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EAN : 9782378800246
297 pages
L' Iconoclaste (29/08/2018)
4.05/5   87 notes
Résumé :
Le fiancé de Danielle est mort en Algérie. Hantée par ses lettres, elle sombre dans la folie. Son fils, reporter de guerre, se débat avec cet héritage. Un roman brutal écrit dans l'urgence.


Grand reporter de guerre, Jean-Baptiste Naudet va affronter la mort en Afghanistan, en Bosnie et au Kosovo. Il plonge dans ces conflits contemporains, les yeux écarquillés par l’horreur, avec le sentiment d’y être poussé par une mai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (43) Voir plus Ajouter une critique
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La guerre d'Algérie ?
Un tabou pour tous les appelés qui en reviennent ; c'est ce que ressent leur entourage proche.
Des jeunes gens de 20 ans qui n'ont pas demandé à y aller "pour défendre les intérêts du gouvernement Français" et qui reviennent le visage fermé et incapables de raconter ce qu'ils ont vécus ou faits.
Des familles des deux côtés de la méditerranée qui ont soufferts ou ont été dévastées.
Jean-Baptiste Naudet décrit bien dans son livre, avec des passages très durs et crus, les ravages de cette guerre ; on pourrait dire de toutes les guerres d'ailleurs car il sait de quoi il parle ayant été reporter dans plusieurs pays en guerre.
Dans ce roman il raconte un drame intime, la mort de Robert le premier amour de sa mère, à la guerre d'Algérie.
Celle-ci, quand ses souvenirs reviennent, s'enfonce de plus en plus dans la douleur devant un fils qui assiste impuissant à la déchéance de sa mère ne comprenant pas ce qui lui arrive.
Jean-Baptiste à son tour perd bien et se retrouve en Hôpital Psychiatrique quand son père, pour essayer de le sauver, lui confie la correspondance entre Robert et sa mère.
Après la lecture de leurs lettres il recherche et trouve le demi-frère De Robert à qui il se confie "Je lui raconte mon histoire, la quête de son frère, ma mère, sa folie, ma folie, l'amour, la mort et la guerre. C'était un peu confus parce que je ne comprend pas vraiment tout moi-même, encore aujourd'hui".
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1960 Danielle et Robert s'aiment quand survient la guerre d'Algérie et la mobilisation du sergent Robert S.....Avant le départ , défiant les conventions mais laissant parler le coeur, ils "le font", une fois,une merveilleuse fois...Et c'est la séparation. ..
S'instaure alors entre eux une belle et émouvante
correspondance, touchante, belle, pudique, enjouée ou de plus en plus mélancolique au fur et à mesure que le temps passe, que les événements se succèdent, que les horreurs minent le moral.
Et puis, il y a la description de cette guerre qui ne voulait pas dire son nom, cette guerre qui allait faucher des jeunes dont la seule aspiration était de vivre. Attention, âmes sensibles, l'atrocité fait "dégueuler","chier" dans leur froc ces jeunes bleus qui ont si peur de mourir dans des décors de rêve .
L'histoire de Danielle et Robert survivra-t-elle à ces atrocités ?
Jean -Baptiste, lui, vivra plus tard, dans l'ombre De Robert. Reporter de guerre, il sillonne le monde en quête d'informations mais ne pourra jamais échapper aux démons qui l'assaillent,l l'alcool, la drogue et la folie...
C'est l'âme humaine qui est "décortiquée " dans ce roman. Incapable de "voir plus loin que leur bout de leur nez", c'est "la fleur au fusil" que les jeunes se précipitent, au nom de "la défense de la patrie"aux mains des politiques.....
Au delà du conflit en Algérie, ce sont tous les conflits du monde qui sont " montrés du doigt".
Quand donc l'homme civilisé ne se contentera-til plus du tant prononcé ,"quelle connerie,la guerre" ?
C'est un beau roman qui se lit vite tant sont belles les lettres d'amour échangées entre ces deux extraordinaires personnages.Les mots y traduisent une foi touchante en la vie à deux....
Certes, les descriptions des combats, des embuscades, des exactions sont cruelles, dures.Mais si, à force de ne pas vouloir les lire, on les occultait de nos mémoires?
J'aurais aimé pour ce livre une couverture plus émouvante, plus forte, plus belle, comme l'histoire, plus incitative pour le message. Je ne l'aime pas, elle condamne ce livre remarquable.
A défaut de jeter votre dévolu sur ce livre, feuilletez- le chez votre libraire. Ce pourrait bien être plus qu'une simple découverte.
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L'amour, la folie, une guerre. Un tel sous-titre ne pouvait que laisser présager un livre écrit dans le sang et dans les larmes, d'une authenticité bouleversante, une aventure humaine extraordinaire, à laquelle je n'étais absolument pas préparée. Ce sont justement ces dernières qui sont les plus belles, les plus vraies. Ce sont celles aussi qui vous transpercent le plus le coeur de par leur vérité et la force de leur voix.

