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La Voie des Oracles tome 2 sur 3
EAN : 9782367403052
332 pages
Scrineo (28/05/2015)
3.89/5   131 notes
Résumé :
Parce qu'Aedon les poursuit sans relâche, Thya, Aylus, Enoch et le Sylvain minuscule fuient dans les terres barbares jusqu'aux confins de l'Asie. Sur les routes, ils vont découvrir des mondes différents, colorés, fabuleux, aux magies millénaires, aux mythologies fascinantes. Un univers plus vaste et plus étrange que tout ce qu'ils auraient pu imaginer. Leurs rares alliés sont en péril. Aedon, toujours plus menaçant et plus trouble, a conclu un pacte avec des créatur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (64) Voir plus Ajouter une critique
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Vers l'est, vers l'uchronie, et au-delààààààà !

Changement de braquet dans ce deuxième tome largement tourné vers l'action. le rythme s'accélère et les pénétrations dans l'esprit des personnages sont limitées au strict nécessaire.
Les enjeux augmentent également. Alors que le premier tome semblait restreindre l'intrigue essentiellement à un affrontement frère-soeur, ce deuxième tome lui fait subir une inflation subite et ce n'est ni plus ni moins que l'existence de l'univers qui se retrouve dans la balance. le gabarit des acteurs – surtout des « maléfiques » – enfle également avec l'arrivée de dieux d'envergure qui prennent les choses en main.

Le récit reste toutefois centré autour de nos trois héros Thya, Aylus et Enoch – les deux premiers oracles de leur état, le dernier plutôt sorcier – qui vont être balayés par les vents des événements et manipulés comme des héros grecs. Avec eux nous partons en voyage vers l'Orient. C'est l'occasion de découvrir de nouvelles cultures, moins « romaines ». Mais cela passe très vite. On ne s'endort pas, il faut se déplacer. Dommage. J'aurais apprécié découvrir un peu plus Constantinople, avoir le temps de figer dans ma tête des images inoubliables. Mais non, faut partir.
Les kilomètres parcourus vont d'autant plus se multiplier car Estelle Faye fait prendre à sa Communauté le même destin que celle de l'Anneau de Tolkien : elle la casse et développe plusieurs chemins parallèles. Les péripéties subies par les uns et les autres sont très prenantes, écrites selon la classique méthode page turner : pour savoir ce qu'il advient de Thya, il vous faut passer le chapitre qui parle de Enoch, puis celui sur Aylus, puis celui sur Aedon le frère de Thya, puis… Comment voulez-vous vous arrêter pour dormir ?

On entre aussi franchement dans l'uchronie. Si jusqu'à présent les événements avaient pu avoir lieu dans notre Histoire, cachés aux yeux des contemporains, ce qui arrive à l'Empereur Honorius nous plonge dans l'imaginaire. Tchouk-tchouk, le train de l'Histoire vient de bifurquer et s'engage sur une voie inconnue. Au niveau des enjeux, cela m'a rappelé la BD Troie de Nicolas Jarry.

Tout est-il excellent dans ce deuxième tome ? Non pas. Je suis sceptique devant la faiblesse et l'humanité dont Estelle Faye pare certains de ses dieux. La vitesse à laquelle le récit se déroule oblige à certaines ellipses un peu malheureuses, comme certaines batailles qui sont éludées, certains périples zappés, certaines aventures (celle d'Aylus en particulier) font tout simplement pschitt. Et comme dans le premier tome je trouve les enchainements de certains événements quelque peu capilotractés. Je ne comprends pas pourquoi Thya conserve sa motivation de vengeance à la fin, alors que celle-ci n'a plus lieu d'être.
D'une manière plus générale, j'ai du mal à imaginer qu'un monde dans lequel le panthéon des dieux grecs (ou romain) et tous les personnages de la mythologie sont une réalité ait pu voir se développer le Christianisme. Une religion peut en supplanter une autre en prêchant que ses mythes ne sont que superstitions. Si vraiment Jupiter, Apollon, les Centaures et patin couffin existent, il suffirait d'un peu de comm « miraculeuse » pour que les humbles mortels s'agenouillent et jettent aux orties péché originel, Trinité et compagnie.

