AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782072859823
48 pages
Gallimard (18/04/2019)
3.91/5   55 notes
Résumé :
«Il y a ce que disent les Gilets jaunes. Il y a surtout ce qu’ils révèlent. Cette manière de parler d’eux, dans la presse, les médias, les milieux politiques, sur les réseaux sociaux ! Une distance, une condescendance, un mépris.» Danèle Sallenave

Au miroir du mouvement des Gilets jaunes, l'élite politique, intellectuelle, culturelle a laissé voir son vrai visage. Début janvier 2019, le président promet d'éviter ces "petites phrases" qui risquent d'êt... >Voir plus
Que lire après Jojo, le Gilet jauneVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
3,91

sur 55 notes
5
3 avis
4
5 avis
3
4 avis
2
0 avis
1
0 avis
Jojo, le gilet jaune - Danièle Sallenave de l'Académie française.
Lu en mai 2019. Paru chez Tracts-Gallimard - 22 mars 2019 - 3,90 €.

Ne reniant pas ses origines relativement modestes, ses parents étaient instituteurs, encore respectés en ces temps là, Danièle Sallenave allant sur ses 79 ans, à l'époque l'instituteur était un personnage important, surtout dans les villages, mon grand-père maternel l'était aussi dans un village en Belgique, l'auteure nous emmène tout au long de ces 42 pages dans le fil de ses réflexions sur le phénomène des Gilets jaunes.
C'est avec une plume fluide qu'elle nous parle de ces "petites gens", ceux "d'en-bas", de leurs demandes de la dérive et de la violence que bon nombre de ces Gilets jaunes condamnent. "Leur mouvement attire, sans forcément les soutenir, des radicaux anti-système et des délinquants ordinaires. Mais il va courir à l'échec s'il se fait régulièrement déborder par des casseurs organisés" page 4.
Casseurs qui s'en prennent aux commerçants, qui détruisent du matériel public, des voitures etc...
Les Gilets jaunes inquiètent, ce mouvement parti de rien et qui a pris une telle ampleur peut évidemment en effrayer certains, surtout dans la population bien plus aisée et bien sûr les élites de la nation.
Mais malgré cela, Danièle Sallenave leur garde le même intérêt qu'à leurs débuts : "A cause de ce qu'il a révélé : la profondeur de la faille ouverte, en France, entre les "élites" et le "peuple". Dont je ne m'accommode pas, ni ne m'accommoderai jamais" page 5.
Elle compare l'ambiance politique et le mouvement de Mai 68 : "Mais il partait des jeunes "d'en-haut", les étudiants" à celle d'aujourd'hui : " les Gilets jaunes viennent "d'en-bas", ils réclament une fiscalité plus juste. La fiscalité a toujours été au départ et au coeur des révoltes populaires. Une amélioration du pouvoir d'achat".
En un mot, ils veulent être entendus.
"Cette manière de parler d'eux, dans la presse, les médias, les milieux politiques, sur les réseaux sociaux ! Une condescendance, un mépris."
Un membre du Cercle Montesquieu (décembre 2018) écrit-elle, a déclaré : "Le pouvoir d'achat n'est pas un droit de l'homme, il ne figure pas dans la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789, texte sur lesquels sont fondés tous les droits dont jouissent les Français aujourd'hui". ( "Manger est-il un droit de l'homme ?" page 7.
"Les familles du CAC 40 ne se battent-elles pas aussi pour protéger leurs droits acquis ? "
Le président lui-même, fin juin 2018 n'a-t-il pas dit lors d'une rencontre avec des entrepreneurs de la Halle de Freyssinet à Paris: "Une gare, c'est un lieu où l'on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien" et cela après avoir dit publiquement qu'il ne prononcerait plus de phrases méprisantes.
Danièle Sallenave se pose aussi la question suivante : "Le mouvement des Gilets jaunes est-il le point de départ d'une révolution ?"
Certains Gilets jaunes le disent.
Elle met aussi en perspective de manière claire, les événements de ces dernières semaines avec des événements de l'histoire.
L'auteure est allée à la rencontre de ces Gilets jaunes, elle s'est rendue aux ronds-points pour comprendre ce qu'il se passait. Elle dénonce ces petites phrases comme encore celle du président disant "que les médias ne devraient pas accorder autant de place sur leurs antennes à Jojo le gilet jaune qu'à un ministre".
Il est vrai que la violence de quelques-uns a jeté le discrédit sur les Gilets jaunes.
"Nul ne peut prédire l'avenir d'un mouvement de cet ordre, son espérance de vie est sans doute limitée. D'autres cependant suivront et rien n'interdit de penser qu'ils puissent retrouver l'ancienne solidarité active des intellectuels organiques et des artistes, le soutien de leur expérience et de leurs savoirs" page 41.
"La protestation des Gilets jaunes, c'est une demande de plus de justice, de dignité, d'égalité, portée par une catégorie de Français qu'on n'avait pas l'habitude d'écouter ni d'entendre" page 42.
Et pour finir, Danièle Sallenave termine son essai par ces phrases non dénuées de poésie : "Dans les semaines à venir, il m'arrivera sans doute un jour ou l'autre de faire le tour d'un rond-point que je connais bien, et où je me suis arrêtée souvent. Hérissé de bannières et de slogans, il est entouré d'une palissade de palettes. Un feu y flambe en permanence. Je donnerai comme à chaque fois un coup de klaxon en passant. Je ne sais pas combien de temps encore il y aura quelqu'un pour me répondre."
C'est sûr que les Gilets jaunes ont trouvé en Danièle Sallenave, si pas une amie, une personne à leur écoute et qui les comprend.