Au coeur meurtri, déboussolé mais aussi battant extrêmement fort et juste de ce livre, deux récits de guerres plurielles, deux destins séparés dans le temps et dans l'espace, et pourtant profondément liés par les sentiments et relations humaines, notamment par une étoile qui se prénomme Amour. La confrontation avec la Guerre est aussi le fil rouge de ce récit, qui va tisser ce dit lien d'apparence totalement inexistant mais qui est en réalité tout ce qu'il y a de plus évident et authentique, qui ne peut être nié ou brisé.

Ces deux destins, ce sont ceux, d'un côté, de Robert Sipière, tout juste vingt ans en 1960 alors que la guerre d'Algérie bat son plein ; de l'autre, celui de Jean-Baptiste, que l'on va suivre de l'adolescence à l'âge adulte. L'un va être envoyé au djebel pour combattre les "bougnoules" (rien que d'employer ce surnom qui est devenu beaucoup trop usité à mon goût, j'ai envie de pleurer et d'enfouir ma tête dans le sable comme une autruche à tout jamais) sans avoir vraiment rien demandé, l'autre va vivre, au contraire de l'existence fulgurante du premier, une vie de tourments à regarder constamment la guerre en face, tout en étant dégoûté de lui-même d'être ainsi obnubilé par l'Horreur. Une sensation de dégoût mêlé de fascination, celle de comprendre et de saisir un sens qui n'a pas lieu d'être, à laquelle je m'identifie fortement et dans laquelle je me retrouve, indubitablement.

Alors que ces deux hommes que rien ne prédestinait à avoir ne serait-ce qu'un point commun se retrouvent embrigadés et empêtrés dans le bourbier innommable qu'est la Guerre, alors que cette immondice les répugne au plus au point, en tout, impossible pourtant de s'en défaire. On dirait comme une seconde peau qui leur colle au corps. Ou plutôt comme une prison inviolable qui les enferment dans leurs pensées contradictoires, entre devoir de servir son pays et devoir de savoir, devoir de combattre pour que cessent tous les conflits. La guerre pour mettre fin à toutes les guerres est une idée stupide, n'est-ce pas ? Et pourtant, cette dernière se répète inlassablement, tel un disque rayé... « Comment échapper à un tel cercle vicieux ? », semble nous demander ce livre qui met toujours le doigt sur ce qui fait mal, et qui appuie bien fort sur la plaie.