La fin réserve une surprise. Les événements prennent un tour qui n'a pas été sans me rappeler le tome 1 de Martyrs d'Olivier Peru. Mais là j'en dis déjà trop.
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Après la Dark Fantasy façon Renaissance, la magie de la Chine éternelle et le post-apocalyptique écologique, l'auteure française continue avec ce 2e tome de "La Voie des oracles" son peplum onirique et fantastique. La jeune Thya, héritière des savoirs païens dans un Empire romain devenu chrétien, poursuit sa quête qui va la mener des forêts germaines aux déserts iraniens en passant par Salone, Constantinople, les montagnes d'Arménie et la Route de la soie traversant l'Empire Sassanide…

Dans ce tome 2, passé un cap le récit se divisant en POVs :
- Thya poursuit sa route avec Adur en direction du Désert du Vide, en parallèle de celle suivit par Aylus et Tirésias
- Enoch, qui doit apprendre à maîtriser la magie ancestrale dont il a hérité, tente d'échapper à la cage dorée d'Hécate
- Aedon le fourbe poursuit sa conquête du pouvoir pour s'apercevoir qu'elle ne lui apporte rien de ce qu'il avait désiré…
- l'Ondine et le Sylvain se voient confier une mission par Culsans : équipés de l'ultime sortilège des Étrusques et de l'Epée d'Orion offert par Apollon, c'est à eux que reviendra la lourde tâche de sauver leur monde ou de le condamner…
Après tout n'est pas toujours très clair en ce qui concerne l'intrigue général et le fil directeur, je n'ai ainsi pas compris l'obstination de Thya à retrouver les Dieux Voilés, celle-ci prenant la décision de partir au bout du monde les retrouver avant que ces derniers ne lui donnent de véritables raisons de les poursuivre…


Dans cet empire romain finissant où la magie existe encore, les dieux anciens font face aux temps nouveaux… Hécate prend exemple sur le Christ Blanc en voulant devenir une Déesse Unique régnant de Rome à Samarcande, Dionysos mime les bacchanales des temps jadis, Apollon profite de son nouvel anonymat pour s'adonner aux joies simples du théâtre, Janus ambivalent comme toujours ne sait lui à quels saints se vouer… Ces divinités désenchantées m'ont bien rappelé les anciens dieux perdus dans les villes et les campagnes du Nouveau Monde du roman de Neil Gaiman intitulé "American Gods".

Le désenchantement est aussi de mise pour les hommes et les femmes puisqu'aucune des rencontres de Thya ne survivra, tous et toutes mourant vainement sans rien avoir accompli de leurs rêves ou de leurs ambitions : Waudur ne réveillera jamais les siens, Sethre ne pourra jamais apporter son aide à sa nièce, Orodès ne sauvera jamais son roi, Adur ne sauvera jamais son peuple, le Faune et le Sylvain ne sauveront pas leurs amis… Culsans tant qu'Aelon ne sont plus que les marionnettes d'Hécate, et je ne parle même pas du pauvre Enoch !
Et pour la 5e fois en 5 livres Estelle Faye continue son exploration du thème de la mémoire :
- Thya vend les souvenirs d'Enoch pour venger son ami qu'elle pense défunt
- en souhaitant retrouver Thya, Enoch finit par être obligé de l'oublier
Difficile de ne pas penser au conte d'Andersen où la courageuse Gerda partait à la recherche de Kai complètement vampé par la Reine des Neiges…

Quelqu'un qui a tout perdu a donc tout à gagner, et c'est avec détermination que Thya tente le tout pour le tout…

Toutes les cartes sont redistribuées pour troisième et dernier tome ! C'est bien vu et c'est bien joué, et c'est même un soulagement que d'apporter une lueur d'espoir dans l'océan de désespérance sur lequel nous avons vogué…