Commenter  J’apprécie          9137
Voilà un petit livre, un livre-tract, tel le titre de cette collection, qui tente de répondre à la question « Pourquoi les Gilets jaunes ?». Au delà des réponses habituelles l'auteure insiste sur le problème culturel. Il n'y a pas de revendication culturelle dans ce mouvement, et pourtant les Gilets jaunes pourraient reprocher à l'école d'échouer à réaliser l'égalité des droits, de ne plus jouer son rôle d'ascenseur social. Par ailleurs l'ambition de politique culturelle de l'après guerre telle que la définissait alors Jean Vilar – le peuple a droit au meilleur – a disparu.
Un regard honnête et empathique sur le mouvement des Gilets jaunes
Commenter  J’apprécie          180
Danièle Sallenave, Académicienne, prend fait et cause pour le mouvement des Gilets jaunes. Pourquoi un immortel viendrait-il s'épancher sur les gens de peu ? On peut lire dans son ouvrage au moins trois raisons.

Tout d'abord, l'auteure se reconnaît dans l'origine sociale des manifestants. Ses parents étaient aussi d'humbles et invisibles travailleurs. Ensuite, Danièle Sallenave croit toujours à l'idée d'égalité et l'espoir d'un dénivellement social. Enfin, l'auteur croit tout autant au pouvoir de l'éducation populaire, de l'instruction et de la culture pour sortir de sa condition et s'élever intellectuellement sans même chercher une quelconque promotion sociale. A ce propos, elle évoque cette histoire lu dans dans le roman « Démons » de « l'écrivain autrichien Heimito von Dorerer, qui a surpris par son appétit de livres. Sa vie lui convient. Avec des livres. On lui propose de devenir responsable culturel à la mairie ? "Mais non, répond-il. Je veux être un menuisier qui lit."»

Avec ce soutien indéfectible aux Gilets jaunes, aux opprimés en général, on se demande bien ce que Danièle Sallenave trouve comme plaisir à siéger dans une institution aussi conservatrice que l'Académie française ; peut-être est-ce le plaisir d'enrager les plus réactionnaires. Et ce plaisir est partagé.
Commenter  J’apprécie          112
« Jojo, le gilet jaune » Danièle Sallenave (42 pages, Tracts Gallimard)
Un texte qui fait du bien, signé d'une académicienne assez classique dans son écriture.
Danièle Sallenave prend ici un parti résolu pour le mouvement des gilets jaunes, sans pour autant occulter certains dérapages physiques ou verbaux. Mais elle pose la question pertinente : d'où vient la première violence ? de “ceux d'en haut”. Quelle est cette surdité des puissants, des gouvernants, à l'égard de revendications plus que légitimes de la part de celles et ceux qui sont en souffrance, relégués dans des zones vidées de toute politique publique de développement ? Et quel est ce mépris profond de la part de cette soi-disant élite intellectuelle et culturelle à l'égard de ceux qu'on prive systématiquement de parole et qui exigent d'être entendus ? Elle n'est pas très jolie jolie, cette intelligentsia, de droite ou de gauche (cf ces soi-disant progressistes laïcs qui ont tôt fait d'user de toutes les stratégies pour mettre leur progéniture dans les écoles privées), et qui se plaignent que la culture ne soit pas un sujet de préoccupation de gilets jaunes. Ils sont bien méprisants, ces gouvernants qui, tel Macron, ne comprennent pas que certains médias accordent autant de temps de parole à un « Jojo le gilet jaune » qu'à un ministre !
C'est aussi cela qui est un grand bol d'air frais dans ce « tract » d'une immortelle, cette claque à la petite bourgeoisie pseudo intellectuelle très hautaine à l'égard d'un mouvement social profond, ce rappel que les classes sociales existent, et que celle d'en bas exige fort légitimement plus de justice sociale.
Commenter  J’apprécie          70
Un petit livre qui est comme un long article qui invite à la réflexion et propose des éléments d'analyse du mouvement des gilets jaunes et de ces racines. C'est très clair, très intéressant, à lire et relire. L'auteur donne son analyse, son point de vue, tranché et empli de compréhension et nous amène à réfléchir et échanger : nous en avons parlé avec mon libraire, très enthousiaste, qui lui-même en avait parlé avec ses clients qui se sont arrachés ce petit livre. Bref passionnant.
Commenter  J’apprécie          110