Comme le chante si bien Nino Ferrer, ils ne savent pas quoi faire. le message véhiculé par Jean-Baptiste Naudet semble en effet en parfaite adéquation et harmonie avec la chanson bouleversante du célèbre chanteur au destin si tragique, lui aussi tué par ses démons d'une autre manière et dans d'autres circonstances (Vraiment ? La guerre gronde partout, même dans notre tête. Surtout dans notre tête à vrai dire), de Robert Sipière : "Un jour ou l'autre il faudra qu'il y ait la guerre/On le sait bien/On n'aime pas ça, mais on ne sait pas quoi faire/On dit c'est le destin". Dans le roman La Blessure, le Sud de Nino Ferrer devient la Kabylie des Algériens, ces montagnes à la géographie si particulière, si atypique de ce pays, si caractéristique de toute une nation, que les Français vont transformer en bains de sang de ceux qu'ils osent affliger du surnom insultant de "crouilles" et de bien d'autres noms d'oiseau qui ne méritent guère d'être prononcés.

Ce récit, qui nous laisse à bout de souffle à la dernière page tournée et à l'ouvrage refermé, se construit de la façon suivante : linéarité avec l'histoire de la vie de Jean-Baptiste, en prenant pour point de départ l'année de la Révélation du secret, qui jusqu'alors représente l'Épée de Damoclès qui plane au-dessus la vie familiale, du coeur de Danielle, 1980, jusqu'au point d'arrivée qu'est 2004, l'année de l'Aveu, à soi-même et aux autres. L'année de la Tentative ultime de compréhension, d'appréhension de la Folie, avant l'Abandon et la Délivrance : l'Acceptation du Pardon.

Le tout est éclairé par la propre expérience de guerre De Robert, reconstituée par Jean-Baptiste grâce au matériau précieux que lui a confié son père si généreux et si plein d'abnégation, Gilles, cet ami dévoué, résolument fidèle, et qui pense toujours aux autres, à leur protection, avant de penser à celle de son coeur, de ses sentiments, et de ses propres envies, que représente la correspondance que sa mère entretenait avec son ravissant fiancé à cette époque de leur prime jeunesse. Jean-Baptiste nous offre même le privilège de nous divulguer le contenu de cette correspondance qui vaut tous les trésors du monde, petit bout par petit bout.

L'assemblage de ces trois récits en un (enfin, ceux De Robert et Danielle ne font qu'un tous les deux), loin de dérouter le lecteur de son intérêt croissant pour cette histoire familiale et qui traite avant tout d'Humanité au fil des pages, fait toute la force et la richesse de cette gigantesque Blessure béante, à coeur ouvert, qui s'épanche de larmes de sang intarissables. Elle est tel un trou abyssal, un gouffre de souffrance et de peine inconsolée sans fond qui nous emporte instantanément, qui nous fait sombrer et remonter à la surface, à court d'air et revigorés. En plus de cela, Jean-Baptiste Naudet accomplit l'exploit de canaliser ce chagrin face à la perte de la lucidité puis de la vie qui nous dévore tous, tel un David incapable de vaincre Goliath. Il réussit à condenser ces démons de mort, de cruauté et de culpabilité qui nous rongent et qui nous gangrènent l'âme, jusqu'à en laisser à peine des trous dans un gruyère périmé. de maigres trous de bon sens et d'espoir qui tentent avec leur peu de forces de s'élargir, de résister. Et ils y parviennent, tel le rayon de soleil qui perce l'épaisse obscurité. On est bien peu de choses, in fine. Cependant, Jean-Baptiste Naudet arrive à résumer la nature humaine, ses interrogations entêtantes, mais aussi sa capacité délirante à croire au Bien ou à perpétrer le Mal, avec le nombre de mots et de pages suffisant. C'est déjà bien assez de torture comme ça.

Sous sa plume naissent ainsi des personnalités complexes, néanmoins tout ce qu'il y a de plus réel, et scindées en deux : l'Ombre et la Lumière.

