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EAN : 9782724615708
238 pages
Les Presses de Sciences Po (06/11/2014)
3/5   1 notes
Résumé :
Qu'un État refuse de ratifier les conventions multilatérales ou qu'il conteste l'ordre international, et l'on parle d'"État déviant", voire d'"État voyou", tels l'Iran, le Venezuela ou la Somalie. Mais quid des États-Unis ou de la Chine qui, par exemple, n'ont pas ratifié le Statut de Rome créant la Cour pénale internationale ?

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L'espace mondial n'est pas – ou pas seulement – une arène où s'affrontent des puissances. Cette grille de lecture réaliste ne suffit plus dans le monde de l'après-guerre froide. D'autres approches sont nécessaires qui analysent les relations internationales avec les outils de la sociologie. Cette démarche est au coeur de la thèse de sciences politiques soutenue en 2011 à Sciences Po Paris par Soraya Sidani.
D'Émile Durkheim à Robert Merton en passant par Erving Goffman ou Michel Foucault, la déviance a fait l'objet de nombreuses études sociologiques. Soraya Sidani interroge la marginalisation des Etats par rapport aux normes multilatérales avec les mêmes outils. Elle le fait à partir de l'analyse des ratifications des quelque 317 conventions multilatérales enregistrées au siège des Nations unies entre 1945 et 2014. Elle en tire un classement des États par niveau de ratification depuis les Pays Bas qui arrivent en tête avec 214 conventions ratifiées jusqu'au Sud-Soudan 193ème avec 8 conventions ratifiées seulement.
L'utilisation de ce corpus pour analyser la « déviance » soulève une difficulté terminologique. Dévier, qui provient du latin deviare, sortir du chemin, implique une action volontaire. Un État n'est pas déviant malgré lui. Or, comme Soraya Sidani le montre finement, l'absence de ratification d'une convention internationale peut trouver son origine soit dans le refus unilatéral d'un État d'y adhérer soit dans son incapacité à le faire. Si dans le premier cas, il s'agit bien d'une déviance au sens étymologique du terme, l'expression n'est pas appropriée dans le second qui constitue plutôt une marginalisation involontaire ou un défaut d'intégration.

Cette réserve posée, il n'en faut pas moins saluer la clarté de la typologie dressée par Soraya Sidani. Elle distingue deux types de déviances : une déviance subie – qui, pour les motifs exposés plus haut, devrait plutôt selon nous être qualifiée de marginalité – et une déviance souhaitée.
D'un côté, la déviance normative peut s'analyser comme un défaut d'intégration à l'échelle internationale. Cette déviance, subie plus que voulue, s'explique par plusieurs facteurs. le premier est le défaut d'intégration régionale : un État ratifie d'autant plus de conventions multilatérales qu'il participe à une union régionale intégrée (17 des 20 États en tête du classement sont membres de l'Union européenne). le deuxième est le retard de développement socio-économique : la négociation, la ratification et la mise en oeuvre d'une convention internationale suppose la mobilisation d'un minimum de moyens que de nombreux États, notamment Africains ou insulaires en queue de classement, ne possèdent pas. le troisième est le caractère autoritaire de l'État : moins un État est démocratique – selon les critères de Freedom House – moins il ratifie de conventions internationales.
De l'autre, la déviance normative résulte d'un choix rationnel. On pourrait croire que ce serait le cas des États contestataires de l'ordre international, ces États successivement qualifiés par la superpuissance américaine de « rogue states » (1994), « states of concern » (2000) ou « outlier states » (2010). Or ces États ne sont pas les plus mal classés : la Corée du nord est certes 182ème mais l'Iran 105ème, le Venezuela 94ème et Cuba 39ème. S'ils contestent l'ordre international, ils le font de l'intérieur, utilisant par exemple les organes onusiens comme une tribune pour leurs revendications. Les États contestataires ne sont donc pas nécessairement des États déviants.
La déviance n'est pas là où on l'imagine : ce sont paradoxalement les États les plus puissants qui font le choix rationnel de rester en marge du jeu conventionnel. C'est le cas des États-Unis (63ème) ou de la Chine (75ème). Cette distanciation volontaire par rapport à la norme, privilège du fort, procède d'un réflexe souverainiste et d'une démarche utilitariste : dans le jeu international, le fort ne veut pas se lier les mains par des engagements internationaux. On pense au refus américain de ratifier le Protocole de Kyoto, le Statut de la Cour pénale internationale, la Convention relative aux droits de l'enfant ou le Traité d'interdiction des mines antipersonnel. Cet exceptionnalisme est une constante : il n'a pas reculé depuis le remplacement de George W. Bush par Barack Obama.

L'analyse de Soraya Sidani a le mérite de la clarté. Elle s'appuie sur un instrument robuste, le classement des États en fonction du nombre de conventions ratifiées. Mais cet instrument a ses limites. le nombre de conventions internationales ratifiées par un État ne dit rien de la façon dont le contenu de cette convention est, ou pas, appliqué par cet État. Des appréciations qualitatives, résultant par exemple de l'analyse des examens périodiques universels (EPU), seraient utiles pour affiner l'évaluation de l'intégration ou de la déviance des États.
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