C'est original, c'est intéressant, bien écrit et bien construit. Derrière une plume agréable, en dépit des nombreuses ellipses, Estelle Faye nous offre une joli prose et un travail de fond qui fait la part belle aux légendes celtiques, romaines, grecques et iraniennes, ici joliment maîtrisées, où apparaissent ménades, goules, simurghs, phénix et licornes… Mais au final je ne suis vraiment pas persuadé que les ambiances sombres et amères de l'auteur se marient très bien avec les codes de la littérature YA. Si l'auteure choisi le parti pris de quelque chose de définitivement plus ambitieux en terme de public cible, on tentait carrément un incontournable de la Fantasy française !
Sur le livre objet, encore un travail très propre des poulains des éditons Scrineo : magnifique illustration d'Aurélien Police, cartes très utiles et très réussies de F. Legeron, couverture solide, papier épais, mise en page claire et aérée… et le tout 100% « made in France » s'il vous plait. (Au grand dam des dézingueurs du dimanche made in France)
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Ce second tome de « La voie des Oracles » m'a plu, toutefois j'ai pris moins de plaisir à tourner les pages… Cela vient surtout du fait que la narration passe sans arrêt d'un narrateur à un autre (au moins six différents), si bien que cela cassait un peu le rythme. Certes, il se passe plein de choses : il y a des morts, des batailles, des complots et des événements divins, mais j'avais l'impression qu'à force d'avancer sur plusieurs tableaux, l'histoire ne progressait pas trop ou traînait parfois en longueur… Ce qui n'est pourtant pas le cas ! Ça bouge beaucoup et les protagonistes n'ont presque aucun répit. Je pense que c'est vraiment le nombre de points de vue qui a nui à mon appréciation générale… Cela m'a perturbée. Quel dommage ! En tout cas, « Enoch » est bien plus sombre que « Thya ». Tous les personnages vont devoir subir la rencontre de la jeune oracle qui, malgré elle, entraîne la perte de ses proches. J'ai été étonnée par certains décès toutefois, ce n'est pas pour me déplaire, car j'aime que l'on me surprenne. Estelle Faye ose agir, faire souffrir ses personnages ou faire tomber des têtes…

Si dans le premier tome on se demandait où voulait en venir l'auteure, cet opus a permis d'éclaircir plusieurs zones d'ombres et de comprendre les enjeux de chacun. J'ai aimé enfin comprendre les actes d'Aedon, le frère de Thya. Son caractère est intéressant et son passé marquant. Dans un sens, il est presque attachant même si on n'apprécie pas pour autant ses gestes ou sa détermination à mettre la main sur sa soeur… C'est un antagoniste ni blanc ni noir, ce qui est très appréciable. Autres personnages énigmatiques qui ne sont pas manichéens : les Dieux qui servent avant tout leur intérêt et se fichent de certaines pertes humaines ou des souffrances. Ils peuvent aussi bien aider quelqu'un, puis le délaisser plus tard. Ici, on découvre que le monde est réellement régit par les dieux et leurs entourloupes… Ainsi, on va faire la rencontre de Bacchus et d'Apollon… Mais on va surtout voir le véritable visage d'Hécate. Celle-ci n'hésite pas à se servir d'autrui comme ses marionnettes. Elle tisse une toile collante et fatale pour attraper Thya… le scénario est très bien maîtrisé et rien n'est laissé au hasard. C'est bluffant ! Je tire mon chapeau aux trois derniers chapitres qui relancent avec brio l'intrigue et qui me fait trépigner d'impatience pour découvrir le troisième tome. Hélas, je dois patienter le temps que les éditions Folio l'éditent…

