LETTRE A TYNIANOV
Mon cher Iouri, je ne t'écris pas cette lettre aujourd'hui, mais l'hiver passé: ces lettres indiquent ici l'hiver.
Je ne vais pas entrer d'emblée dans le vif du sujet, mais commencer par qui a grossi et qui joue du violon.
Celui qui a grossi, c'est moi. Il fait nuit à présent. J'ai passé le seuil de la fatigue et je ressens quelque chose qui se rapproche de l'inspiration. La situation est très grave, il faut réfléchir, même si l'on est occupé à autre chose, réfléchir malgré tout.
Je crains de céder à l'époque. Tout ira pour le mieux et soudain on s'apercevra qu'on a accepté l'idée que "c'est encore mieux sans les jambes".
La voix du petit éléphant rouge se fait indolente. Il a envie de parler d'amour.
Mais l'amour, comme me l'a dit Larissa Reisner, c'est une pièce composée de scènes très courtes et de longs entractes. Il faut savoir se conduire pendant les entractes ...