AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
(01/01/1900)
3.75/5   12 notes
Résumé :
Tragédie grecque d'Euripide composée entre 414 et 412 av. J.-c.
Remplacée par une biche au moment de son sacrifice à Aulis, Iphigénie est déposée par Artémis en Tauride. Là, elle devient prêtresse de la déesse et sujette du roi Thoas. Selon les rites du pays, il lui incombe de donner la mort à tout étranger qui s'aventure en Tauride.
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten
Que lire après Iphigénie en TaurideVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Et voilà ! Encore une fois les dieux grecs font preuve de leur enfoiritude envers les pauvres humains qui les adorent.

Dans la dernière pièce d'Euripide que j'avais lue – Hélène – on apprenait donc que le carnage de la guerre de Troie s'était déroulé pour un leurre placé là par Héra, que la véritable Hélène n'avait jamais accompagné Pâris, n'avait jamais trahi Ménélas.
Et là, rebelote ! Cette fois on apprend qu'Iphigénie a échappé au sacrifice, qu'Artémis – qui avait expressément demandé ce don de soi – avait discrètement remplacé la fille par une biche au dernier moment, leurrant tout le monde au passage.
Un moment d'égarement de mansuétude de la part de la déesse ? Voire ! La « mort » d'Iphigénie incruste la haine implacable des Troyens dans le coeur d'Agamemnon, l'envie de vengeance dans celui de Clytemnestre, la volonté ensuite de venger leur père dans ceux d'Electre et Oreste. C'est à nouveau tout le carnage de la guerre et ses suites funestes qui en découlent. Artémis imite le dieu d'Abraham qui demande un sacrifice « qui fasse sens ». Mais le Dieu d'Abraham arrêtera sa main, alors qu'Artémis épargne Iphigénie en douce et se fait ainsi complice des conséquences.

La pièce elle-même ressemble d'ailleurs beaucoup à Hélène. Iphigénie a été transportée en Tauride – la Crimée d'aujourd'hui – pour être la prêtresse d'Artémis, sacrificatrice des étrangers qui échouent sur ce rivage (cocasse !). Justement Oreste, son frère, débarque avec son pote Pylade après avoir été « libéré » des Érinyes qui le poursuivaient pour son matricide. C'est Apollon qui lui a enjoint de venir. Oreste et Pylade sont faits prisonniers et mis en présence de leur bourreau : Iphigénie. Comme souvent dans ce genre de situation, l'auteur se régale à faire dialoguer le frère et la soeur sans qu'une parole ne permette à l'un d'entre eux de découvrir l'identité de l'autre. C'est toujours très fort.

Une fois la découverte faite, il s'agit de s'enfuir. Et comme dans Hélène, c'est la fille qui monte un plan capillotracté mais qui fonctionne vachement bien parce que celui qu'il s'agit de leurrer, le roi Thoas de Tauride, est un teubé fini. Il croit tout ce qu'Iphigénie lui dit. Et quand la tromperie est éventée, il s'empresse d'envoyer son armée à la poursuite… après avoir demandé à un témoin une description des événements circonstanciée de plus de cent vers, largement de quoi donner une belle avance aux fuyards.

On comprend qu'Apollon avait à coeur de « sauver » le culte de sa soeur de ces barbares et de le transporter dans un endroit civilisé près d'Athènes. Iphigénie et Oreste en ont été les instruments.