Dans ce second volume, le côté fantastique est encore plus présent, que ce soit avec les pouvoirs des deux héros ou des créatures magiques de plus en plus nombreuses. le Faune, le Sylvain et l'Ondine ont une place importante dans le récit puisqu'ils vont parfois être narrateurs. Gentils et avenants, ils vont faire tout leur possible pour sauver leurs amis… Mais cette tâche est loin d'être facile, surtout lorsqu'il y a autant d'ennemis ! Et comme je vous l'ai souligné, ce roman est très sombre et l'auteure tue qui elle désire… Mais je ne vous en dis pas plus ! Quoi qu'il en soit, malgré ses quelques défauts, la suite est tout de même plaisante et dans la lignée du premier tome. Si vous avez aimé « Thya », celui-ci devrait vous plaire, car les héros évoluent et se développent au fil des pages. de plus, l'intrigue se complexifie en devenant plus dense, profonde et obscure… Ma note est un peu sévère, mais c'est surtout pour montrer à quel point j'ai été partagée par cette lecture. Merci encore à Lireàlafolie qui avait organisé un concours pour gagner les deux premiers tomes. Maintenant, il me tarde de découvrir comment tout cela va se terminer, surtout après une telle conclusion ! Je sens qu'Estelle Faye va continuer à me surprendre…

Lien : https://lespagesquitournent...
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Dans ce second tome, nous poursuivons les aventures de Thya, Enoch, Aylus et le Faune minuscule. Ils quittent la Gaule pour une destination plus orientale : de Constantinople au royaume sassanide, ce sera dans le désert du Vide que devra s'achever leur quête. Toujours poursuivie par son frère Aedon, Thya trouvera sur sa route de nouveaux alliés et des créatures mythologiques pour le moins surprenantes.

Pour ma part, ce second opus est une plus grande réussite que le premier. En effet, les quelques écueils que j'avais reprochés précédemment ont été corrigés comme la présence d'une carte ou la rectification de l'orthographe du mot latin "limes". L'auteur a davantage poussé ses recherches sur le contexte historique et la lecture s'en ressent : nous avons un environnement beaucoup plus crédible bien qu'encore une fois, nous avons affaire à un récit non pas historique mais fantastique.

L'écriture m'a parue également plus aboutie que dans le premier tome à tel point que des tableaux onirique et poétique se dégagent litéralement de l'intrigue et m'ont complètement emporté dans cette invitation au voyage. Je citerai pour exemple la description du jardin du palais de Samarcande, le désert de Dasht-e Kavir ou (ma scène préférée) la fête de Dionysos donnée dans une villa abandonnée, en Gaule.

Enfin, j'ai eu le sentiment aussi que le scénario était beaucoup plus maitrisé. En effet, dans le premier tome, je n'avais pas très bien compris où l'auteure voulait nous emmener avec Thya. Ce n'est pas le cas avec cette lecture. Dès les premières pages, la base est posée et nous savons quelle direction Thya va prendre. La fin est d'ailleurs une réussite car elle permet de relancer l'intrigue et m'a donné envie de poursuivre avec le troisième et dernier opus.
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Un second tome sympa, mais que j'ai un peu moins aimé que le premier.



Nous continuons donc de suivre « la fuite » de la jeune Thya, d'Enoch et d'Aylus (le dernier venu du groupe si l'on peut dire). Ces derniers vont vers l'Est à la poursuite de dieux anciens, les Dieux voilés, anciennes divinités étrusques presque oubliées. Mais est-ce pour un bien ou un mal ?



Il y a de très bonnes choses, mais j'ai envie de commencer par les petites choses qui ne m'ont pas emballé.

Je crois que j'ai eu un peu de mal avec le côté « road-trip » de ce tome (alors que dans le premier, ça voyage aussi beaucoup, allez savoir pourquoi.). Peut-être parce que les personnages passent trop vite dans les contrées… je ne sais pas trop (oui, je suis pénible).

Ensuite, j'ai eu un peu de mal avec les trop grands nombres de points de vue. Il est vrai que pour comprendre ce qui se trame et peut-être ne pas trop rester figé dans la narration, ces changements de protagonistes étaient nécessaires.



Mais il y avait plein de bonnes choses aussi.

J'aime particulièrement l'évolution du personnage de Thya. Elle perd en innocence au fur et à mesure des aventures et des drames qui la touchent. On sent qu'elle change d'avis sur certains aspects de la vie et aussi de sa relation à ses pouvoirs. Bon, je la trouve un peu trop « attachée » à Enoch, mais si vous lisez mes chroniques vous savez bien que les histoires d'amour ce n'est pas mon truc ! Mais bon, il y a de très bonnes choses dans cette affaire et on ne tombe pas dans du mielleux.