C'est ce qui émane de la plume à fois si puissante et qui va droit au vrai de Jean-Baptiste Naudet. Là où tout ne paraît être que confusion, c'est en réalité limpide comme de l'eau de roche. C'est ce qu'il m'a semblé en tout cas, c'est comme ça que je le ressens après lecture. Chaque être est tiraillé, déchiré même, entre son Docteur Jekyll, sa façade lisse, douce, simple, et son Mr Hyde, l'être en proie à ses pires démons et à sa rage la plus destructrice. La figure de la Mère, qui est censée jouer le rôle de Doctoresse, va devenir le véritable antidote du poison de la Guerre dont est contaminé son fils avant même sa naissance. Ça tombe bien, elle est pharmacienne, tout un symbole. Cette mère est sûrement la figure la plus magistrale de tout le roman. On fait la connaissance d'abord d'une Danielle léthargique, aux prises d'une lassitude extrême face à ce monde qui ne tourne plus rond depuis belle lurette, et qui ne trouve même plus les mots pour exprimer la colère qui la consume au plus profond de son être meurtri. Elle qui s'est tant battue pour élever ses enfants dans un amour qu'elle croyait avoir résolument perdu, elle baisse les bras.

Cette femme autrefois si forte, si admirable, lorsqu'elle en était à l'aube radieuse, grandiose, de ses vingt printemps, ne trouve plus que le mot "Bêtise" (pour ne pas utiliser le vilain mot) à susurrer d'une voix éteinte, d'outre-tombe, qui revient d'aussi loin que là où se trouvent les Kabyles tués par Robert et ses hommes, là où repose Robert lui-même, ainsi que le fidèle, vaillant gaillard, bon vivant, toujours présent pour ses camarades, Roux. C'est avec beaucoup d'émotion et avec une grande fébrilité que l'on lit les lettres débordantes de vie et de tendresse qui redonnent à Danielle son unique voix, la seule qu'elle ait jamais eue.

La voix affirmée d'une jeune femme magnifique et chérie par son bien-aimé ; elle lui rend cet amour transcendant au centuple. Elle le réconforte, elle lui fait part de tous les efforts qu'elle fournit, de son travail acharné pour leur assurer un nid douillet, elle lui rappelle qu'il est vivement attendu à la maison, là où se trouvent leurs deux coeurs esseulés. Tous les deux savent que rien n'est certain, que l'issue est fatidique. Ils n'ont véritablement été qu'un une seule fois, à leur grand désarroi, et cela nous brise le coeur de comprendre que ce qui aurait dû être la promesse d'une vie à deux, féconde, longue et sereine, a vu son éclat se tenir et être finalement anéanti dans le firmament de la nuit d'apparence sans étoiles, sans lueur, de la Guerre d'Algérie.

Et malgré tout, malgré la fin qui menaçait à chaque instant de s'ouvrir sous leurs pieds pour engloutir tout ce qui était important et vital à leurs yeux, Danielle et Robert, ces deux amants, amoureux superbes, sont devenus les étoiles l'un de l'autre. Ils se sont transformés en une seule et même étoile, comme s'ils n'avaient jamais été séparés, comme s'ils n'avaient toujours été que de l'Amour à l'état pur, pour toujours et à jamais, de façon irrémédiable. Cette étoile n'a au fond jamais cessé de briller, toujours plus fort, tel un héritage impérissable d'un amour qui a réussi à vaincre la mort. Cette étincelle, c'était celle de leurs retrouvailles dans un pays étranger, qui n'était pas le leur et où les troupes de l'armée française ont commis les pires atrocités : violer un pays, sa culture, ses paysages dignes du jardin d'Eden, noyés dans le carnage du sang de l'Enfer, la dignité et l'honneur de ses hommes fiers et courageux, le corps de ses femmes, la jeunesse et la vie, la liberté de ce peuple... C'est la France qui, à ce moment-là, a tout sali, a sali aussi notre nom, qui est devenue HLL (Hors-la-loi), et qui est à l'origine de l'abomination perpétrée. Nous sommes inéluctablement coupables.

