
Assez inattendue la séquence où Théo s'autorise à se «  pignoller », trahi par son corps, découvrant « un plaisir fugace » . Puis c'est les balbutiements des étreintes avec Mila (21ans), l'éveil du désir charnel. Plus fusionnel avec Marianne, la mère d'Antoine, veuve qui sait que « la vie n'attend pas », et se montre insatiable.
Théo va vivre une parenthèse intense dans le cabanon de la Ciotat avec Marianne.
Ils se touchent, se frottent, se caressent, s'étreignent, se désirent.
le vertige les étourdit. Ils se disputent, se quittent, se rabibochent.
Mais est-ce vraiment cela l'amour,vient à s'interroger Théo.

La météo revêt son importance, cet orage qui gronde, ce ciel menaçant, «  d'ébène », renvoie à l'accident dont fut victime Mila.


Yves Bichet nous replonge dans un pan de l'histoire avec la guerre d'Algérie et ses dégâts collatéraux. Sont évoqués les attentats, dont celui contre De Gaulle.
le mot « guerre » scande le début du récit, comme un leitmotiv, il fait peser le poids de la menace. Son héros, Théo, traumatisé de voir son ami dans cet état végétatif, va tenter des ruses lors du conseil de révision, avec la connivence de son père . Il est révolté par cette absurde guerre, qui fracasse la jeunesse, les « envoie au casse-pipe ». de plus tombé amoureux, il veut vivre cet amour absolu. Comment échapper à l'armée ? le narrateur nous embarque dans une cavale éperdue, Théo à la merci de passeurs, renouant avec Mila, abandonnant Marianne. Et des parents inquiets à qui Théo fait gober un chapelet de mensonges. le traqué devient le traqueur.
L'auteur, à travers Théo l'insoumis,antimilitariste, aborde la question des objecteurs de conscience. Il rappelle que ce n'est que le « 23 décembre 1963 que l'Assemblée Nationale adopte le statut. D'où ces vies clandestines et l'existence de passeurs pour conduire en Suisse ces déserteurs.
Il aborde une autre question très polémique : l'acharnement thérapeutique. Quel avenir pour Antoine ?

L'auteur semble affectionner les personnages aux vies clandestines, d'errance, sans domicile fixe. Dans L'homme qui marche on suit un chemineau et Robert qui ont besoin de nature, du clapotis de l'eau du murmure du vent, comme Mila et Théo contemplatifs du lac de Paladru ou du Mont Blanc. Ses personnages font l'amour dans des lieux improbables. Dans le porteur d'ombre, le nid d'amour est une éolienne, dans Indocile c'est une grotte. Autre point commun supplémentaire, le personnage accusé de meurtre est en fait innocent, mais se sacrifie pour un autre.
On croise dans les romans d'Yves Bichet des personnages au bord du gouffre, impliqués dans des imbroglios sidérants. Il y décline l'art de prendre le large.

Yves Bichet a l'art de peindre les paysages traversés, les lieux avec une précision dans le détail des plus étonnantes. Que ce soit la chambre d'hôpital, la caravane de Mila remplie d' objets hétéroclites, le travail de typographe, les attractions de la fête foraine, le récit des efforts des grutiers pour redresser cette grue qui penche comme la tour de Pise. Tout est minutieusement décrit. On devine un connaisseur des chantiers, des banlieues industrielles, qui sait aussi voir la beauté et la poésie des choses.
Le récit est rendu haletant par la profusion de verbes d'action. Variation des pronoms : on passe du narrateur relatant à la 3ème personne ( il, elle) au protagoniste ( je et tu).

Le romancier va ravir, émouvoir les fans de Johnny Hallyday, en immortalisant certaines de ses chansons. le mange-disque avale le 45-tours et "les notes de Retiens la nuit" s'égrènent » avec l'espoir de voir Antoine réagir. Sur le champ de foire, c'est Douce violence que Johnny claironne. Théo fait vrombir le moteur en « chantant à tue-tête » Souvenirs, souvenirs.