En parallèle, on voit aussi le personnage d'Aedon changé et là aussi j'ai trouvé son évolution très intéressante.

J'avoue que dans ce tome, j'ai développé une affection particulière pour le Minuscule que je trouve adorable.



Ce que j'ai aimé dans ce livre, c'est que depuis le tome 1 en Gaule, les personnages voyagent et découvrent d'autres civilisations et mode de vie. L'auteur ne limite pas sa vision au monde romain, mais l'étend. J'aime ce recul qui permet de voir que Rome et Byzance ne sont pas des perles au milieu du rien du reste du monde. C'est par exemple un défaut que l'on retrouve dans les études historiques ou archéologiques (la grande Pyramide c'est génial certes, mais 2000 ans plus tôt, en Bretagne, on construisait Barnenez).

Pour faire « cet aplatissement », on voit que l'auteure a fait des recherches très poussées. Bref, elle sait de quoi elle parle !



J'aime quand les choses ne sont pas tous biens gentils ! Et j'avoue que j'ai parfois été très surpris des choix de l'auteure dans les drames qui touchent son héroïne, mais que c'est plaisait ! On sent bien qu'elle n'a pas écrit pour plaire à son lectorat. Non, elle ose des choses et j'ai beaucoup aimé.

La fin est très intéressante et le prochain tome m'intrigue vraiment.



