Jabach réunit successivement deux collections. En 1671, pressé « entre l'enclume et le marteau », comme il dit lui-même, ayant acquis, peut-être à tort et à travers, tableaux et dessins, malgré ses affaires obérées, il dut vendre au roi, moyennant 220.000 livres —somme dérisoire si l'on songe aux trésors qu'il cédait— la collection qu'il avait acquise avec tant de joie et conservée jusqu'alors avec tant d'amour ; 5.542 dessins et 101 tableaux. Il lui resta seulement quelques broutilles qu'il ne put se résigner à abandonner. Les jours meilleurs revenus, il acheta de nouveau avec la même passion qu'autrefois ; à sa mort, en 1696, il possédait 687 tableaux, des bronzes, des objets d'art et plus de 4.000 dessins. Cette collection revint à ses héritiers.
Parmi les collectionneurs de dessins des siècles passés, Everhard Jabach occupe une place éminente. Son cabinet était d'une variété singulière et d'une incomparable richesse. Mais il ne semble pas avoir réservé aux maîtres français, dans ses cartons, la place à laquelle ils avaient droit. Il ne les négligea pas complètement, cependant. La collection qu'il vendit au roi, en 1671, comprenait des dessins français. Ces œuvres ont constitué le premier fonds français du Cabinet royal. A ce titre, elles présentent un grand intérêt pour l'histoire des dessins français du Louvre.
Les collections de dessins documentaires étaient nombreuses au XVIIe siècle, dans les provinces surtout où les œuvres artistiques ne pénétraient pas aisément, bien que le goût des Cabinets à la manière de Paris se soit répandu chez les seigneurs désœuvrés et chez les grands fonctionnaires de la Couronne. On en rencontrait également à Paris. La plus célèbre de toutes — elle intéresse encore, au suprême degré, les historiens et les archéologues — appartenait à Roger de Gaignières.