Cependant, au-delà de cette honte cuisante qui nous brûle tel un fer rouge sur la peau, au-delà de l'indignation et de la colère grondante face à tant de sang innocent versé, ce que je retiendrai avant tout, c'est la touchante et sincère humanité de Danielle et Robert, leur immense sensibilité, leur humilité désarmante, et leur demande de pardon. Pardonnez-nous, tel un cri du coeur, du plus profond de l'âme.

Et c'est Jean-Baptiste qui va répondre à ce cri déchirant enfermé dans des lettres qui irradient l'amour sans limites, sans frontières, dissimulé dans des phrases qui expriment l'irrépressible besoin de l'être aimé, de se raccrocher à ce qui donne du sens à notre vie et à toute cette galère, où la haine, la vengeance et ce désir sorti d'on-ne-sait-où de tuer du "fellouze" (une autre appellation tout à fait abjecte) finit par tirer inlassablement sur le fil de notre existence et par tout réduire à néant. Jean-Baptiste nous prouve in fine le contraire, que ce néant est en réalité rempli d'un cri immense, qui nous dépasse totalement. Son cri à lui, c'est d'abord celui de l'adolescent en colère, qui en veut terriblement à sa mère de n'avoir pas su maintenir la quiétude du foyer, et qui a pour souhait de mener la guerre à l'idée même de la faire. Chose selon lui de prime abord tout à fait impossible, impensable, et peu enviable. La Guerre gronde en chaque homme et le fascine. On veut même lui faire la guerre (lui faire elle-même en somme), tiens ! Après avoir lu (dévoré plutôt) tant de livres sur le sujet, des grands classiques de tout temps, la soif de Jean-Bapt est intarissable. Il franchit ainsi la limite entre l'encre et le papier et la chaire à canon et le sang, et ainsi commence sa carrière de reporter de guerre.

A travers les yeux écarquillés tout grands par l'horreur (pires que ceux d'Alex dans Orange Mécanique) de Jean-Baptiste, le souffle toujours aussi court (je me demande comment j'ai fait pour respirer en lisant ce roman), nous allons ainsi voir défiler les paysages dévastés par les bombardements d'obus, les terrains minés, par le son des kalachnikovs, les tanks militaires des ex-pays communistes ; le sang d'hommes, de femmes et d'enfants par milliers déversé par les haches et les machettes sur et dans le sol du Rwanda ; dans les entrailles de ces terres souillées par la peur et la menace à tous les coins de rue, à peine sorti de chez-soi, comment reconstruire un monde viable ? le cri qui voyageait au-delà de la mer devient un maigre filet de voix atterré, susurrant, incrédule, un "pardon" quasi inaudible.

Et pourtant, je l'ai entendu, au plus profond de mon être, comme s'il avait été prononcé par une voix de titan et adressé au soleil. Ce soleil de Kabylie dont Robert avait fini par apprécier la clarté et la chaleur, ce soleil dans le coeur des gens, dans le coeur et la façon d'être de ces montagnards comme lui, qui lui ressemblaient beaucoup en fin de compte. Et cette bonté, et cette clarté qui se dégageaient De Robert, elles brillaient également dans les étoiles du ciel de Tchétchénie, de Crimée, de Croatie, du Rwanda, de Paris, de Fontainebleau, j'en suis persuadée. Simplement, à force de se crever les yeux mutuellement, on ne pouvait plus y voir clair, forcément. Ce livre nous force à regarder et à écouter les coeurs et les âmes qui saignent. Et c'est une bonne chose. Alors, faisons-le.

Au nom de la patrie française, je vous demande pardon,

Au nom de tous les amoureux qui voulaient juste s'aimer et être ensemble en paix, je vous demande pardon,

Au nom de la stupidité humaine, je vous demande pardon,

Au nom de la cruauté inexplicable de certains êtres, je vous demande pardon,

Au nom de cette banalité qui ne devrait être tolérée, je vous demande pardon,

A ce peuple farouche et fier de ce qu'il est, qui voulait juste être libre et respecté, je vous demande pardon,

A tous les Algériens, et à tous ceux qui souffrent aujourd'hui encore des affres de la guerre, je vous demande pardon,

Sincèrement pardon.