Hormis le comportement des dieux qui m'a encore fait bondir (mais sont-ils maîtres du Destin, ces zozos-là ?) la pièce s'est révélée très agréable à lire. Et j'ai été ravi de découvrir une Iphigénie différente de celle d'Aulis, plus aigrie, pétrie de haine envers Hélène (si elle savait), Ménélas, le devin Calchas et même envers Achille.
Et pour une fois tout finit bien. Même les esclaves grecques sont libérées.
Commenter  J’apprécie          392
Je remercie à nouveau l'émission de France Inter « Quand les dieux rôdaient sur la terre » qui m'a donné une autre idée de lecture pour approfondir ma découverte de la mythologie et du théâtre grecs antiques.
Iphigénie est la fille d'Agamemnon, le roi des rois. Mais pour mener sa guerre et partir assiéger Troie, il lui faut des vents cléments, qu'il ne peut obtenir, selon l'oracle, qu'en sacrifiant ce qu'il a de plus cher, sa fille. Nénamoins, la déesse Artémis, déesse cruelle et féroce, protège les jeunes vierges. Elle a enlevé Iphigénie pour en faire sa prêtresse, loin, si loin, en Tauride. La Tauride – Crimée actuelle – apparaît comme une frontière du monde grec, peuplée de Barbares. C'est un territoire désolé et effrayant, entouré de falaises déchiquetées battues par des vagues de tempête. Et, surtout, la mort y attend les Grecs, puisque tous ceux qui y passent sont sacrifiés sur l'autel de la déesse, leur tête découpée et exposée, leur sang dégoulinant sur le sol. Oui, c'est cruel et sanglant. Iphigénie rêve de vengeance, elle aimerait que ce soit Hélène sous le couteau sacrificiel, elle dont les amours coupables sont responsables de tant de malheurs.
La pièce peut donc apparaître comme une critique des « subtilités de la déesse », périphrase d'Iphigénie pour évoquer la férocité d'Artémis. Après tout, c'est la soeur d'Apollon Phoïbos, le dieu de la lumière et des arts, certes, mais aussi un dieu violent et cruel. Artémis a sauvé Iphigénie, mais pour la transformer en instrument de mort sur une terre sauvage ; Iphigénie « a peur d'elle ». Toutefois, Iphigénie précise sa pensée : ce sont les hommes qui tuent, et qui « attribuent leurs torts à la déesse ; / Aucun dieu n'est cruel ». Ce sont donc les hommes qui sont responsables de ses meurtres, les hommes dont les principales victimes sont les femmes : Hélène peut-être, Iphigénie surtout que son père était prêt à tuer pour sa guerre, ses servantes contre lesquelles le roi barbare veut se venger.
Si les dieux sont cruels, c'est parce qu'ils suivent les volonté du destin, appelé « fatalité » par Athéna. En effet, elle apparaît en personne à la fin dans un deus ex machina au sens propre, pour plier à sa volonté le roi barbare prêt à poursuivre Iphigénie et Oreste. Thoas l'exprime ainsi «  à quoi bon résister à la volonté des dieux, qui ont la force pour eux ». Les dieux décident et les hommes doivent exécuter...
Tout apparaît donc comme un plan, comme une suite logique d'événements déterminés par « la fatalité », de la malédiction première, initiale, sur la famille des Atrides, au matricide d'Oreste et à sa poursuite par les Erinyes, ces déesses de la vengeance, à ses retrouvailles avec Iphigénie et à leur retour à Athènes. C'est une pièce athénienne, destinée au public athénien. Elle a donc des éléments « patriotiques »pour utiliser un terme anachronique, en présentant Athènes comme « la ville fondée par les dieux ». le personnage d'Athéna explique donc aux spectateurs assistant à la pièce l'origine de leurs cultes et de leurs temples, de certaines de leurs lois aussi. Cette fin m'a toutefois semblé un peu rapide, tout finit bien malgré ce début si sombre.
Commenter  J’apprécie          90
Cette pièce est une belle illustration de la forme mouvante de la mythologie grecque. Il n'y avait rien de figé. L'oralité étant le vecteur le plus commun de sa diffusion, elle ne pouvait que se transformer au gré des envies de chaque aède. Euripide n'en use pas autrement dans Iphigénie en Tauride. Agamemnon n'a pas tué sa fille au moment du sacrifice mais une biche recouverte d'un voile, substituée au dernier moment par Artémis pour tromper le roi d'Argos. Iphigénie est alors emmenée en Tauride, pays barbare, pour devenir prêtresse d'un temple dédié à sa déesse protectrice. Mais le jeune frère matricide Oreste et son cousin Pylade, poussés par un oracle d'Apollon, débarquent en Tauride découvrant alors l'identité de la prêtresse. Il y a de beaux passages: le récit du bouvier de la capture d'Oreste et Pylade et le dialogue entre Iphigénie et son frère qui ne connaissent pas encore leur véritable identité.
Commenter  J’apprécie          61
Après un procès chez les Olympiens pour statuer au sujet du dernier meurtre chez les Atrides, Apollon envoie Oreste, toujours escorté de son cousin et fidèle ami Pylade, chercher la statue de sa soeur Artémis en Tauride.

La mission est périlleuse. D'abord, poursuivi par les Erynies après l'assassinat de sa mère, Oreste a des crises de démence qui le rendent vulnérable ; ensuite, la Tauride a un sanctuaire d'Artémis qui exige des sacrifices humains pour tout étranger se présentant dans le pays. Or il se trouve que c'est Artémis qui a enlevé d'Aulis Iphigénie et l'a emmenée en Tauride pour la sauver du sacrifice auquel son père Agamemnon la soumettait. Tous la croient morte. Thoas, le roi de Tauride, capture Oreste et Pylade et décide de les offrir en sacrifice à la déesse par la main d'Iphigénie.

Or cette dernière finit par identifier son frère ; ils réfléchissent ensemble au stratagème à mettre en place pour pouvoir s'enfuir ensemble et retourner en Grèce. C'est extrêmement difficile. Heureusement, Athéna interviendra...

Les versions au sujet de ce qu'il a pu advenir d'Iphigénie (réellement morte sous le couteau paternel ? enlevée par Artémis en Tauride ?...) diffèrent. Je connaissais de nom cette tragédie et cette version et me voici mieux informée. Est-ce que la Tauride est la Crimée ? Dans cette contrée, Hérodote raconte qu'on y faisait des sacrifices humains à Iphigénie... Mais il existait près d'Athènes un tombeau d'Iphigénie et on faisait des sacrifices à Artémis Taurapole... C'est à cette toponymie que se réfère Euripide quand il écrit cette tragédie... qui finit bien !