Un roman jeunesse que j'ai bien aimé (lu en deux jours), mais qui m'a moins plus que le premier. Mais j'avoue que j'ai hâte de connaitre la conclusion de cette Histoire.
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critiques presse (1)
Elbakin.net
15 juin 2015
Estelle Faye confirme une fois de plus son talent de conteuse, à la croisée des chemins, entre efficacité de la mise en scène et justesse des émotions.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Au soir, le Faune amena l'Ondine au cœur des bois, dans une clairière où s'était élevée une villa des siècles plus tôt, aux premiers jours de la Gaule romaine. Cette villa, presque un palais, toute en raffinement et en élégance, avait joui d'une certaine réputation au temps de sa splendeur. Il s'y donnait alors des fêtes étranges, dont les échos résonnaient jusqu'aux bords du fleuve. Des réjouissances qui duraient des semaines entières et dont les participants, murmurait-on, revenaient différents. Nul ne savait à l'avance qui était invité, ou pourquoi. Pas plus qu'on ne savait comment se déroulaient ces fêtes, et pourtant elles exerçaient une telle fascination sur les notables d'Aquitania que beaucoup étaient prêts à de véritables bassesses pour y assister une fois. Il se murmurait aussi que le maître des lieux avait été initié aux mystères de Dionysos, sur l'île lointaine de Naxos, que ses agapes recelaient en leur sein des rituels obscurs, mêlant à la magie des débauches et des sacrifices. Qu'enfin, parmi les convives, certains n'étaient pas humains.
Puis les fêtes s'étaient éteintes, la villa avait été abandonnée, et les raisons mêmes de cet abandon avaient été effacées de la mémoire des hommes ainsi que des êtres surnaturels. Tout au plus le Faune avait-il entendu des contes sur une jeune prêtresse, fille de proconsul, qui aurait détourné l'un des favoris de Dionysos de son dieu, puis aurait plongé dans la folie. Le père vengeur aurait fait raser la villa. D'autres légendes encore invoquaient un oracle, qui aurait défié le Destin en pleine ivresse, et aurait fini déchiré par les Ménades, les suivantes démentes du dieu de l'ivresse. On n'assassinait pas si facilement les devins à l'époque. Les autorités avaient lancé une enquête. Mais quand les légionnaires s'étaient présentés à la villa, ils avaient trouvé les lieux déserts. Cependant, d'autres sources chuchotaient que la villa s'était retirée de ce monde elle-même, de par sa propre volonté. À l'apogée de sa gloire, elle avait préféré disparaître plutôt que de déchoir. Cette dernière version était la préférée du Faune. Il se délectait des histoires douces plus que des récits de tuerie et de sang.
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Puis les flots se calmèrent, les nuages s'écartèrent, un jour doré frôla le turquoise des eaux. La mer se rétrécit en un détroit, surplombé par une ville immense, splendide, comme auréolée de soleil. La vision amena Thya dans ses rues populeuses, sur ses quais bondés de marchandises et de couleurs fortes, de vives lumières, dans un hippodrome où criaient des foules exaltées, sur des forums et dans des palais ornés de mosaïques d'or, d'œuvres d'art venues des quatre coins du monde. Dans les ateliers on travaillait la soie et les pierres précieuses. Les habitants portaient des vêtements amples et chamarrés au col brodé d'argent et d'or, des chlamydes — des manteaux courts d'origine grecque, retenus sur une épaule par des broches bijoux. Les hommes arboraient de fins colliers de barbe et les femmes des diadèmes dans les cheveux. La ville évoquait, par ses bâtiments, par sa structure, les traditionnelles urbs romaines, mais elle était cent fois plus prospère, plus riche, plus belle. Plus neuve aussi, beaucoup plus neuve, comme si pour l'essentiel elle avait été construite depuis moins d'un siècle. C'était comme un fantasme devenu une réalité tangible, un palais des mirages transformé en cité des hommes, le rêve incarné d'un Empereur bien plus fortuné qu'Honorius à Rome.
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A l'intérieur de la Curie, dans l'unique et vaste salle où siégeait le Sénat, les débats battaient leur plein. Des deux côtés de l'allée centrale, des orateurs en toge blanche et rouge s'invectivaient à grand renfort de citations des pères de l'Église et des anciens héros de Rome. Le sujet du jour était, comme souvent, l'autel de la Victoire. Cet autel d'origine païenne était enlevé puis réinstallé au fond de la Curie selon les pétitions des groupes d'influence, l'humeur des Empereurs ou celles des évêques... Cela symbolisait bien la déchéance actuelle. Voilà où en était réduite l'auguste assemblée, voilà à quoi se limitait son pouvoir. Ergoter sur la place d'un autel.
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Les Étrusques sont un peuple courageux, et pourtant ils craignent des dieux dont ils ne parlent quasiment jamais, pour lesquels ils ne construisent pas de temple, et qui n'ont même pas de nom. Le seul matelot qui a accepté de m'instruire, après quelques carafes de vin, m'a dit qu'ils étaient partis loin vers l'est, là où il n'y a plus que du vide. Voilà des divinités bien terribles, pour qu'on tremble à leur évocation alors même qu'elles ne sont plus là.
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Le Temps est un fil infini, lui dirent-ils, constitué de milliards d’autres, une tresse d’une myriade de fils de vie qui se déroule dans un océan de ténèbres. Par endroits l’un de ses fils infimes pointe hors de la tresse, et son extrémité se balance, livrée aux vents de la grande nuit. Chacun de ses accidents est un oracle. Une vie un peu plus libre, un moins liée au Temps que les autres. Et si ce fil est assez fort, assez solide pour qu’on le tire en arrière, alors grâce à lui on peut défaire une part de la tresse, défaire le présent, le passé. Revenir en arrière. Remonter le temps.
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Réécrire l'Histoire et les histoires, se réapproprier le corps du texte. Si le langage forme notre façon de penser, les légendes et mythes fondateurs façonnent notre perception du monde. Et si nous avons les mythes en commun, c'est bien pour les questionner, les interpréter et faire un lieu où l'imaginaire peut influencer le réel.
Animé par Willy Richert.
Avec les auteur·rice·s Estelle Faye (La Dernière Amazone, Rageot), Murielle Szac (L'Odyssée des femmes, L'Iconoclaste et L'Odyssée d'Homère, RMN), Stéphane Bientz (Le Goût du sel, Espaces 34) et Nicolas Jaillet (Frater, In8).
Avec la participation de Faustine Aynié-Yvinec et des élèves de 3eA du collège Valmy - Paris (75). Un grand merci à Eva Mouillaud, professeure.
Et la voix de Cécile Ribault Caillol pour Kibookin.fr
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