Signé une jeune fille qui a foi en l'humanité, en la bienveillance envers autrui, et qui ne cessera jamais de chercher des réponses.
Lien : https://lunartic.skyrock.com..
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***

Alors qu'ils sont fiancés depuis peu, prêts à se marier, Robert et Danielle sont séparés par la guerre d'Algérie. Âge d'à peine vingt ans, malgré l'optimisme et la naïveté de la jeunesse, Robert a peu d'espoir de revenir... Les deux amoureux s'échangent des lettres passionnées, des missives remplies de tendresse et de douceur... Et elles dont l'oxygène De Robert, au milieu de la violence des montagnes de Kabylie. Plusieurs années après, Danielle souffre toujours de la mort De Robert et son fils Jean Baptiste vit dans l'ombre de cet amour perdu... Pour leur plus grande folie !

C'est dans le cadre de la sélection des 68 premières fois que j'ai lu ce premier roman. Jean Baptiste Naudet nous livre ici une autobiographie crue et violente sur ce qu'il a vécu au sein de sa famille.
Ce n'est pas une mais trois vies qui ont été brisées ce 9 juin 1960 en Algérie. Avec le sergent Robert Sipière, c'est sa fiancée qui est atteinte en plein coeur... Puis Jean Baptiste Naudet lui-même... Prisonnier de ce passé, il va revivre les folies des guerres... Et se perdre dans la violence des combats, ceux des pays dans lesquels il couvre les batailles en tant que grand reporter mais aussi dans celui qui lui demande le plus de courage : la folie de sa mère...

Un roman qui mêle des lettres, des récits de combats, dès questionnements personnels... Un roman qui évoque les atrocités de la guerre d'Algérie et de la culpabilité de certains face à leur place au sein du conflit... Un roman fort et nécessaire..
Lien : https://lire-et-vous.fr/2019..
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Ma dernière lecture pour cette session « Rentrée littéraire 2018 des 68 premières Fois : La Blessure de Jean-Baptiste Naudet, un premier roman d'inspiration biographique et autobiographique sur la guerre, la filiation et l'amour…

L'auteur est grand reporter ; c'est peut-être pour cela que son récit prend des allures de témoignage et de documentaire sur le parcours d'un jeune soldat envoyé faire son service militaire en Algérie en 1960 et sur ses propres ressentis de journaliste envoyé dans les pays en guerre.
Jean-Baptiste Naudet a choisi d'emblée de ne pas respecter la chronologie des évènements dans le récit concernant Robert et Danielle avec l'effet d'annonce de la mort et de la folie dès le début. de même, il y aura aussi des allers-retours temporels dans l'histoire de Jean-Baptiste. C'est le personnage de Danielle qui devient le lien féminin de ce livre d'hommes ; elle est à la fois la fiancée amoureuse De Robert et la mère folle de Jean-Baptiste dont les deux prénoms rythment le récit comme titres de chapitre.

Le découpage des récits entrecroisés de la guerre d'Algérie, de la correspondance entre Robert et Danielle, des souvenirs d'enfance et de jeunesse du narrateur et de ses reportages dans les pays en guerre ou sur les champs de bataille m'a un peu déstabilisée ; je perdais la notion de fil conducteur et je prenais trop de distance.
L'émotion m'est venue seulement grâce à l'intertextualité : les chansons de Barbara et de Jean Ferrat pour illustrer la dépression de la mère, les poètes pour dénoncer l'universalité de la guerre : « le Dormeur du val » de Rimbaud ou encore des citations de Prévert (« Quelle connerie la guerre !») ou d'Apollinaire (« Ah Dieu ! que la guerre est jolie, avec ses chants ses longs loisirs »). Baudelaire est également convoqué quand il s'agit d'«aimer et mourir » ou de parler à sa douleur ainsi que Victor Hugo pour le deuil. Enfin, j'ai retrouvé la célèbre citation d'Albert Camus sur les tortures et représailles durant la guerre d'Algérie…