critiques presse (1)
LaCroix
26 avril 2019
À l’écoute des élites qui parlent avec mépris des gilets jaunes, mais aussi au contact de ceux-ci, l’académicienne Danièle Sallenave inscrit le mouvement social actuel dans de larges perspectives historiques.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Qu'on cesse de se forger l'image d'un peuple "de salauds", selon Bernard Tapie, quand il lui arrive de voter FN. Qu'on relise Brecht dans un poème fameux : "Questions que se pose un ouvrier qui lit" :

Qui a construit Thèbes aux sept portes ?
Dans les livres, on donne le nom des rois.
Les rois ont-ils trainé les blocs de pierre ?
Babylone, détruite plusieurs fois,
Qui tant de fois l'a reconstruite ? Dans quelles maisons
De Lima la dorée logèrent les ouvriers du bâtiment ?
Quand la muraille de Chine fut terminée,
Où allèrent ce soir-là les maçons ?

(page 28)
Commenter  J’apprécie          170
Les Gilets Jaunes, c'est la foule et la foule fait peur. Médecin et sociologue, admiré de Mussolini, Gustave Le Bon écrit dans Psychologie des foules en 1895 : "Par le fait seul qu'il fait partie d'une foule, l'homme descend plusieurs degrés sur l'échelle de la civilisation. Isolé, c'était peut-être un individu cultivé ; en foule c'est un instinctif, par conséquent un barbare." C'est "la grande peur des bien-pensants", le parti de l'ordre qui se crispe devant "la violence" - toujours vue unilatéralement, comme la violence des colonisés qui s'insurgent.
On parle de la violence du fleuve, disait Bertolt Brecht, jamais de celle des digues qui le contiennent.

(page 8)
Commenter  J’apprécie          120
La meilleure définition du populisme, je l'ai trouvée chez un intellectuel polonais à qui j'avais plusieurs fois rendu visite avant 1989 à Varsovie, l'historien Bronislaw Geremek. Enfant juif rescapé du ghetto de Varsovie, militant chrétien et laïque convaincu, séduit par le marxisme, il se passionne pour l'histoire des pauvres, des marginaux, et plus généralement pour celle des luttes sociales. Répondant à des questions du monde.fr en juin 2008, il écrit : « Le populisme exploite l'absence du peuple sur la scène publique. »
Commenter  J’apprécie          120
Qui sont les Gilets jaunes ? Ce sont des gens que les habitants des grandes villes ne croisent jamais. Des gens qu'on entend jamais. Il y a quelque part, dans un roman de Dickens une formulation extraordinaire pour désigner justement ceux qu'on ne voit pas et qui parfois se révoltent. « Quelque chose qui parfois se soulevait comme la mer, faisait un peu de mal et de dégâts, et retombait à nouveau. »
Commenter  J’apprécie          80
Si la culture continue à se développer en vase clos, elle en paiera le prix.
Lorsqu'on constate l'effondrement de la lecture, osera-t-on poser la question : les livres qu'on publie n'y sont-ils pas aussi pour quelque chose ?
Prenons garde, disait Brecht, encore lui : si le théâtre oublie le monde, bientôt le monde oubliera le théâtre.

(page 37)
Commenter  J’apprécie          91

Videos de Danièle Sallenave (22) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Danièle Sallenave
LES GILETS JAUNES, ET APRÈS ?
TABLE RONDE Salle des États Généraux, Château royal de Blois
L'ampleur de ce mouvement social pose des questions centrales sur l'état et l'avenir du pays : qui sont-ils et pourquoi aucun « corps intermédiaire » ne peut les représenter ? La transition énergétique est-elle nécessairement injuste ? le niveau des prélèvements obligatoires est-il vraiment excessif ?
INTERVENANTS : Edwy PLÉNEL, Journaliste et fondateur de Médiapart, auteur de Gilets jaunes,la victoire des vaincus (Éd. La découverte), Danièle SALLENAVE, Écrivaine auteure de Jojo, le gilet jaune (Éd. Gallimard), membre de l'Académie Française et Alexis SPIRE, Chercheur à l'EHESS et auteur de Résistances à l'impôt, attachement à l'État (Éd. Seuil)
MODÉRATION ET COORDINATION Guillaume DUVAL, Éditorialiste à Alternatives Économiques
+ Lire la suite
autres livres classés : gilets jaunesVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (115) Voir plus




{* *} .._..