Conseiller à une personne en deuil de sécher ses larmes, de ne pas toujours ressasser sa peine, d'être courageux ou raisonnable "car tout fini par s'apaiser", est une erreur. En ce domaine, rien ne passe qui n'est pas vécu dans toute son intensité. La souffrance existe, de toute façon. Ne pas l'afficher ou la refouler, sous quelque prétexte que ce soit, revient à la porter jusqu'à la fin de ses jours, obsédante et destructrice.
Bien plus tard, je devais découvrir combien la visite au défunt, avant la mise en bière, permet d'ancrer le survivant dans la réalité de la mort et dans ses propres chances de survie. Ne pas voir la dépouille mortelle d'un être aimé permet, inconsciemment, de nier sa mort et d'espérer, au-delà de toute raison, qu'il revienne un jour : nouvel écueil sur le chemin du deuil.
Quelques minutes plus tard, nous perçûmes comme un frémissement - à moins que ce ne fût un bruissement d'ailes ? Marie-France pleurait. Cela suffit à faire explorer mon propre chagrin. Il n'y a aucune honte à pleurer ; les larmes sont une manifestation du corps et de l'esprit en état de détresse. Contenues, elles se rappelleraient à notre souvenir sous la forme d'autres manifestation, plus douloureuses. Pleurer, c'est encore accompagner.
Ne voit-on pas à quel point cette dernière période de la vie est déjà une préparation à la mort ? Une vieillesse réussie dans l'action, la paix et l'harmonie permettra une mort sereine. Il faut donc qu'elle soit vécue de façon complète, totale ; de n'importe quelle manière, mais en toute liberté.
Marie Ireland, abordant l'univers de ces malades en phase terminale, souligne toute l'importance des relations entre le personnel soignant et la personne en souffrance, qui doit être traitée avec amour et délicatesse, à son rythme et selon son désir, qui peut varier d'un moment à l'autre. Même diminuée, elle doit conserver sa dignité et être respectée. Elle doit surtout être aimée.