Je n'ai été sensible à la fascination de Jean-Baptiste Naudet pour la guerre, depuis ses lectures jusqu'à son métier futur de reporter de guerre, tel « un junkie accro à la plus forte des sensations : celle du jeu avec la mort ». Il m'a juste manqué quelque chose pour que mon intérêt soit plus que littéraire.
Je pense avoir saisi le propos et la posture de Jean-Baptiste Naudet. La blessure du titre symbolise la transmission de la destinée sous forme de « piège mental » : le père de l'auteur a épousé la fiancée de son ami mort en Algérie, son fils est approché par l'épouse d'un ami suicidé. La cicatrisation de cette blessure passe par un travail de recherche et de mémoire. Ce livre est « une offrande, comme une supplique, comme un chant à la mort, à l'amour. Comme une étoile dans la nuit, une étoile qui n'a pas de nom mais qui est la nôtre, une étoile qui ne parle que d'amour et qui ne doit jamais mourir. Pour que l'on nous comprenne, pour que l'on nous excuse, pour que l'on nous pardonne ».
Mais ce projet de pardon final tel qu'il apparaît dans le dénouement m'a laissé une drôle d'impression ; j'aurais eu besoin de plus d'analyse psychologique, peut-être de mise en fiction des personnages réels pour leur donner plus de moyens d'expression. Ou alors c'est le format romanesque qui ne m'a pas convenu ; je voyais davantage ce livre comme un essai, une étude.

Je salue cependant l'authenticité de la démarche de Jean-Baptiste Naudet. Il nous donne à lire, avec l'autorisation de son père, de véritables extraits de la correspondance entre sa mère et son fiancé. Il met l'intimité familiale au service de l'Histoire pour qu'on ne ferme plus les yeux, pour que les générations à venir puissent « à temps protester et, si besoin est, résister ».
C'est aussi une démarche individuelle sur l'acceptation de devoir vivre avec la souffrance de ses ancêtres qui peut parler à beaucoup au-delà des symptômes précisément décrits ici.
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critiques presse (3)
LeMonde
09 novembre 2018
Jean-Baptiste Naudet sonde la folie de sa mère, rattrapée par le deuil d’un amour tué pendant la guerre d’Algérie. Déchirant.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Lexpress
23 octobre 2018
La Blessure est un remède pour lui, une catharsis, un pansement sur une jambe de bois, on ne sait pas. C'est en tout cas un récit en plusieurs voix qui tente de peindre des mondes en perdition d'où l'amour parviendrait tout de même à se faire entendre.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Bibliobs
03 septembre 2018
De ce reportage au bout de sa nuit, il a rapporté la bouleversante correspondance amoureuse de sa mère, un récit accablant sur la criminalité en uniforme, et cette confession saisissante, fiévreuse, animée d'une lucidité terrible, qu'on ne peut lire sans frémir. Respect et amitié, Jean-Baptiste.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
La nuit, je sens souvent deux grands yeux noirs, écarquillés de terreur, qui me fixent. Un grand malaise me saisit et me réveille. Je suis dans un taxi dans le sud de la Serbie, à la frontière du Kosovo. Je veux rejoindre Pristina, la capitale du Kosovo, mais la route est coupée par des combats. Je pourrais faire un grand détour pour éviter de traverser la ligne de front. Mais c'est long et coûteux. Comme un vague cessez-le-feu est déclaré, je tente ma chance par la route directe. Pour éviter des infiltrations de combattants du Kosovo, les soldats de l'Otan obligent les chauffeurs de taxi à voyager avec un de leurs enfants. Notre chauffeur a dû prendre "en garantie" sa fille. Elle a sept ans et de grands yeux noirs. Nous roulons doucement dans des collines boisées. Dans la voiture, le silence s'épaissit. Rafale. Au détour d'un virage, on se fait soudain allumer à l'arme automatique. La bagnole prend quelques bastos. Le chauffeur fait demi-tour, le plus vite possible. Sa petite fille ne crie pas. Elle me fixe en silence de ses grands yeux noirs terrorisés. Je dois faire le très long et coûteux détour. Quand je rentre à Paris, le journal se plaint de ma note élevée de taxi. La nuit, les grands yeux noirs me poursuivent. Pardon.
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Fontainebleau