Yves Bichet signe un roman d'apprentissage tumultueux, mettant en scène deux adolescents qui découvrent l'amour sur fond de guerre d'Algérie.Leur liaison amoureuse engendre de multiples rebondissements. Coups de théâtre au cours de la désertion de Théo. Les protagonistes passent par la case prison.
L'auteur décortique la traversée du désir chez Théo, « au coeur d'artichaut », paumé, déboussolé, qui ne sait pas choisir entre Marianne et Mila, ce qui alimente un suspense en continu. Pas facile de savoir qui gagnera le coeur de Théo.
Yves Bichet déploie une écriture très cinématographique.
On referme ce roman complexe bien secoué et l'auteur de nous questionner : «  Théo, en fuyant l'appel est-il lâche ou courageux » ?
Commenter  J’apprécie          70
J'attends toujours la sortie des romans d'Yves Bichet avec intérêt, car je ne sais jamais où il va m'embarquer, mais je sais que je vais être surpris. Indocile est le 4e roman que je lis de lui, et je peux dire que je ne suis pas déçu.
La similitude entre tous ses personnages, c'est le décalage. Ils n'entrent pas dans le moule social, dans la catégorie des tièdes, des insipides. Chaque fois, par cette forme de marginalité, il révèle les aspérités de notre société.
Après l'homme qui masturbait les dindons (La Part animale), celui qui marchait sur les pointillés rouges de la frontière (L'Homme qui marche) et ces retraités déjantés (L'Été contraire), voici Théo et Mila, deux ados sur le seuil de l'âge adulte qui doivent apprendre à gérer leurs sentiments, leur corps et leur place dans la société d'une façon instinctive, sans mode d'emploi. Ce n'est pas Marianne, qui pourrait être sa mère, qui va l'aider, ni Antoine, le fils de cette dernière et ami de Théo, qui agonit sur son lit d'hôpital suite à un accident en Algérie. Ces deux jeunes sont paumés et s'improvisent amoureux, tout en se cherchant et en se conjuguant au futur, temps qu'ils n'ont pas l'habitude d'employer.
Outre ce thème, c'est aussi un regard sur la guerre d'Algérie avec ses combats, ses morts idiotes, ses attentats en France, la prise de position des journalistes, sur l'objection de conscience des jeunes qui ne veulent pas aller à une guerre qui ne les concerne pas et qui n'en porte pas le nom. D'ailleurs, Théo, qui refuse de partir, ne met pas de mots politiques sur cette décision, ce n'est pas une question d'objection de conscience, mais un choix simple, intuitif.
Et puis, il y a l'écriture d'Yves, étonnante, captivante. Il arrive, par la mise à la marge de ses personnages, à nous recentrer, sans pour autant nous identifier forcément à eux. Par la complexité qu'il donne à leurs tourments, il dénoue certains troubles intérieurs.
Yves Bichet est peut-être lui aussi à la marge des écrivains contemporains. Pas de recherche de notoriété, pas de surmédiatisation, au grand dam de son éditeur certainement, mais une envie d'écrire fougueuse, profonde et légère à la fois. On est dans l'utopie, dans la solidarité. C'est un roman assez sombre malgré ce qu'il disait à propos de L'Été contraire ("La morosité me casse les pieds"), dans une forme de morosité. C'est là l'intérêt de la diversité des sujets et contextes abordés par l'auteur, une remise à plat à chaque titre, une prise de risque, pour construire un ensemble dont nous ne connaîtrons la forme qu'à la fin, a contrario de nombreux auteurs prolifiques…
Lien : http://dominiquelin.overblog..
Commenter  J’apprécie          55
Nous suivons les états d'âme d'un jeune homme des années soixante, qui assiste son meilleur ami dans le coma, a une aventure avec la mère de celui-ci et découvre l'amour dans les bras d'une belle "foudroyée" (d'ailleurs la foudre et ses coups jouent un rôle majeur dans ce récit).
Les "évènements" devenue guerre d'Algérie sont bien sûr évoqués mais l'auteur s'attarde surtout sur l'évolution du "héros", Théo.
Rien pour m'emballer vraiment (ou plutôt nous emballer car plusieurs lecteurs et lectrices de mon cercle partagent cet avis).
Commenter  J’apprécie          90
Débuter le roman par une scène de masturbation à côté d'un comateux, est-ce bien nécessaire ? Pour en faire un moment subversif, vaguement baudelairien ? Soit ! Parce que finalement je me suis fait prendre, peu à peu, par cette mélopée pathétique que met en place Yves Bichet. Théo aurait bien pu être mon père, parce que lui non plus ne voulait pas la faire, cette sale guerre qui ne dit pas son nom. Peut-être est-ce cela qui m'émeut le plus. C'est aussi un roman qui dit la difficulté d'aimer, d'aimer avec justesse ; une broderie autour de la cristallisation stendhalienne et la décristallisation gidienne. Et finalement on quitte le livre avec regret, parce qu'on a été touché par cette révolte solitaire de la génération sacrifiée des années 60.
Commenter  J’apprécie          50
Un grand merci à Yves Bichet pour ce nouveau roman qui m'a emportée jusqu'à la dernière ligne dans une histoire inattendue, forte et terriblement humaine.
Le récit est beau et les personnages attachants, dans leur découverte de l'amour, de la sexualité, de la vie et de la mort.
J'ai aimé le style incisif, les phrases courtes, percutantes et la grande poésie qui sous tend le récit de bout en bout.
Commenter  J’apprécie          40


critiques presse (1)
LeFigaro
15 septembre 2017
Yves Bichet évoque la guerre d'Algérie à travers la figure d'un déserteur.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Tu fonces, Théodore, et tu réfléchis après. Alors écoute-moi bien. Je suis un homme d'action moi aussi mais j'ai compris depuis belle lurette qu'on avance la tête la première que pour éprouver ses convictions, conforter ses intuitions, se rassurer en un sens. C'est déjà quelque chose, me diras-tu. Sauf que si on fonce trop, on perd pied et il n'y a plus d'intuition qui vaille. Les vérités se dérobent une à une et on reste Gros-Jean comme devant. L'idéal ne précède jamais rien. L'idéal louvoie. Il reste en retrait, à l'affût derrière le courage. Les vraies certitudes arrivent plus tard, Théo. On les guette, on les traque sa vie durant.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Yves Bichet (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Yves Bichet
Et si la poésie était dans le geste, dans le travail des mains, que celui-ci serve à élaborer un poème, ou pour constituer n'importe quel autre objet ?
Les deux poètes Christophe Claro et Yves Bichet expliquent au micro d'Olivia Gesbert ce qui fait selon eux l'essence de la poésie.
#poesie #bookclubculture #culture _____________ Venez participer au Book club, on vous attend par ici https://www.instagram.com/bookclubculture_ Et sur les réseaux sociaux avec le hashtag #bookclubculture
Retrouvez votre rendez-vous littéraire quotidien https://youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrqL4fBA4UoUgqvApxm5Vrqv ou sur le site https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/bienvenue-au-book-club-part-2
Suivez France Culture sur : Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture Twitter : https://twitter.com/franceculture Instagram : https://www.instagram.com/franceculture TikTok : https://www.tiktok.com/@franceculture Twitch : https://www.twitch.tv/franceculture
+ Lire la suite
autres livres classés : guerre d'algérieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (42) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3141 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}