En réalité, ce sont les faits évoqués, dans un monde de mort, où les choses semblent un double négatif du monde connu des Grecs ; j'évoque la pertinente question du choeur au sujet d'une Artémis admettant des sacrifices humains alors qu'elle est une figure pleine de sollicitude en Grèce et qui a, au premier chef, voulu sauver Iphigénie d'un sacrifice humain. Iphigénie, dont la vie s'est interrompue, ne semble pas épargnée au point de pouvoir espérer la reprendre là où elle espérait la mener (n'allait-elle pas vers ses noces avec Achille ?)... Or, Pylade, tout indiqué pour l'épouser, arrivant avec son frère, est le prétendant d'Electre. Iphigénie est sauvée mais désormais consacrée à la prêtrise.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
Commenter  J’apprécie          30
Une des plus belles pièces d'Euripide. Fine, émouvante, bouleversante, elle est vraiment de toute beauté. Iphigénie est une des plus sublimes figures tragiques mises en scène au théâtre. Mon grand regret : ne pas avoir vu la pièce jouée au théâtre. J'espère que ce sera le cas un jour. En attendant il faut que j'écoute l'opéra de Gluck.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
IPHIGÉNIE:
Mes servantes !
comme je suis vouée à gémir et gémir,
hélas ! en tristes plaintes
éloignées des accents mélodieux de lyre
où se plaisent les Muses,
las ! à me lamenter, hélas, dans mon chagrin !
Quel désastre m'accable !
Quels sanglots je répands sur la vie de mon frère,
tel que me l'ont fait voir en songe
les ombres de la nuit qui vient de s'effacer !
Je suis perdue ! perdue !
Anéantie, la Maison de mes pères !
Las, hélas ! ma race a péri !
Commenter  J’apprécie          80
ORESTE : Sache-le bien : ces dieux dont nous célébrons la science ne disent pas plus vrai que les songes fugaces. Dans le monde des dieux tout va à tort et à travers, aussi bien que parmi les hommes.

Second épisode.
Commenter  J’apprécie          100
Sache-le bien : ces dieux dont nous célébrons la science ne disent pas plus vrai que les songes fugaces. Dans le monde des dieux tout va à tort et à travers, aussi bien que parmi les hommes. Ce qui torture l'homme qui, dans un esprit droit, prit l'oracle pour guide, c'est de se voir perdu, ainsi qu'il l'est pour l’œil des clairvoyants.
Commenter  J’apprécie          00
Iphigénie (à Pylade)
Dis à Oreste, fils d'Agamemnon :"Celle qui t'écrit est celle qui fut immolée en Aulide, qui vit encore, quoiqu'elle ne vive plus pour vous..."
Oreste
Où est-elle ? Après sa mort, comment a-t-elle pu revivre ?
Iphigénie
C'est elle-même que tu vois : ne m'interromps point.
Commenter  J’apprécie          00
Iphigénie (seule)
En vertu d'une coutume antique de ce pays, j'immole tout Grec qui aborde sur cette terre. C'est à moi d'initier les victimes; à d'autres est remis le soin abominable de les égorger dans le sanctuaire de la déesse.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Euripide (24) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de  Euripide
Par Chloé Delaume accompagnée de Benoist Esté Bouvot
Chloé Delaume poursuit son exploration des grandes figures mythologiques féminines en se penchant cette fois sur celle de Médée. Elle revisite ce personnage de la mythologie afin d'en convoquer toute la puissance pour faire écho aux problématiques féministes contemporaines. Médée, magicienne, amoureuse, dont le nom semble depuis toujours synonyme d'infanticide. Pourtant, celle, sans qui Jason ne serait rien, n'a pas toujours été la meurtrière de ses enfants : avant Euripide, Médée commet bien des crimes, mais pas celui-là. Ce soir elle raconte son histoire et interroge la véritable nature de sa culpabilité, elle qui durant tant de siècles ne fut écrite que par des hommes.
Dans le cadre du colloque international « Chloé Delaume : une oeuvre intermédiale » et de la résidence Lilith & Cie.
« le souci quand on est personnage de fiction, c'est qu'un tas de gens, sans cesse, vient vous écrire dessus. On se voit transformé sans le moindre recours. Quelqu'un m'a noirci l'âme, depuis je fais avec. » Chloé Delaume, « Médée avant Médée »
À lire – Chloé Delaume, Pauvre folle, Seuil, 2023.
Son : François Turpin Lumière : Iris Feix Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
+ Lire la suite
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus
Acheter ce livre sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten


Lecteurs (48) Voir plus



Quiz Voir plus

Devenez très fort en citations latines en 10 questions

Que signifie Vox populi, vox Dei ?

Il y a des embouteillages partout.
Pourquoi ne viendrais-tu pas au cinéma ?
J'ai un compte à la Banque Populaire.
Voix du peuple, voix de Dieu.

10 questions
543 lecteurs ont répondu
Thèmes : latin , Citations latines , antiquitéCréer un quiz sur ce livre

{* *}