Ces temps ont connu et connaissent encore de si horribles, de si gigantesques massacres qu'il est presque inconvenant de vouloir sauver de l'oubli la jeune vie perdue d'un ami allé en Algérie dans une injuste guerre. Et pourtant, des lignes que sa fiancée et lui s'écrivirent surgit une tentative pour devenir homme dans un monde inhumain.
Que ces efforts donnent à penser à ceux qui, jeune comme eux, voudraient s'interroger, avant qu'il ne soit trop tard, sur la politique.
L'histoire de celle qui les as tués n'est pas encore écrite : elle est celle de la cupidité et de la lâcheté.
Cupidité qui s'habille toujours des oripeaux de la Civilisation. Lâcheté de nous tous qui évitons au jour le jour d'essayer de savoir et de comprendre, pour à temps protester et, si besoin est, résister.
Car, à se fermer les yeux, il arrive que soi-même ou, pis, ceux que l'on aime doivent le payer de larmes de sang.

Gilles Naudet

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Ils vont tenter de laminer, et pour de bon, le FLN et son bras armé, L'ALN, dans son refuge kabyle. Mais la violence aveugle fait des succès militaires français des victoires à la Pyrrhus. Ratissages et bouclages, ordres et contrordres sont les deux mamelles de l'armée française en Algérie. Les vexations, les exactions qui les accompagnent sont devenues le carburant de la rébellion. Ceux qui commettent des atrocités sont une minorité, qui ne se distingue pas par son courage au combat, mais qui a carte blanche. Dans cette sale guerre, seuls les plus cruels, les plus féroces, les plus impitoyables semblent triompher dans les deux camps. La guerre comme degré zéro de la politique, la guerre comme une maladie contagieuse, comme triomphe de l'ensauvagement.
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Jugé "bon pour le service", il a reçu sa convocation il y a plus de cinq mois maintenant. Il s'est retrouvé sous les drapeaux, départ pour l'AFN, l'Afrique française du Nord. Même si, officiellement, il effectue un service ordinaire, un détail macabre dit que c'est bien la guerre. On lui a donné une plaque d'identité militaire en métal, avec son nom, son groupe sanguin, qu'il porte sur une chaîne autour du cou. Une "plaque à vache" à découper selon le pointillé en cas de décès. Une moitié finira clouée sur le cercueil drapé de tricolore.". C'est ce qu'on appelle aussi la "plaque à viande".
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Œil pour œil, dent pour dent….
Comme l'a écrit Albert Camus déjà en 1956, "chacun s'autorise du crime de l'autre pour aller plus avant". Mais personne, en fait, ne se souvient vraiment qui, des soldats français ou des fells, a commencé les exactions. Cela n'a plus d'importance. C'est à la guerre comme à la guerre, terreur contre terreur. Il n'y a plus de règles, sauf la loi du Talion, la loi du sang et de la survie à tout prix.
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Video de Jean-Baptiste Naudet (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Baptiste Naudet
La réalisatrice Coline Serreau lit un extrait du livre La Blessure, du Grand reporter de guerre Jean-Baptiste Naudet. Sortie : 29 septembre 2018.
Plus d'info www.editions-iconoclaste.fr/livres/la-blessure/
Musique : Erik Satie / Musopen
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